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Sueño imaginado 1932-01-05 — Orquesta Típica Los Provincianos con Carlos Lafuente. Dir. Ciriaco Ortiz

Cieto Minocchio Letra: Francisco Brancatti

C’est sym­pa de faire des rêves, mais par­fois le retour à la réal­ité est ter­ri­ble. C’est ce qui arrive au héros de cette mag­nifique valse, sans doute un peu trop rare dans les milon­gas. Ciri­a­co Ortiz, à la tête de l’orchestre Los Provin­cianos, l’a enreg­istrée, il y a exacte­ment 93 ans…

Sueño imag­i­na­do 1932-01-05 — Orques­ta Típi­ca Los Provin­cianos con Car­los Lafuente. Dir. Ciri­a­co Ortiz.

Dès le début on remar­que que le titre est conçu sous forme de ques­tions-répons­es. L’orchestre lance une ques­tion et un soliste donne la réponse.
Si les vio­lons avec Elvi­no Var­daro sont majori­taire­ment les solistes, les ban­donéons, dont celui de Ciri­a­co Ortiz et peut-être celui du jeune Aníbal Troi­lo ont égale­ment leurs répar­ties. Pour les danseurs, ces dia­logues sont très intéres­sants, car cela leur per­met de vari­er l’improvisation. La répéti­tiv­ité de la struc­ture per­met de pré­par­er une « réponse » au cas où les pre­miers dia­logues auraient été loupés dans l’improvisation.
Pour les danseurs moins avancés, les pre­miers temps de chaque mesure sont mar­qués par la con­tre­basse de Man­fre­do Lib­er­a­tore. C’est le Poum du Poum-Tchi-Tchi de la valse (Temps fort-Temps faible-Temps faible). On n’entend pas vrai­ment le piano, en revanche, on a l’impression qu’une caisse claire sonne les temps faibles.
C’est donc une valse facile pour les danseurs qui ont besoin d’un repère tem­porel bien mar­qué.
À 1:58, Car­los Lafuente chante le refrain. Sa voix peut un peu sur­pren­dre, mais, comme l’intervention est courte, cela ne devrait pas trop per­turber les danseurs. On remar­quera que l’orchestre fait la place au chanteur en l’accompagnant en sour­dine par un dis­cret Poum-Tchi-Tchi, ce qui per­met aux danseurs de garder le rythme.
On remar­quera la com­plex­ité modale de l’œuvre, avec de nom­breux change­ments de tonal­ité, ce qui peut par­fois don­ner une impres­sion de dis­so­nance si on reste sur l’élan de la tonal­ité précé­dente.

Il est dif­fi­cile d’authentifier les instru­men­tistes de l’orchestre, car les orchestres de la Vic­tor étaient à géométrie vari­able. Comme ces orchestres se lim­i­taient aux enreg­istrements, ils se con­stru­i­saient à chaque ses­sion avec des musi­ciens de pre­mier plan, disponibles.
On con­sid­ère générale­ment que les prin­ci­paux musi­ciens de Los Provin­cianos dirigés par Ciri­a­co Ortiz étaient :
Ciri­a­co Ortiz, Aníbal Troi­lo, Hora­cio Golli­no (ban­donéon­istes)
Orlan­do Cara­bel­li (pianiste)
Elvi­no Var­daro, Manuel Núñez, Anto­nio Rossi (vio­lonistes)
Man­fre­do Lib­er­a­tore (con­tre­bassiste)

Un des orchestres de la Vic­tor

Cette pho­to générale­ment légendée comme étant de Los Provin­cianos, sans doute à cause de la présence de Ciri­a­co Ortiz. Cepen­dant, Mer­cedes Simone n’est pas inter­v­enue dans cet orchestre. Il me sem­ble donc qu’il faut plutôt con­sid­ér­er que c’est une com­po­si­tion mixte, notam­ment avec l’orchestre Típi­ca Vic­tor de Cara­bel­li dont Ciri­a­co Ortiz était égale­ment mem­bre. On notera la présence du jeune Aníbal Troi­lo. Sur la droite, le vio­loniste Ben­jamín Hol­ga­do Bar­rio qui est à l’origine de la pre­mière scis­sion de l’orchestre de D’Agostino. Il récla­mait 17 pesos, pour lui et les autres mem­bres de l’orchestre, au lieu des 15 pesos qui étaient octroyés pour les enreg­istrements, et D’Agostino a viré tout l’orchestre, Var­gas com­pris. Celui-ci est revenu un peu plus tard, mais la magie fut un peu brisée.
Je pro­pose pour cette pho­to, la date du 13 août 1931, car c’est celle qui per­met de réu­nir le plus de pro­tag­o­nistes. Mer­cedes Simone a enreg­istré ce jour Cir­co criol­lo avec la Tipi­ca Vic­tor (Cara­bel­li). Sur cette pho­to, il manque Cara­bel­li et, Lesende, qui n’a jamais enreg­istré avec la Vic­tor est plutôt un intrus. En effet, il enreg­is­trait à l’époque avec deux com­pag­nies con­cur­rentes de la Vic­tor, la Brunswick (avec la Orques­ta Típi­ca Brunswick) et avec la Colum­bia (avec l’orchestre de Anto­nio Bonave­na).
Hora­cio Golli­no est générale­ment indiqué comme ayant fait par­tie des pre­miers ban­donéon­istes de Los Provin­cianos. Il était né le 5 févri­er 1911, il aurait donc eu qua­si 20 ans, ce qui sem­ble cor­re­spon­dre à l’âge du troisième ban­donéon­iste de la pho­to.
José María Otero, qui est tou­jours très bien doc­u­men­té, indique que ce serait en fait Toto (Juan Miguel Rodríguez). Si on observe la pho­to suiv­ante, représen­tant l’orchestre de Troi­lo en 1941, il sem­blerait que l’on puisse valid­er l’hypothèse de Toto.

De gauche à droite, en bas : David Díaz, Toto (Juan Miguel Rodríguez), Ani­bal Troi­lo, Eduar­do Mari­no et Hugo Bar­alis. À l’arrière : Pedro Sapoc­hnik, Orlan­do Goñi, Fran­cis­co Fiorenti­no, Kicho Díaz et Astor Piaz­zol­la (qui fit le forc­ing auprès de Troi­lo pour rem­plac­er Toto qui était malade). Hugo Bar­alis a appuyé sa can­di­da­ture…

Cepen­dant, selon Toto Tan­go qui est égale­ment une source de haute qual­ité, Toto serait né en 1919. Il aurait donc eu 12 ans si ma data­tion de la pho­to est bonne, ce qui sem­ble tout de même un peu jeune et ne cor­re­spond pas à l’image. Si on regarde l’âge prob­a­ble des dif­férents musi­ciens de la pre­mière pho­to, la date de 1931 est fort plau­si­ble ; Troi­lo fait vrai­ment jeune (il est né en 1914 et aurait donc 17 ans), sur la sec­onde, il a 27 ans, il sem­ble dif­fi­cile de con­sid­ér­er qu’il y a beau­coup moins de 10 ans entre les pho­tos.
Je pro­pose donc d’identifier Hora­cio Golli­no sur cette pho­to, ce qui nous per­me­t­tra d’avoir enfin un vis­age à met­tre sur ce musi­cien de grande qual­ité, qui ter­mi­na sa vie en don­nant des cours de musique sans pou­voir pra­ti­quer le ban­donéon à cause de la paralysie d’un de ses bras.

