La Confiteria del Molino a été créée par deux pâtissiers d’origine italienne, Constantino Rossi et Cayetano Brenna, qui ouvrirent dans un premier temps la « Confiteria del Centro » à l’angle de Rodríguez Peña et Rivadavia.
En 1866, ils renomment leur pâtisserie « Antigua Confitería del Molino » (Confiserie du Vieux Moulin), en hommage au premier moulin à farine à vapeur de la ville.
En 1905 Rossi et Brenna achetèrent les locaux situés à l’angle de Rivadavia et Callao, juste en face du Congreso, l’emplacement actuel.
Ils firent les choses en grand en faisant intervenir un architecte italien, Francisco Gianotti, en important des meubles, de la verrerie haut de gamme et en ne lésinant pas sur le stuc imitation marbre, les vitraux et des poignées et finitions en bronze.
L’inauguration du bâtiment de style « Art nouveau » a eu lieu le 9 juillet 1916 (centenaire de l’indépendance de l’Argentine).
La reconstruction après l’incendie de 1930
Durant le coup d’État de 1930, la confiteria est incendiée. Elle sera réouverte l’année suivante et restera en service jusqu’en 1978, date à laquelle les héritiers de l’architecte rachètent le site.
La confitería après sa reconstruction. On remarque les rails et caténaires de la ligne de tranvía (tramway).
Ceux-ci l’exploitent jusqu’en 1997, date de sa fermeture. La même année, l’édifice est déclaré Monument historique national, puis reste à l’abandon, les héritiers ne disposant pas des fonds nécessaires pour sa restauration et sa réouverture.
En 2014, l’édifice est récupéré par le congrès sous le terme d’utilité publique. C’est pratique pour eux d’avoir un tel lieu juste devant le Congreso.
El Congreso avec à droite, la Confitería del Molino
Depuis 2018, les travaux de restauration redonnent à l’édifice sa fraicheur et, depuis 2020, la façade se dresse de nouveau fièrement.
En 2018, les travaux commencent. À gauche, an août 2018 et à droite, en décembre 2018. Il reste beaucoup d’ouvrage à réaliser…Confitería del Molino en mai 2025
Aujourd’hui (2025), les travaux continuent, mais des visites sont organisées dans les parties publiques.
La coupole, illuminée la nuit a belle allure.
La Confiteria del Molino a retrouvé sa place parmi les prestigieuses confiterías de Buenos Aires, comme Las Violetas qui n’a jamais fermé ou la Idéal, qui, elle, est réouverte depuis peu.
Vous n’avez sans doute jamais dansé sur des musiques de Maderna et c’est sans doute rassurant quant aux choix des DJ. Cependant, la culture tango va au-delà de la danse et il me semble intéressant de s’intéresser à cet OVNI du tango qu’est Osmar Maderna. Je vous invite à gravir les degrés d’une gamme bleue pour découvrir ce compositeur et chef d’orchestre à part.
Extrait musical
Partition de Escalas en azul de Osmar Maderna.Escalas en azul 1950-05-17 – Orquesta Osmar Maderna
Il n’est pas très difficile de deviner d’où vient le titre. Le terme de escalas en musique peut être traduit par gammes. On notera que le piano joue tout au long de l’œuvre des gammes, c’est-à-dire des successions de notes ascendantes ou descendantes. Ce style ornemental est typique de Maderna. Le reste de l’orchestre semble dédié à l’accompagnement du piano qui voltige au-dessus des autres instruments. Le tempo est bien marqué, souligné par les bandonéons et les cordes qui effectuent des pauses précédées d’élans, un peu comme dans une ranchera. La musique est interprétée de façon virtuose qui donne une impression de très grande vitesse. Des danseurs piégés par un DJ facétieux qui se retrouveraient sur la piste pourraient s’appuyer sur cette présence du rythme pour garder une cadence raisonnable et ne pas se lancer dans des pas fébriles et ridiculement rapides. Même si on n’est pas dans un rythme ternaire de valse, une éventuelle interprétation dansée de ce titre pourrait s’apparenter à celui d’une valse. Des temps bien marqués et des mouvements tournants, toniques, mais pas vertigineux. On notera les nombreux changements de tonalité et la richesse des variations et des parties. On est plus en face d’une composition de musique classique que d’un tango traditionnel. Je ne vous encouragerai pas à danser ce titre, mais à l’écouter attentivement, assurément. Osmar Maderna
Maderna a relativement peu enregistré. Avec un peu plus d’une soixantaine d’enregistrements, c’est presque étonnant que son nom nous soit parvenu.
Des orchestres plus prolifiques sont passés aux oubliettes.
