Archives par étiquette : Callejas solo (A Alfredo Callejas)

Homenajes

Aujourd’hui, nous allons nous intéress­er aux hom­mages. C’est en effet un thème récur­rent du tan­go. On célèbre l’ami, le maître, le grand homme ou la grande femme, la mère, sou­vent. Voici quelques hom­mages et le dernier va sans doute vous éton­ner.

Je n’évoquerai pas les dédi­caces que l’on trou­ve notam­ment sur les par­ti­tions. Ce ne sont pas tou­jours à pro­pre­ment par­ler des hom­mages, car sou­vent les per­son­nes payaient pour être men­tion­nées. Je n’évoquerai pas non plus les dis­ques d’hommage à…, puisqu’il s’agit de com­pi­la­tions et pas de titres créés spé­ciale­ment.
J’évoque donc ici, les thèmes musi­caux et les paroles qui ren­dent hom­mage, évo­quent, citent, des per­son­nes, au sens large.

Hommage avec le nom dans le titre

Une pre­mière forme est de tout sim­ple­ment déclar­er dans le titre le nom de la per­son­ne à qui on souhaite ren­dre hom­mage.
Atten­tion toute­fois à ne pas com­met­tre d’erreurs. En effet, les noms de per­son­nal­ités publiques font le plus sou­vent référence à un lieu, à une rue, et pas au per­son­nage qui a don­né son nom à cet endroit. Par exem­ple, Rodriguez Peña ou Te espero en Rodriguez Peña ne par­lent pas du prési­dent argentin, mais de la rue et plus par­ti­c­ulière­ment du salon qui y était fameux.
Très sou­vent, ces hom­mages com­men­cent par A pour indi­quer la dédi­cace, mais ce n’est pas tou­jours le cas. Voici une petite liste, bien sûr très incom­plète, notam­ment, je n’évoque pas les tan­gos qui n’ont pas l’objet dans le titre, ou ceux dont le titre vient d’une dédi­cace postérieure, comme El Entr­erri­ano.

  • A Alfre­do Belusi
  • A Ángel Amadeo Labruna
  • A Belis­ario Roldán
  • A Don Agustín Bar­di
  • A Don Guiller­mo
  • A Don Javier
  • A Don Juan Manuel
  • A Don Nicanor Pare­des
  • A Don Pedro Maf­fia
  • A Don Pedro San­til­lán
  • A Don Pir­in­cho Canaro
  • A Ernesto Sába­to
  • A Evaris­to Car­riego
  • A Fir­po
  • A Franci­ni-Pon­tier
  • A Fran­cis­co
  • A Fran­cis­co de Caro
  • A Gabi­no Sosa
  • A Home­ro
  • A Home­ro Manzi
  • A Hora­cio Sal­gan
  • A Orlan­do Goñi
  • A Ire­neo Leguisamo (“El Pulpo” o “El Mae­stro”)
  • A Juan Car­los Copes,
  • A Leopol­do Fed­eri­co
  • A Lo Pir­in­cho
  • A Luci­na y Joe
  • A Luis Luchi
  • A Mag­a­l­di
  • A Man­cu­so
  • A Mar­ta Rosa
  • A Mar­tin Fier­ro
  • A Mer­cedes
  • A Natalio Pes­cia
  • A Orlan­do Goñi (Orlan­do Goñi)
  • A Pedro Maf­fia
  • A Quin­quela Mar­tin
  • A Raúl Berón
  • A Ricar­do Cate­na
  • A Rober­to Ari
  • A Rober­to Grela
  • A Rober­to Peppe
  • A Rober­to Per­fumo
  • A Ros­alía
  • A Sal­vador Allende
  • Adiós Aro­las (Se llam­a­ba Eduar­do Aro­las)
  • Ángel Var­gas (El ruiseñor)
  • Aníbal Troi­lo
  • Aro­las
  • Calle­jas solo (A Alfre­do Calle­jas)
  • Cele­do­nio
  • Con T de Troi­lo
  • Cum­br­era (Car­los Gardel)
  • D’Arienzo vos sos el rey
  • D’Arienzo y Pal­i­to
  • Dis­cos de Gardel
  • Don José Maria
  • Don Juan
  • Don Orlan­do
  • El fueye de Aro­las
  • El pol­lo Ricar­do
  • El Tigre
  • El Yakaré (Elías Antúnez)
  • Gardel
  • Gardel que estas en los cie­los
  • Gardel – Raz­zano (El moro­cho y el Ori­en­tal)
  • Ger­ar­do Matos Rodriguez
  • Gri­cel
  • La negri­ta María
  • Luís maría
  • Mar­go
  • Mar­got
  • María
  • María Bar­ri­en­to
  • María Cristi­na
  • María de Buenos Aires
  • María Del Car­men
  • María Dolores
  • María Esther
  • María Lan­do
  • María Reme­dios
  • María Trinia
  • Mar­i­ana
  • Mar­ián­gel
  • Mar­i­an­i­to
  • Madame Ivone
  • Mi Ana María
  • Mi maría Rosa
  • Mi Mar­i­anela
  • Milon­ga para Gardel
  • Negra María
  • Para Eduar­do Aro­las
  • Peri­con por María
  • Pir­in­cho (Canaro)
  • Que le parece Dona María
  • Retra­to de Alfre­do Gob­bi
  • Rincón por María
    Tan­go a Pugliese
  • Un ADN a Gardel
  • Vio­lín
  • Zor­ro platea­do (Máx­i­mo Acos­ta)