Paroles

Que sueño aquel tan hon­do y cru­el
Me vi en la glo­ria de tu pecho amante
Y a al instante todo se acabo
Fue mi Sueño imag­i­na­do
Nada más que un sop­lo de plac­er
Que se fumó y una ilusión hecha can­ción que se apagó
Cieto Minoc­chio Letra: Fran­cis­co Bran­cat­ti

Traduction libre

Quel rêve si pro­fond et cru­el.
Je me suis vu dans la gloire de ta poitrine aimante et, instan­ta­né­ment, tout fut ter­miné.
C’é­tait mon rêve imag­iné,
rien de plus qu’un souf­fle de plaisir
qui par­tit en fumée et une illu­sion faite chan­son qui s’éteignait.

Autres versions…

Il n’y a pas d’autre ver­sion enreg­istrée de cette valse, même si le titre a inspiré de nom­breux auteurs de tous types de musique. Je vous pro­pose donc de ter­min­er en réé­coutant cette valse.

Sueño imag­i­na­do 1932-01-05 — Orques­ta Típi­ca Los Provin­cianos con Car­los Lafuente. Dir. Ciri­a­co Ortiz. C’est notre valse du jour.

À bien­tôt, les amis. Faîtes de beaux rêves qui se réalis­eront.

Remerciements

Je prof­ite de la mod­i­fi­ca­tion sur l’anecdote sur Poe­ma liée au cadeau par André Vagnon de deux ver­sions très rares pour faire quelques remer­ciements.
L’aventure des anec­dotes de tan­go ini­tiée il y a un peu plus de six mois a béné­fi­ciée de l’aide de dif­férents col­lègues, de sites et de livres.
La petite pause tech­nique, un peu imposée pour les raisons déjà évo­quées, me donne l’occasion de don­ner quelques remer­ciements.
Les col­lègues TDJ Cami­lo Gat­i­ca, Gab­bo Frese­do, André Vagnon (Bible Tan­go) et Michael Sat­tler qui m’ont passé des musiques que je n’avais pas et Fred Alard qui par sa lec­ture atten­tive m’a fait amélior­er cer­tains arti­cles. Mer­ci à Gérard Car­don­net, Ani­ta et Philippe Con­stant qui m’ont égale­ment fourni des infor­ma­tions fort intéres­santes et qui ont égale­ment écrit d’intéressants com­men­taires.
Je dois égale­ment citer mon infati­ga­ble cor­recteur, Thier­ry Leco­quierre qui traque mes coquilles avec une effi­cac­ité red­outable.
Un grand mer­ci pour mes partageurs, qui chaque jour ont partagé mes anec­dotes sur leurs pro­fils, Tan­guy Tan­go est sur la pre­mière marche du podi­um.
Mer­ci à ceux qui met­tent de gen­tils com­men­taires, comme Angela Cas­san (pre­mière marche du podi­um dans cette caté­gorie) Jean-Philippe Kbcoo, Domi Lau­re,
Mer­ci aux 600 vis­i­teurs quo­ti­di­ens du site, même si cet afflux me pose des prob­lèmes avec la société qui héberge le site web et qui me dit que je devrais pren­dre un héberge­ment web plus cher pour éviter les coupures. “Util­i­sa­tion de l’UC et des con­nex­ions simul­tanées excè­dent régulière­ment les ressources disponibles, veuillez con­sid­érez (sic) l’évolution vers une gamme supérieure de for­mule d’hébergement, qui inclu­rait alors plus de ressources.”…
Mer­ci à tous ceux qui met­tent des J’aime sur les pub­li­ca­tions et notam­ment leur partage dans Face­book.
Mer­ci à tous ceux qui lisent, écoutent et me font de temps à autre un petit signe.
Mer­ci aux mer­veilleux DJ de Buenos Aires et qui sont ma référence.
Mer­ci à ceux qui me suiv­ent comme DJ égale­ment, ces anec­dotes sont indis­so­cia­bles de cette activ­ité. Mieux con­naître le réper­toire, c’est pou­voir offrir la bonne musique au bon moment.
Mer­ci à ceux qui m’ont lais­sé de gen­tils com­men­taires dans mon livre d’or.

Bref, mer­ci à tous (moins un qui se recon­naî­tra, même si comme je l’ai fait à divers­es repris­es, je lui tends la main pour faire la paix, ce qu’il a à chaque fois refusé, préférant con­tin­uer la guerre qu’il a ini­tiée).

Merci à mes principaux sites de référence :

Tango-dj.at La meilleure référence pour avoir les dates d’enregistrement et les auteurs des tan­gos.
TodoTango.com Une référence incon­tourn­able pour ceux qui s’intéressent au tan­go.
La Bible Tan­goUne autre référence, notam­ment pour le tan­go européen.
Milon­gaophe­lia Qui pro­pose de nom­breux arti­cles de fond, une belle icono­gra­phie et qui est très utile pour le tan­go à Paris au début du vingtième siè­cle.
Tan­gos al bar­do Le site pas­sion­nant et incon­tourn­able de José María Otero
Michael Lav­oc­ah,Pour être sincère, je n’ai lu qu’un arti­cle de son site, mais il me sem­ble être une impor­tante ressource. Je viens de recevoir son livre His­toire de tan­go qui est plutôt bien fait. Je vous le recom­mande.

Pour les livres, cela serait un peu long

J’en ai cité quelques-uns dans mes anec­dotes, mais impos­si­ble de tous les citer.
Je vous donne juste quelques petites per­les en atten­dant :

Mis memo­rias (1906–1956) Mis bodas de oro con el tan­go (Fran­cis­co Canaro). Un des plus intéres­sants, car auto­bi­ographique.
Osval­do Pugliese, une vida en el tan­go (Oscar del Pri­ore). Un peu court, mais bien doc­u­men­té.
Osval­do Pugliese, Tes­ti­mo­nios de mi vida (Beba Pugliese). Par la fille de Pugliese.
Osval­do Pugliese al Colón (Arturo M. Loz­za). Mer­ci à Denis Tor­res qui m’a fait par­venir une ver­sion PDF, plus facile à trim­baler que la ver­sion papi­er que j’utilisais. Un très bon ouvrage.
El tan­go en la sociedad porte­na 1880–1920 (Lamas Bin­da), qui a écrit beau­coup et dont je recom­mande la plu­part des écrits. De plus, il est spé­cial­iste des tan­gos de la vieille garde).
La his­to­ria del tan­go en Paris (Enrique Cadicamo).
Así nacieron los tan­gos (Fran­cis­co Gar­cía Jiménez).
Cien tan­gos fun­da­men­tales (Oscar del Pri­ore y Irene Amuchástegui).
El ori­gen del tan­go (Rober­to Sell­es).
Les livres de Felipe Pigna sur l’histoire argen­tine (Pas directe­ment lié au tan­go, mais comme ces derniers s’inscrivent dans l’histoire du pays, il faut un peu de cul­ture his­torique).
Et les nom­breuses discogra­phies et cat­a­logues de maisons d’édition qui per­me­t­tent de lever bien des doutes.

Encore un grand mer­ci à tous !

Mer­ci à tous !