Les musiciens de Maderna
Il a commencé à enregistrer en 1946, en Uruguay, puis, la même année pour la Victor, et cela jusqu’en 1951. Les musiciens des derniers enregistrements sont un peu différents, mais je vous propose ici, ceux qui ont participé à l’enregistrement de Escalas en azul, enregistré le 17 mai 1947. Osmar Maderna (Direction et piano) Felipe Ricciardi, Eduardo Rovira, José Cambareri et Leopoldo Federico (bandonéon). Comme on peut le remarquer, des musiciens de premier plan et plutôt virtuoses. Aquiles Roggero, Haroldo Ghesagui et Angel Bodas (violon) Ariel Pedernera (contrebasse)
Une partie de ces musiciens vient, tout comme Maderna (qui avait remplacé Stamponi au piano en 1939), de l’orchestre de Miguel Caló (1941-1945), ce sont donc des estrellas (étoiles). Ces transfuges sont : Felipe Ricciardi et José Cambareri (le mage du bandonéon, connu pour ses tempos de folie). Attention, au pupitre des bandonéons de Caló, on trouve aussi un Federico, Domingo de son prénom, mais il n’est pas apparenté à Leopoldo. À la contrebasse, c’est le même Ariel Pederna qui œuvre.
Pour l’anecdote, on notera qu’il y avait un violoniste prénommé Aquiles dans les deux orchestres. Aguilar pour Caló et Roggero pour Maderna. Ce dernier, Aguilar Roggero, dirigera un orchestre en l’honneur de Maderna qui était décédé dans un accident d’avion (28/04/1951), l’orchestre Símbolo « Osmar Maderna ».
La Orquesta Símbolo « Osmar Maderna »
L’année suivant la mort de Maderna, l’orchestre Símbolo « Osmar Maderna » reprend une partie du répertoire et des compositions de Maderna. Orlando Tripodi remplace Osmar Maderna au piano. Aquiles Roggero, continue à tenir le violon, tout en dirigeant et établissant les arrangements de l’orchestre. Le pupitre des violons est complété par Carlos Taverna, Edmundo Baya, et Esteban Cañete. Au bandonéon, on retrouve Felipe Ricciardi, son frère Jorge, Héctor Lettera et Toto Panti pour compléter le pupitre des bandonéons. Víctor Monteleone tient la contrebasse.
L’orchestre semble avoir cessé les enregistrements après la mort de Aquiles Roggero, ce dernier étant justement mort d’une crise cardiaque lors d’une séance, en 1977. Ces enregistrements ne semblent pas avoir été publiés.
Autres versions
Escalas en azul 1950-05-17 – Orquesta Osmar Maderna. C’est notre tango du jour.Escalas en azul 1959-06-17 – Orquesta Símbolo « Osmar Maderna » dir. Aquiles Roggero.
Cette version est proche de celle enregistrée en 1950, comme on peut l’entendre et même voir dans l’illustration ci-dessous. Le tempo est le même, les pauses sont synchronisées et les deux versions peuvent être jouées ensemble durant les 40 premières secondes sans problèmes notables.
En haut, en vert la version de 1950 par Osmar Maderna. En bas, en violet, la version de 1959 par la Orquesta Símbolo.
Cette similitude vraiment frappante est la preuve que l’hommage à Osmar Maderna, tragiquement disparu n’est pas seulement dans le nom de l’orchestre, mais aussi dans le respect de son style.
Ce respect est peut-être une autre explication, avec sa mort gardelienne, du fait que Maderna n’est pas tombé dans l’oubli. Les versions brillantes étaient bien adaptées aux années 60-70, années où la danse était passé au second plan.
Selección de Osmar Maderna 1968 (Potpourri) – Orquesta Símbolo « Osmar Maderna » dir. Aquiles Roggero.
Encore dix ans plus tard, une autre version de Escalas en azul. Ce potpourri comporte trois titres composés par Maderna ; Escalas en azul, Lluvia de estrellas et Concierto en la luna. Un DJ facétieux pourrait en faire une tanda… Dans ces trois titres, on reconnaît la prépondérance du piano, comme dans les enregistrements de Maderna. La tâche de Orlando Tripodi a été de continuer à faire vivre le style de jeu si particulier de Maderna.
Ce titre, comme la plupart des enregistrements de Maderna, n’est pas destiné à la danse, tout comme son célèbre vol du bourdon (El vuelo del moscardón) qu’il a adapté de l’œuvre de Nikolai Rimsky-Korsakov et que je vous propose d’écouter pour terminer ce petit hommage à Osmar Maderna.
El vuelo del moscardón 1946-05-13 – Orquesta Osmar Maderna.
Dans ce thème, le piano est le bourdon qui volette et la sensation de rapidité est encore plus vive que dans notre tango du jour. L’orchestre est moins présent pour donner tout son envol au bourdon à dents blanches et noires.
Ce titre sympathique, connu par les frères Canaro, a quelques particularités qui peuvent faire hésiter un DJ de le passer en milonga. Voyons si ces scrupules sont justifiés. Nous allons traiter en parallèle les deux enregistrements, celui de Juan et celui de Francisco, tous les deux de 1935.
Tout d’abord, la version de Juan. C’est lui l’auteur de la musique et il l’a enregistré un 3 mai, date anniversaire de cet article.