Personnes difficiles à identifier

On par­le d’une per­son­ne pré­cise, mais il est dif­fi­cile d’être sûr de la per­son­ne évo­quée, il s’agit par­fois d’un être imag­iné à par­tir de plusieurs per­son­nes, comme Zor­ro Gris.

  • A lo Mag­dale­na
  • A lo Mega­ta
  • A mi mar­i­u­cho
  • Grise­ta
  • La Mar­i­anel­la
  • María celosa
  • María la del portón
  • María more­na
  • Mari­posa (papil­lon)
  • Otario que andas penan­do
  • Pobre Mar­got
  • Señori­ta María
  • Tu nom­bre es María
  • Yo soy María
  • Zor­ro gris

Dédicaces génériques

Elles peu­vent être util­isées pour dif­férentes per­son­nes, par exem­ple, les mères en général

  • A la mujer argenti­na
  • A los ami­gos
  • A los artis­tas plás­ti­cos
  • A los mae­stros
  • A los míos
  • A los mucha­chos
  • A los obreros grá­fi­cos
  • A los payadores
  • A los que se fueron
  • A mi esposa
  • A mi madre
  • A mi madrecita
  • A mi padre
  • A mi vie­ja
  • A mis com­pañeros
  • A mis tíos
  • A mis viejos
  • A su memo­ria
  • A un seme­jante
  • El inge­niero (ingénieurs diplômés dans les uni­ver­sités argen­tines).

Les dédicaces à Canaro

  • A Don Pir­in­cho Canaro (déjà cité)
  • A lo Pir­in­cho
  • Canaro
  • Canaro en Cór­do­ba
  • Canaro en Japón
  • Canaro en Paris
  • Pir­in­cho

Les sélections

Les selec­ciones sont des titres qui mélan­gent plusieurs morceaux. On les appelle aus­si Pop­urri (Pots-pour­ris).
Il en existe de dif­férents auteurs et/ou com­pos­i­teurs, par exem­ple Aro­las, Canaro, De Caro, Delfi­no, Di Sar­li, Dis­ce­po­lo, Gardel, Mar­i­ano Mores, Piaz­zol­la, Troi­lo… C’est une forme d’hommage qui con­siste à met­tre en valeur des com­po­si­tions ou textes d’un com­pos­i­teur ou auteur par­ti­c­uli­er.
Sans le titre selec­cion ou pop­urri, on trou­ve égale­ment

  • Hom­e­na­je a Car­los Gardel
  • Recor­dan­do a Dis­ce­po­lo
  • Hom­e­na­je a Eduar­do Rovi­ra

Les à la manière de

Il s’agit d’œuvres où on imite le style de la per­son­ne à qui on souhaite ren­dre hom­mage. Je par­le de com­po­si­tions, pas des orchestres qui jouent à la manière de…

