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De puro guapo 1940-01-25 — Orquesta Pedro Laurenz con Juan Carlos Casas

Pedro Laurenz (Pedro Blanco) Letra: Manuel Andrés Meaños

Même si Pedro Lau­renz et Juan Car­los Casas ont enreg­istré dix tan­gos, la plu­part du temps, dans les milon­gas, seuls qua­tre de ces titres sont dif­fusés par les DJ. Ces titres le méri­tent, mais cela occulte les autres enreg­istrements qui peu­vent per­me­t­tre de faire des tan­das plus intéres­santes. En effet, les titres habituels sont telle­ment proches qu’on a l’impression de danser plusieurs fois le même titre.

Extrait musical

Par­ti­tion de Puro puapo, ver­sion Lau­renz et Meaños.
De puro guapo 1940-01-25 — Orques­ta Pedro Lau­renz con Juan Car­los Casas.

Deux accords au piano d’Héctor Grané, puis l’appel qui fait se sou­venir que Lau­renz était ban­donéon­iste (ici, accom­pa­g­né au ban­donéon par Ángel Domínguez et Rolan­do Gavi­o­li). Avec le com­plé­ment de la con­tre­basse de Alber­to Celen­za, le rythme très mar­qué des ban­donéons et du piano se con­tin­ue. Il faut atten­dre presque une minute pour que les vio­lons s’expriment de façon plus audi­ble et encore, pour quelques sec­on­des. À 1:25 un très beau motif du vio­loniste Mauri­cio Mise annonce l’intervention de Juan Car­los Casas qui débute à 1:45. La voix par­faite­ment déliée s’intègre dans le phrasé agres­sif des ban­donéons qui, lorsque Casas ter­mine le seul refrain, repren­nent jusqu’au final le rythme puis­sant.

Paroles

Entre cortes y que­bradas,
suave rezongué en tu oído
todo mi ver­bo flori­do
que te dijo mi quer­er.
Vos mostraste en tu son­risa
toda tu coquetería,
y yo, ven­ci­da mi hom­bría…
Yo que siem­pre supe vencer.

Pa’ con­seguir tu car­iño
quiero jugarme la vida
al naipe que me ha gus­ta­do…
No es la primera par­ti­da
en que mi resto he juga­do…
Y si al final copo y gano,
—tau­ra soy en la pos­tu­ra—
hay un facón, bra­va mano,
cora­je y bravu­ra
pa’ hac­erme valer.

Lo que yo quiero lo ten­go,
y eso por tau­ra y por guapo…
Bas­ta que en un bra­zo el trapo
ten­ga y en otro el facón…
Si no bas­tan mis haz­a­ñas
pon­go mi cora­je a prue­ba.
¡Nadie ven­ta­ja me lle­va
cuan­do está en juego tu amor!
Pedro Lau­renz (Pedro Blan­co) Letra: Manuel Andrés Meaños

Juan Car­los Casas ne chante que le refrain (en gras).

Traduction libre

Entre cortes y que­bradas (fig­ures de tan­go archaïques),
J’ai douce­ment grom­melé dans ton oreille
Tout mon verbe fleuri
Que t’a dit mon amour.
Tu as mon­tré avec ton sourire
Toute ta coquet­terie (séduc­tion)
et moi, ma viril­ité vain­cue…
Moi qui avais tou­jours su vain­cre.
Pour obtenir ton affec­tion
Je veux ris­quer ma vie
à la carte qui m’a plu…
Ce n’est pas la pre­mière par­tie
dans lequel j’ai joué mon repos…
Et si à la fin je bois et gagne,
—tau­ra (Caïd), je suis dans la pos­ture —
il y a un couteau, main vive (courageuse, prompte à tir­er le couteau),
Courage et bravoure
pour me faire val­oir.
Ce que je veux, je l’ai
Et cela par tau­ra et par beau (parce que je suis un caïd et beau)…
Il suf­fit que, dans un bras il y ait le chif­fon (étoffe pour pro­téger. Les gau­chos util­i­saient leur pon­cho enroulé sur le bras comme pro­tec­tion)
et dans l’autre, le couteau…
Si mes exploits ne suff­isent pas
Je mets mon courage à l’épreuve.
Per­son­ne n’a l’a­van­tage sur moi
Quand est en jeu ton amour !

