Archives par étiquette : Horacio Sanguinetti (Horacio Basterra)

Princesa del fango 1951-05-11 — Orquesta Francini-Pontier con Julio Sosa

Enrique Mario Francini Letra : Horacio Sanguinetti (Horacio Basterra)

Nous avons décou­vert, à l’occasion de Porteña lin­da Rosi­ta, l’amour mal­heureux d’Hora­cio San­guinet­ti. Dans ce tan­go inter­prété par Julio Sosa, San­guinet­ti nous par­le d’elle et de son amour. Sortez vos mou­choirs.

Rosita

Rosi­ta, telle que la décrit Beba Pugliese était grande, blonde. Elle avait les cheveux coif­fés en arrière et elle fumait. C’était le grand amour de San­guineti. Mal­heureuse­ment, celle-ci est par­tie avec un autre, mais on peut trou­ver son por­trait en fil­igrane dans dif­férentes com­po­si­tions de San­guinet­ti et notam­ment dans Prince­sa del fan­go.
En effet, Rosi­ta était une tra­vailleuse de la nuit et elle était donc de la fange, la fange morale qui ter­nit les âmes.

Rosi­ta, alias : Prince­sa del fan­go. Rosi­ta, que j’imagine un peu à la Evi­ta était une femme de la nuit, une princesse de la fange, une femme « mod­erne ».

Extrait musical

Par­ti­tion pour piano de Prince­sa del fan­go avec en cou­ver­ture, Franci­ni et Pon­tier.
Prince­sa del fan­go 1951-05-11 — Orques­ta Franci­ni-Pon­tier con Julio Sosa

L’orchestre et Julio Sosa sont au ser­vice de la nos­tal­gie triste de San­guinet­ti. Cette ver­sion qui est la seule enreg­istrée ne sera pas des­tinée à la danse, mais c’est une belle chan­son, émo­tion­nante.

Paroles

(recita­do)
Se alargan las graves caden­cias de un tan­go,
un mís­ti­co sop­lo recorre el salón…
Y rezan las tristes prince­sas del fan­go
ple­garias que se alzan des­de un ban­doneón.


Mi copa es tu copa, bebamos, ami­ga,
el bel­lo topa­cio del mági­co alco­hol.
La sed que yo ten­go me que­ma la vida,
bebi­en­do des­cansa mi enorme dolor.
Tu rubio cabel­lo, tu piel de azu­ce­na,
tu largo vesti­do de seda y de tul,
me ale­gran los ojos, me bor­ran las penas,
me envuel­ven el alma en un sueño azul.

Prince­sa del fan­go,
baile­mos un tan­go…
¿No ves que estoy triste,
que llo­ra mi voz?
Prince­sa del fan­go,
her­mosa y coque­ta…
yo soy un poeta
que muere de amor.

Me sien­to esta noche más triste que nun­ca
me ron­da un oscuro fan­tas­ma de amor
por eso es que quiero matar su recuer­do
ahogan­do mi angus­tia, con tan­gos y alco­hol.
Yo sé que si miente tu boca pin­ta­da,
esconde un amar­go can­san­cio fatal.
Tu alma y mi alma están amar­radas
llo­ramos el mis­mo dolor de arra­bal.

Enrique Mario Franci­ni Letra: Hora­cio San­guinet­ti (Hora­cio Baster­ra)

Princesa del fango (traduction libre)

(Réc­i­tatif)
Les cadences graves d’un tan­go s’allongent, un souf­fle mys­tique par­court la pièce…
Et les tristes princess­es de la boue réci­tent des prières qui s’élèvent d’un ban­donéon.
Mon verre est ton verre, buvons, mon amie, la belle topaze de l’alcool mag­ique.

La soif que j’ai brûle ma vie, boire repose mon énorme douleur.
Tes cheveux blonds, ta peau de lys, ta longue robe de soie et de tulle réjouis­sent mes yeux, effacent mes peines, envelop­pent mon âme dans un rêve bleu.
Princesse de la boue, dan­sons un tan­go…

Ne vois-tu pas que je suis triste, que ma voix pleure ? Princesse de la boue, belle et coquette… Je suis un poète qui se meurt d’amour.
Je me sens plus triste que jamais ce soir, un som­bre fan­tôme d’amour me hante, c’est pourquoi je veux tuer son sou­venir en noy­ant mon angoisse avec des tan­gos et de l’alcool.