La capilla blanca 1944-07-11 — Orquesta Carlos Di Sarli con Alberto Podestá

Carlos Di Sarli Letra : Héctor Marcó (Héctor Domingo Marcolongo)

Une grande par­tie des titres com­posés par Car­los Di Sar­li ont des paroles de Héc­tor Mar­có, comme Corazón (le pre­mier titre de leur col­lab­o­ra­tion), Porteño y bailarín, Nido gau­cho, Juan Porteño, En un beso la vida, Rosamel, Bien frap­pé, et la mer­veille d’aujourd’hui, La capil­la blan­ca, tran­scendée par la voix de Alber­to Podestá.

Héc­tor Mar­có écrira les paroles de ce tan­go à la suite d’une expéri­ence per­son­nelle. Car­los Di Sar­li le met­tra soigneuse­ment en musique, avec le temps néces­saire pour don­ner sa mesure à un sujet qui par­lait à sa sen­si­bil­ité. Di Sar­li n’était pas un com­pos­i­teur de l’instant, il savait pren­dre son temps…

Comme vous le décou­vrirez à la lec­ture des paroles si vous ne les con­naissiez pas, ce tan­go pour­rait être l’objet d’un fait divers, comme en rela­tent les jour­nal­istes, jour­nal­istes auquel ce tan­go est dédié.

”Existe un gremio que siem­pre pidió para los demás, y nun­ca para sí mis­mo. …Ese gremio, es el de los peri­odis­tas. Muy jus­to entonces que yo lo recuerde con car­iño y dedique a todos los peri­odis­tas de la Argenti­na, este tan­go”. Car­los Di Sar­li.

Dédi­cace inscrite sur la cou­ver­ture de la par­ti­tion éditée par Julio Korn.

« Il existe un syn­di­cat qui a tou­jours demandé pour les autres, et jamais pour lui-même… Ce syn­di­cat c’est celui des jour­nal­istes. C’est donc très juste que je m’en sou­vi­enne avec affec­tion et que je dédie ce tan­go à tous les jour­nal­istes argentins. » Car­los Di Sar­li.

Si vous souhaitez en savoir plus sur ce titre, je vous con­seille cet arti­cle de l’excellent blog Tan­go al Bar­do.

Extrait musical

La capil­la blan­ca 1944-07-11 — Orques­ta Car­los Di Sar­li con Alber­to Podestá.

Les propo­si­tions légères des vio­lons sont ponc­tuées de lourds accords du piano de Di Sar­li. La tonal­ité passe du mode majeur au mode mineur à divers­es repris­es, sug­gérant des émo­tions mêlées. À 1:20 la chaleureuse voix de Podestá reprend le motif des vio­lons. Le pas­sage au sec­ond thème est sig­nalé par un point d’orgue appuyé. Il déroule ensuite le début des paroles jusqu’à l’ultime note.

La capil­la blan­ca. À gauche, édi­tion Korn sur laque­lle on peut lire la dédi­cace aux jour­nal­istes. Au cen­tre et à droite, édi­tion brésili­enne de la Par­ti­tion. Le chanteur est Vic­tor Manuel Caser­ta. Je n’ai mal­heureuse­ment pas trou­vé d’interprétation enreg­istrée par lui. On notera qu’il est né à Buenos Aires de par­ents d’origine brésili­enne. Il fut égale­ment poète, mais pas auteur de textes de tan­go, à ma con­nais­sance.

Paroles

En la capil­la blan­ca
de un pueblo provin­ciano,
muy jun­to a un arroyue­lo de cristal,
me hin­ca­ban a rezar
tus manos…
Tus manos que encendían
mi corazón de niño.
Y al pie de un San­to Cristo,
las aguas del car­iño
me dabas de (a) beber.

Feliz nos vio la luna
bajar por la mon­taña,
sigu­ien­do las estrel­las,
bebi­en­do entre tus cabras,
un ánfo­ra de amor…
Y hoy son aves oscuras
esas tími­das cam­panas
que doblan a lo lejos
el toque de oración.
Tu voz murió en el río,
y en la capil­la blan­ca,
quedó un lugar vacío
¡Vacío como el alma
de los dos…!

En la capil­la blan­ca
de un pueblo provin­ciano,
muy jun­to a un arroyue­lo de cristal,
pre­sien­to sol­lozar
tus labios…
Y cuan­do con sus duen­des
la noche se despier­ta
al pie de San­to Cristo,
habrá una rosa muer­ta,
¡que rue­ga por los dos!

Car­los Di Sar­li Letra: Héc­tor Mar­có

Alber­to Podestá et Mario Pomar chantent seule­ment ce qui est en gras.

Traduction libre

Dans la chapelle blanche d’un vil­lage provin­cial, tout près d’un ruis­seau de cristal, tes mains m’ont age­nouil­lé pour prier…
Tes mains qui ont illu­miné mon cœur d’enfant.
Et au pied d’un Saint Christ, tu m’as don­né à boire les eaux de l’affection.
La lune nous a vus descen­dre heureux de la mon­tagne, suiv­ant les étoiles, buvant par­mi tes chèvres, une amphore d’amour…
Et aujourd’hui, ce sont des oiseaux obscurs, ces cloches timides qui son­nent au loin l’appel à la prière.
Ta voix s’est éteinte dans la riv­ière, et dans la chapelle blanche, une place vide a été lais­sée.
Vide comme l’âme des deux… !
Dans la chapelle blanche d’un vil­lage provin­cial, tout près d’un ruis­seau de cristal, je sens tes lèvres san­glot­er…
Et quand avec ses duen­des (sorte de gnomes, lutins de la mytholo­gie argen­tine) la nuit se réveillera au pied du Saint Christ, il y aura une rose morte,
Priez pour nous deux !

Comme vous l’aurez noté, les paroles ont une con­no­ta­tion religieuse mar­quée. C’est assez courant dans le tan­go, l’Argentine n’ayant pas la sépa­ra­tion de l’église et de l’état comme cela peut se faire en France et la reli­gion, les reli­gions sont beau­coup plus présentes. Par ailleurs, Di Sar­li était religieux et donc ce type de traite­ment du sujet n’était pas pour lui déplaire.

Autres versions

La capil­la blan­ca 1944-07-11 — Orques­ta Car­los Di Sar­li con Alber­to Podestá.

C’est notre tan­go du jour et prob­a­ble­ment la ver­sion de référence pour ce titre. Podes­ta ne chante que les pre­miers cou­plets.

La capil­la blan­ca 1953-06-26 — Orques­ta Car­los Di Sar­li con Mario Pomar (Mario Cor­rales).

J’aime beau­coup Mario Pomar. Cette ver­sion est suff­isam­ment dif­férente de celle de 1944 pour avoir tout son intérêt. Son tem­po est plus lent, plus majestueux. Je peux pass­er indif­férem­ment, selon les cir­con­stances, l’une ou l’autre de ces ver­sions.

La capil­la blan­ca 1973 — Rober­to Rufi­no.

Com­ment dire. Rufi­no qui a fait de si belles choses avec Di Sar­li aurait peut-être pu se dis­penser de cet enreg­istrement. Même pour l’écoute, je ne le trou­ve pas sat­is­faisant, mais je peux me tromper.

La capil­la blan­ca 1973 — Alber­to Podestá accomp. Orques­ta de Leopol­do Fed­eri­co.

La capil­la blan­ca 1973 — Alber­to Podestá accomp. Orques­ta de Leopol­do Fed­eri­co. Podestá enreg­istre de nou­veau son grand suc­cès. Ici, avec l’orchestre suave et dis­cret de Leopol­do Fed­eri­co.

