Archives par étiquette : José Pedro De Grandis

Adiós pueblo 1941-08-14 — Orquesta Ricardo Tanturi

Agustín Bardi Letra : José Pedro de Grandis

Pour un 14 août, jour anniver­saire, j’aurais pu choisir deux ver­sions de ce titre qui ont toutes les deux été enreg­istrées un 14 août. Celle de Julio de Caro et celle de Ricar­do Tan­turi.

Si j’ai mis en avant celle de Tan­turi, qui se prête plus à la danse, je vous présen­terai égale­ment celle de Ricar­do de Caro et une ver­sion chan­tée qui vous per­me­t­tra de com­pren­dre pourquoi ces retrou­vailles sont un adieu.

Extrait musical

Adiós pueblo… À gauche, par­ti­tion de 1941, à droite celle de 1928 avec De Caro. Au cen­tre, la par­ti­tion pour piano avec la dédi­cace à Ricar­do de Caro par Agustin Bar­di, « Pour mon estimé ami et col­lègue, Fran­cis­co de Caro ».
Adiós pueblo 1941-08-14 — Orques­ta Ricar­do Tan­turi

Paroles

Puebli­to que un día lejano
Al ausen­tarme, te di mi adiós,
Hoy ya de vuelta te bus­co en vano
Puebli­to mío, quién te cam­bió.
No exis­ten ya tus casitas
Llenas de flo­res, de luz y sol,
Tam­poco exis­ten tus vecini­tas
En cam­bio tienes, des­o­lación.

Pueblo en que viví
Mis años de juven­tud,
Hoy ven­go aquí
Para aliviar
Esta inqui­etud
Que nun­ca, nun­ca más
Podré bor­rar.
¡Oh!, Quién pudiera ser
Niño otra vez,
Para volver
Al tiem­po que pasó,
Eternizar por siem­pre
Su niñez,
Y no saber jamás
Lo que es dolor.

Aquel dulce hog­ar
Que una tarde aban­doné,
Cuán­to yo diera
Por hal­lar,
Para poder
En mi vejez cal­mar,
Lo que sufrí,
Y en su qui­etud
Poder­le con­fi­ar,
A un ser queri­do
Todo mi dolor, y ante mi pena
Tan sólo hal­lar
Un poco de su amor.

Puebli­to que un día fuiste
Como una madre a mi niñez,
Hoy que te anh­elo, ya nada existe
Cómo cas­ti­gas a mi vejez.
Puebli­to que un día lejano
Al ausen­tarme, te di mi adiós,
Y hoy ya de vuelta te bus­co en vano
Puebli­to mío, quién te cam­bió.

Agustín Bar­di Letra : José Pedro De Gran­dis

Traduction libre

Petit vil­lage à qui, un jour loin­tain j’ai fait mes adieux en par­tant.
Aujour­d’hui, je suis de retour et je te recherche, en vain, mon petit vil­lage. Qui t’a changé ?
Tes petites maisons pleines de fleurs, de lumière et de soleil n’ex­is­tent plus, tes petites voisines n’ex­is­tent plus non plus.
À la place, tu n’es que déso­la­tion.

Vil­lage dans lequel j’ai vécu ma jeunesse, aujour­d’hui, je viens ici pour apais­er ce malaise que je ne pour­rai plus jamais, jamais effac­er.
Oh, qui pour­rait rede­venir un enfant pour revenir au temps qui s’est écoulé, pour immor­talis­er à jamais son enfance et ne jamais savoir ce qu’est la douleur ?
Ce doux foy­er que j’ai quit­té un après-midi, com­bi­en don­nerais-je pour le retrou­ver, pour pou­voir calmer dans ma vieil­lesse ce que j’ai souf­fert ?
Et dans sa quié­tude, pou­voir lui con­fi­er, comme à un être cher, toute ma douleur, et face à mon cha­grin, seule­ment pou­voir trou­ver un peu de son amour.

Petit vil­lage qui, un jour, a été comme une mère pour mon enfance,
aujour­d’hui que je te désire, plus rien n’ex­iste comme tu punis ma vieil­lesse.
Petit vil­lage à qui, un jour loin­tain j’ai fait mes adieux en par­tant.
Et aujour­d’hui, je suis de retour et je te recherche, en vain, mon petit vil­lage. Qui t’a changé ?