Je sais que si ta bouche peinte ment, elle cache une fatigue amère et fatale.
Ton âme et la mienne sont liées. Nous pleu­rons la même douleur des faubourgs.

Autres versions

Ce titre n’a pas de frères, mais des cousins. La fange, el fan­go a inspiré plusieurs com­pos­i­teurs, paroliers et orchestre. Voici donc un petit bain de boue…

Cuna de tango (Francisco Canaro Musique et paroles)

Cuna de fan­go 1952-08-11 — Orques­ta Fran­cis­co Canaro con Alber­to Are­nas y Coro.

Un titre con­tem­po­rain de notre tan­go du jour. Le thème de la fange était à la mode. Ici, c’est le berceau qui fait l’objet de cette chan­son à car­ac­tère de milon­ga.
Au début, Alber­to Are­nas, dans son réc­i­tatif ini­tial, dit :

A este tan­go, flor de tan­go
Quieren cam­biar­lo de ran­go,
Pobre tan­go, flor de tan­go
Meci­do en cuna de fan­go.

De ce tan­go, fleur du tan­go
Ils veu­lent chang­er le rang,
Pau­vre tan­go, fleur du tan­go
Bercé dans le berceau de la fange.

Ran­go, Fan­go et Tan­go sont des rimes rich­es. Canaro, l’auteur, joue donc avec les mots. Avec cette déc­la­ra­tion lim­i­naire, il affirme une posi­tion sem­blable à celle de Borges qui con­sid­ère que le tan­go est affaire de bor­del et qu’il aurait dû se can­ton­ner à cet univers « vir­il »

Flor de tango (Augusto A. Gentile Letra: Pascual Contursi)

Peut-être le Flor de tan­go évo­qué par Cuna de tan­go…

Flor de fan­go 1918 — Car­los Gardel con acomp. de José Ricar­do (gui­tare).

On est à l’opposé de la milon­ga précé­dente. Car­los Gardel est dans le charme, ce qui avait l’effet d’énerver Borges. Ce sont deux visions opposées du tan­go qui s’affirment. Gardel et Borges, enne­mis à vie. Rien de tan­go bru­tal et rugueux dans cette chan­son du charmeur Gardel.

Flor de fan­go 1926-10-25 — Orques­ta Típi­ca Vic­tor dir. Cara­bel­li.

Une ver­sion vieille garde. Suff­isam­ment marchante et énergique pour ne pas déplaire à Canaro (dont Cara­bel­li n’est pas si loin dans cette ver­sion) et à Borges.

Flor de fan­go 1940-04-25 — Rober­to Fir­po y su Cuar­te­to Típi­co.

Rober­to Fir­po dans son style sautil­lant. Sûr que ça va éclabouss­er. Je ne sais pas com­ment a réag­it Borges à cette ver­sion sym­pa­thique mais man­quant tout de même un peu de char­p­ente.

Flor de fan­go 1960-02-12 — Miguel Vil­las­boas y su Quin­te­to Bra­vo del 900.

Et on con­tin­ue à éclabouss­er avec Vil­las­boas qui reprend le style sautil­lant de Fir­po.

Hijo de fango (Francisco Pracánico ; C. Franzino Letra : Carlos Pesce)

Dans la famille Fan­go, après la fleur, je voudrais le fils.

Hijo del fan­go 1931-07-08 — Orques­ta Típi­ca Los Provin­cianos con Car­los Lafuente.

Le fils de la fange que chante Lafuente est empreint de tristesse et nos­tal­gie. On est loin de la fleur sautil­lante de Fir­po et Vil­las­boas.

Flor de fango y flor de tango

Revenons pour ter­min­er avec notre orchestre du jour. Franci­ni-Pon­tier. Voici un titre qui a une let­tre près aurait été de la même famille… Fango Tango, Triste flor de tan­go. La musique est du même Enrique Franci­ni, mais cette fois les paroles sont de Car­los Bahr.
Le chanteur n’est plus le Varon del Tan­go, Julio Sosa, mais le moins con­nu Pablo Moreno. Ce chanteur né en Ital­ie et établi à Mon­te­v­ideo (Uruguay) était ami de Julio Sosa, ce qui est une autre rai­son pour que j’associe cet enreg­istrement à notre tan­go du jour.

Pablo Moreno, le bary­ton ita­lo-uruguayen
Triste flor de tan­go 1953-09-22 — Orques­ta Franci­ni-Pon­tier con Pablo Moreno.