La capil­la blan­ca 1986 — Alber­to Podestá accomp. Orques­ta de Alber­to Di Paulo. Encore Podestá.
La capil­la blan­ca 2000c — Alber­to Podestá accomp. Orques­ta de Leopol­do Fed­eri­co.

Podestá accom­pa­g­né par Fed­eri­co nous pro­pose une autre ver­sion encore plus lente.

La capil­la blan­ca 2008 (pub­li­ca­tion 2009-09) – José Lib­ertel­la (Pepe) con Adal­ber­to Per­az­zo.

Pepe Lib­ertel­la, le leader du Sex­te­to May­or pro­pose cette ver­sion de notre tan­go du jour. Adal­ber­to Per­az­zo chante tous les cou­plets, y com­pris la triste fin.

La capil­la blan­ca 2011 — Orques­ta Típi­ca Gente de Tan­go con Héc­tor Mora­no.
La capil­la blan­ca 2020-07-10 — Pablo Mon­tanel­li.

Dans son inter­pré­ta­tion au piano, Pablo Mon­tanel­li fait ressor­tir le rythme de habanera à la main gauche.

L’illustration de couverture

Une chapelle blanche au bord d’une riv­ière, ça ne se trou­ve pas si facile­ment.
J’ai pen­sé délir­er à par­tir de la créa­tion de Le Cor­busier, Notre dame du haut à Ron­champ.

Notre Dame du Haut à Ron­champ, archi­tecte Le Cor­busier. Le cours d’eau au pre­mier plan est bien sûr une créa­tion de ma part…

Pre­mier jet que je n’ai pas con­tin­ué, la chapelle aus­si mag­nifique soit elle ne me paraît pas pou­voir con­venir et je ne voy­ais pas com­ment l’intégrer avec une riv­ière qui aurait détru­it la pureté de ses lignes.

J’ai pen­sé ensuite à dif­férentes petites églis­es vues du côté de Salta ou Jujuy, comme l’église San José de Cachi dont j’adore le graphisme épuré.

Une pho­to brute, avant toute inter­ven­tion de la Igle­sia San José de Cachi.

Cette église a égale­ment les trois cloches, comme sur la par­ti­tion éditée par Julio Korn. Cepen­dant, cela fait trop église et pas assez chapelle. Trois cloches pour une chapelle, c’est trop, même si cela a peut-être été validé par Di Sar­li et Mar­có comme on l’a vu sur la par­ti­tion éditée par Jules Korn.
Je pense que j’aurais pu en faire un truc intéres­sant, type art déco ou autre styl­i­sa­tion.
Une autre can­di­date aurait pu être la chapelle mys­térieuse de Rio Blan­co. Elle est assez proche du Rio Rosario. Je vous la laisse décou­vrir en suiv­ant ce lien…
J’ai finale­ment opté pour l’image que j’ai choisie. Un paysage roman­tique, situé quelque part dans les Andes. Pourquoi les Andes, je ne sais pas. Sans doute que c’est, car il y a mes paysages préférés d’Argentine. Et puis le texte par­le de mon­tagne, alors, autant en choisir de belles…
La mon­tagne a été con­sti­tuée à par­tir d’éléments pris dans les Andes, dont le mer­veilleux pic de El Chal­ten, la mon­tagne qui fume. La chapelle est en fait un ermitage dédié à la Vir­gen de Fáti­ma en Asturies (Espagne). Ce n’est pas couleur locale, mais c’est la même église que José María Otero a util­isée pour son texte sur ce tan­go. Pour don­ner un effet roman­tique, l’eau est en pose longue et j’ai joué d’effets dans Pho­to­shop, pour la lumière et l’aspect vaporeux. Je trou­ve que le résul­tat, avec sa riv­ière meur­trière et ce con­tre-jour dévoilant des ombres inquié­tantes, exprime bien ce que je ressens à la lec­ture du texte de Héc­tor Mar­có.

La capil­la blan­ca, dans ce mon­tage, vous recon­naîtrez El Chal­ten, la mon­tagne qui fume, cet impres­sion­nant pic de la Patag­o­nie. La chapelle est en fait l’ermitage de la Vir­gen de Fáti­ma en Asturies (Espagne).

À demain, les amis.

El once (A divertirse) 1953-05-20 – Orquesta Osvaldo Fresedo

Osvaldo Fresedo (Osvaldo Nicolás Fresedo) Letra : Emilio Fresedo (Emilio Augusto Oscar Fresedo)

Vous savez tous que « El once », en espag­nol, sig­ni­fie le 11. Mais peut-être ne con­nais­sez-vous pas la rai­son de ce nom. Ceux qui con­nais­sent Buenos Aires, pour­ront penser à la place Once de Sep­tiem­bre 1852 que l’on appelle sim­ple­ment Once. On lit par­fois que c’est le numéro 11 dans une course de chevaux, voire le 11 au foot­ball. Je pense que vous avez com­pris que j’allais vous pro­pos­er une autre expli­ca­tion…

El once

S’il existe des tan­gos sur le quarti­er de Once (Bar­rio Once), ses habi­tants (Muñe­ca del Once), le train de onze heures (El tren de las once), la messe de onze heures (Misa de once), une adresse (Callao 11), ou une équipe de foot­ball (El once glo­rioso) qui célèbre l’équipe d’Uruguay qui a gag­né la pre­mière coupe du Monde en 1930.

À gauche, les cap­i­taines d’Argentine et Uruguay se salu­ent avant la finale. À droite, après la vic­toire de l’Uruguay, les jour­naux argentins se déchaî­nent, accu­sant les Uruguayens d’avoir été bru­taux…

Car­los Enrique (musique) et Luis César Amadori (paroles), écrivent El once glo­rioso en l’honneur de l’équipe gag­nante. Les paroles sont dignes des chants des inchas (sup­port­ers) d’aujourd’hui :

Ra ! Ra ! Ra !
Le foot­ball uruguayen !
Ra ! Ra ! Ra !
Le Cham­pi­onnat du monde !

Une autre piste peut se trou­ver dans les cours­es. Leguisamo avait un cheval nom­mé Once, je vous invite à con­sul­ter l’excellent blog de José María Otero pour en savoir plus
Mais, ce n’est tou­jours pas la bonne expli­ca­tion.
Une pre­mière indi­ca­tion est le sous-titre « a diver­tirse » (pour s’amuser). Cela cor­re­spond peu aux dif­férents thèmes évo­qués ci-dessus. Cela incite à creuser dans une autre direc­tion.
Nous allons donc inter­roger la musique du jour, puis les paroles pour voir si nous pou­vons en savoir plus.

Extrait musical

El once (A diver­tirse) 1953-05-20 – Orques­ta Osval­do Frese­do.

On a l’impression d’une balade. Tout est tran­quille. Dif­fi­cile d’avoir une indi­ca­tion utile pour résoudre notre énigme. Heureuse­ment, si notre ver­sion est instru­men­tale, Emilio Frese­do, le frère de Osval­do a écrit des paroles.

Paroles

No deje que sus penas
se vayan al vien­to
porque serán aje­nas
al que oye lo cier­to.
No espere que una mano
le aflo­je el dolor,
sólo le dirán pobre
y después se acabó.
Por eso me divier­to,
no quiero sen­tir­las,
no quiero oír lamen­tos
que amar­guen la vida;
pre­fiero que se pier­dan
y llegue el olvi­do
que todo reme­dia,
que es lo mejor.