Autres versions

Adiós pueblo 1928-08-14 — Orques­ta Julio De Caro. La ver­sion par le dédi­cataire de la com­po­si­tion de Bar­di.
Adiós pueblo 1928-09-21 — Alber­to Vila con gui­tar­ras. C’est la seule ver­sion enreg­istrée nous per­me­t­tant d’écouter les paroles de José Pedro De Gran­dis.
Adiós pueblo 1941-08-14 — Orques­ta Ricar­do Tan­turi. C’est notre tan­go du jour.

Quelques mots de Agustín Bardi

Comme on a pu le voir dans la dédi­cace de la par­ti­tion, Bar­di con­sid­érait De Caro comme son ami. Cet homme tran­quille était appré­cié par les musi­ciens de tan­go et quand il mou­rut d’une crise car­diaque à 56 ans, José Luis Padu­la écriv­it « Bar­di » que Fran­cis­co Canaro enreg­is­tra la même année avec son Quin­te­to Pir­in­cho. Osval­do Pugliese lui écrira « Adiós Bar­di » et Hora­cio Sal­gán com­posera « A Don Agustín Bar­di ».

Cet homme dis­cret n’était pas un oiseau de la nuit, tout au con­traire. C’était un dis­cret employé d’assurance qui, par son tra­vail, a gravi les éch­e­lons de Cadet à Directeur avant de pren­dre sa retraite à 51 ans. Il a cepen­dant com­posé de très nom­breux tan­gos que vous con­nais­sez prob­a­ble­ment comme :

C.T.V. (Se te ve) ; Cabecita negra ; Cacha­da ; Chuzas ; El abro­jo ; El baque­ano ; El buey solo ; El cua­trero (El tigre) ; El pal­adín ; El pial ; El rodeo ; El tau­ra ; En su ley ; Florci­ta ; Gal­lo ciego ; Gente menu­da ; Inde­pen­di­ente Club ; La guiña­da ; La racha ; La últi­ma cita ; Las doce menos cin­co ; Loren­zo ; Madre hay una sola ; No me escribas ; Noc­turno (Valse) ; Nun­ca tuvo novio ; Oiga com­padre ; Pico blan­co ; Qué noche ; Se han sen­ta­do las car­retas ; Se lo lle­varon ; Siem­pre los dos ; Sin hilo en el car­retel ; Tier­na­mente ; Tier­ri­ta ; Tin­ta verde ; Triste que­ja ; Tu ima­gen que vuelve (Valse) ; Un baile en la emba­ja­da ; Vicen­ti­to ; Viejo espe­jo ; Yo tam­bién fui pibe.

Adiós Agustín Bar­di et à bien­tôt, les amis !

Adiós 1926-12-31 (vals) — Orquesta Roberto Firpo

Pedro Láurenz (Pedro Blanco) Letra: José Pedro De Grandis

Adiós 2024. Cette année se ter­mine aujourd’hui et 2025 pointe son nez. C’est sans doute l’occasion de se faire des promess­es de meilleure année. Pour pass­er le cap, rien de mieux qu’une valse instru­men­tale qui chas­se tous les soucis et fait fleurir le bon­heur sur les lèvres et dans le cœur des danseurs. Cette valse, enreg­istrée le 31 décem­bre 1926 par Rober­to Fir­po, est une des pre­mières enreg­istrées avec les capac­ités de l’enregistrement élec­trique (qui fête son siè­cle d’existence) et on sent qu’elle com­mence à se libér­er des con­traintes de l’enregistrement acous­tique. Que 2025 soit la nou­velle généra­tion qui sur­passe l’ancienne sur la route du bon­heur.

Adiós 1926-12-31 — Orques­ta Rober­to Fir­po
Pedro Lau­rens avec son ban­donéon, la par­ti­tion de Adiós et José De Gran­dis.

Le rythme est soutenu et les danseurs pour­ront utilis­er leur réserve d’énergie pour aller jusqu’au bout de la valse. La monot­o­nie que pour­rait engen­dr­er la reprise des par­ties sans réelles vari­a­tions et en n’étant qu’instrumentale n’est pas vrai­ment présente, car on se laisse pren­dre par le mou­ve­ment et, lorsqu’arrive la fin, on aurait bien aimé que cela dure un peu plus.