  • Engob­biao (Alfre­do Gob­bi)
  • Pichuque­an­do (Canaro)
  • Pugliese­an­do  (Pugliese)
  • Tan­go a Pugliese (Pugliese)

San Pugliese

Vous vous êtes peut-être demandé pourquoi on dis­ait « San Pugliese », ce qui veut dire Saint Pugliese.
Don Osval­do était athée, com­mu­niste de sur­croît et donc, dif­fi­cile­ment canon­is­able, du moins par le Vat­i­can, même avec un Pape d’origine argen­tine.
Mais les Argentins ont de la ressource et l’idée de créer une image « pieuse » (Estampi­ta) à l’image de Pugliese est venue à Car­los Vil­l­a­ba à la vue des images pieuses qui se dis­tribuent dans les églis­es.
Il con­fia le texte à Alber­to Muñoz qui souhai­ta garder l’anonymat et c’est pour cette rai­son qu’il n’est pas signé. Ce qui est amu­sant, c’est que plusieurs per­son­nes ont revendiqué l’écriture, ce qui, pour Alber­to était la preuve que cela fonc­tion­nait.
L’image d’origine est con­sti­tuée d’une pho­to de Pugliese sur laque­lle un œil­let a été ajouté. C’est l’œillet qui était placé sur le piano quand Pugliese était absent (générale­ment en prison…) lors des con­certs.

San Pugliese. À gauche, Rec­to et ver­so de l’im­age « pieuse » orig­i­nale (estampi­ta). À droite, trois ver­sions plus récentes.

La men­tion « San Pugliese », reprend le principe des images pieuses, comme celle de San Expe­d­i­to, le saint des caus­es justes et urgentes…

Une image pieuse dédiée à San Expos­i­to.

Un doc­u­men­taire est sor­ti il y a quelques mois sur San Pugliese. Je vous invite à le voir, si vous en avez l’occasion, il est pas­sion­nant.

Bande annonce de San Pugliese

https://filmfreeway.com/SanPugliese
Le site et la bande annonce de San Pugliese.

https://www.facebook.com/sanpugliesedocumental
La page Face­book est égale­ment intéres­sante

Texte de la prière à Saint Pugliese

Pro­tégenos de todo aquel que no escucha. Ampára­nos de la mufa de los que insis­ten con la pati­ta de pol­lo nacional. Ayú­danos a entrar en la armonía e ilumí­nanos para que no sea la des­gra­cia la úni­ca acción coop­er­a­ti­va. Llé­vanos con tu mis­te­rio hacia una pasión que no par­ta los hue­sos y no nos deje en silen­cio miran­do un ban­doneón sobre una sil­la

Traduction libre de la prière à Saint Pugliese

« Pro­tège-nous tous ceux qui n’écoutent pas. Pro­tège-nous de la mufa (mau­vaise humeur) de ceux qui insis­tent avec la cuisse de poulet nationale. Aide-nous à entr­er en har­monie et éclaire-nous afin que le mal­heur ne soit pas la seule action coopéra­tive. Emmène-nous avec ton mys­tère vers une pas­sion qui ne brise pas les os et ne nous laisse pas en silence regar­dant un ban­donéon sur une chaise ».

Comment utiliser la prière à San Pugliese

Les musi­ciens argentins, même ceux qui n’ont rien à voir avec le tan­go respectent San Pugliese et l’invoquent pour que tout se passe bien. Sur les scènes, on peut voir des images de San Pugliese et quand tout ne se passe pas pour le mieux, il con­vient de con­jur­er le mau­vais sort en cri­ant Pugliese – Pugliese – Pugliese. Ne croyez pas que c’est une super­sti­tion, cela fonc­tionne et beau­coup d’artistes et de tech­ni­ciens ont la Estampi­ta dans leur porte­feuille, placée sur la con­sole ou sur leur instru­ment.

Clin d’œil final…

Le principe des images pieuses détournées con­tin­ue d’être util­isée en Argen­tine et je vous présente pour ter­min­er une image qui me fait mourir de rire. Le nom de l’homme poli­tique San­toro a été découpé en faire San Toro. Jaja­ja.

San­toro (en un seul mot) est un homme poli­tique argentin, enseignant de for­ma­tion. La prière demande à ce que les enfants puis­sent avoir une plave (van­cante) à l’é­cole publique.

