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Ilusión azul 1945-06-08 — Orquesta Alfredo De Angelis con Carlos Dante

Arquímedes Arci, paroles et musique

Hier, nous étions dans les éclats de , aujourd’hui, dans l’illusion bleue. Les deux thèmes sont proches. En valse, les choses passent mieux, mais les paroles que propose sur sa propre musique méritent qu’on s’y attarde. On notera le très gros succès de ce titre, même en dehors de la petite sphère du tango.

De Arquímedes Arcidiacono (Arci) se connaissent deux compositions dont il est à la fois compositeur et parolier, Ilusión azul et qui comme notre valse du jour a été inauguré par Agustín Magaldi.
Consejo de oro fut enregistrée par la suite par Pugliese et Ilusión azul a fait carrière avec De Angelis, mais de très nombreuses versions bien au-delà de la petite sphère du tango témoignent de l’engouement pour ce titre particulièrement réussi.
Ces deux seules œuvres connues dont il assure les deux rôles, de compositeur et d’auteur, témoignent de son grand talent. Ses paroles sont à la hauteur de sa musique.
De Arquímedes, on sait très peu pour ne pas dire rien. On connaît juste la date de sa mort, le 5 avril 1938, et c’est tout.

Extrait musical

Ilusión azul 1945-06-08 — Orquesta Alfredo De Angelis con Carlos Dante.

C’est le premier des deux enregistrements de De Angelis. Une valse rapide, avec des reprises d’énergie. Une valse irrésistible.

Partition pour piano de Ilusión azul de Arquímedes Arci.

On remarque que sur la partition, il est indiqué vals criollo. Ce n’est pas tout à fait un synonyme de valse et cette indication a de l’importance. Tout d’abord, pour le musicien, qui sait que cela signifie un type d’accompagnement particulier. Pour les guitaristes, cela s’effectue par deux mouvements vers le bas et un vers le haut de la main droite, ce qui rend tout à fait différemment de l’accompagnement classique de la valse. Ceux qui connaissent le pourront ressentir l’envie de frapper dans les mains, car cela rappelle l’introduction de la chacarera (par exemple). Attention, je n’ai pas dit que c’était le même rythme, seulement que c’est la même sensation de pseudo syncope…
L’autre point est que cette indication fait verser le titre dans le domaine du folklore. Ce n’est pas une obligation, mais les joueurs, notamment de guitare folklorique, vont s’emparer plus facilement de cette partition et cela explique sans doute le destin de cette valse, comme nous allons le voir avec les autres versions.

Paroles

Altiva y soberbia, cual diosa pagana,
pasaste a mi lado mostrando el rencor
y desde aquel día yo sé que he perdido,
la gloria inefable de un sueño de amor.
No extraño tus besos que fueron fingidos,
ni extraño tus labios de raro dulzor…
ni me sorprende tu enorme falsía,
porque son hermanas: mujer y traición.

Yo tan sólo siento
de todo tu enojo,
el traidor embrujo
que tienen tus ojos.
Ojos que fueron estrellas que guiaron mi alma,
que me roban calma si me niegan crueles
cuando ansioso busco su mirar de amor.
Ojos que fueron las redes donde ,
te adoré sincero y me han hecho esclavo,
al poner en mi alma la azul ilusión.
Pero tu alma, desdeñosa y fría,
no sabía de amores para mi dolor.
Fueron tus ojos los que me mintieron
tan engañadores, como aquel fulgor.
Y ahora arrastro la cadena
del recuerdo triste
del pasado hermoso,
al vivir dichoso
en los dorados brazos
de aquella ilusión.

Amores fingidos son, cual mariposa,
como ella engañosa que igual que una flor
nos mienten cariño, nos hieren el alma,
se llevan la esencia y nos dejan dolor.
Pero yo no siento el dolor de la herida
que abrió dentro mi alma tu negra traición,
tan sólo me duele el fulgor de tus ojos,
que ayer me miraron con tierna pasión.

