Archives par étiquette : Enrique Carrera Sotelo

Milonguero viejo 1955-06-20 — Orquesta Carlos Di Sarli

Carlos Di Sarli Letra: Enrique Carrera Sotelo

On con­sid­ère par­fois, que les pre­mières ver­sions sont les meilleures et que par la suite, les enreg­istrements suiv­ants vont en décli­nant. Come toute général­i­sa­tion hâtive, c’est dis­cutable. Dans le cas de Di Sar­li, même si on se place dans le rôle du danseur, cette théorie n’est pas for­cé­ment per­ti­nente. Il y a une évo­lu­tion, mais toutes les ver­sions, si dif­férentes soient-elles, ont de l’intérêt. Voyons cela.

Extrait musical

Milonguero viejo 1955-06-20 — Orques­ta Car­los Di Sar­li.

C’est la qua­trième ver­sion pro­posée par Di Sar­li au disque. Nous ver­rons l’évolution en fin d’article avec l’écoute des trois pre­mières ver­sions.

Paroles

Les ver­sions de Di Sar­li sont toutes instru­men­tales, mais il y a des paroles, que voici :

El bar­rio duerme y sueña
al arrul­lo de un triste tan­go llorón;
en el silen­cio tiem­bla
la voz milonguera de un mozo can­tor.
La últi­ma esper­an­za flota en su can­ción,
en su can­ción mal­e­va
y en el can­to dulce ele­va
toda la dulzu­ra de su humilde amor.

Lin­da pebe­ta de mis sueños,
en este tan­go llorón
mi amor mis­ton­go va can­tan­do
su milon­ga de dolor,
y entre el rezon­go de los fuelles
y el canyengue de mi voz,
ilu­sion­a­do y tem­bloroso
vibra humilde el corazón.

Sos la paica más lin­da del pobre arra­bal,
sos la musa mal­e­va de mi inspiración;
y en los tan­gos del Pibe de La Pater­nal
sos el alma criol­la que llo­ra de amor.
Sin berretines mi musa mis­tonguera
chamuya en ver­so su dolor;
tu almi­ta loca, sen­cil­la y milonguera
ha enlo­que­ci­do mi pobre corazón.

El bar­rio duerme y sueña
al arrul­lo del triste tan­go llorón;
en el silen­cio tiem­bla
la voz milonguera del mozo can­tor;
la últi­ma esper­an­za flota en su can­ción,
en su can­ción mal­e­va
y el vien­to que pasa lle­va
toda la dulzu­ra de su corazón.

Car­los Di Sar­li Letra: Enrique Car­rera Sote­lo

Traduction libre et indications

Le quarti­er dort et rêve au roucoule­ment d’un triste tan­go lar­moy­ant ; dans le silence trem­ble la voix milonguera d’un char­mant chanteur.
La dernière espérance flotte dans sa chan­son, dans sa chan­son mal­e­va (en lun­far­do, c’est l’apocope de malévo­lo au féminin. La chan­son est donc mal inten­tion­née, mau­vaise, par son sens, pas par manque de qual­ité) et dans la douce chan­son, il élève toute la douceur de son hum­ble amour.
Belle poupée de mes rêves, dans ce tan­go lar­moy­ant mon amour triste chante sa milon­ga de douleur, et entre le grogne­ment des ban­donéons et le canyengue de ma voix, amoureux et trem­blant, le cœur vibre hum­ble­ment.
Tu es la plus jolie fille (la paica est la com­pagne d’un com­padri­to et par exten­sion, l’amante ou tout sim­ple­ment la com­pagne) des faubourgs pau­vres, tu es la muse malveil­lante de mon inspi­ra­tion ; et dans les tan­gos du Pibe de La Pater­nal (surnom d’Osvaldo Frese­do, ce qui explique qu’il fut le pre­mier à l’enregistrer…) vous êtes l’âme criol­la (de tra­di­tion argen­tine) qui pleure d’amour.
Sans repos (el berretín peut être le loisir comme dans Los tres berretines, une idée fixe, un caprice), ma triste muse exprime en vers, sa douleur ; ta petite âme folle, sim­ple et milonguera a ren­du fou mon pau­vre cœur.
Le quarti­er dort et rêve au roucoule­ment d’un triste tan­go lar­moy­ant ; dans le silence trem­ble la voix milonguera d’un char­mant chanteur.
La dernière espérance flotte dans sa chan­son, dans sa chan­son mal­e­va et le vent qui passe emporte toute la douceur de son cœur.

