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Misa criolla y Navidad nuestra — Ariel Ramírez, Los Fronterizos y la Cantoría de la Basílica del Socorro

Ariel Ramírez Letra: Felix Luna

N’ayant pas de tan­go enreg­istré un 25 décem­bre, je vous pro­pose de nous intéress­er à une des com­po­si­tions les plus célèbres d’Argentine, la Misa criol­la.
On par­le de Misa criol­la, mais en le faisant on risque d’occulter la face B du disque qui com­porte une autre com­po­si­tion d’Ariel Ramírez et Felix Luna, Navi­dad nues­tra. C’est cette œuvre qui est de cir­con­stance en ce 25 décem­bre 2024, 60 ans après sa créa­tion.
Ce fut mon pre­mier disque, offert par ma mar­raine, j’ai donc une affec­tion par­ti­c­ulière pour ces deux œuvres.

Misa criolla et Navidad nuestra – Extraits musicaux

Ariel Ramírez s’est inspiré de rythmes tra­di­tion­nels de son pays (mais pas que) pour com­pos­er les cinq œuvres qui com­posent la Misa criol­la (Face A) et les six qui con­stituent Navi­dad nues­tra (Face B).
J’ai ajouté quelques élé­ments sonores en illus­tra­tion. Ils ne sont pas précédés de la let­tre A ou B qui sont réservées aux faces A et B du disque d’origine.

À gauche, le disque sor­ti en Argen­tine en 1965. cette cou­ver­ture restera la même pour les édi­tions argen­tines ultérieures. Au cen­tre, une édi­tion française. Elle utilise l’il­lus­tra­tion de la pre­mière édi­tion (1964) et qui a été éditée en Nou­velle-Zélande. Mon disque por­tait cette illus­tra­tion et pas celle de l’édition argen­tine, postérieure d’un an.

Misa criolla

A1: Misa Criol­la — Kyrie — Vidala-Baguala La vidala et la baguala sont deux expres­sions chan­tées du Nord-Ouest de l’Argentine accom­pa­g­nées d’une caja.
Une caja qui accom­pa­gne le chant de la Videla et de la baguala.
Baguala Con mi caja can­tar quiro.

On recon­naît la caja qui est frap­pée sur un rythme ter­naire, mais seule­ment sur deux des trois temps, créant ain­si un temps de silence dans la per­cus­sion.
Cela donne une dimen­sion majestueuse à la musique. Ariel Ramírez utilise ce rythme de façon par­tielle. On l’entend par exem­ple dans le pre­mier chœur, dans les silences du chant.

A2: Misa Criol­la — Glo­ria — Car­naval­i­to-Yar­avi.

Pour créer un thème en con­traste, Ariel Ramírez utilise deux rythmes dif­férents, égale­ment du Nord-Ouest. Le car­naval­i­to allè­gre et enjoué et le yar­avi, plus calme, très calme, fait de longues phras­es. Le yar­avi est triste, car util­isé dans les rites funéraires. Il s’oppose donc au car­naval­i­to, qui est une danse de groupe fes­tive. Vous recon­naîtrez facile­ment les deux rythmes à l’écoute.

A3: Misa Criol­la — Cre­do — Chacar­era Trun­ca.

Vous recon­naîtrez facile­ment le rythme de la chacar­era. Ici, une chacar­era sim­ple à 8 com­pas­es. Même si elle est trun­ca, vous pour­riez la danser, la trun­ca est juste une dif­féren­ci­a­tion d’accentuation des temps. Ariel Ramírez, cepen­dant, ne respecte pas la pause inter­mé­di­aire, il préfère don­ner une con­ti­nu­ité à l’œuvre.

A4: Misa Criol­la — Sanc­tus — Car­naval Cochabam­bi­no.

Encore un rythme cor­re­spon­dant à une danse fes­tive, même si Ariel Ramírez y inter­cale des pas­sages d’inspiration plus religieuse. On notera que cette forme de car­naval n’est pas argen­tine, mais bolivi­enne.

A5: Misa Criol­la — Agnus Dei — Esti­lo Pam­peano.

Le Esti­lo n’est pas exacte­ment un rythme par­ti­c­uli­er, car il mélange plusieurs gen­res. C’est une expres­sion de la pam­pa argen­tine. Après le motif du départ en intro­duc­tion, on remar­que une inspi­ra­tion du Yar­avi. Le clavecin d’Ariel Ramírez apporte une légèreté dans les tran­si­tions.