Rober­to Fir­po

Cette ver­sion instru­men­tale, la seule enreg­istrée, mal­gré l’utilisation du mode mineur sur les 2/3 de sa durée, n’engendre pas la mélan­col­ie. On ne se ren­dra pas compte de la tristesse sous-jacente à l’histoire, tristesse dévoilée par les paroles du poète (vio­loniste et com­pos­i­teur), José Pedro De Gran­dis.
Ce thème con­vient assez bien à Fir­po, qui a sou­vent un curieux mélange de tristesse et d’énergie dans ses inter­pré­ta­tions.

Paroles

Las blan­cas flo­res que en ti he deposi­ta­do
Fueron un sím­bo­lo de fe que puse en ti,
Y me ale­jé tristón
Dudan­do si al volver
Sería dueño de tu corazón.
Mas esas flo­res de pena han mar­chi­ta­do
Al ver lo pron­to que te olvi­daste de mí,
Y al ver su pena yo
Tam­bién dolor sen­tí
Por ser tan cru­el esta desilusión.

Fue la plá­ci­da luna
Tes­ti­go de los besos,
Y dul­ces embe­le­sos
Que a tu lado gocé;
Mis labios fer­vorosos,
Tu nom­bre, han ben­de­ci­do
Tu nom­bre tan queri­do
Que no olvi­daré.
Olvi­das que fijaste
Tus ojos en mis ojos,
Dijiste con son­ro­jos:
“Me acor­daré de vos”;
No quise des­pedirme
Te dije: “has­ta luego”,
Y aho­ra cuan­do llego
Reci­bo tu adiós.

Si al recor­darme besas esas flo­res que te he dado
No te asom­bre si vuel­ven a revivir,
Porque en ellas mi corazón he deja­do
Que implo­rante, tus besos ha de pedir.

Pedro Láurenz (Pedro Blan­co) Letra: José Pedro De Gran­dis

Traduction libre des paroles

Les fleurs blanch­es que j’ai déposées en toi étaient un sym­bole de la foi que j’ai placée en toi,
Et je me suis éloigné, triste, doutant qu’à mon retour je sois le pro­prié­taire de ton cœur.
Mais, ces fleurs de cha­grin se sont fanées quand j’ai vu comme tu m’as vite oublié, et quand j’ai vu leur cha­grin, j’ai aus­si ressen­ti de la douleur parce que cette décep­tion était si cru­elle.
La lune placide a été témoin des bais­ers et des doux ravisse­ments dont j’ai joui à tes côtés ;
Mes lèvres fer­ventes ont tant béni ton prénom, ton prénom si cher que je ne l’ou­blierai pas.
Tu oublies que tu as fixé tes yeux dans mes yeux, tu as dit en rougis­sant :
« Je me sou­viendrai de toi » ;
Je ne voulais pas te dire au revoir, je t’ai dit : « à plus tard »,
Et main­tenant, quand j’ar­rive, je reçois ton adieu.
Si, lorsque tu te sou­viens de moi, tu embrass­es ces fleurs que je t’ai don­nées, ne t’étonne pas si elles revi­en­nent à la vie, car, en elles, mon cœur a déposé en implo­rant que tes bais­ers soient demandés.

À l’année prochaine, les amis !

Amurado 1940-07-29 — Orquesta Pedro Laurenz con Juan Carlos Casas

Pedro Maffia ; Pedro Laurenz Letra : José Pedro De Grandis

Encore un tan­go qui ne laisse pas les tangueros se repos­er, notam­ment dans cette ver­sion. Les deux Pedro, Lau­renz puis Maf­fia ont créé un mon­stre qui aspire toute l’énergie vitale des danseurs de la pre­mière à la dernière note. Le charme sem­ble aus­si avoir opéré égale­ment sur les directeurs d’orchestre, car de très nom­breuses ver­sions en ont été enreg­istrées. La ver­sion du jour est par l’un des deux com­pos­i­teurs, Lau­renz avec Juan Car­los Casas.

Un démarrage sur les chapeaux de roues

Le point de départ de ce tan­go a été don­né par De Gran­dis qui avait écrit un texte, sur la mis­ère de l’abandon. En 1925–1926, il était vio­loniste dans le sex­te­to du ban­donéon­iste Enrique Pol­let, celui qu’on retrou­vera par la suite dans l’orchestre de Pugliese et qui est à l’origine de la superbe vari­a­tion finale de Recuer­do.