Nada más 1938-07-08 — Orquesta Juan D’Arienzo con Alberto Echagüe

Juan D’Arienzo ; Luis Rubistein Letra : Luis Rubistein

Nous avons vu il y a peu Un tan­go y nada más où j’évoquais l’existence d’une ving­taine de tan­go con­tenant Nada más dans le titre. Celui-ci est le numéro 1… De plus, hier, j’ai été un peu dur avec D’Arienzo et Echagüe et je leur devais une revanche. Avec ce titre, ils mar­quent des points, beau­coup de points.

Extrait musical

Par­ti­tion pour piano éditée par Jules Korn de Nada más.
Nada más 1938-07-08 — Orques­ta Juan D’Arienzo con Alber­to Echagüe.

La musique se déroule en par­ties s’opposant, de pas­sages martelés (ban­donéons et piano) et d’autres ondoy­ants (vio­lons). La voix de Echagüe se lance, pour un court pas­sage, le refrain, en totale har­monie avec la musique qui con­tin­ue en arrière-plan et reprend la main sur la même cadence et organ­i­sa­tion jusqu’à la fin. Une ver­sion pour danseurs. On notera que les petites accen­tu­a­tions du piano sont un peu plus dis­crètes que dans les dernières ver­sions avec Bia­gi au piano. Juan Poli­to est en train de trou­ver ses mar­ques pour suc­céder aux mains sor­cières de Rodol­fo Bia­gi.

Paroles

No quiero nada, nada más
que no me dejes, frente a frente, con la vida.
Me moriré si me dejás
por qué sin vos no he de saber vivir.

Y no te pido más que eso,
que no me dejes sucumbir,
te lo supli­co por Dios
no me quites el calor
de tu car­iño y tus besos,
que, si me fal­ta la luz
de tu mirar, que es mi sol,
será mi vida una cruz.

Cuán­ta nieve habrá en mi vida
sin el fuego de tus ojos!
Y mi alma, ya per­di­da,
san­gran­do por la heri­da,
se dejará morir,
y en la cruz de mis anh­e­los
llenaré de bru­mas mi alma,
morirá el azul del cielo,
sobre mi desvelo
vién­dote par­tir.

No quiero nada, nada más
que la men­ti­ra de tu amor, como limosna.
¿Qué voy a hac­er si me dejás
con el vacío de mi decep­ción?
No te vayas te lo ruego,
no destro­ces mi corazón,
si no lo hacés por amor
hace­lo por com­pasión
pero por Dios no me dejés
jamás te molestaré,
seré una som­bra a tus pies,
tira­da en algún rincón.

Juan D’Arienzo ; Luis Rubis­tein Letra: Luis Rubis­tein

Echagüe ne chante que le refrain (en gras).
Rober­to Mai­da chante ce qui est en bleu.
Ada Fal­cón chante tout et ter­mine en reprenant le refrain (en gras).

Traduction libre

Je ne veux rien, rien de plus que tu ne me laiss­es pas face à face avec la vie.
Je mour­rai si tu me quittes, car sans toi je ne saurai pas vivre.
Et je ne te demande rien de plus, que de ne pas me laiss­er suc­comber, je te sup­plie pour l’amour de Dieu, de ne pas m’enlever la chaleur de ton affec­tion et de tes bais­ers, car s’il me manque la lumière de ton regard, qui est mon soleil, ma vie serait une croix.
Com­bi­en de neige il y aurait dans ma vie sans le feu de tes yeux !
Et mon âme, déjà per­due, saig­nant de la blessure, se lais­sera mourir, et sur la croix de mes désirs je rem­pli­rai mon âme de brouil­lards, le bleu du ciel mour­ra, sur mon insom­nie en te regar­dant par­tir.
Je ne veux rien, rien de plus que le men­songe de ton amour, comme une aumône.
Que vais-je faire si tu me laiss­es avec le vide de ma décep­tion ?
Ne t’en va pas (on pense à « Ne me quittes pas de Jacques Brel), je t’en sup­plie, ne détru­is pas mon cœur, si tu ne le fais pas par amour, fais-le par com­pas­sion, mais par Dieu, ne me quitte pas (et voilà, nous sommes avec Jacques Brel). Jamais, je ne te dérangerai, je serai une ombre à tes pieds, couché dans un coin.