Autres versions

Milonguero viejo 1928-02-24 — Orques­ta Osval­do Frese­do con Ernesto Famá.

Il ne faut pas juger trop sévére­ment cette ver­sion, elle est de 1928 et donc dans le jus de son époque. Dis­ons juste qu’elle n’est pas de la meilleure péri­ode de Frese­do. Manque de chance, il le réen­reg­istr­era en fin de car­rière, une autre ver­sion qui n’est pas dans sa meilleure péri­ode… On doit cepen­dant met­tre à son crédit un tem­po assez lent, comme celui des Di Sar­li des années 50, mais le pesant canyengue, détru­it toute la joliesse du titre. Une ver­sion pour des piétineurs qui ne seraient pas gênés par la voix de Famá.

Milonguero viejo 1928-02-29 — Igna­cio Corsi­ni con gui­tar­ras de Aguilar-Pesoa-Maciel.

Remar­quez l’alternance de voix de gorge et de tête.

Milonguero viejo 1928-04-02 — Orques­ta Juan Maglio “Pacho” con Car­los Viván.

C’est la dernière ver­sion chan­tée. Les enreg­istrements suiv­ants seront instru­men­taux. Le style un peu trop vieil­lot manque sans doute de charme pour nos milon­gas mod­ernes, même si dans l’interprétation, l’écriture de Di Sar­li est recon­naiss­able. N’oublions pas qu’à cette époque, Di Sar­li jouait avec son sex­te­to dans un style sem­blable.

A Milonguero viejo 1940-07-04 — Orques­ta Car­los Di Sar­li.

Un tem­po un peu soutenu, peut-être trop pour le thème. Mais comme c’est une ver­sion instru­men­tale, les danseurs ne sont pas sup­posés savoir que c’est triste… 128BPM

B Milonguero viejo 1944-07-11 — Orques­ta Car­los Di Sar­li.

Milonguero viejo 1944-07-11 — Orques­ta Car­los Di Sar­li. Qua­tre ans après, Di Sar­li cor­rige le tir avec un rythme plus calme. 122 BPM, mais quand on dans l’oreille, les ver­sions des années 50, on pour­ra le trou­ver un tout petit peu trop rapi­de. On notera qu’au début, Di Sar­li a ajoutée une mon­tée de gamme pour intro­duire le thème. La ver­sion de 1940 et celles des autres orchestres qui n’ont pas adop­té cet ajout parais­sent plus abruptes dans la mise en œuvre.

C Milonguero viejo 1951-09-26 — Orques­ta Car­los di Sar­li.

Di Sar­li ralen­ti encore le tem­po. La musique sonne plus majestueuse. Je trou­ve que cela con­vient mieux au thème du vieux milonguero, même si c’est un enreg­istrement instru­men­tal. 115 BPM. Comme j’ai placé un sondage à la fin de l’article, je ne vais pas écrire que c’est ma ver­sion préférée pour ne pas vous influ­encer.

Milonguero viejo 1954 — Orques­ta Lucio Demare.

L’ordre chronologique des enreg­istrements place cet enreg­istrements au milieu des ver­sions de Di Sar­li. La com­para­i­son n’est pas à l’avantage de Demare.

D Milonguero viejo 1955-06-20 — Orques­ta Car­los Di Sar­li.

C’est notre tan­go du jour. Il est à la vitesse que la ver­sion de 1951, 115 BPM. Avec la ver­sion de 1951, peut-être encore meilleure, cette ver­sion prou­ve que l’adage de plus c’est vieux, mieux c’est ne fonc­tionne pas. Les ver­sions de 1950, pour ce titre, sur­passent large­ment celles des années 40.

Milonguero viejo 1957 — Hora­cio Sal­gán y su Orques­ta Típi­ca.

Entrée directe sans intro­duc­tion au piano. Les vari­a­tions imprévis­i­bles, ren­dent le titre indans­able.

Face 2 — 01 Milonguero viejo 1958 — Argenti­no Galván.