Un jour que ce sex­te­to jouait dans son lieu habituel, Le Café El Par­que (près de Tri­bunales et assez près du théâtre Colón), Pedro Lau­renz qui était ami de Pol­let prit con­nais­sance du texte et sur l’instant sur son ban­donéon, imag­i­na un air pour la pre­mière par­tie, puis il alla le mon­tr­er à Pedro Maf­fia qui était alors au ciné­ma Select Lavalle, à prox­im­ité, dans l’orchestre de Julio De Caro. Maf­fia fut telle­ment ent­hou­si­as­mé qu’il deman­da à Lau­renz de pou­voir le ter­min­er.
Et ain­si, le tan­go inté­gra le réper­toire de Julio De Caro qui l’enregistrera deux ans plus tard, la même année que Gardel et beau­coup d’autres.
Après cette pre­mière vague, le tan­go fut moins enreg­istré, juste ressus­cité à divers­es repris­es par Lau­renz. La sec­onde vague n’arrivera que dans les années 50 avec une nou­velle folie autour du thème, folie qui dure jusqu’à nos jours où beau­coup d’orchestres ont ce tan­go à leur réper­toire.
Pedro Lau­renz l’a enreg­istré au moins cinq fois, vous pour­rez com­par­er les ver­sions dans la par­tie « autres ver­sions ».

Extrait musical

Amu­ra­do. Pedro Maf­fia ; Pedro Lau­renz Letra: José Pedro de Gran­dis La dédi­cace est au Doc­teur Pros­pero Deco, qui devien­dra le Directeur del Hos­pi­tal Gen­er­al de Agu­dos José María Pen­na de 1945 à 1955. À droite, son buste dans l’hôpital.
Amu­ra­do 1940-07-29 — Orques­ta Pedro Lau­renz con Juan Car­los Casas.

Tout com­mence par un puis­sant appel du ban­donéon qui résonne comme un cla­iron, puis la machine se met en marche. Le rythme est puis­sam­ment martelé, par les ban­donéons, la con­tre­basse, le piano, en con­tre­point, des plages de douceur sont don­nées par les vio­lons et en son temps par Juan Car­los Casas, mais à aucun moment le rythme et la ten­sion ne bais­sent, jusqu’à la fin presque abrupte. On notera aus­si un mag­nifique solo de ban­donéon, indis­pens­able pour un titre com­posé par deux ban­donéon­istes… L’intervention, courte de Casas, n’exprime pas toute la douleur du texte et les danseurs peu­vent pren­dre du plaisir sans remord. Cette incroy­able com­po­si­tion emporte les danseurs et hérisse les poils de bon­heur de bout en bout. Cette ver­sion est une mer­veille absolue qui fait regret­ter que Lau­renz et Casas n’ait pas plus enreg­istré.

Paroles

Cam­pa­neo a mi catr­era y la encuen­tro des­o­la­da.
Sólo ten­go de recuer­do el cuadri­to que está ahí,
pilchas vie­jas, unas flo­res y mi alma ator­men­ta­da…
Eso es todo lo que que­da des­de que se fue de aquí.

Una tarde más tris­tona que la pena que me aque­ja
arregló su bagay­i­to y amu­ra­do me dejó.
No le dije una pal­abra, ni un reproche, ni una que­ja…
La miré que se ale­ja­ba y pen­sé :
¡Todo acabó!

¡Si me viera ! ¡Estoy tan viejo!
¡Ten­go blan­ca la cabeza!
¿Será aca­so la tris­teza
de mi negra soledad ?
Debe ser, porque me cruzan
tan fuleros berretines
que voy por los cafetines
a bus­car feli­ci­dad.

Bulinci­to que cono­ces mis amar­gas desven­turas,
no te extrañe que hable solo. ¡Que es tan grande mi dolor !
Si me fal­tan sus cari­cias, sus con­sue­los, sus ter­nuras,
¿qué me quedará a mis años, si mi vida está en su amor?

¡Cuán­tas noches voy vagan­do angus­ti­a­do, silen­cioso
recor­dan­do mi pasa­do, con mi ami­ga la ilusión !…
Voy en cur­da… No lo niego que será muy ver­gonzoso,
¡pero lle­vo más en cur­da a mi pobre corazón!