Si bus­ca con­sue­lo no vaya a llo­rar,
apren­da a ser fuerte y mate el pesar.
Son­ría lle­van­do a su boca el licor,
que baile su almi­ta esperan­do un amor.
El humo de un puro, la luz del lugar,
las notas que vagan le harán olvi­dar.
Quién sabe a su lado los que irán así
con los cora­zones para diver­tir.

A diver­tirse todos
rompi­en­do el silen­cio
para can­tar en coro
siquiera un momen­to.
Recuer­den que en la vida
si algo hay de val­or
es de aquel que lle­va
pasán­dola mejor.
Ale­gre su mira­da
no piense en lo malo,
no deje que su cara
se arrugue tem­pra­no.
Deje que todo cor­ra,
no apure sus años
que a nadie le impor­ta
lo que sin­tió.

Osval­do Frese­do (Osval­do Nicolás Frese­do) Letra : Emilio Frese­do (Emilio Augus­to Oscar Frese­do)

En gras le refrain que chantent Teó­fi­lo Ibáñez et Rober­to Ray.

Traduction libre

Ne laisse pas tes cha­grins s’envoler au vent, car ils seront étrangers à celui qui entend la vérité.
N’attends pas qu’une main soulage la douleur ; ils te diront seule­ment, le pau­vre, et puis c’est tout.
C’est pour cela que je m’amuse, je ne veux pas les sen­tir, je ne veux pas enten­dre des lamen­ta­tions qui aigris­sent la vie ; je préfère qu’ils se per­dent
et qu’arrive l’oubli qui remédie à tout, c’est le mieux.
Si tu cherch­es du récon­fort, ne pleures pas, apprends à être fort et tuer le cha­grin.
Sourire en por­tant la liqueur à ta bouche, laisse ton âme danser en atten­dant l’amour.
La fumée d’un joint (puro est sans doute mis pour por­ro, cig­a­rette de mar­i­jua­na, à moins que ce soit un cig­a­re), la lumière du lieu, les notes vagabon­des te fer­ont oubli­er.
Qui sait, à ton côté, ceux qui iront ain­si avec à cœur de s’amuser.
Amu­sons-nous tous, en rompant le silence pour chanter en chœur, ne serait-ce qu’un instant.
N’oublie pas que dans la vie, si quelque chose a de la valeur, c’est d’avoir passé le meilleur moment.
Rends joyeux ton regard, ne pense pas au mal, ne laisse pas ton vis­age se froiss­er pré­maturé­ment.
Laisse tout couler, ne pré­cip­ite pas tes années parce que per­son­ne ne se soucie de ce que tu ressens.

C’est donc une invi­ta­tion à oubli­er ses prob­lèmes en faisant la fête. C’est assez proche du Amusez-vous immor­tal­isé par Hen­ri Garat (1933) et Albert Pré­jean (1934)
Je vous le pro­poserai en fin d’article. Ça n’a rien à voir avec notre pro­pos, mais c’est eupho­risant 😉

Autres versions par Fresedo

Bien sûr, pour un titre aus­si célèbre, il y a for­cé­ment énor­mé­ment d’autres ver­sions.
Je vous pro­pose dans un pre­mier temps d’écouter les ver­sions de l’auteur, Frese­do. Ce dernier devait être fier de lui, car il a enreg­istré à de nom­breuses repris­es.

El once 1924 – Sex­te­to Osval­do Frese­do

Mer­ci à mes col­lègues Cami­lo Gat­i­ca et Gab­bo Frese­do (quand Gab­bo vient au sec­ours d’Osval­do et Emilio…) qui m’ont fourni cet enreg­istrement qui me man­quait).
Remar­quez les superbes solos de vio­lon notam­ment à 1:05,1:52, 2:24 et 2:56. Cette ver­sion est assez allè­gre. Notez bien ce point, il nous servi­ra à déter­min­er l’usage de ce titre et donc son nom.

El once (A diver­tirse) 1927 – Sex­te­to Osval­do Frese­do.

Je trou­ve intéres­sant de com­par­er cette ver­sion avec celle de 1924. Pour moi représente un recul. Le rythme est beau­coup plus lent, pesant. C’est un exem­ple du « retour à l’ordre » des années 20, dont Canaro est un des moteurs. Vous pour­rez le con­stater dans sa ver­sion de 1925 ci-dessous.

El once (A diver­tirse) 1931-11-14 – Orques­ta Osval­do Frese­do con Teó­fi­lo Ibáñez.

Osval­do a fini par enreg­istr­er les paroles de son frère, Emilio (Gardel l’avait fait en 1925). On reste dans le tem­po anémique de 1927. On a du mal à voir com­ment cette ver­sion, comme la précé­dente, d’ailleurs peut appel­er à se diver­tir… Il est vrai qu’il ne chante que le refrain qui n’est pas la par­tie la plus allè­gre du titre.

El once (A diver­tirse) 1935-04-05 – Orques­ta Osval­do Frese­do con Rober­to Ray.

Cette fois, Frese­do retrou­ve une ver­sion un peu plus dynamique qui peut mieux cor­re­spon­dre à l’idée du diver­tisse­ment. On pour­rait presque voir des per­son­nes gam­bad­er.
C’est un des pre­miers enreg­istrements où l’on remar­que la propen­sion de Frese­do à rajouter des bruits bizarres qui devien­dront sa mar­que de fab­rique dans ses dernières années, même si Sas­sone fait la même chose.

El once 1945-11-13 – Osval­do Frese­do.

Frese­do va encore plus loin que dans la ver­sion de 1935 dans l’ajout de bruits. C’est dans­able, mais pas totale­ment sat­is­faisant à mon goût.

El once (A diver­tirse) 1953-05-20 – Orques­ta Osval­do Frese­do.

C’est notre tan­go du jour. Comme déjà évo­qué, on pense à une prom­e­nade. Les bruits sont un peu plus fon­dus dans la musique. Mais on ne peut pas dire que c’est un tan­go de danse fab­uleux. Je trou­ve que ça manque un peu de fête. On retrou­ve quelques gross­es chutes qui ont fait la notoriété de Frese­do dans les années 1930. Frese­do se sou­vient peut-être un peu trop de ses orig­ines de la haute société pour une musique de danse qui se veut sou­vent plus pop­u­laire.

El Once (A diver­tirse) 1979-10-30 – Orques­ta Osval­do Frese­do.

En 1979, Frese­do enreg­istre pour la sep­tième fois son titre fétiche. On y retrou­ve presque tous ses élé­ments, comme les bruits bizarres, de jolis pas­sages de vio­lon, une élé­gance aris­to­cra­tique, man­quent seule­ment les gross­es chutes. Cela reste tran­quille, dans­able une après-midi chaude juste avant de pren­dre le thé, avec la pointe d’ennui « chic » qui con­vient.