Lorsque Franci­ni et Pon­tier quit­tèrent l’orchestre de Miguel Caló, ils for­mèrent cet orchestre pour exploiter leur style et leurs tal­ents de vio­loniste (Franci­ni) et ban­donéon­iste (Pon­tier). Leur style, comme on peut l’entendre ici, est net­te­ment moins dansant que celui de Caló… Reste que la voix de bary­ton de Moreno est chaude et pleine et qu’il aurait peut-être fait des mer­veilles s’il avait eu une car­rière plus soutenue et plus portègne. Pour moi sa ver­sion de Manos ado­radas sur­passe les ver­sions de Rober­to Rufi­no et celles de Caló et si la ver­sion de Pugliese avec Alber­to Morán est peut-être supérieure, elle le doit aus­si au génie de San Pugliese et à son rythme plus soutenu et enivrant pour la valse.
Nous restons avec Franci­ni, Mon­tier et Moreno pour la valse Manos ado­radas, his­toire d’utiliser la force cen­trifuge pour éjecter toute la boue accu­mulée…

Manos ado­radas 1952-12-10 — Orques­ta Franci­ni-Pon­tier con Pablo Moreno
Prince­sa del fan­go.

Porteña linda 1940-04-30 — Orquesta Edgardo Donato y sus muchachos con Horacio Lagos (Milonga)

Edgardo Donato (Edgardo Felipe Valerio Donato) Letra: Horacio Sanguinetti (Horacio Basterra)

Les tan­gos par­lent sou­vent des jolies femmes. Celles-ci sont de Buenos Aires, mais d’autres villes ont droit à la mise en valeur de leurs femmes. Aujourd’hui, nous fer­ons un jeu et décou­vrirons une femme qui est sans doute une des inspi­ra­tri­ces de cette milon­ga pour Hora­cio San­guinet­ti, l’auteur des paroles.

Jeu des sept erreurs

Un petit jeu pour com­mencer. Voici une image avec une cou­ver­ture de par­ti­tion de Porteña lin­da et un disque de la firme Vic­tor, égale­ment avec Porteña lin­da. Cherchez, non pas néces­saire­ment les erreurs, mais ce qui est dif­férent (il y a moins de sept dif­férences à trou­ver). Réponse après les paroles et avant la décou­verte de Rosi­ta…

Extrait musical

À gauche, cou­ver­ture de la par­ti­tion pour piano et voix de Porteña lin­da et à droite, disque de Porteña lin­da.
Porteña lin­da 1940-04-30 — Orques­ta Edgar­do Dona­to con Hora­cio Lagos (Milon­ga)

Hier, je vous avais pro­posé une ving­taine de ver­sions. Pour ce titre, seul Dona­to a enreg­istré sa com­po­si­tion, mais de si belle manière que cela com­pense…

Les paroles

Buenos Aires tiene
De noche y de día,
Mujeres tan lin­das
Que no las cam­biaría.

Sin hablar de más
Ni des­pre­ciar a las ingle­sas,
Y sin humil­lar
Por las france­sas.

Buenos Aires tiene
Mujeres tan lin­das,
Que uno ya pierde la razón
Y da el corazón.

Soy el canyengue
De esta milon­ga,
Porteña lin­da
No hay quién te pise el pon­cho,
Ayer creí que por Maipú y Tucumán
Iba a morir de amor.

Edgar­do Dona­to (Edgar­do Felipe Vale­rio Dona­to) Letra: Hora­cio San­guinet­ti (Hora­cio Baster­ra)

Traduction libre et indications

Buenos Aires a, nuit et jour, des femmes si belles que je ne les chang­erais pas. 
Sans en dire plus, ni dépréci­er les Anglais­es, et sans hum­i­li­er les Français­es. Buenos Aires a de si belles femmes que vous perdez la tête et don­nez votre cœur. 
Je suis le com­padre de cette milon­ga, Porteña lin­da (belle habi­tante de Buenos Aires) il n’y a per­son­ne pour te provo­quer (Pis­ar el pon­cho en lun­far­do sig­ni­fie chercher des nois­es. Les gau­chos posaient leur pon­cho au sol et l’adversaire, s’il accep­tait le com­bat le piéti­nait), hier j’ai cru qu’à l’angle de Maipú et Tucumán j’al­lais mourir d’amour. (Maipú et Tucumán est l’intersection de ces deux rues de Buenos Aires. Il y avait là un bar célèbre, car c’est ici que Car­los Di Sar­li a com­mandé les paroles du tan­go « Corazón ». à Héc­tor Mar­có).