Autres versions

De puro guapo 1935-07-24 — Orques­ta Fran­cis­co Canaro con Rober­to Mai­da.

On est telle­ment habitués à enten­dre la ver­sion de Lau­renz et Casas, que cette ver­sion pesante de Canaro sem­ble d’une antiq­ui­té insup­port­able. De fait, il sem­ble peu intéres­sant de sub­stituer cet enreg­istrement à notre tan­go du jour. Bien sûr, les ama­teurs de canyengue seront sans doute d’un avis con­traire et c’est bien. J’aime la diver­sité des opin­ions.

De puro guapo 1935-11-26 — Orques­ta Fran­cis­co Lomu­to con Jorge Omar.

Enreg­istré seule­ment qua­tre mois plus tard, la ver­sion de Lomu­to se dégage un peu plus de la gangue de la vieille garde que la ver­sion de Canaro. Quelques lib­ertés des instru­ments allè­gent égale­ment cet enreg­istrement. La sonorité est plus proche de celle que pro­duira trois ans plus tard Lau­renz.

De puro guapo 1940-01-25 — Orques­ta Pedro Lau­renz con Juan Car­los Casas. C’est notre tan­go du jour.

Les enreg­istrements suiv­ants seront instru­men­taux et chercheront à pro­pos­er de nou­velles direc­tions dans l’interprétation de l’œuvre. Je vous invite à juger de la diver­sité.

De puro guapo 1966 — Leopol­do Fed­eri­co y Rober­to Grela.

Grela que nous avons enten­du tant de fois en duo avec Troi­lo est ici avec Leopol­do Fed­eri­co. Le ban­donéon de ce dernier et la gui­tare de Grela nous livrent un titre très intéres­sant à écouter, foi­son­nant de créa­tiv­ité.

De puro guapo 1967-11-29 — Orques­ta Aníbal Troi­lo.

La ver­sion de Troi­lo est assez majestueuse. Elle n’est claire­ment pas des­tinée à la danse, même si je con­nais cer­tains qui me con­trediront.

De puro guapo 1968 — Pedro Lau­renz con su Quin­te­to.

Près de 30 ans plus tard, Lau­renz remet son titre en jeu. Cette ver­sion un peu sautil­lante ne me con­va­inc pas, mais pas du tout. On a l’impression que les musi­ciens s’endorment, mal­gré la présence de la gui­tare élec­trique…
Le quin­tette était for­mé de Pedro Lau­renz (ban­donéon), Eduar­do Wal­czak (vio­lon), Rubén Ruiz (gui­tare élec­trique), José Colán­ge­lo (piano) et Luis Pereyra qui a rem­placé le ban­donéon par la con­tre­basse.

De puro guapo 1969-09-18 — Orques­ta Juan D’Arien­zo.

On réveille tout le monde avec cette ver­sion de D’Arienzo. Si on recon­naît des élé­ments de D’Arienzo, cet enreg­istrement tardif manque sans doute de la puis­sance que peu­vent man­i­fester d’autres titres de la même époque. Les efforts de D’Arienzo pour pro­duire un son plus « mod­erne » déna­turent son style et là encore, je ne défendrai pas ce titre pour con­stituer une tan­da, même si cela reste dans­able.

De puro guapo 1972-11-10 — Orques­ta Osval­do Pugliese.

Après les recherch­es de Troi­lo, cette ver­sion mar­que une autre étape dans la recherche d’une har­monie par­ti­c­ulière. Autant les mêmes efforts chez D’Arienzo tombaient à plat, autant le résul­tat de Pugliese apporte un sus­pens musi­cal qui rend l’œuvre pas­sion­nante à écouter. Là encore, ce n’est pas un titre à danser, mais à écouter avec une atten­tion soutenue pour prof­iter de tous ces instants sub­tils.