La ver­sion la plus courte. Elle fait par­tie du disque de Argenti­no Galván que je vous ai présen­té en deux fois et dont j’ai promis une étude de la pochette, un jour…

Milonguero viejo 1959-04-06 Orques­ta Osval­do Frese­do.

Vous étiez prévenu, même si Frese­do a enreg­istré deux fois, Milonguero viejo, aucune de ses ver­sions ne soulèvera d’enthousiasme. Pour un titre qui le cite, il aurait pu s’ap­pli­quer et enreg­istr­er avec Ray ou Ruiz, une belle ver­sion.

Milonguero viejo 1983 c — Alber­to Di Paulo.

Entrée direct dans le thème, sans l’introduction de piano. En revanche, le tem­po est lent, comme les derniers enreg­istrements de Di Sar­li. Pour la danse il manque peut êre un peu de tonus et l’orchestre n’est pas assez incisif, les danseurs risquent de s’endormir.

Milonguero viejo 2010 — Las Bor­donas.

Avec un tem­po irréguli­er de près de 150BPM, ne me sem­ble pas très en phase avec les paroles, chan­tées avec une alter­nance de voix de gorge et de tête, un peu comme le fai­sait Corsi­ni. Si les gui­taristes sont Javier Amoret­ti, Nacho Cedrún et Martín Creix­ell et le con­tre­bassiste Popo Gómez, je ne sais pas qui chante, peut-être les gui­taristes.

E Milonguero viejo 2011 — Orques­ta Típi­ca Gente de Tan­go.

Pour cette dernière ver­sion, je vous pro­pose leur par­ti­tion en PDF. Comme vous avez pu l’entendre, c’est un arrange­ment à par­tir de Di Sar­li. Ils ont égale­ment con­servé l’ajout du piano en intro­duc­tion des ver­sions de 1944 et ultérieures de Di Sar­li.

Partition Gente de tango (PDF)

Sondage

Primero de mayo (premier mai)

En Argen­tine, le pre­mier mai est férié. Tous les mag­a­sins sont fer­més et seuls quelques ser­vices jugés essen­tiels fonc­tion­nent. Tout au plus quelques bars ouvrent dans la soirée. Les maisons de dis­ques fer­mant aus­si, il ne sem­ble pas y avoir de tan­gos enreg­istrés pour le jour des tra­vailleurs et tra­vailleuses (Día Inter­na­cional del tra­ba­jador y la tra­ba­jado­ra comme on dit en Argen­tine). Mais il y a des choses à dire sur le sujet…

Haragán

Enrique Pedro Delfino Letra: Manuel Romero, Luis Bayón Herrera

Extrait musical

Haragán, par­ti­tion pour piano. Superbe illus­tra­tion de cou­ver­ture par San­dro

Il y a de très nom­breuses ver­sions de Haragán et bien sûr, aucune n’est du pre­mier mai. J’en ai donc choisi une, mais vous avez bea­coup d’autres à écouter après la présen­ta­tion des paroles. J’ai choisi celle de Rafael Canaro car elle est sym­pa et qu’on l’en­tend moins que son fran­gin, Fran­cis­co qui a aus­si don­né sa ver­sion du thème, une ver­sion que j’aime bien car elle est amu­sante. Mais le thème de Haragán est amu­sant, comme en témoigne l’il­lus­tra­tion de la par­ti­tion…

Haragán 1929 – Orques­ta Rafael Canaro con Car­los Dante

Paroles de Haragán

Sofia Bozán a été la pre­mière à chanter Haragán. C’était en 1928, au théâtre Sarmien­to. Mal­heureuse­ment, il ne sem­ble pas y avoir d’enregistrements de cette presta­tion.

¡La pucha que sos reo y ene­mi­go de yugar­la!
La esque­na se te frunce si tenés que labu­rar­la…
Del orre batal­lón vos sos el capitán;
vos creés que naciste pa’ ser un sultán.
Te gus­ta med­i­tar­la pan­za arri­ba, en la catr­era
y oír las cam­panadas del reló de Bal­van­era.
¡Salí de tu letar­go! ¡Ganate tu pan!
Si no, yo te largo… ¡Sos muy haragán!

Haragán,
sí encon­trás al inven­tor
del laburo, lo fajás…
Haragán, si seguís en ese tren
yo te amuro, Cachafaz
Grandulón,
pro­totipo de ator­rante
robus­to, gran bacán;
des­pertá, si dormi­do estás,
peda­zo de haragán.