Réponse au jeu des sept erreurs

Voici la réponse à notre petit jeu.

À gauche, cou­ver­ture de la par­ti­tion pour piano et voix de Porteña lin­da et à droite, disque de Porteña lin­da.

Si le titre est le même, ce n’est pas la même œuvre. La par­ti­tion est une pro­duc­tion espag­nole avec un com­pos­i­teur et un paroli­er dif­férent de la ver­sion de notre milon­ga du jour qui est une œuvre argenti­no-uruguayenne.

Cou­ver­ture de par­ti­tionDisque
TitrePorteña lin­daPorteña lin­da
TypeTan­go can­ciónMilon­ga tanguea­da
Com­pos­i­teurJoaquina Mar­ti MiraEdgar­do Dona­to
Paroli­erHilario Omedes (y Hernán­dez)Hora­cio San­guinet­ti
Date1934Avant avril 1940
Lieu de pro­duc­tionMadrid — EspagneBuenos Aires — Argen­tine

Joaquina Marti Mira, Hilario Omedes et Hernández

Dans la Gac­eta de Madrid n°126 du 6 mai 1935, on peut lire :
“70.657.— Porteña lin­da, tan­go can­ción; por Hilario Omedes y Hernán­dez, de la letra, y Joaquina Martí Mira, de la músi­ca, Madrid. Lit. Sucs. de Durán, 1934.— Folio con dos hojas. (44.872.)”.
On notera donc que cette œuvre a été pub­liée en 1934 et qu’un auteur sup­plé­men­taire est indiqué, Hernán­dez.
En ce qui con­cerne Hilario Omedes, cet auteur ne sem­ble pas avoir été pro­lifique. On con­nait de lui cette pièce de théâtre ¡Histéri­ca! Plutôt du niveau du comique troupi­er. En voici un court extrait que je vous ai traduit de l’espagnol :

« — Marie : Que dîtes-vous ? Fer­nan­do s’en va ? Il part de Madrid ? (Elle pleure) […] Lais­sez-moi seule !
- Don­cel­la : (Boulever­sée) Mais ne pleurez pas made­moi­selle… Oui… Je m’en vais ; mais ne pleurez pas… Comme si un homme méri­tait autant !
(En aparte) Per­dre un fiancé offi­ciel, passe encore, mais tout un batail­lon… Ji… i… Ji… i ; (Elle sort en pleu­rant, essuyant ses larmes avec son tabli­er). »

Hernán­dez, l’autre auteur cité par la Gac­eta de Madrid est peut-être Guiller­mo Hernán­dez Mir. Celui-ci est un peu plus pro­lifique. Il a écrit, des livres, nou­velles, mais aus­si pour le théâtre. Si vous voulez un exem­ple, La Feria (1915) : disponible en télécharge­ment gra­tu­it…

Quant à la com­positrice, Joaquina Martí Mira, elle a aus­si com­posé au moins un paso doble, égale­ment cité dans la Gac­eta de Madrid,
57.152.—De los Ardales, pasodoble, por “Mar­timi­ra” y “Mignon”, seudón­i­mos de doña Joaquina Martí Mira y D. Anto­nio Grau ; Dauset. ” Ejem­plar manuscrito.-—4.® apaisa­do con dos hojas. (36.562.)

N’ayant pas trou­vé un enreg­istrement de son tan­go Porte­na lin­da, je vous pro­pose Perdó­na­lo qu’elle a signé de son pseu­do­nyme Mar­timi­ra y Mignon. Anto­nio Grau Dauset a écrit les paroles. L’orchestre n’est pas iden­ti­fié. La chanteuse est Paqui­ta Alfon­so. L’enregistrement est au cat­a­logue de Juil­let 1930 de « La Voz de Su Amo » (édi­teur musi­cal de Barcelone), il est donc antérieur.

Perdó­na­lo 1930c — Mar­timi­ra y Mignon (Joaquina Martí Mira) Letra: Anto­nio Grau Dauset.
Her­al­do de Barcelona, vers 1930 (rubrique théâ­trale en page 9. Paqui­ta Alfon­so qui chante le titre de Joaquina Mar­ti Mira est con­nue. Faut-il en déduire une cer­taine notoriété pour la com­positrice de porteña Lin­da made in spain ?