Pourquoi « El once »

Il est impos­si­ble de devin­er la rai­son du titre à par­tir des ver­sions de Frese­do, sauf peut-être avec celle de 1924. Je vais donc vous don­ner l’explication.
Les internes en médecine de Buenos Aires ont décidé en 1914 de faire un bal des­tiné à se diver­tir. Musique, alcool, femmes com­préhen­sives, le cock­tail par­fait pour ces jeunes gens qui devaient beau­coup étudi­er et devaient donc avoir besoin de relâch­er la pres­sion.
Si on regarde les paroles sous ce jour, on com­prend mieux.
Reste à expli­quer pourquoi El once (le 11). L’explication est sim­ple. Le pre­mier événe­ment a eu lieu en 1914 et ensuite, chaque année, un autre a été mis en place. Celui de 1924 est donc le… onz­ième (je vois que vous êtes forts en cal­cul). Les frères Frese­do ont donc nom­mé ce tan­go, le 11 ; El once.
De 1914 à 1923 inclus, c’était Canaro qui offi­ci­ait à cette occa­sion. Les frères Frese­do fêtaient donc aus­si leur entrée dans cette man­i­fes­ta­tion dont la pre­mière a eu lieu au « Palais de glace » un lieu qu’un tan­go de ce nom des années 40 évoque avec des paroles et une musique d’Enrique Domin­go Cadí­camo.
Vous trou­verez quelques pré­ci­sions sur cette his­toire dans un arti­cle d’Isaac Otero.

Autres versions

El Once (A diver­tirse) 1925 – Orques­ta Fran­cis­co Canaro.

L’année précé­dente, Frese­do a gril­lé la place à Canaro qui ani­mait ce bal depuis 10 ans. Canaro enreg­istre tout ce qu’il peut, alors, mal­gré sans doute une petite décep­tion, il enreg­istre aus­si El once, lui qui a fait de uno a diez (1 à 10)

El once (A diver­tirse) 1925 – Car­los Gardel con acomp. de Guiller­mo Bar­bi­eri, José Ricar­do (gui­tares).

Le petit Français 😉 donne sa ver­sion avec toutes les paroles de Emilio, con­traire­ment à Ibáñez et Ray qui ne chan­taient que le refrain.

El once (A diver­tirse) 1943-01-13 – José Gar­cía y su Orques­ta Los Zor­ros Gris­es.

Et les Zor­ros sont arrivés ! C’est une ver­sion entraî­nante, avec plusieurs pas­sages orig­in­aux. Un petit flo­rilège des « trucs » qu’on peut faire pour jouer un tan­go. Le résul­tat n’a rien de monot­o­ne et est suff­isam­ment fes­tif pour con­va­in­cre des internes décidés à faire la fête. C’est sans doute une ver­sion qui mérit­erait de pass­er plus sou­vent en milon­ga, même si quelques ron­chons pour­raient trou­ver que ce n’est pas un tan­go con­ven­able. J’ai envie de leur dire d’écouter les con­seils de ce tan­go et de se diver­tir. Le tan­go est après tout une pen­sée allè­gre qui peut se danser.

El once (A diver­tirse) 1946-10-21 – Rober­to Fir­po y su Nue­vo Cuar­te­to.

Cette ver­sion par­ti­c­ulière­ment gaie est sans doute une de celles qui con­viendraient le mieux à une fête d’internes. On retrou­ve les sautille­ments chers à Fir­po. Elle trou­vera sans doute encore plus de ron­chons que la précé­dente, mais je réa­gi­rai de la même façon.

El once (A diver­tirse) 1946-12-05 – Orques­ta Car­los Di Sar­li.

Avec cette ver­sion, on retrou­ve la maîtrise de Di Sar­li qui nous pro­pose une ver­sion élé­gante, par­faite pour la danse. C’est sûr que là, il n’y aura pas de ron­chons. Alors, pourquoi s’en priv­er ?

El once (A diver­tirse) 1951-10-23 – Orques­ta Car­los Di Sar­li.

Je préfère la ver­sion de 1946, mais cette inter­pré­ta­tion est égale­ment par­faite pour la danse. Elle aura toute sa place dans une tan­da de cette époque.

El once (A diver­tirse) 1951 – Oswal­do Bercas et son orchestre.

De son vrai nom, Boris Saar­be­coof a tra­vail­lé en France et a pro­duit quelques titres intéres­sants. On a des enreg­istrements de sa part de 1938 à 1956. C’est un des 200 orchestres de l’âge d’or dont on ne par­le plus beau­coup aujourd’hui. Il a égale­ment pro­duit de la musique clas­sique.

El once (A diver­tirse) 1952-11-14 – orques­ta Alfre­do De Ange­lis.

C’est sans doute une des ver­sions que l’on entend le plus. Son entrain et sa fin tonique per­me­t­tent de bien ter­min­er une tan­da instru­men­tale de De Ange­lis.

El once (A diver­tirse) 1954-11-16 – Orques­ta Car­los Di Sar­li.

On retrou­ve Di Sar­li avec des vio­lons sub­limes, notam­ment à 1:42. Je préfère cette ver­sion à celle de 1951. Je la passerai donc assez volon­tiers, comme celle de 1946 qui est ma chou­choute.

El once (A diver­tirse) 1955-10-25 – Quin­te­to Pir­in­cho dir. Fran­cis­co Canaro.

Fran­cis­co Canaro qui n’est pas ran­cu­nier (???) enreg­istre de nou­veau le titre des Frese­do avec son quin­te­to Pir­in­cho. C’est une ver­sion bien ryth­mée avec de beaux pas­sages, comme le solo de ban­donéon à 1:02. Une ver­sion guillerette qui pour­ra servir dans une milon­ga un peu informelle où les danseurs ont envie de se diver­tir (celles où il n’y a pas de ron­chons).

El once (A diver­tirse) 1956-10-30 – Orques­ta Enrique Rodríguez.

Un Rodríguez tardif qui reste léger et qui sera appré­cié par les fans de cet orchestre.

El once (A diver­tirse) 1958 – Argenti­no Galván.

Je cite cette ver­sion ultra­courte, car je l’ai évo­quée dans His­to­ria de la orques­ta típi­ca — Face 1. Pas ques­tion de la plac­er dans une tan­da, bien sûr à cause de sa durée réduite à 33 sec­on­des…

El once (A diver­tirse) 1960c — Juan Cam­bareri y su Cuar­te­to de Ayer.

Juan Cam­bareri, le mage du ban­donéon (El Mago del Ban­doneón) four­nit la plu­part des temps des ver­sions vir­tu­os­es, sou­vent trop rapi­des pour être géniales à danser, mais dans le cas présent, je trou­ve le résul­tat très réus­si. On notera égale­ment que d’autres instru­men­tistes sont vir­tu­os­es dans son orchestre. C’est une ver­sion à faire péter de rage les ron­chons…
Un grand mer­ci à Michael Sat­tler qui m’a fourni une meilleure ver­sion que celle que j’avais (disque 33 tours en mau­vais état).

El once (A diver­tirse) 1965-07-28 – Orques­ta Enrique Mora.

Une ver­sion intéres­sante, mais qui ne boule­verse pas le paysage de tout ce que nous avons déjà évo­qué.

El once (A diver­tirse) 1966-08-03 – Orques­ta Juan D’Arienzo.

Finale­ment D’Arienzo se décide à enreg­istr­er ce titre qui man­quait à son réper­toire. J’adore le jeu de la con­tre­basse de Vic­to­rio Vir­gili­to.

Amusez-vous ! 1934 — W. Heymans — Sacha Guitry — Albert Willemetz

Ce titre fai­sait par­tie de l’opérette de Sacha Gui­t­ry, Flo­restan Ier prince de Mona­co.
Le titre a été créé par Hen­ri Garat.

Amusez-vous 1933 — Hen­ri Garat

L’année suiv­ante, Albert Pré­jean l’enregistre à son tour. C’est la ver­sion la plus con­nue.

Amusez-vous 1934 — Albert Pré­jean.