Pedro Maf­fia ; Pedro Lau­renz Letra: José Pedro de Gran­dis

Juan Car­los Casas ne chante que ce qui est en gras.

Traduction libre et indications

Je con­tem­ple mon lit et le trou­ve désolé.
Je n’ai comme sou­venir que le petit tableau qui est ici, de vieilles cou­ver­tures, quelques fleurs et mon âme tour­men­tée…
C’est tout ce qui reste depuis qu’elle est par­tie d’i­ci.
Un après-midi plus triste que le cha­grin qui m’af­flige, elle a pré­paré son petit bagage et m’a lais­sé emmuré.
Je n’ai pas dit un mot, pas un reproche, pas une plainte…
Je l’ai regardée s’éloign­er et j’ai pen­sé :
Tout à une fin !
Si elle me voy­ait ! Je suis si vieux !
J’ai la tête blanche !
Est-ce peut-être la tristesse de ma noire soli­tude ?
Ça doit l’être, parce que j’ai des idées tant débiles que je vais dans les cafés pour chercher le bon­heur.
Petit logis, qui con­naît mes mésaven­tures amères, ne t’é­tonne pas que je par­le tout seul. Que ma douleur est grande !
Si me man­quent ses caress­es, ses con­so­la­tions, sa ten­dresse, que me restera-t-il dans mes années, si ma vie est dans son amour ?
Com­bi­en de nuits je vais vagabon­dant, angois­sé, silen­cieux, me sou­venant de mon passé, avec mon ami l’il­lu­sion…
Je vais me saouler… Je ne nie pas que ce soit hon­teux, mais je sup­porte mieux mon pau­vre cœur quand je suis bour­ré (saoul) !

Autres versions

J’ai mis en rouge les ver­sions par les auteurs (Maf­fia, 1 ver­sion et Lau­rens, 5 ver­sions).

Amu­ra­do 1927-02-11 — Orques­ta Rober­to Fir­po.

Une ver­sion calme, sans doute trop calme si on la com­pare à notre tan­go du jour…

Amu­ra­do 1927-04-08 — Orques­ta Fran­cis­co Lomu­to.

Une autre ver­sion tran­quille, exé­cutée avec con­science, mais sans doute pas de quoi sus­citer la folie.

Amu­ra­do 1927-06-08 — Igna­cio Corsi­ni con gui­tar­ras de Pagés-Pesoa-Maciel.

Une jolie inter­pré­ta­tion de Corsi­ni, à écouter, bien sûr.

Amu­ra­do 1927-07-20 — Pedro Maf­fia y Alfre­do De Fran­co (Duo de ban­do­neones).

Pedro Maf­fia l’auteur de la sec­onde par­tie nous pro­pose ici sa ver­sion en duo avec Alfre­do De Fran­co. Une ver­sion sim­ple, mais plus rapi­de que les autres de l’époque. Il nous manque cer­tains instru­ments aux­quels nous sommes désor­mais habitués pour totale­ment appréci­er cette ver­sion qui peut paraître un peu monot­o­ne et répéti­tive.

Amu­ra­do 1927-07-22 — Car­los Gardel con acomp. de Guiller­mo Bar­bi­eri, José Ricar­do (gui­tar­ras).

Avec seule­ment deux gui­tares, Gardel donne la réponse à Corsi­ni qui le mois précé­dent avait enreg­istré le titre avec trois gui­tares. C’est égale­ment joli et tout autant pour l’écoute et pas pour la danse.

Amu­ra­do 1927-08-16 — Orques­ta Fran­cis­co Canaro con Agustín Irus­ta.

Canaro enreg­istre à son tour, sur un rythme calme, qui est de toute façon une de ses car­ac­téris­tiques de l’époque. De jolis traits de vio­lon et ban­donéon allè­gent un peu le mar­quage puis­sant du rythme. La voix de Irus­ta, un peu nasale, apporte une petite vari­a­tion dans cette inter­pré­ta­tion qui ne sera sans doute pas à la hau­teur des danseurs d’aujourd’hui.

Amu­ra­do 1927-09-07 — Agustín Mag­a­l­di con gui­tar­ras.