Rosita

J’ai déjà par­lé du des­tin trag­ique de San­guinet­ti, ou plutôt d’Hora­cio Baster­ra qui est retourné dans son pays après avoir tué le mil­i­taire qui mal­traitait sa sœur. Sa fuite rocam­bo­lesque en Uruguay depuis Tigre avec l’aide d’Osvaldo Pugliese et de Cátu­lo Castil­lo pour­rait faire l’objet d’un roman.
Mais sa vie, courte et trag­ique lui a per­mis d’écrire au moins 155 titres (enreg­istrés à la SADAIC). Nous le retrou­verons donc à d’autres reprise dans les anec­dotes de tan­go.
Aujourd’hui, je vais juste évo­quer Rosi­ta, son grand amour.
Rosi­ta, telle que la décrit Beba Pugliese était grande, blonde. Elle avait les cheveux coif­fés en arrière et elle fumait.
On peut trou­ver son por­trait en fil­igrane dans dif­férentes com­po­si­tions de San­guinet­ti. Dans notre milon­ga du jour, par exem­ple, mais peut-être encore plus dans Prince­sa del fan­go.

Prince­sa del fan­go 1951-05-11 — Orques­ta Franci­ni-Pon­tier con Julio Sosa.
Enrique Mario Franci­ni Letra: Hora­cio San­guinet­ti (Hora­cio Baster­ra)

Je reviendrai sur ce titre le 11 mai, jour anniver­saire de son enreg­istrement par Julio Sosa.

Rosi­ta, que j’imag­ine un peu à la Evi­ta était une femme de la nuit, une princesse de la fange.

Nada 1944-04-13 — Orquesta Carlos Di Sarli con Alberto Podestá

José Dames Letra: Horacio Sanguinetti (Horacio Basterra)

On se damn­erait pour ce tan­go de José Dames. Sa musique sub­tile et élé­gante remue l’âme et on ne peut cacher son émo­tion en le dansant. Les paroles d’Horacio San­guinet­ti expliquent la puis­sance de la musique en révélant la bien triste his­toire de celui qui étant par­ti ne retrou­ve pas son amour en revenant.

Extrait musical

Nada 1944-04-13 — Orques­ta Car­los Di Sar­li con Alber­to Podestá. C’est le tan­go du jour.

Le piano de Di Sar­li lance les deux pre­mières notes, deux accords puis la mélodie démarre ascen­dante, alter­nant les par­ties per­cutées et les par­ties glis­sées. Comme si deux émo­tions se partageaient la musique. Les vagues se relan­cent les unes après les autres, que ce soit au vio­lon ou à la voix. La musique reste tout le temps, dansante, même lors des pas­sages plus glis­sés. La fin se fait dans un ralen­tisse­ment et se ter­mine avec la voix de Podestá qui chante « amor ». En fait, il reste un petit paquet de notes au piano qui ponctuent la fin, un peu à la manière de Caló, Caló que vous pour­rez enten­dre dans le chapitre « autres ver­sions ».
Mais pour l’instant, intéres­sons-nous aux belles et poignantes paroles d’Hora­cio San­guinet­ti.

Les paroles

He lle­ga­do has­ta tu casa…
¡Yo no sé cómo he podi­do!
Si me han dicho que no estás,
que ya nun­ca volverás…
¡Si me han dicho que te has ido!
¡ Cuán­ta nieve hay en mi alma!
¡Qué silen­cio hay en tu puer­ta!
Al lle­gar has­ta el umbral,
un can­da­do de dolor
me detu­vo el corazón.

Nada, nada que­da en tu casa natal…
Sólo telarañas que teje el yuyal.
El ros­al tam­poco existe
y es seguro que se ha muer­to al irte tú…
¡Todo es una cruz!
Nada, nada más que tris­teza y qui­etud.
Nadie que me diga si vives aún…
¿ Dónde estás, para decirte
que hoy he vuel­to arrepen­ti­do a bus­car tu amor?


Ya me ale­jo de tu casa
y me voy ya ni sé dónde…
Sin quer­er te digo adiós
y has­ta el eco de tu voz
de la nada me responde.
En la cruz de tu can­da­do
por tu pena yo he reza­do
y ha roda­do en tu portón
una lágri­ma hecha flor
de mi pobre corazón.

José Dames Letra: Hora­cio San­guinet­ti (Hora­cio Baster­ra)

Raúl Iri­arte ne chante que ce qui est en gras et pas le dernier cou­plet. Alber­to Amor et Alber­to Podes­ta font de même, mais repren­nent la fin du refrain (en bleu) pour ter­min­er.