De puro guapo 1996 — Quin­te­to Real.

Puisqu’on a décidé de s’éloigner, au fil du temps du tan­go de danse, cette ver­sion du Quin­te­to Real s’essaye à une syn­thèse entre les recherch­es de Pugliese et l’orchestration de Lau­renz. Le résul­tat, au regard des deux mod­èles opposés a du mal à con­va­in­cre, ou pour le moins à me con­va­in­cre.

De puro guapo 2002 — La Fur­ca.

La Fur­ca essaye de main­tenir la dragée haute. Il est curieux de voir que cette œuvre qui a sus­cité la mer­veilleuse ver­sion de Lau­renz Casas a eu peu de descen­dance à la hau­teur.
Je vous pro­pose de ter­min­er ce tour du tan­go « De Puro Guapo » avec une petite sur­prise.

Un Puro guapo peut en cacher un autre

Il arrive sou­vent qu’on demande au DJ un morceau spé­ci­fique. C’est générale­ment le cas pour les démon­stra­tions de danseurs, mais aus­si pour les danseurs usuels de la milon­ga. Sou­vent (lire, tout le temps), ils sont décom­posés quand je leur dis, mais quelle ver­sion ? Suit une petite écoute au casque, jusqu’à ce qu’ils trou­vent la ver­sion souhaitée.
À ce sujet, j’ai eu, en quelques occa­sions, des danseurs qui m’ont chan­té le titre qu’ils voulaient pour leur démo. Là encore, trou­ver le titre est générale­ment assez facile, mais quand il y a trente ver­sions, il faut faire preuve de per­spi­cac­ité.
Par­fois, la dif­fi­culté vient de ce qu’un orchestre a enreg­istré deux tan­gos du même titre, mais dif­férents. C’est par exem­ple le cas avec De puro guapo qui existe aus­si dans une ver­sion écrite par Rafael Iri­arte (Rafael Yorio) avec des paroles de Juan Car­los Fer­nán­dez Díaz.
Ce tan­go a été enreg­istré par plusieurs orchestres qui ont aus­si enreg­istré la ver­sion de Lau­renz, par exem­ple, Fran­cis­co Canaro. Mais on se ren­dra bien vite compte que ce n’est pas le même. Imag­inez le désar­roi du cou­ple de danseurs en démon­stra­tion si le DJ met le mau­vais tan­go. Le DJ doit savoir pos­er les bonnes ques­tions et faire écouter le titre aux danseurs , si pos­si­ble, et les danseurs devraient s’assurer de la ver­sion qu’ils souhait­ent utilis­er en don­nant l’orchestre, l’éventuel chanteur et la date d’enregistrement afin d’éviter tout risque et ambiguïté. Enfin, presque tous les risques, car nous avons vu qu’un orchestre comme celui de Canaro pou­vait enreg­istr­er le même jour avec le même chanteur, le même titre, un en ver­sion de danse et un en ver­sion d’écoute…

La cou­ver­ture de la ver­sion de Iri­arte et Meaños. Je vous passe les paroles du tan­go, comme on peut s’en douter en voy­ant cette illus­tra­tion, l’his­toire est trag­ique, plus que celle de Lau­renz à laque­lle elle peut tout de même répon­dre…
De puro guapo 1927-11-16 — Orques­ta Fran­cis­co Canaro.

On retrou­ve le canyengue cher à Canaro. Cette ver­sion instru­men­tale nous dis­pense de la noirceur des paroles. On remar­que que le titre n’a rien à voir avec celui écrit par Lau­renz.

De puro guapo 1928-01-14 — Car­los Gardel con acomp. de Guiller­mo Bar­bi­eri, José Ricar­do (gui­tar­ras).

Gardel avec ses gui­taristes nous présente cette chan­son trag­ique.