Il ne man­quait que lui, après Corsi­ni et Gardel, voici Mag­a­l­di. Moi, j’aime bien. Bien sûr, ce n’est pas plus pour la danse que les ver­sions des deux con­cur­rents, mais ça se laisse écouter.

Amu­ra­do 1927-09-12 — Orques­ta Julio De Caro.

Je pense que dès les pre­mières mesures vous aurez remar­qué la dif­férence d’ambiance par rap­port à toutes les ver­sions précé­dentes. Le ruba­to mar­qué, par­fois exagéré et la vari­a­tion du solo de ban­donéon sont déjà très proches de ce que pro­posera Lau­renz 13 ans plus tard. On notera les sonorités étranges qui appa­rais­sent vers la fin du morceau, De Caro aime ajouter des instru­ments atyp­iques.

Amu­ra­do 1927-12-06 — Orques­ta Juan Maglio “Pacho” con José Galarza.

On revient sans doute un cran en arrière dans la moder­nité, mais la par­tie d’orchestre est assez sym­pa­thique. La voix de Galarza sera en revanche un peu plus dif­fi­cile à accepter par les danseurs d’aujourd’hui.

Amu­ra­do 1928 — Trío Argenti­no (Irus­ta, Fuga­zot, Demare) y su Orques­ta Típi­ca Argenti­na con Rober­to Fuga­zot.

Le piano de Demare démarre puis laisse la place à la voix de Fuga­zot qui gardera ensuite la vedette en masquant un peu le beau jeu de Demare au piano qui ne pour­ra que plac­er un mag­nifique accord final.

Amu­ra­do 1940-07-29 — Orques­ta Pedro Lau­renz con Juan Car­los Casas.

C’est notre tan­go du Jour. Si on note la fil­i­a­tion avec l’interprétation de De Caro, la ver­sion don­née par Lau­renz est éblouis­sante en tous points. Il a fait le ménage dans les propo­si­tions par­fois un peu con­fus­es de De Caro et le résul­tat est par­fait pour la danse.

Amu­ra­do 1944-11-24 — Orques­ta Osval­do Pugliese.

Tout en restant fidèle à l’écriture de Lau­renz, Pugliese pro­pose sa ver­sion avec une pointe de Yum­ba et son alter­nance de moments ten­dus et d’autres, relâchés, et des nuances très mar­quées. Le résul­tat est comme tou­jours superbe, mais beau­coup plus dif­fi­cile à danser pour les danseurs qui ne con­nais­sent pas cette ver­sion. En milon­ga, c’est donc à réserv­er à des danseurs expéri­men­tés ou motivés. L’accélération de la vari­a­tion en solo du ban­donéon qui nous mène au final est tout aus­si belle que celle de Lau­renz, les danseurs pour­ront s’y don­ner ren­dez-vous pour oubli­er les petits pièges des par­ties précé­dentes.

Amu­ra­do 1946 (trans­misión radi­al) — Orques­ta Pedro Lau­renz.

Six ans plus tard, Lau­renz pro­pose une ver­sion instru­men­tale. Il s’agit d’un enreg­istrement radio­phonique, d’une qual­ité impos­si­ble pour la danse, mais nous avons une ver­sion enreg­istrée l’année suiv­ante.

Amu­ra­do 1947-01-16 — Orques­ta Pedro Lau­renz.

Cette ver­sion est très proche et je ne la pro­poserai sans doute pas, car je suis sûr que le petit estri­bil­lo chan­té par Casas va man­quer aux danseurs.

Amu­ra­do 1952-09-25 — Orques­ta Pedro Lau­renz.

Après un peu de temps de réflex­ion, Lau­renz pro­pose une nou­velle ver­sion, très dif­férente. On sent qu’il a voulu dans la pre­mière par­tie tir­er par­ti des idées de Pugliese, mais la réal­i­sa­tion est un peu plus sèche, moins coulée et la sec­onde par­tie s’enfonce un peu dans la guimauve. Mon petit Pedro, désolé, mais on reste avec ta pre­mière ver­sion, même si on garde de cette ver­sion le final qui est tout aus­si beau que dans l’autre.

Amu­ra­do 1955-09-16 — Orques­ta José Bas­so.