El día del caso­rio dijo el tipo ‘e la sotana:
«El coso debe siem­pre man­ten­er a su fulana».
Y vos inter­pretás las cosas al revés:
¡que yo te man­ten­ga es lo que querés!
Al cam­po a cachar giles que el amor no da pa’ tan­to.
A ver si te entreveras porque yo ya no te aguan­to…
Si en tren de cara rota pen­sás con­tin­uar,
“Primero de Mayo” te van a lla­mar.

Enrique Pedro Delfi­no Letra: Manuel Romero, Luis Bayón Her­rera

Traduction libre de Haragán

Putain ! (c’est en fait une excla­ma­tion de sur­prise, de dégoût, pas la désig­na­tion d’une pute au sens strict) tu es con­damné et enne­mi du tra­vail ! (yugar ou yugar­la – tra­vail)
Ton dos se tord s’il te faut tra­vailler…
Du batail­lon des con­damnés (orre est reo en ver­lan), tu es le cap­i­taine ;
Tu crois être né pour être un sul­tan.
Tu aimes méditer le ven­tre à l’air, sur le lit (catr­era = lit en lun­far­do)
et enten­dre les cloches de l’horloge de Bal­van­era.
Sors de ta léthargie ! Gagne ton pain !
Sinon, je te jette dehors… Tu es trop paresseux !

Paresseux,
Si tu crois­es l’inventeur du tra­vail, tu le roue de coups…
Paresseux, si tu con­tin­ues ain­si (dans ce train), je t’abandonne (amuro en lun­far­do a dif­férentes sig­ni­fi­ca­tions, dont celle de quit­ter pour un autre), Cachafaz (il ne s’agit pas bien sûr de El Cachafaz, mais du terme lun­far­do qui sig­ni­fie paresseux, coquin, voy­ou, sans ver­gogne et autres choses peu aimables).
Grand gail­lard,
Pro­to­type de l’oisif (attorante) robuste, grand prof­i­teur (un bacan, est un indi­vidu qui jouit de la vie. En général un bacan a de l’argent, il entre­tient une cour­tisane, mais là, il n’en a que les façons, pas le porte­feuille) ;
Réveille-toi, si tu es endor­mi gros tas (peda­zo est un amon­celle­ment) fainéant.

Le jour du mariage, le type en soutane a dit :
« Le mec doit tou­jours entretenir sa moitié. »
Et tu inter­prètes les choses à l’envers :
Que je t’entretienne, c’est ce que tu veux !
À la cam­pagne pour attrap­er des idiots pour l’amour ne donne pas pour si cher.
Voyons si tu vas t’emmêler les pinceaux (là, ce serait plutôt se remuer qu’emmêler) parce que là, je ne te sup­porte plus…
Si tu prévois de con­tin­uer sur un train en panne
« Primero de Mayo », ils vont te nom­mer (en lun­far­do, un primero de mayo est un fainéant qui fait de chaque jour un 1er mai, jour férié).

Autres versions

Haragán 1928-08-31 — Orques­ta Fran­cis­co Canaro con Char­lo.

Cette ver­sion fait un peu musique de dessin ani­mé. Char­lo chante un paresseux qui sem­ble con­tent de l’être.

Haragán 1928-08-31 — Orques­ta Fran­cis­co Lomu­to.

Le même jour que Canaro, Lomu­to pro­duit une ver­sion instru­men­tale. Comme sou­vent, cette ver­sion peut faire penser à Canaro, mais elle est un peu moins imag­i­na­tive. La con­cor­dance de date fait qu’il est amu­sant de com­par­er les deux ver­sions.

Haragán 1928 — Enrique Delfi­no (piano y can­to) y Manuel Para­da (gui­tar­ra).

Une ver­sion par l’auteur de la musique au piano, je vous en présen­terai deux autres…

Haragán 1928-09-11 — Azu­ce­na Maizani con acomp. de Dúo Enrique Delfi­no (piano) y Manuel Para­da (gui­tare).

Les mêmes musi­ciens, avec le ren­fort d’Azucena…

Haragán 1928-09-25 — Orques­ta Osval­do Frese­do.