De puro guapo V2 1928-02-02 — Orques­ta Osval­do Frese­do con Ernesto Famá.

Deux semaines après Gardel, Frese­do enreg­istre le titre dans une ver­sion des­tinée à la danse. Tout au moins la danse de l’époque…

De puro guapo 1972-12-13 — Rober­to Goyeneche con Atilio Stam­pone y su Orques­ta Típi­ca.

Goyeneche nous donne une très belle inter­pré­ta­tion de ce titre. Bien sûr, une chan­son, bien jolie à écouter et chargée d’émotion.

Comme la ver­sion de Lau­renz, la ver­sion de Iri­arte a don­né lieu à des inter­pré­ta­tions très var­iées, mais elle n’aura sans doute pas les hon­neurs du bal, comme la ver­sion que Lau­renz a enreg­istrés avec Casas et qui nous rav­it à chaque fois.

Bon, lais­sons les puros gua­pos à leurs van­tardis­es et méfaits et je vous dis, à bien­tôt, les amis !

Fantasma 1939-12-28 — Orquesta Roberto Firpo con Alberto Diale

Mario Maurano Letra: José Roberto De Prisco

En Ital­ie, il y a une dizaine d’années, il y a eu un intérêt mar­qué pour notre tan­go du jour, Fan­tas­ma (fan­tôme) par Rober­to Fir­po. Comme vous allez l’entendre, cette œuvre mérite en effet l’écoute par son orig­i­nal­ité. Mais atten­tion, il y a fan­tôme et fan­tôme et un fan­tôme peut en cacher un autre.

Extrait musical

Fan­tas­ma 1939-12-28 — Orques­ta Rober­to Fir­po con Alber­to Diale.

Dès les pre­mières notes, mal­gré le mode mineur employé, on note l’énergie dans la musique.
On peut donc s’imaginer que l’on par­le d’un fan­tôme au sens de per­son­ne van­i­teuse et pré­somptueuse, d’un fan­faron.
Écoutez donc le début avec cette idée. La par­tie A est tonique, en stac­ca­to. J’imagine tout à fait un fan­faron gam­bad­er dans les rues de Buenos Aires. À 28″ com­mence la par­tie B qui dévoile régulière­ment un mode majeur, le fan­faron épanoui sem­ble se réjouir, prof­iter de sa suff­i­sance.
Lorsque la par­tie A revient, elle est jouée en lega­to mais tou­jours avec le rythme pres­sant et bien mar­qué qui pousse à danser de façon tonique. On notera la vir­tu­osité de Juan Cam­bareri, le mage du ban­donéon qui réalise un solo épous­tou­flant.

Les musi­ciens du cuar­te­to “Los de Antes” de Rober­to Fir­po. De gauche à droite, Juan Cam­bareri (ban­donéon), Fer­nan­do Por­cel­li (con­tre­basse), Rober­to Fir­po (piano) et José Fer­nán­dez (vio­lon).

Le ténor, Alber­to Diale, inter­vient à 1:25 pour une inter­ven­tion de moins de 30 sec­on­des, ce qui n’est pas gênant, car il me sem­ble qu’il n’apporte pas une plus-val­ue extra­or­di­naire à l’interprétation. Cepen­dant, comme il énonce les paroles écrites par José Rober­to De Prisco, on est bien obligé de com­pren­dre que l’on ne par­le plus d’un fan­faron, même si la dernière par­tie avec ses envolées ven­teuses peut faire penser à une bau­druche qui se dégon­fle.
Avec le sens des paroles, on peut imag­in­er que ce sont les fan­tômes que l’on chas­se avec son allé­gresse, allé­gresse exprimée par les pas­sages en mode majeur qui s’intercalent entre les pas­sages en mode mineur.
Je suis sûr que vous imag­inez les fan­tômes qui volè­tent dans tous les sens à l’écoute de la dernière par­tie. On se sou­vient que Fir­po a écrit plusieurs titres avec des sons réal­istes, comme El amanecer et ses oiseaux mer­veilleux, El rápi­do (le train rapi­de), Fue­gos arti­fi­ciales (feu d’artifice) ou La car­ca­ja­da (l’éclat de rire). Cette com­po­si­tion l’a donc cer­taine­ment intéressé pour la pos­si­bil­ité d’imiter les fan­tômes volants. N’oublions pas que les musi­ciens avant les années 30 inter­ve­naient beau­coup pour faire la musique dans les ciné­mas, les films étant muets, ils étaient vir­tu­os­es pour faire les bruitages.