Et c’est sur cette musique entraî­nante que se ter­mine l’anecdote du jour. À mes amis ron­chons qui ont envie de dire que ce n’est pas du tan­go, je répondrai que c’est une corti­na et qu’il faut pren­dre la vie par le bon bout.

Les paroles de Amusez-vous

Amusez-vous, foutez-vous d’tout
La vie entre nous est si brève
Amusez-vous, comme des fous
La vie est si courte, après tout.
Car l’on n’est pas ici
Pour se faire du souci
On n’est pas ici-bas
Pour se faire du tra­cas.
Amusez-vous, foutez-vous d’tout
La vie passera comme un rêve
Faites les cent coups, dépensez tout
Prenez la vie par le bon bout.
Et zou

Amusez-vous, foutez-vous d’tout
La vie entre nous est si brève
Amusez-vous, comme des fous
La vie est si courte, après tout.
Car l’on n’est pas ici
Pour se faire du souci
On n’est pas ici-bas
Pour se faire du tra­cas.
Amusez-vous, foutez-vous d’tout
La vie passera comme un rêve
Faites les cent coups, dépensez tout
Prenez la vie par le bon bout.
Et zou

Pour que la vie soit tou­jours belle
Ha, que j’aimerais un quo­ti­di­en
Qui n’annoncerait qu’de bonnes nou­velles
Et vous dirait que tout va bien
Pour ne mon­tr­er qu’les avan­tages
Au lieu d’apprendre les décès
On apprendrait les héritages
C’est la même chose et c’est plus gai
Pour rem­plac­er les jour­naux tristes
Que ça serait con­so­la­teur
De lancer un jour­nal opti­miste
Qui dirait à tous ses lecteurs :

Amusez-vous, foutez-vous d’tout
La vie entre nous est si brève
Amusez-vous, comme des fous
La vie est si courte, après tout.
Car l’on n’est pas ici
Pour se faire du souci
On n’est pas ici-bas
Pour se faire du tra­cas.
Amusez-vous, foutez-vous d’tout
La vie passera comme un rêve
Faites les cent coups, dépensez tout
Prenez la vie par le bon bout.
Et zou

Amusez-vous, foutez-vous d’tout
La vie passera comme un rêve
Faites les cent coups, dépensez tout
Prenez la vie par le bon bout.
Et zou

W. Hey­mans — Sacha Gui­t­ry — Albert Willemetz
Amusez-vous, comme des fous.

El Ingeniero 1945-02-20 – Carlos di Sarli (Tango)

Orquesta Carlos Di Sarli

Ale­jan­dro Jun­nis­si (1930) Letra: Juan Manuel Guer­rera (2020)

Le tan­go du jour, El Inge­niero, est indu­bitable­ment asso­cié à Car­los Di Sar­li. C’est assez logique, car il est le seul à l’avoir enreg­istré à la belle époque du tan­go. Il a enreg­istré le titre à trois repris­es. En 1945, le 20 févri­er, le 22 juil­let 1952 et le 31 jan­vi­er 1955.
Le titre est assez clair et pour une fois, il ne s’agit pas d’un surnom, d’un mot d’argot (lun­far­do), mais bien de la fonc­tion, du méti­er d’ingénieur.
L’auteur de la musique, Ale­jan­dro Jun­nis­si, dédi­cace sa com­po­si­tion « a todos los inge­nieros egre­sa­dos de las uni­ver­si­dades argenti­nas » (À tous les ingénieurs diplômés des uni­ver­sités argen­tines). On retrou­ve dans cette dédi­cace, la fierté d’un âge d’or de l’Argentine, le début du vingtième siè­cle.
Cet âge d’or se dévoile dans l’architecture, mais aus­si par les créa­tions indus­trielles. À la fin des années 20, l’Argentine était con­sid­érée comme un impor­tant pays indus­triel.

L’ingénieur

Un des héros dis­crets de ce suc­cès est l’ingénieur que l’Argentine célèbre deux fois en juin, le 6 juin avec el Día del Inge­niero et indi­recte­ment le 16 juin avec el Día de la Inge­niería Argenti­na.
La pre­mière date est en sou­venir du pre­mier ingénieur civ­il d’Argentine, Luis Augus­to Huer­go, diplômé le 6 juin 1870.
Rien ne prou­ve que celui qui a inspiré Jun­nis­si soit Huer­go. Dis­ons que c’est le méti­er qui est illus­tré ici.

Un pays à bonne école

Les efforts con­sen­tis en matière d’éducation par l’Argentine qui devait accueil­lir et « argen­tinis­er » des mil­lions de migrants don­naient leurs fruits et bien­tôt l’Argentine dis­po­sait de nom­breuses uni­ver­sités, qui aujourd’hui encore restent pres­tigieuses.

Citons les Inge­nierías de Cór­do­ba y de La Pla­ta ou l’Escuela de Inge­nieros de Minas de San Juan.

Les pays étrangers, notam­ment européens, ont égale­ment investi en Argen­tine. Par exem­ple, lÉcole Cen­trale des Arts et Man­u­fac­tures de Paris qui a ouvert une école d’ingénieurs à Buenos Aires.

Ces nou­veaux ingénieurs ont per­mis le développe­ment du pays, des ponts, du chemin de fer, de l’architecture et la décou­verte de pét­role a accen­tué le développe­ment indus­triel du pays.

Les montagnes russes

L’essor indus­triel a été soutenu par une immi­gra­tion extrême­ment forte. La main‑d’œuvre était abon­dante et déjà con­cen­trée dans les villes, car les cam­pagnes apparte­naient à quelques pro­prié­taires ter­riens et n’offraient que peu de débouchés aux nou­veaux arrivants.
Cette con­cen­tra­tion explique aus­si les prob­lèmes poli­tiques récur­rents de l’Argentine, prob­lèmes don­nant lieu à des crises graves et des émeutes.
À peine écrit ce tan­go, en 1930 que, la même année, en sep­tem­bre, les mil­i­taires pre­naient le pou­voir en des­ti­tu­ant Hipól­i­to Yrigoyen. Ce prési­dent au dou­ble vis­age a assumé deux fois la prési­dence. Dou­ble vis­age, car il prône une Argen­tine aux mains des ouvri­ers, mais com­man­dite une répres­sion sanglante con­tre des grévistes, réal­isant par la même le pre­mier pogrom d’Amérique du Sud (Semaine trag­ique, du 7 au 14 jan­vi­er 1919).
Ceux qui suiv­ent l’actualité de l’Argentine con­stateront que les événe­ments actuels rap­pel­lent ceux des années passées, 2001, 1976, 1930, et autres.
Bon, j’ai un peu oublié mon ingénieur dans tout cela. Revenons donc à la musique.
Lorsqu’Alejandro Jun­nis­si écrit sa musique, l’Argentine est encore dans une péri­ode rel­a­tive­ment opti­miste, mal­gré les con­tre­coups de la crise de 1929.

L’ingénieur mérite son tan­go ; le voici.

Extrait musical

El Inge­niero 1945-02-20 — Car­los di Sar­li

La ver­sion est plus sèche, les vio­lons moins lyriques que dans les ver­sions des années 50. Même si Di Sar­li a con­tin­ué dans les années 50 à pro­pos­er du tan­go de danse, on sent dans cette évo­lu­tion la tran­si­tion que d’autres orchestres ont opéré de façon plus dras­tique.
Le Di Sar­li des années 50 est sou­vent le plus util­isé dans les milon­gas, car il tranche plus avec les autres orchestres de référence, les qua­tre piliers par son aspect plus roman­tique. Cela per­met de don­ner du con­traste à la milon­ga.
Vous pour­rez les enten­dre en fin d’ar­ti­cle.