C’est une ver­sion instru­men­tale, mais on entend bien la « fatigue » du paresseux.

1928-09-28 – Orques­ta Juan Maglio Pacho (ver­sion instru­men­tale).
Haragán 1928-09-28 — Orques­ta Juan Maglio Pacho — Disco-Nacional-Odeon-No.7591-A-Matriz-e-3264
Haragán 1929-06-21 — Car­los Gardel con acomp. de Guiller­mo Bar­bi­eri, José María Aguilar (gui­tar­ras)
Haragán 1929 – Igna­cio Corsi­ni acomp. de gui­tares. L’autre Gardel…
Haragán 1929 – Orques­ta Rafael Canaro con Car­los Dante
Haragán 1929 — Enrique Delfi­no (piano) y Anto­nio Rodio (vio­lin).

Une ver­sion instru­men­tale très sym­pa. Dom­mage que le son ne soit pas de bonne qual­ité…

Haragán 1929 — Ali­na de Sil­va (acomp. accordéon et piano). Un enreg­istrement français de chez Pathé)
Haragán 1929 — Ali­na de Sil­va (acomp. accordéon et piano). Un enreg­istrement français de chez Pathé).

Pas d’enregistrement notable du titre dans les années 30, il faut atten­dre 1947 et… Astor Piaz­zol­la, pour le retrou­ver sur un disque.

Haragán 1947-04-15 – Astor Piaz­zol­la y su Orques­ta Típi­ca con Aldo Cam­poamor
Haragán 1955-12-14 — Enrique Mora y su Cuar­te­to Típi­co con Elsa Moreno.

Une ver­sion tonique, une chan­son mais qua­si­ment dans­able. Un résul­tat dans la lignée de cam­bal­ache ou des enreg­istrements de Tita Merel­lo (qui a d’ailleurs enreg­istré aus­si cam­bal­ache…).

Haragán 1958-07-29 — Diana Durán con acomp. de Oscar Savi­no.

Une ver­sion chan­tée par une femme énergique. Notre Haragán n’a qu’à bien se tenir.

Haragán 2013 — Stel­la Milano.

Une des plus récentes ver­sions de ce thème qui est tou­jours d’actualité…

Autres musiques

D’autres musiques pour­raient con­venir pour un pre­mier mai, par exem­ple :

Al pie de la San­ta Cruz 1933-09-18 — Car­los Gardel con acomp. de Guiller­mo Bar­bi­eri, Domin­go Riverol, Domin­go Julio Vivas, Hora­cio Pet­torossi.

Ce tan­go a été inter­dit, car il par­le de grève…

Tra­ba­jar, nun­ca 1930-06-11 — Tita Merel­lo con orques­ta (Juan Car­los Bazán Letra : Enrique Car­rera Sote­lo).

Un tan­go humoris­tique qui pour­rait être la réponse du Haragán a sa femme, sous forme de bonnes réso­lu­tions pour l’année nou­velle et qui se ter­mine par, « j’accepte tout en ton nom, mais le tra­vail, ça, non ! » L’argot util­isé dans ce tan­go est sim­i­laire à celui de Haragán.

Seguí mi con­se­jo 1929-06-21 — Car­los Gardel con acomp. de Guiller­mo Bar­bi­eri, José María Aguilar (Sal­vador Meri­co Letra: Eduar­do Sal­vador Trongé).

Encore un tan­go qui donne de bons con­seils pour ne rien faire… Un véri­ta­ble manuel du haragán.

Seguí mi con­se­jo 1947-01-29 — Orques­ta Enrique Rodríguez con Ricar­do Her­rera.

Une ver­sion dans­able de ce titre. Sans doute à pass­er un pre­mier mai, ou pour se moquer d’un danseur un peu paresseux…

1° de mayo — Osval­do Jiménez y Luis Gar­cía Mon­tero (Tan­go).

Oui, oui, j’ai bien trou­vé un tan­go qui por­tait la date du jour. Osval­do Jiménez à la gui­tare et au chant a mis en musique le poème 1° de mayo de Luis Gar­cía Mon­tero… Bon, ce n’est pas le tan­go du siè­cle, mais ça mon­tre que le tan­go est tou­jours en phase de créa­tion et que l’association entre les poètes et les musi­ciens fonc­tionne tou­jours.