Arquímedes Arci, paroles et musique

Traduction libre

Hautaine et arrogante, comme une déesse païenne, tu es passée à côté de moi en montrant du ressentiment et depuis ce jour je sais que j’ai perdu la gloire ineffable d’un rêve d’amour.
Je ne regrette pas tes baisers qui étaient feints, je ne regrette pas tes lèvres d’une rare douceur… et je ne suis pas surpris par ton énorme mensonge, parce qu’elles sont sœurs : femme et trahison. (je précise que je ne suis pas solidaire de ce qui est écrit ici)

Je ressens seulement ta colère, le traître sortilège qu’ont tes yeux.
Des yeux qui furent des étoiles qui guidaient mon âme, qui me volaient le calme quand ils se refusaient cruellement quand je cherchais anxieusement leur regard d’amour.
Des yeux qui étaient les filets où j’étais prisonnier, je t’ai adoré sincèrement et me suis fait esclave, en mettant dans mon âme l’illusion bleue.
Mais ton âme, dédaigneuse et froide, ne connaissait pas d’amour pour ma douleur.
Ce sont tes yeux, ceux qui m’ont menti, aussi trompeurs que cette lueur éblouissante.
Et maintenant, je traîne la chaîne du triste souvenir du beau passé, vivant heureux dans les bras dorés de cette illusion.

Ce sont des amours feints, comme un papillon, comme elle, trompeuse, qui, comme une fleur, nous illusionnent d’affection, blessent notre âme, nous enlèvent l’essence et nous laissent de la douleur.
Mais je ne sens pas la douleur de la blessure qu’a ouverte dans mon âme ta noire trahison, je suis seulement peiné par l’éclat de tes yeux, qui hier me regardaient avec une tendre passion.

Autres versions

Ilusión azul 1933-08-07 — Dúo Agustín Magaldi y Pedro Noda con guitarras.

Le duo de chanteurs vedettes interprète ce titre avec brio. Ils inaugurent une typologie qui sera reprise par de nombreux orchestres de folklore argentin, mais pas que. Nous en verrons quelques exemples.

Ilusión azul 1945-06-08 — Orquesta Alfredo De Angelis con Carlos Dante. C’est notre valse du jour.
Ilusión azul 1964-04 — Orquesta Alfredo De Angelis con Juan Carlos Godoy y Roberto Mancini.

Une superbe version qui reprend le duo, comme Magaladi et Noda. Petite anecdote, jusqu’à il y a 25 ans, j’avais les deux versions, mais celle de 1964 n’avait pas la totalité de son intro. J’avais donc fait un montage en modifiant la sonorité de la version de 1945, pour insérer les secondes qui manquaient. Je viens de réécouter cette chimère. Ce n’est pas si mal, mais je suis content d’avoir désormais une version intégrale de 1964.
C’est intéressant pour étudier l’évolution du style de De Angelis en une dizaine d’années.

Ilusión azul 1974 — Los Cantores del Alba.

Quand je vous annonçais la récupération par le domaine du folklore, en voici un premier exemple. Les puristes et les grognons diront que ce n’est pas du tango et que ce n’est pas dansable. Pour une fois, je suis un peu d’accord, mais à cause de la pause intermédiaire qui peut poser des problèmes aux

Ilusión azul 1985c — Arboleda y Valencia.

Ce duo colombien est surtout connu pour leur grand succès, la valse El Camino de la vida (1991).

Ilusión azul — Diana Maria y Luz Aida.

Deux sœurs colombiennes qui chantent ensemble. On peut également entendre leur frère, Oscar Ivan. Encore un exemple du courant colombien qui porta cette valse. Attention, il ne faudrait pas confondre, cette Luz Aida, avec la célèbre actrice argentine qui intervient, par exemple dans Loco lindo (1936) et qui enregistra quelques tangos.