Les paroles

Vous m’attendiez au tour­nant. Toutes les ver­sions enreg­istrées par de grands orchestres de tan­go sont instru­men­tales. Cepen­dant, il existe au moins une ver­sion des paroles que je repro­duis ici. Je n’imagine pas très bien le résul­tat, tant on est habitué à l’entendre avec les vio­lons de Di Sar­li.
D’une façon plus générale, de nom­breux tan­gos sont sans paroles, d’autres ont changé de paroles au cours du temps et cer­tains textes de tan­go n’ont pas encore trou­vé leurs musiques. Il reste du pain sur la planche pour les auteurs et com­pos­i­teurs…
Celui qui a écrit les paroles est Juan Manuel Guer­rera. Sa créa­tion est récente, 2020, soit 90 ans après la musique. Si vous enreg­istrez une ver­sion d’El Inge­niero avec les paroles, je vous promets de la plac­er ici et si elle est dans­able, je la dif­fuserai en milon­ga…

Y allá va el inge­niero
Por las calles del dolor
Cam­i­na solo
Llo­ran­do
Se va der­rum­ban­do
Es pura des­o­lación
Tan­to quiere
Olvi­dar
Que ha vivi­do sin quer­erlo para los demás
Que ha deja­do sus pasiones demasi­a­do atrás
Que ha olvi­da­do entre sus cuen­tas ani­marse a más
Tan­to quiere
Aban­donar
Un des­ti­no que sabe a nada
El que eligió
Y no cam­bió
Y allá va el inge­niero
Hun­di­do en la frus­tración
Su penar sue­na a nos­tal­gia
Con dejos de ban­doneón
Y allá va el inge­niero
Con su arte en un cajón
Aho­ra no jue­ga, no apues­ta
Sus miedos no enfrenta
Y gana su perdi­ción
“Soy un cobarde”
Se dice tarde
Y vuelve a reflex­ionar:
“No es bue­na elec­ción, la res­i­gnación
Renun­ciar a un sueño, es como morir
Sin res­olu­ción, no hay real­ización,
Sin un ide­al, tan triste es vivir”
Y encuen­tra en lo que siente
Respues­tas que su mente
Bus­ca­ba des­de siem­pre
Con cien­tí­fi­ca obsesión
Y allá va el inge­niero
Se le muere el corazón
Acom­pañan los vio­lines
Su dramáti­ca can­ción
Y allá va el inge­niero
Se desan­gra en su razón
Pierde su tiem­po, pen­san­do
En vez de arries­gan­do
Y entier­ra su vocación
Tan­to quiere
Regre­sar
A un pasa­do irre­me­di­a­ble que ha queda­do atrás
A un pre­sente esper­an­za­do que no volverá
A un futuro imag­i­na­do que ya no será
Tan­to quiere
Escapar
De su vida equiv­o­ca­da
La que él mis­mo eligió
Y, sin val­or, jamás cam­bió

Ale­jan­dro Jun­nis­si (1930) Letra: Juan Manuel Guer­rera (2020)

Autres enregistrements

Sig­nalons que le même jour, le 20 févri­er 1945, Di Sar­li enreg­istr­era avec Jorge Durán, Porteño y bailarín, un tan­go com­posé par Car­los Di Sar­li avec des paroles d’Héctor Mar­có. Ce titre enreg­istré sur la matrice 80553–1 sera pub­lié sur le même disque 60–0639, sur la face A et el Inge­niero, sur la face B. Ce dernier a été enreg­istré sur la matrice 80554–1.

Porteño y bailarín 1945-02-20 Car­los Di Sar­li con Jorge Durán (Car­los Di Sar­li Letra: Héc­tor Mar­có)

Les prin­ci­paux enreg­istrements d’El Inge­niero sont ceux de Di Sar­li. Il faut dire qu’il a mis la barre très haute et qu’il était dif­fi­cile de pro­pos­er des ver­sions sur­pas­sant les trois enreg­istrements du maître de Bahia Blan­ca.

El Inge­niero, 1945-02-20 — Car­los Di Sar­li
El Inge­niero 1952-07-22 — Car­los Di Sar­li
El Inge­niero 1955-01-31 — Car­los Di Sar­li

Pour ter­min­er, un enreg­istrement du 21e siè­cle. J’aime bien. Cepen­dant, il est peu prob­a­ble que je le pro­pose en milon­ga, car le manque de fran­chise dans la mar­ca­cion fait que les ver­sions orig­i­nales sont à mon avis préférables pour danser.

El Inge­nier­ro — Orques­ta Típi­ca de la Guardia Vie­ja 2002

Sources

José María Otero ; Ale­jan­dro Jun­nis­si ; Tan­gos al bar­do
https://tangosalbardo.blogspot.com/2016/08/alejandro-junnissi.html

Juan Manuel Guer­rera ; Letra para el tan­go ‘El inge­niero’
https://jmguerrera.medium.com/letra-para-el-tango-el-ingeniero-b8beb02152b8

Les autres sources con­sultées con­cer­nent surtout le développe­ment indus­triel de l’Argentine et son his­toire.

D’après les doc­u­ments de Chris­t­ian de Pescara ; Pio­nnier de l’aviation > Les Héli­cop­tères du mar­quis Pat­eras-Pescara (1890–1966) ; lat­i­tud-argenti­na
https://www.latitud-argentina.com/blog/pionnier-aviation-helicopteres-marquis-pateras-pescara

Bernar­do Kosacoff y Daniel Azpi­azu; La indus­tria argenti­na, desar­rol­lo y cam­bios estruc­turales
https://repositorio.cepal.org/server/api/core/bitstreams/fc7cb237-a9cd-4627–8634-b1e2d8d5502c/content#:~:text=La%20industrialización%20de%20la%20Argentina,industrial%20en%20ei%20escenario%20latinoamericano.

Peyrú Pablo y Ver­na Etcheber Rober­to;  La indus­tria y la Argenti­na; Mono­grafias
https://www.monografias.com/trabajos14/industarg/industarg

Juan Pablo Pekarek ; Engi­neers, between being archi­tects and entre­pre­neurs Con­struc­teurs from the École Cen­trale de Paris in Buenos Aires, 1890–1920
http://portal.amelica.org/ameli/journal/219/2193563002/

Sylvie Sure­da-Cagliani ; Chapitre II. Panora­ma de l’histoire de l’Argentine de 1930 à 1974 in Vic­times et bour­reaux dans le théâtre de Grisel­da Gam­baro ; Press­es uni­ver­si­taires de Per­pig­nan
http://books.openedition.org/pupvd/32217

Felipe Pigna ; Argen­tine — La Semaine trag­ique (7–14 jan­vi­er 1919) ; Alter­in­fos
https://www.alterinfos.org/spip.php?article6016

Décen­nie infâme ; Wikipedia
https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9cennie_inf%C3%A2me

Andrés H. Reg­giani, Hernán González Bol­lo ; Déna­tal­ité, «crise de la race» et poli­tiques démo­graphiques en Argen­tine (1920–1940) ; Vingtième Siè­cle. Revue d’histoire 2007/3 (n° 95), pages 29 à 44

El Ingien­ero