1° de mayo — Osval­do Jiménez y Luis Gar­cía Mon­tero (Tan­go).
La pho­to de cou­ver­ture est un mur­al intérieur, peint à l’huile, de 4,5x6m de Ricar­do Carpani appelé 1ero de Mayo. Il se trou­ve au Sindi­ca­to de Obreros del Vesti­do, rue Tucumán au 737. Il a été réal­isé en 1963 et pas en 1964 comme le dis­ent presque toutes les sources. J’ai rajouté la sig­na­ture (Carpani).

Si vous souhaitez en savoir plus sur cet artiste : http://www.relats.org/documentos/TAC.Muralismo.Soneira.60y70.pdf

Haragán — Primero de mayo (premier mai)

Enrique Pedro Delfino Letra: Manuel Romero, Luis Bayón Herrera

En Argen­tine, le pre­mier mai est férié. Tous les mag­a­sins sont fer­més et seuls quelques ser­vices jugés essen­tiels fonc­tion­nent. Tout au plus quelques bars ouvrent dans la soirée. Les maisons de dis­ques fer­mant aus­si, il ne sem­ble pas y avoir de tan­gos enreg­istrés pour le jour des tra­vailleurs et tra­vailleuses (Día Inter­na­cional del tra­ba­jador y la tra­ba­jado­ra comme on dit en Argen­tine). Mais il y a des choses à dire sur le sujet…

Faute d’enregistrement un pre­mier mai, j’ai cher­ché des tan­gos qui par­lent du pre­mier mai et de ces ques­tions.
Le plus con­nu est bien sûr Haragán. C’est donc lui qui va faire office de tan­go du jour… Ce tan­go ne par­le pas pré­cisé­ment du pre­mier mai, mais le type fainéant qui se fait dis­put­er par sa femme est ce qu’on appelle en Argen­tine un Primero de Mayo (un pre­mier mai), à cause de son allergie au tra­vail.

Extrait musical

Haragán, par­ti­tion pour piano. Superbe illus­tra­tion de cou­ver­ture par San­dro

Il y a de très nom­breuses ver­sions de Haragán et bien sûr, aucune n’est du pre­mier mai. J’en ai donc choisi une, mais vous avez beau­coup d’autres à écouter après la présen­ta­tion des paroles. J’ai choisi celle de Rafael Canaro car elle est sym­pa et qu’on l’en­tend moins que son fran­gin, Fran­cis­co qui a aus­si don­né sa ver­sion du thème, une ver­sion que j’aime bien car elle est amu­sante. Mais le thème de Haragán est amu­sant, comme en témoigne l’il­lus­tra­tion de la par­ti­tion…

Haragán 1929 – Orques­ta Rafael Canaro con Car­los Dante

Paroles de Haragán

Sofia Bozán a été la pre­mière à chanter Haragán. C’était en 1928, au théâtre Sarmien­to. Mal­heureuse­ment, il ne sem­ble pas y avoir d’enregistrements de cette presta­tion.

¡La pucha que sos reo y ene­mi­go de yugar­la!
La esque­na se te frunce si tenés que labu­rar­la…
Del orre batal­lón vos sos el capitán;
vos creés que naciste pa’ ser un sultán.
Te gus­ta med­i­tar­la pan­za arri­ba, en la catr­era
y oír las cam­panadas del reló de Bal­van­era.
¡Salí de tu letar­go! ¡Ganate tu pan!
Si no, yo te largo… ¡Sos muy haragán!

Haragán,
sí encon­trás al inven­tor
del laburo, lo fajás…
Haragán, si seguís en ese tren
yo te amuro, Cachafaz
Grandulón,
pro­totipo de ator­rante
robus­to, gran bacán;
des­pertá, si dormi­do estás,
peda­zo de haragán.

El día del caso­rio dijo el tipo ‘e la sotana:
«El coso debe siem­pre man­ten­er a su fulana».
Y vos inter­pretás las cosas al revés:
¡que yo te man­ten­ga es lo que querés!
Al cam­po a cachar giles que el amor no da pa’ tan­to.
A ver si te entreveras porque yo ya no te aguan­to…
Si en tren de cara rota pen­sás con­tin­uar,
“Primero de Mayo” te van a lla­mar.