Version de Juan Canaro
Sueño de muñeca 1935-05-03 – Orquesta Juan Canaro con Alejandro Fernández (Rafael Vicente Cisca).
On est frappé par la très longue introduction, comme si l’on se préparait au sommeil et presque à une minute, le rêve démarre, s’exprimant sur un mode mineur. On remarque quelques petits sursauts qui évoquent la ranchera (ou la mazurka). L’orchestration est assez simple et la voix de Alejandro Fernández ressort bien au-dessus des instruments.
Version de Francisco Canaro
Francisco a donc enregistré sa version une semaine avant son frère.
À l’époque, les deux frères n’étaient plus aussi proches, Juan avait quitté l’orchestre de Francisco depuis cinq ans. L’introduction est encore longue avec 40 secondes. Un faux départ à 30 secondes prépare les danseurs à la « valse ». C’est une petite fantaisie proposée par Francisco. On remarque tout de suite que l’orchestration est beaucoup plus poussée chez Francisco. Les instruments, plus nombreux, sont diversifiés et différenciés. Même si on n’échappe pas au marquage pesant des temps évoquant la mazurka ou la ranchera, les dialogues entre les instruments apportent une note de variété qui enlève la monotonie. En général, cette version sera préférée à celle de Juan, même si elle accentue encore plus le caractère de la ranchera.
Paroles
En el jardín de la ilusión Dormida vi bajo el rosal, A la mujer de tentación Que presintió mi madrigal.
Tenía los cabellos de oro y sol Un cuerpo de muñeca escultural, Mejillas con colores de arrebol Diosa y flor virginal.
Por verla y admirarla me acerqué Y el hombre más dichoso me sentí, Pues viendo que soñaba la escuché Y al soñar, decía así:
Tú serás mi dulce amor El príncipe que soñé, Te brindo mi candor Y sólo para ti seré. Ven mis ansias a calmar Y en pago de tu amor, En mí, mis besos lograrás Con pasión, Te adora hasta morir Mi amante corazón. Juan Canaro Letra: Jesús Fernández Blanco
Traduction libre
Dans le jardin de l’illusion, j’ai vu, endormi au pied du rosier, la femme de la tentation qu’avait imaginée mon madrigal.
Elle avait des cheveux d’or et de soleil, un corps de poupée sculpturale, des joues avec des couleurs de coucher de soleil (arrebol est un mot poétique désignant la couleur des nuages éclairés par le soleil couchant), déesse et fleur virginale. Pour la voir et l’admirer, je me suis approché et je me suis senti l’homme le plus heureux. Puis, voyant qu’elle rêvait, je l’ai écoutée et, dans son rêve, elle parlait ainsi : Tu seras mon doux amour, le prince dont j’ai rêvé, je t’offre ma candeur et je serai seulement à toi. Viens calmer mes désirs et, en retour de ton amour, en moi, tu obtiendras mes baisers, avec passion. Je t’adore à mourir, mon cœur aimant.
Les angoisses du DJ
Les deux versions provoquent les angoisses du DJ pour deux raisons.
Première angoisse des DJ, une introduction très longue
La version de Juan totalise 55 secondes d’introduction et celle de Francisco 40 secondes.
La version de Juan totalise 55 secondes d’introduction et celle de Francisco 40 secondes. C’est long, très long, surtout quand on fait des tandas de trois titres…
De si longues introductions sont donc assez difficiles à utiliser. Le DJ devrait prévenir les danseurs et leur indiquer la durée de l’introduction. C’est d’autant plus important que ces introductions ne permettent pas de deviner le style des musiques. En annonçant à l’avance une valse, pour un premier titre de tanda, cela laisse le temps aux danseurs de bien inviter.
Cependant, dans beaucoup de cas et toujours quand ce type de titre est placé au milieu d’une tanda, on coupera l’introduction. Pour la version de Francisco, on pourra garder le faux départ, comme un élément de jeu avec les danseurs.
Les DJ bavards peuvent profiter de ces introductions généreuses pour donner des indications. Les autres pourront assister au désarroi des danseurs qui ne savent sur quel pied ils vont devoir danser…
Seconde angoisse des DJ, un style hésitant
Vous l’aurez remarqué, les deux versions, même si elles ont bien un rythme à trois temps, présentent des petits bonds suivis de courtes pauses, typiques de la ranchera ou de la mazurka.
Cet élément n’est pas très propice à la valse, car il casse la dynamique.
Le DJ devra donc juger, en fonction des compétences des danseurs, si cela va être apprécié ou honni par les danseurs.
La quasi-totalité des bons danseurs est incapable de réaliser une valse agréable sur une ranchera très marquée. En revanche, les danseurs plus moyens pourront s’en accommoder plus facilement, car ils sont moins concernés par le respect de la musique.
Dans le cas de ces « valses », les accents de ranchera ne sont pas trop marqués et on pourra tenter de les passer. Cependant, il y a tant de valses parfaites pour cela que ce n’est pas forcément pertinent de prendre des risques.
À vous de juger.
À bientôt, les amis !
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