Ilusión azul 1962c — accompagné de Osvaldo Requena y .

Lalo est le frère de Julio Martel. Leur style est assez proche.
Erratum, 2024-06-12
Dans la V1 de cet article, j’avais reproduit deux fois ce titre. Une fois sous le nom de Julio Martel et une autre avec la mention Cuarteto Palais de Glace. Les deux datés de 1962c. Voici l’explication de mon erreur. Merci à Fred Alard TDJ et Gérard Cardonnet d’avoir attiré mon attention sur ce titre.
En fait, j’avais les deux identifications dans ma discothèque. Une bien labelisée, avec Lalo Martel et une que j’avais numérisé il y a trente ans à partir d’un disque vinyle du Cuarteto Palais de Glace. Lors de l’opération, il m’avait échappé les petits caractères qui indiquaient :

En el lado B, tema 2, Ilusión azul (Vals) no fue interpretado por el Cuarteto Palais de Glace sino por Lalo Martel acompañado por Osvaldo Requena y Los reyes del tango.

Sur la face B, le deuxième titre, Ilusión azul (Valse) n’a pas été interprété par le Quartette Palais de Glace, mais par Lalo Martel accompagné de Osvaldo Requena y Los Reyes del Tango.
Désolé de l’erreur, pendant des années, j’ai annoncé Palais de Glace dans les milongas alors que c’était Los Reyes del Tango.
Détail amusant, personne n’avait remarqué que le titre était présenté deux fois et les commentaires élogieux sur cette musique s’adressaient à la version étiquetée Palais de Glace et aucun à celle, totalement identique, étiquetée Lalo Martel

Ilusión azul 1984c — Hernan y Jose Arbey.

Encore un duo, encore des Colombiens.

Ilusión azul 1985c — Los Romanceros de America.

Encore des Colombiens. Quatre guitares. Ils ont enregistré suffisamment de valses pour faire une belle tanda, pour les danseurs qui aiment sortir des sentiers battus.

Ilusión azul 1985c — Los Patuma.

Je vous laisse deviner de quel pays ils viennent…

La Colombie, bravo, vous avez trouvé…

Ilusión azul 1985c — .

Perdu, ils sont Chiliens….

Ilusión azul 1991c — Los Cantores de Antaño.

Une version très typée années 90 de la musique de variété, avec la batterie et les sons étranges de l’orgue électronique. Je le propose plus pour la curiosité et parce qu’ils renforcent mon équipe colombienne…

Ilusión azul 2010c — Los Gentiles y Grupo Transparencias.

Je ne vous demande pas d’où ils sont, car vous avez déjà deviné. Ils sont colombiens.

Ilusión azul 2010-10 — .

Une version instrumentale, type musique classique. La qualité des musiciens permet de voir la qualité d’écriture du titre, mais bien sûr, les danseurs préféreront une des versions traditionnelles.

Ilusión azul 2015c – Trio Quitasueño.

Encore un orchestre… colombien.  Leur nom est amusant. Ils quittent le sommeil. Dans ce contexte, j’imagine que c’est leur musique qui empêche de dormir… Le terme quitasueño s’utilise aussi quand des soucis empêchent de dormir.

Ilusión azul 2021c — Full Circle Trio.

Pour terminer avec la version la plus originale et la question les plus difficiles :
1 Quel est l’instrument principal de cette version ?
2 De quel pays sont les musiciens ?

Réponses…

Si vous avez répondu le Marimba ou quelque chose d’approchant, bravo, vous ferez un bon danseur voire un bon DJ.
Si vous avez répondu Colombie, vous êtes un bon lecteur, mais vous avez perdu, c’est USA…

Full Circle Trio, avec Jack Van Geem (marimba), Robert Wright (contrebasse) et Raymond Froelich (percussions).

À noter qu’ils ont fait un disque de tango. Peut-être à recommander à ceux qui ont du mal à repérer quand poser les pieds 😉

À demain, les amis.