Enrique Pedro Delfi­no Letra: Manuel Romero, Luis Bayón Her­rera

Traduction libre de Haragán

Putain ! (c’est en fait une excla­ma­tion de sur­prise, de dégoût, pas la désig­na­tion d’une pute au sens strict) tu es con­damné et enne­mi du tra­vail ! (yugar ou yugar­la – tra­vail)
Ton dos se tord s’il te faut tra­vailler…
Du batail­lon des con­damnés (orre est reo en ver­lan), tu es le cap­i­taine ;
Tu crois être né pour être un sul­tan.
Tu aimes méditer le ven­tre à l’air, sur le lit (catr­era = lit en lun­far­do)
et enten­dre les cloches de l’horloge de Bal­van­era.
Sors de ta léthargie ! Gagne ton pain !
Sinon, je te jette dehors… Tu es trop paresseux !

Paresseux,
Si tu crois­es l’inventeur du tra­vail, tu le roues de coups…
Paresseux, si tu con­tin­ues ain­si (dans ce train), je t’abandonne (amuro en lun­far­do a dif­férentes sig­ni­fi­ca­tions, dont celle de quit­ter pour un autre), Cachafaz (il ne s’agit pas bien sûr de El Cachafaz, mais du terme lun­far­do qui sig­ni­fie paresseux, coquin, voy­ou, sans ver­gogne et autres choses peu aimables).
Grand gail­lard,
Pro­to­type de l’oisif (attorante) robuste, grand prof­i­teur (un bacan, est un indi­vidu qui jouit de la vie. En général un bacan a de l’argent, il entre­tient une cour­tisane, mais là, il n’en a que les façons, pas le porte­feuille) ;
Réveille-toi, si tu es endor­mi gros tas (peda­zo est un amon­celle­ment) fainéant.

Le jour du mariage, le type en soutane a dit :
« Le mec doit tou­jours entretenir sa moitié. »
Et tu inter­prètes les choses à l’envers :
Que je t’entretienne, c’est ce que tu veux !
À la cam­pagne pour attrap­er des idiots pour l’amour ne donne pas pour si cher.
Voyons si tu vas t’emmêler les pinceaux (là, ce serait plutôt se remuer qu’emmêler) parce que là, je ne te sup­porte plus…
Si tu prévois de con­tin­uer sur un train en panne
« Primero de Mayo », ils vont te nom­mer (en lun­far­do, un primero de mayo est un fainéant qui fait de chaque jour un 1er mai, jour férié).

Autres versions

Haragán 1928-08-31 — Orques­ta Fran­cis­co Canaro con Char­lo.

Cette ver­sion fait un peu musique de dessin ani­mé. Char­lo chante un paresseux qui sem­ble con­tent de l’être.

Haragán 1928-08-31 — Orques­ta Fran­cis­co Lomu­to.

Le même jour que Canaro, Lomu­to pro­duit une ver­sion instru­men­tale. Comme sou­vent, cette ver­sion peut faire penser à Canaro, mais elle est un peu moins imag­i­na­tive. La con­cor­dance de date fait qu’il est amu­sant de com­par­er les deux ver­sions.

Haragán 1928 — Enrique Delfi­no (piano y can­to) y Manuel Para­da (gui­tar­ra).

Une ver­sion par l’auteur de la musique au piano, je vous en présen­terai deux autres…

Haragán 1928-09-11 — Azu­ce­na Maizani con acomp. de Dúo Enrique Delfi­no (piano) y Manuel Para­da (gui­tare).

Les mêmes musi­ciens, avec le ren­fort d’Azucena…

Haragán 1928-09-25 — Orques­ta Osval­do Frese­do.

C’est une ver­sion instru­men­tale, mais on entend bien la « fatigue » du paresseux.

1928-09-28 – Orques­ta Juan Maglio Pacho (ver­sion instru­men­tale).
Haragán 1928-09-28 — Orques­ta Juan Maglio Pacho — Disco-Nacional-Odeon-No.7591-A-Matriz-e-3264
Haragán 1929-06-21 — Car­los Gardel con acomp. de Guiller­mo Bar­bi­eri, José María Aguilar (gui­tar­ras)
Haragán 1929 – Igna­cio Corsi­ni acomp. de gui­tares. L’autre Gardel…
Haragán 1929 – Orques­ta Rafael Canaro con Car­los Dante
Haragán 1929 — Enrique Delfi­no (piano) y Anto­nio Rodio (vio­lin).