Paroles de la première version dédiée à Alfredo Callejas [Callejas solo (A Alfredo Callejas)]

Une pre­mière ver­sion de la musique a été asso­ciée à des paroles, égale­ment de Rubin­stein à la gloire de Alfre­do Calle­jas surnom­mé « El Tigre » qui était un jock­ey fameux de l’hippodrome de Paler­mo (Buenos Aires). Son fils égale­ment prénom­mé Alfre­do a repris sa car­rière comme entraîneur et quit­ta l’Argentine en 1977 pour aller s’occuper des chevaux de son com­pa­tri­ote Robert Pérez à New York (USA). Le petit fils d’Alfredo et fils d’Alfredo, Bernar­do a suivi le même chemin et a un éle­vage de chevaux à Bel­mont (USA).
Les paroles évo­quent Bland­engues. Il me sem­ble qu’il s’agit d’un lieu situé à Bar­ra­cas, dans le Sud de Buenos Aires, peut-être où vivait ce jock­ey et entraîneur.
Le nom est égale­ment celui d’un rég­i­ment argentin créé au 18e siè­cle et dis­sous au 19e (notons qu’un rég­i­ment de ce nom existe tou­jours en Uruguay). Il est donc peu prob­a­ble que Alfre­do soit réelle­ment un mem­bre de Bland­engues. je pro­pose plutôt d’y voir un hom­mage his­torique, ce jock­ey rejoignant les illus­tres défenseurs de la patrie (con­tre les peu­ples pre­miers), ou tout sim­ple­ment son lieu d’origine, le Sud de Buenos Aires étant un lieu par­ti­c­ulière­ment prop­ice aux exploits équestres et au tan­go, d’autant plus qu’il y avait à l’époque de grands espaces prop­ices à ces exer­ci­ces. Aujourd’hui encore, un grand parc sub­siste, El par­que Leonar­do Pereyra.

Sos de Bland­engues el mejor
Y no hay quién ten­ga tu muñe­ca pa’ tal­lar,
Ni se conoce un cuidador
Con más car­pe­ta pa’ poder ganar.

Y de Bland­engues sos el mago
Que ha con­quis­ta­do más hala­gos,
“Tigre” Calle­jas, no hay qué hac­er­le
Se impone tu muñe­ca de gran “com­pos­i­tor”.

Juan D’Arienzo ; Luis Rubis­tein Letra : Luis Rubis­tein

Traduction libre de la première version dédiée à Alfredo Callejas [Callejas solo (A Alfredo Callejas)]

Tu es de Bland­engues le meilleur et il n’y a per­son­ne qui a ton poignet pour domin­er (tal­lar n’est pas à pren­dre dans le sens de tailler, mais de domin­er, c’est du lun­far­do), ni aucun soigneur con­nu avec plus d’habileté (car­pe­ta en lun­far­do) pour pou­voir gag­n­er.
Et de Bland­engues vous êtes le magi­cien qui a con­quis le plus d’éloges, « Tigre » Calle­jas, il n’y a rien à faire, votre tal­ent (muñe­ca en lun­far­do = habileté) de grand « com­pos­i­teur » s’impose (un com­pos­i­tor en lun­far­do est un pré­para­teur de chevaux de course).

Autres versions

Calle­jas solo (A Alfre­do Calle­jas) 1928 — Orques­ta Juan D’Arienzo con Car­los Dante.

D’Arienzo et Rubin­stein avaient déjà util­isé cette même musique sous le titre Calle­jas solo. Vous recon­naîtrez sans peine l’air, même si l’interprétation est extrême­ment dif­férente. Heureuse­ment que Car­los Dante chante très peu, car sa voix n’est pas des plus agréable dans cet enreg­istrement.

Calle­jas solo 1930 — Orques­ta Eduar­do Bian­co.

Même si cette ver­sion instru­men­tale a été pub­liée sous le titre de Calle­jas Solo, la douceur de son inter­pré­ta­tion sem­ble plus adap­tée aux nou­velles paroles, celle de Nada más. La ver­sion française serait donc un précurseur des futures ver­sions.