Navidad nuestra

Com­mence ici la face B et une autre œuvre, con­sacrée à la nais­sance de Jésus, de l’annonciation à la fuite en Égypte.

B1: Navi­dad Nues­tra — La Anun­ciación – Chamame.

Le chamame, cette danse joyeuse et fes­tive, jouée à l’accordéon, est typ­ique de la province de Cor­ri­entes. Cer­tains danseurs européens s’évertuent à danser en milon­ga…

Par­ti­tion de La Anun­ciación, pre­mier thème de la Navi­dad nues­tra.
Milon­ga para as mis­sões — Rena­to Borghet­ti. Oui, c’est un chamamé, pas une milon­ga…
B2: Navi­dad Nues­tra — La Pere­gri­nación — Huel­la Pam­peana.

La huel­la est une danse asso­ciant des tours, des voltes et des zap­ateos, ce qui rap­pellera un peu la chacar­era ou le gato.
La Pere­gri­nación racon­te la quête par Jose et Maria (Joseph et Marie) d’un endroit pour la nais­sance de Jésus. Ils sont dans la pam­pa gelée, au milieu des chardons et orties. Je vous donne en prime la mer­veilleuse ver­sion de la Negra (Mer­cedes Sosa).

La Pere­gri­nación — Mer­cedes Sosa.
B3: Navi­dad Nues­tra — El Nacimien­to — Vidala Cata­mar­que­na.

On retrou­ve le rythme calme de la vidala pour annon­cer la nais­sance.
Je vous pro­pose les paroles ci-dessous.

B4: Navi­dad Nues­tra — Los Pas­tores — Chaya Rio­jana.

Là, il ne s’agit pas d’une musique tra­di­tion­nelle, mais d’une fête qui a lieu à la Rio­ja. La Chaya est une belle Indi­enne qui tombe amoureuse d’un jeune homme coureur de jupons. Celui-ci ignore la belle qui ira s’exiler dans les mon­tagnes. Pris de remords, il décide de la retrou­ver et, finale­ment, il ren­tre à la Rio­ja, se saoule et brûle vif dans un poêle. Tous les ans, la fête célèbre l’extinction du jeune homme en feu avec les larmes de Chaya.
Aujourd’hui, cette anci­enne fête est plutôt un fes­ti­val de folk­lore où se suc­cè­dent dif­férents orchestres.

B5: Navi­dad Nues­tra — Los Reyes Magos – Taki­rari.

Le Taki­rari est une danse bolivi­enne qui a des par­en­tés avec le car­naval­i­to. Les danseurs saut­ent, se don­nent le coude et tour­nent en ronde. C’est donc une musique joyeuse et vive.

B6: Navi­dad Nues­tra — La Hui­da — Vidala Tucumana.

Encore une vidala qui imprime son rythme triste. On sent les pas lourds de l’âne qui mène Marie et Jésus en Égypte. La musique se ter­mine par un decrescen­do qui pour­rait simuler l’éloignement de la fuite.

Voilà, ici se ter­mine notre tour de la Misa criol­la et de la Navi­da nues­tra. On voit que, con­traire­ment à ce qui est générale­ment affir­mé, seuls quelques rythmes du folk­lore argentin sont présen­tés et que deux thèmes sont d’inspiration bolivi­enne.

À propos des paroles

En Argen­tine, qui n’est pas un pays laïque, la reli­gion est impor­tante. Je devrais dire les reli­gions, car, si le catholi­cisme des Espag­nols est impor­tant, il me sem­ble que les évangélistes sont bien plus présents si on en juge par le nom­bre d’églises évangélistes. Les autres reli­gions monothéistes sont égale­ment bien représen­tées dans ce pays qui a accueil­li en masse les juifs chas­sés d’Europe et les nazis. Cette œuvre a d’ailleurs été écrite à la suite du témoignage de deux sœurs alle­man­des ren­con­trées à Würzburg et qui lui ont con­té les hor­reurs de la Sec­onde Guerre mon­di­ale.
On note aus­si en Argen­tine divers­es reli­gions, ou plutôt cultes, comme celui du Gau­chi­to Gil, de Difun­ta Cor­rea ou tout sim­ple­ment de foot­balleurs comme Maradona.
Les paroles de Felix Luna ont été écrites à par­tir de textes liturgiques révisés par Anto­nio Osval­do Cate­na, Ale­jan­dro May­ol et Jesús Gabriel Segade, trois prêtres, dont le dernier était aus­si le directeur de la Can­to­ria de la Basíli­ca del Socor­ro qui a enreg­istré la pre­mière ver­sion avec Ariel Ramírez.
À ce sujet, ce chœur, le deux­ième plus ancien d’Argentine, est en péril à la suite de la perte de son finance­ment. La cul­ture n’est plus à la mode en Argen­tine. Leur dernier con­cert a eu lieu il y a une dizaine de jours pour les 60 ans de la Misa criol­la. Ils recherchent un spon­sor. Si vous avez des pistes, vous pou­vez écrire à panella.giovanni85@gmail.com.