Traduction libre

Je suis arrivé à ta mai­son…
Je ne sais pas com­ment j’ai pu le faire !
S’ils m’ont dit que tu n’y es pas, que tu ne revien­dras jamais…
S’ils m’ont dit que tu es par­tie !
Que de neige il y a dans mon âme !
Quel silence il y a à ta porte.
Alors que j’atteignais le seuil, un ver­rou de douleur a arrêté mon cœur.

Rien, rien ne reste dans ta mai­son natale… Seule­ment les toiles d’araignées que la végé­ta­tion tisse.
Le rosier n’existe pas non plus, et il est cer­tain qu’il est mort par ton départ.
Tout est une croix !
Rien, rien que de la tristesse et du calme.
Per­son­ne pour me dire si tu vis encore…
Où tu es, pour te dire qu’aujourd’hui je suis revenu repen­tant pour chercher ton amour ?

Je m’éloigne de ta mai­son et je m’en vais, je ne sais où…
Sans le vouloir, je te dis adieu et jusqu’à l’écho de ta voix, sor­tie du néant, me répond.
Sur la croix de ton ver­rou pour ta douleur, j’ai prié et une larme a roulé sur ta porte et fait fleurir mon pau­vre cœur.

Autres versions

Nada est le titre de l’année 1944. Ses trois meilleures ver­sions sont de cette année et je n’ai pas envie de vous pro­pos­er celles qui ne sont pas au même niveau ou pas dans­ables, notam­ment celles des années 60, comme Julio Sosa (1963), Ful­vio Salman­ca avec Luis Roca (1964), Juan D’Arienzo avec Jorge Valdez (1964), ou celles que Calo fera en 1965 avec Raúl del Mar ou en 1966 avec Ledes­ma (en vivo). Voici donc, par ordre chronologique, les trois ver­sions enreg­istrées en deux mois, en 1944.

Nada 1944-03-09 — Orques­ta Miguel Caló con Raúl Iri­arte.

Comme Di Sar­li, Caló com­mence par un « Ploum plum », puis expose avec notam­ment les cordes et quelques accents du piano le thème. Le ban­donéon pleure à 0 h 47, puis à 1 h 5 com­mence Raúl Iri­arte. Le rythme est bien mar­qué, notam­ment par des cordes per­cutées, cette mar­ca­tion s’altère pour laiss­er la place aux pas­sages émou­vants. Le thème se ter­mine par un joli trait de ban­donéon et la fin clas­sique de Caló égrenée au piano.

Nada 1944-04-13 — Orques­ta Car­los Di Sar­li con Alber­to Podestá. C’est le tan­go du jour.
Nada 1944-05-09 — Orques­ta Rodol­fo Bia­gi con Alber­to Amor.

Le début est égale­ment un « ploum ploum, ou plutôt un « tchac tchac » incisif. Le tem­po est beau­coup plus soutenu que dans les deux autres ver­sions. Mal­gré la jolie voix et l’interprétation de Alber­to Amor, on perd un peu d’émotion, mais l’énergie de Bia­gi rend le titre très dansant.

Pour ma part, c’est la ver­sion de Di Sar­li que je préfère, suiv­ie de celle de Caló et enfin celle de Bia­gi. Je peux pass­er les trois en milon­ga, selon l’énergie et les cir­con­stances du moment. Les DJ ont à leur dis­po­si­tion ces trois mer­veilleux enreg­istrements pour renou­vel­er le bon­heur des danseurs.

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L’histoire à laquelle vous avez failli échapper

Je n’ai pas envie de détru­ire la magie de ce tan­go mag­nifique en vous con­tant des his­toires sur l’auteur des paroles, Hora­cio Baster­ra, alias Hora­cio San­guinet­ti. Je laisse ceux que ça intéresse s’en charg­er. Sachez seule­ment qu’on a per­du sa trace et que dif­férentes hypothès­es essayent d’expliquer sa dis­pari­tion, notam­ment qu’il aurait tué son beau-frère mil­i­taire et qu’il se serait enfui du pays.
Je ne retiens que la fin de cette his­toire. S’il a quit­té l’Argentine, c’est pour retourn­er au pays (l’Uruguay) pour essay­er de retrou­ver celle qui lui a inspiré Nada. Et ils vécurent heureux et eurent beau­coup d’enfants.
FIN.

Les images auxquelles vous avez failli échapper