Bas­so reprend l’appel ini­tial du ban­donéon, en l’accentuant encore plus que Lau­renz dans sa ver­sion de 1940. Un vio­lon vir­tu­ose nous trans­porte, puis le ban­donéon tout aus­si agile reprend le flam­beau. Par moment on retrou­ve l’esprit de la ver­sion de la ver­sion de Lau­renz en 1940, mais entre­coupée de pas­sages totale­ment dif­férents. Je ne sais pas ce qu’en penseraient les danseurs. D’un côté les rap­pels proches de Lau­renz peu­vent leur faire regret­ter l’original, mais les idées dif­férentes peu­vent aus­si éveiller leur curiosité et les intéress­er. Peut-être à ten­ter dans un lieu rem­pli de danseurs un peu curieux.

Amu­ra­do 1956 — Edmun­do Rivero con acomp. de Car­los Figari y su Orques­ta.

Une ver­sion à écouter, avec la puis­sance d’un grand orchestre.

Amu­ra­do 1956c — Trio Hugo Diaz.

Le trio d’Hugo Diaz, har­moni­ciste que l’on retrou­vera 12 ans plus tard avec une ver­sion encore plus intéres­sante.

Amu­ra­do 1959-01-08 — Orques­ta José Bas­so.

Encore Bas­so, qui s’essaye à l’amélioration de son inter­pré­ta­tion et je trou­ve que c’est une réus­site qui devrait intéress­er encore plus de danseurs que la ver­sion de 1955.

Amu­ra­do 1961-09-08 — Jorge Vidal con acomp. de gui­tar­ras, cel­lo y con­tra­ba­jo.

Amu­ra­do 1961-09-08 — Jorge Vidal con acomp. de gui­tar­ras, cel­lo y con­tra­ba­jo. Vidal avec ce con­jun­to de cordes nous pro­pose une ver­sion très orig­i­nale. Sa superbe voix est par­faite­ment mise en valeur par les cordes qui l’accompagnent. Dom­mage que ce ne soit pas pour la danse.

Amu­ra­do 1962-04-19 Orques­ta Leopol­do Fed­eri­co con Julio Sosa.

Dans la pre­mière époque du titre, on avait enten­du Corsi­ni, Gardel et Mag­a­l­di. Dans cette nou­velle péri­ode, après Rivero, voici Julio Sosa, El varón del tan­go. Une ver­sion qui fait se dress­er les poils de plaisir. Quelle ver­sion !

Amu­ra­do 1962-12-19 — Aníbal Troi­lo y Rober­to Grela en vivo.

Un enreg­istrement avec un pub­lic ent­hou­si­aste, qui masque par­fois la mer­veille du ban­donéon exprimé par Troi­lo, extra­or­di­naire.

Amu­ra­do 1968 Pedro Lau­renz con su Quin­te­to.

La dernière ver­sion enreg­istrée par Pedro Lau­renz, avec la gui­tare élec­trique en prime. Une ver­sion à écouter, mais pas inin­téres­sante.

Amu­ra­do 1972 — Hugo Díaz.

Le meilleur har­moni­ciste nous pro­pose une ver­sion plus aboutie.

Amu­ra­do 1975 — Sex­te­to May­or.
Amu­ra­do 1981 — Orques­ta Leopol­do Fed­eri­co.

Bien au-delà de la ver­sion avec Sosa, l’orchestre s’exprime mag­nifique­ment. On est bien sûr totale­ment hors du domaine de la danse, mais c’est une mer­veille.

Amu­ra­do 1990 Rober­to Goyeneche con arreg­los y direc­ción de Raúl Garel­lo.

Goyeneche man­quait à la liste des chanteurs ayant mis ce titre à son réper­toire. Cet enreg­istrement comble cette lacune.

Amu­ra­do 1995-08-23 — Sex­te­to Tan­go.

Une ver­sion par les anciens musi­ciens de Pugliese.

Voilà, avec une trentaine de ver­sions, vous avez encore une fois un échan­til­lon de la richesse du tan­go. En général, seules une ou deux ver­sions passent en milon­ga, mais quelque­fois les modes changent et des titres oubliés rede­vi­en­nent à la mode. Ain­si, le tan­go reste vivant et quand des orchestres con­tem­po­rains se char­gent de rénover la chose, c’est par­fois une sec­onde chance pour les titres.

Sur ces entre­faites, je vous dis, à demain, les amis.