Une ver­sion instru­men­tale très sym­pa. Dom­mage que le son ne soit pas de bonne qual­ité…

Haragán 1929 — Ali­na de Sil­va (acomp. accordéon et piano). Un enreg­istrement français de chez Pathé)
Haragán 1929 — Ali­na de Sil­va (acomp. accordéon et piano). Un enreg­istrement français de chez Pathé).

Pas d’enregistrement notable du titre dans les années 30, il faut atten­dre 1947 et… Astor Piaz­zol­la, pour le retrou­ver sur un disque.

Haragán 1947-04-15 – Astor Piaz­zol­la y su Orques­ta Típi­ca con Aldo Cam­poamor
Haragán 1955-12-14 — Enrique Mora y su Cuar­te­to Típi­co con Elsa Moreno.

Une ver­sion tonique, une chan­son mais qua­si­ment dans­able. Un résul­tat dans la lignée de cam­bal­ache ou des enreg­istrements de Tita Merel­lo (qui a d’ailleurs enreg­istré aus­si cam­bal­ache…).

Haragán 1958-07-29 — Diana Durán con acomp. de Oscar Savi­no.

Une ver­sion chan­tée par une femme énergique. Notre Haragán n’a qu’à bien se tenir.

Haragán 2013 — Stel­la Milano.

Une des plus récentes ver­sions de ce thème qui est tou­jours d’actualité…

Autres musiques

D’autres musiques pour­raient con­venir pour un pre­mier mai, par exem­ple :

Al pie de la San­ta Cruz 1933-09-18 — Car­los Gardel con acomp. de Guiller­mo Bar­bi­eri, Domin­go Riverol, Domin­go Julio Vivas, Hora­cio Pet­torossi.

Ce tan­go a été inter­dit, car il par­le de grève…

Tra­ba­jar, nun­ca 1930-06-11 — Tita Merel­lo con orques­ta (Juan Car­los Bazán Letra : Enrique Car­rera Sote­lo).

Un tan­go humoris­tique qui pour­rait être la réponse du Haragán a sa femme, sous forme de bonnes réso­lu­tions pour l’année nou­velle et qui se ter­mine par, « j’accepte tout en ton nom, mais le tra­vail, ça, non ! » L’argot util­isé dans ce tan­go est sim­i­laire à celui de Haragán.

Seguí mi con­se­jo 1929-06-21 — Car­los Gardel con acomp. de Guiller­mo Bar­bi­eri, José María Aguilar (Sal­vador Meri­co Letra: Eduar­do Sal­vador Trongé).

Encore un tan­go qui donne de bons con­seils pour ne rien faire… Un véri­ta­ble manuel du haragán.

Seguí mi con­se­jo 1947-01-29 — Orques­ta Enrique Rodríguez con Ricar­do Her­rera.

Une ver­sion dans­able de ce titre. Sans doute à pass­er un pre­mier mai, ou pour se moquer d’un danseur un peu paresseux…

1° de mayo — Osval­do Jiménez y Luis Gar­cía Mon­tero (Tan­go).

Oui, oui, j’ai bien trou­vé un tan­go qui por­tait la date du jour. Osval­do Jiménez à la gui­tare et au chant a mis en musique le poème 1° de mayo de Luis Gar­cía Mon­tero… Bon, ce n’est pas le tan­go du siè­cle, mais ça mon­tre que le tan­go est tou­jours en phase de créa­tion et que l’association entre les poètes et les musi­ciens fonc­tionne tou­jours.

1° de mayo — Osval­do Jiménez y Luis Gar­cía Mon­tero (Tan­go).
La pho­to de cou­ver­ture est un mur­al intérieur, peint à l’huile, de 4,5x6m de Ricar­do Carpani appelé 1ero de Mayo. Il se trou­ve au Sindi­ca­to de Obreros del Vesti­do, rue Tucumán au 737. Il a été réal­isé en 1963 et pas en 1964 comme le dis­ent presque toutes les sources. J’ai rajouté la sig­na­ture (Carpani).

Si vous souhaitez en savoir plus sur cet artiste : http://www.relats.org/documentos/TAC.Muralismo.Soneira.60y70.pdf