La troupe de la Mis­sa criol­la a fait une tournée en Europe en 1967. L’af­fiche du dernier con­cert de la Can­to­ria de la Basíli­ca del Socor­ro pour les 60 ans de l’œuvre.

Paroles (Navidad Nuestra — El Nacimiento — Vidala Catamarquena)

Noche anun­ci­a­da, noche de amor
Dios ha naci­do, péta­lo y flor
Todo es silen­cio y serenidad
Paz a los hom­bres, es Navi­dad

En el pese­bre mi Reden­tor
Es men­sajero de paz y amor
Cuan­do son­ríe se hace la luz
Y en sus brac­i­tos crece una cruz

(Ánge­les can­ten sobre el por­tal)
Dios ha naci­do, es Navi­dad

Esta es la noche que prometió
Dios a los hom­bres y ya llegó
Es Nochebue­na, no hay que dormir
Dios ha naci­do, Dios está aquí
Ariel Ramírez Letra: Felix Luna

Traduction libre de Navidad Nuestra — El Nacimiento — Vidala Catamarquena

Nuit annon­cée, nuit d’amour.
Dieu est né, pétale et fleur.
Tout n’est que silence et sérénité.
Paix aux hommes, c’est Noël
Dans la crèche, mon Rédemp­teur est un mes­sager de paix et d’amour.
Quand il sourit, il y a de la lumière et une croix pousse dans ses bras.
(Les anges chantent au-dessus de la porte), Dieu est né, c’est Noël
C’est la nuit que Dieu a promise aux hommes et elle est déjà arrivée.
C’est la veille de Noël, il ne faut pas dormir, Dieu est né, Dieu est là.

À propos de la première version de la Misa criolla et de Navidad nuestra

Il y a de très nom­breuses ver­sions de la Misa criol­la et de Navi­dad nues­tra. Je vous pro­pose unique­ment de mieux con­naître la ver­sion ini­tiale, celle qui a été enreg­istrée en 1964.

L’orchestre

Ariel Ramírez: Direc­tion générale, piano et clavecin.
Jaime Tor­res: cha­rango.
Luis Amaya, Juanci­to el Pere­gri­no et José Med­i­na: gui­tare criol­la.
Raúl Bar­boza: accordéon pour le chamame «La anun­ciación».
Alfre­do Remus: con­tre­basse
Domin­go Cura: per­cus­sions.
Chango Farías Gómez: bom­bo et acces­soires de per­cus­sion.

Les chanteurs

Les qua­tre chanteurs de Los Fron­ter­i­zos (Ger­ar­do López, Eduar­do Madeo, César Isel­la et Juan Car­los Moreno): chanteurs solistes.
Can­toría de la Basíli­ca del Socor­ro: chœur
Jesús Gabriel Segade: directeur de la Can­toría.

De gauche à droite. La Negra (Mer­cedes Sosa, qui a beau­coup tra­vail­lé avec Ariel Ramírez), Felix Luna (auteur des paroles) et Ariel Ramírez (com­pos­i­teur) au piano et en por­trait à droite.

À bien­tôt les amis. Je vous souhaite de joyeuses fêtes et un monde de paix où tous les humains pour­ront chanter et danser pour oubli­er leurs trist­esses et exprimer leurs joies.

PS : Gérard Cardonnet a fait le commentaire suivant et je trouve cela très intéressant :

« Excel­lent, Bernar­do. Mais s’agis­sant de messe, quand on par­le de com­pos­i­teurs argentins, com­ment ne pas citer la “Misa a Buenos Aires”, dite Mis­a­tan­go, de Mar­tin Palmeri. https://www.choeurdesabbesses.fr/…/la-misatango-de…/ »
Voilà, main­tenant, c’est écrit.