Nada más 1938-07-08 — Orques­ta Juan D’Arienzo con Alber­to Echagüe. C’est notre tan­go du jour.
Nada más 1938-08-22 — Orques­ta Fran­cis­co Canaro con Rober­to Mai­da.

On remar­que tout de suite que l’interprétation de Canaro est plus suave. Mai­da chante d’une voix cares­sante. On est aux antipodes de la ver­sion de D’Arienzo. Deux ambiances pour deux moments dis­tincts de la milon­ga. Les deux sont par­faits pour la danse.

Nada más 1938-09-28 — Ada Fal­cón con acomp. de Fran­cis­co Canaro.

Un mois plus tard, Canaro enreg­istre avec sa chérie, Ada Fal­cón une ver­sion à écouter. C’est absol­u­ment clair. L’orchestre intro­duit directe­ment le chant, puis par la suite ne sert que de ponc­tu­a­tion. Ada chante qua­si­ment a capel­la. C’est une ver­sion très éton­nante, mais pas­sion­nante.

Nada más 1958-07-10 — Orques­ta Juan D’Arienzo con Jorge Valdez.

Je suis sûr qu’aucun danseur n’échangera la ver­sion de D’Arienzo avec Echagüe avec celle inter­prétée par Jorge Valdez. On a la guimauve, sans l’émotion d’Ada Fal­cón.

Nada más 1971-12-20 — Orques­ta Juan D’Arienzo con Mer­cedes Ser­ra­no.

Treize ans plus tard, D’Arienzo enreg­istre sa troisième ver­sion du titre avec Mer­cedes Ser­ra­no. Il l’enregistrera même deux fois avec elle. Je trou­ve que la ver­sion avec Mer­cedes Ser­ra­no en 1971 est bien plus intéres­sante que celle avec Jorge Valdez.

Pour ter­min­er la liste des ver­sions, je vous pro­pose un autre enreg­istrement, par les mêmes. Il s’agit d’une ver­sion enreg­istrée dans l’émission El Tan­go del Mil­lón en 1971 (ou 1975 selon les sources). La vidéo a été col­orisée par Pablo Ramos qui effectue un tra­vail for­mi­da­ble, à la fois avec son orchestre Los Herederos del Com­pás et pour faire revivre cet orchestre dont son père était l’un des chanteurs qui rem­plaça, à mon avis très effi­cace­ment, Jorge Valdez.

Juan D’Arienzo con Mer­cedes Ser­ra­no. 1971 ou 1975.

Et Jacques Brel, dans l’affaire ?

La pho­to de cou­ver­ture a sans doute éton­né cer­tains, je vous dois une expli­ca­tion, que vous avez peut-être déjà dev­inée en prenant con­nais­sance des paroles.
Ce n’est pas à cause de ses dents de cheval que j’ai choisi une image de Jacques Brel, même si cela pou­vait être une référence au jock­ey Calle­jas, mais à cause des paroles de sa chan­son immortelle « Ne me quitte pas ».

Nada más. Jacques Brel, ne me quitte pas.

En effet, elle se ter­mine par :

« Laisse-moi devenir
L’ombre de ton ombre
L’ombre de ta main
L’ombre de ton chien
 »

Jacques Brel, fin de Ne me quitte pas.

Ce qui résonne un peu comme la fin des paroles de Rubin­stein :

“jamás te molestaré,
seré una som­bra a tus pies,
tira­da en algún rincón.”

Luis Rubis­tein, fin des paroles de Nada más.

L’idée d’être l’ombre de l’autre est une image intri­g­ante, peut-être même inquié­tante. Aimer serait devenir un non-être, une réplique som­bre et fidèle de l’être aimé, un oubli de soi total. Je vous laisse méditer sur la ques­tion. Je ramasserai les copies dans deux heures. N’oubliez pas d’écrire votre nom en haut de la feuille, mais aupar­a­vant, délectez-vous de la chan­son de Jacques Brel.

Ne me quitte pas, Jacques Brel

« Il n’est de grand amour qu’à l’ombre d’un grand rêve ».

Edmond Ros­tand (Cyra­no de Berg­er­ac)

À demain, les amis !