Et comme de bien entendu, j’en rajoute une petite couche avec la réponse :

« Gérard, comme tu l’as remar­qué, c’était plutôt Navi­dad nues­tra qui était d’actualité, Noël étant lié à la nais­sance. J’ai d’ailleurs mis en avant El nacimien­to en en men­tion­nant les paroles.
Pour ce qui est de la Mis­a­tan­go, elle fait claire­ment référence à Piaz­zol­la. Mon pro­pos était de chang­er l’éclairage sur l’Argentine pour par­ler des musiques tra­di­tion­nelles. C’est promis, un de ces jours je met­trais les pieds dans le Piaz­zol­la.
La Mis­a­tan­go est une œuvre superbe. Tu la cites avec beau­coup de rai­son.
J’aurais aus­si pu par­ler de tan­gos de sai­son avec quelques titres qui évo­quent les fêtes de fin d’année comme :
Pour Noël
Nochebue­na
Ben­di­ta nochebue­na
Feliz nochebue­na
El vals de nochebue­na
Navi­dad
Feliz Navi­dad
Navi­dad de los morenos
Can­dombe en Navi­dad
Pour le Jour de l’an
Año nue­vo
Pour les Rois mages (6 jan­vi­er)
Noche de reyes
Un rega­lo de reyes
6 de enero (6 jan­vi­er, jour des Rois mages).
Papa Bal­tasar »

Cristal 1944-06-07 — Orquesta Aníbal Troilo con Alberto Marino

Mariano Mores Letra : José María Contursi

La musique de Cristal est de celles qui mar­quent les esprits et les cœurs. La force de l’écriture fait que la plu­part des ver­sions con­ser­vent l’ambiance du thème orig­i­nal. Cepen­dant, nous aurons des petites sur­pris­es. Je vous présente, Cristal de Mar­i­ano Mores avec des paroles de Con­tur­si, mais pas que…

Extrait musical

Cristal 1944-06-07 — Orques­ta Aníbal Troi­lo con Alber­to Mari­no.

Une très jolie descente répétée lance cette ver­sion. Les notes devi­en­nent de plus en plus graves en suiv­ant une gamme mineure. Cela donne une imposante présence au thème. L’introduction se développe, puis après 30 sec­on­des se développe le thème prin­ci­pal. Celui que Alber­to Mari­no chantera à par­tir de 1’20.

Paroles

Ten­go el corazón hecho peda­zos,
rota mi emo­ción en este día…
Noches y más noches sin des­can­so
y esta desazón del alma mía…
¡Cuán­tos, cuán­tos años han pasa­do,
gris­es mis cabel­los y mi vida!
Loco… casi muer­to… destroza­do,
con mi espíritu amar­ra­do
a nues­tra juven­tud.

Más frágil que el cristal
fue mi amor
jun­to a ti…
Cristal tu corazón, tu mirar, tu reír…
Tus sueños y mi voz
y nues­tra timidez
tem­b­lan­do suave­mente en tu bal­cón…
Y aho­ra sólo se
que todo se perdió
la tarde de mi ausen­cia.
Ya nun­ca volveré, lo sé, lo sé bien, ¡nun­ca más!
Tal vez me esper­arás, jun­to a Dios, ¡más allá!

Todo para mí se ha ter­mi­na­do,
todo para mí se tor­na olvi­do.
¡Trág­i­ca enseñan­za me dejaron
esas horas negras que he vivi­do!
¡Cuán­tos, cuán­tos años han pasa­do,
gris­es mis cabel­los y mi vida!
Solo, siem­pre solo y olvi­da­do,
con mi espíritu amar­ra­do
a nues­tra juven­tud…

Mar­i­ano Mores Letra: José María Con­tur­si

Traduction libre

Mon cœur est en morceaux, mon émo­tion est brisée en ce jour…
Des nuits et encore des nuits sans repos et ce malaise de mon âme…
Com­bi­en, com­bi­en d’années se sont écoulées, grison­nant mes cheveux et ma vie !
Fou… presque mort… détru­it, avec mon esprit amar­ré à notre jeunesse.

Plus frag­ile que le verre était mon amour avec toi…
De cristal, ton cœur, ton regard, ton rire…
Tes rêves et ma voix et notre timid­ité trem­blant douce­ment sur ton bal­con…
Et seule­ment main­tenant, je sais que tout a été per­du l’après-midi de mon absence.
Je n’y retourn­erai jamais, je sais, je le sais bien, plus jamais !
Peut-être m’attendrez-vous, à côté de Dieu, au-delà !

Tout pour moi est fini, tout pour moi devient oubli.
Trag­ique enseigne­ment que m’ont lais­sé ces heures som­bres que j’ai vécues !
Com­bi­en, com­bi­en d’années se sont écoulées, grison­nant mes cheveux et ma vie !
Seul, tou­jours seul et oublié, avec mon esprit amar­ré à notre jeunesse…

Autres versions

Cristal 1944-06-03 — Orques­ta Fran­cis­co Canaro con Car­los Roldán.

Canaro ouvre le bal avec une ver­sion tonique et assez rapi­de. Le début spec­tac­u­laire que nous avons vu dans la ver­sion de Troi­lo est bien présent. On remar­quera la présence de l’Orgue Ham­mond et sa sonorité par­ti­c­ulière, juste avant que chante Car­los Roldán. Ce dernier est par moment accom­pa­g­né par le vibra­phone.

Cristal 1944-06-07 — Orques­ta Aníbal Troi­lo con Alber­to Mari­no. C’est notre tan­go du jour.
Cristal 1944-06-30 — Orques­ta Osval­do Frese­do con Oscar Ser­pa.

Frese­do ne pou­vait pas pass­er à côté de ce thème qui sem­ble avoir été écrit pour lui. La struc­ture est très proche de celles de Canaro et Troi­lo, mais avec sa sonorité. La voix de Ser­pa, plus tran­chante que celle de Ray et Ruiz, donne un car­ac­tère toute­fois un peu dif­férent à cette inter­pré­ta­tion de Frese­do.

Cristal 1957 — Dal­va de Oliveira con acomp. de orques­ta.

L’introduction est rac­cour­cie et Dal­va de Oliveu­ra chante qua­si­ment tout de suite. Vous aurez sans doute remar­qué que cette ver­sion était chan­tée en Por­tu­gais avec quelques vari­antes. Vous trou­verez le texte en fin d’article. L’orchestre peut être celui de Fran­cis­co Canaro, car elle a enreg­istrée en 1957 avec lui, mais ce n’est pas sûr.

Cristal 1957-02-01 — Orques­ta Mar­i­ano Mores con Enrique Lucero.

Mar­i­ano Mores enreg­istre sa créa­tion. Mar­i­ano Mores se passe de sa spec­tac­u­laire intro­duc­tion pour jouer directe­ment son thème prin­ci­pal. Le piano fait le lien entre les dif­férents instru­ments, puis Enrique Lucero entre scène. Lucero a une belle voix, mais manque un peu de présence, asso­cié à un orchestre léger et sans doute trop poussé à des fan­taisies qui fait que cette ver­sion perd un peu de force dra­ma­tique. On ver­ra avec des ver­sions suiv­antes que Mores cor­rig­era le tir, du côté chant, mais pas for­cé­ment du côté orches­tral.

Cristal 1958 — Albert­in­ho For­tu­na com Alexan­dre Gnat­tali e a sua orques­tra.

Là encore, voir en fin d’article le texte en por­tu­gais brésilien.

Cristal 1961 — Astor Piaz­zol­la Y Su Quin­te­to Con Nel­ly Vázquez.

Piaz­zol­la enreg­istre à plusieurs repris­es le titre. Ici, une ver­sion avec Nel­ly Vázquez. On est dans autre chose.

Cristal 1962-04-27 — Orques­ta Arman­do Pon­tier con Héc­tor Dario.

Arman­do Pon­tier nous livre une ver­sion sym­pa­thique, avec un Héc­tor Dario qui lance avec énergie le thème.

Cristal 1965 — Ranko Fuji­sawa. Avec l’orchestre japon­ais de son mari,

Ranko nous prou­ve que le tan­go est vrai­ment inter­na­tion­al. Elle chante avec émo­tion.

Cristal 1978-08-01 — Rober­to Goyeneche con Orques­ta Típi­ca Porteña arr. y dir. Raúl Garel­lo.

Goyeneche a enreg­istré de nom­breuses fois ce titre, y com­pris avec Piaz­zol­la. Voici une de ses ver­sions, je vous en présen­terai une autre en vidéo en fin d’article. On voit que Piaz­zol­la est passé par là, avec quelques petites références dans l’orchestration.

Cristal 1984c — Clau­dia Mores con la Orques­ta de Mar­i­ano Mores.

Mar­i­ano revient à la charge avec Clau­dia, sa belle-fille. En effet, elle était mar­iée à Nico, le fils de Mar­i­ano. On retrou­ve l’orgue Ham­mond de Canaro dans cette ver­sion. Si elle est moins con­nue que son mari, il faut lui recon­naître une jolie voix et une remar­quables expres­siv­ité.

Cristal 1986 — Mar­i­ano Mores y su Orques­ta con Vik­ki Carr.

Une ren­con­tre entre Vik­ki Carr qui a habituelle­ment un réper­toire dif­férent. On notera que l’orchestre est plus sobre que dans d’autres ver­sions, même, si Mores ne peut pas s’empêcher quelques fan­taisies.

Cristal 1994 — Orques­ta Mar­i­ano Mores con Mer­cedes Sosa.

Atten­tion, pure émo­tion quand la Negra se lance dans Cristal. Sa voix si par­ti­c­ulière, habituée au folk­lore s’adapte par­faite­ment à ce thème. Atten­tion, il y a un break (silence) très long, ne perdez pas la fin en coupant trop vite. Avec cette ver­sion, on peut dire que Mores, avec ces trois femmes, a don­né de superbes ver­sions de sa com­po­si­tion, d’un car­ac­tère assez dif­férent de ce qu’ont don­né les autres orchestres, si on excepte Piaz­zol­la et ce qui va suiv­re.

Cristal 1994 — Susana Rinal­di con acomp. de orques­ta.

La même année encore une femme qui donne une superbe ver­sion du thème de Mores. Là, c’est la voix qui est essen­tielle. Une ver­sion étince­lante qui pour­rait rap­pel­er Piaf dans le vibra­to de la voix.

Cristal 1998 — Orques­ta Nés­tor Mar­coni con Adri­ana Varela.

Oui, encore une femme, une voix dif­férente. L’empreinte de Piaz­zol­la est encore présente. Nés­tor Mar­coni pro­pose un par­fait accom­pa­g­ne­ment avec son ban­donéon. Vous le ver­rez de façon encore plus spec­tac­u­laire dans la vidéo en fin d’article.

Cristal 2010c — Aure­liano Tan­go Club. Une intro­duc­tion très orig­i­nale à la con­tre­basse.

On notera aus­si la présence de la bat­terie qui éloigne totale­ment cette ver­sion du tan­go tra­di­tion­nel.

Versions en portugais

Voici le texte des deux ver­sions en por­tu­gais que je vous ai présen­tées.

Paroles

Ten­ho o coração feito em pedaços
Tra­go esfar­ra­pa­da a alma inteira
Noites e mais noites de cansaço
Min­ha vida, em som­bras, pri­sioneira
Quan­tos, quan­tos anos são pas­sa­dos
Meus cabe­los bran­cos, fim da vida
Lou­ca, quase mor­ta, der­ro­ta­da
No crepús­cu­lo apa­ga­do lem­bran­do a juven­tude
Mais frágil que o cristal
Foi o amor, nos­so amor
Cristal, teu coração, teu olhar, teu calor
Car­in­hos juve­nis, jura­men­tos febris
Tro­camos, doce­mente em teu portão
Mais tarde com­preen­di
Que alguém bem jun­to a ti
Man­cha­va a min­ha ausên­cia
Jamais eu voltarei, nun­ca mais, sabes bem
Talvez te esper­arei, jun­to a Deus, mais além

Harol­do Bar­bosa

À propos de la version d’Haroldo Barbosa

Le thème des paroles d’Haroldo Bar­bosa est sem­blable, mais ce n’est pas une sim­ple tra­duc­tion. Si la plu­part des images sont sem­blables, on trou­ve une dif­férence sen­si­ble dans le texte que j’ai repro­duis en gras.
« Plus tard, j’ai réal­isé que quelqu’un juste à côté de toi avait souil­lé mon absence.
 Je ne reviendrai jamais, plus jamais, tu sais. Peut-être que je t’attendrai, avec Dieu, dans l’au-delà ».
Con­traire­ment à la ver­sion de Con­tur­si, on a une cause de la sépa­ra­tion dif­férente et là, c’est lui qui atten­dra auprès de Dieu et non, elle qui atten­dra peut-être.

Roberto Goyeneche et Néstor Marconi, Cristal

Et pour ter­min­er, la vidéo promise de Goyeneche et Mar­coni. Cette vidéo mon­tre par­faite­ment le jeu de Mar­coni. Hier, nous avions Troi­lo à ses tout débuts, là, c’est un autre géant, dans la matu­rité.

Rober­to Goyeneche Nés­tor Mar­coni et Ángel Ridolfi (con­tre­basse) dans Cristal de Mar­i­ano Mores et José María Con­tur­si. Buenos Aires, 1987.

À demain, les amis!