Paroles de Fantasma de Mario Maurano et José Roberto De Prisco

Y si al verme, tú lo vieras,
Que te muerde la con­cien­cia,
No los temas.
Los fan­tas­mas de tu pena están en ti.

Yo soy vida, vida entera.
Que can­tan­do su ale­gría,
Va sigu­ien­do su camino,
De ven­turas. Que no dejan,
Que se acerquen los fan­tas­mas ter­ro­rosos de otro ayer.
Mario Mau­ra­no Letra: José Rober­to De Prisco

Traduction libre de Fantasma de Mario Maurano et José Roberto De Prisco

Et si, quand tu me vois, tu le voy­ais qui te mord la con­science, ne les crains pas, les fan­tômes de ton cha­grin sont en toi.
Je suis une vie, une vie entière.
Que chan­tant sa joie, il pour­suit son chemin d’aven­tures. Qu’ils ne lais­sent pas s’approcher les fan­tômes ter­ri­fi­ants d’un autre hier.

Mario Maurano et José Roberto De Prisco

Quelques mots sur les auteurs, qui sont peu, voire très peu con­nus.

Mario Maurano (1905 à Rio de Janeiro, Brésil ‑1974)

Mario Mau­ra­no était pianiste, arrangeur, directeur d’orchestre et com­pos­i­teur.

Il sem­ble abon­né aux fan­tômes, car il a écrit la musique du film Fan­tas­mas en Buenos Aires dirigé par Enrique San­tos Dis­cépo­lo et qui est sor­ti le 8 juil­let 1942. Peut-être qu’on lui a con­fié la com­po­si­tion de la musique du film à cause de notre tan­go du jour.
Cepen­dant, l’histoire n’a rien à voir avec le tan­go et la musique du film, non plus. La présence de Dis­cépo­lo, n’implique pas for­cé­ment que ce soit un film de tan­go… Vous pou­vez voir le film ici… https://youtu.be/xtFdlXh4Vpc

L’af­fiche du film Fan­tas­mas en Buenos Aires, dirigé par Enrique Dis­ce­po­lo et qui est sor­ti en 1942. Zul­li Moreno est l’héroïne et pré­ten­due fan­tôme. Pepa Arias, la vic­time d’une arnaque.

Par­mi ses com­po­si­tions, en plus de la musique de ce film, on peut citer :

  • • Can­ción de navi­dad (Chan­son) (Mario Mau­ra­no Letra: Luis César Amadori)
  • • Cua­tro cam­panadas (Mario Mau­ra­no Letra: Lito Bayardo — Manuel Juan Gar­cía Fer­rari)
  • • El embru­jo de tu vio­lín (Mario Mau­ra­no Letra: Arman­do Tagi­ni — Arman­do José María Tagi­ni)
  • • Fan­tas­ma (Mario Mau­ra­no Letra: José Rober­to De Prisco)
  • • Por la señal de la cruz (Mario Mau­ra­no; Pedro Vesci­na Letra:Antonio Pom­ponio)
  • • Rien­do (Alfre­do Maler­ba; Mario Mau­ra­no; Rodol­fo Sci­ammarel­la, musique et paroles)
  • • Un amor (Mario Mau­ra­no; Alfre­do Anto­nio Maler­ba Letra: Luis Rubis­tein)
  • • Una vez en la vida (Valse) (Ricar­do Maler­ba; Mario Mau­ra­no Letra: Home­ro Manzi (Home­ro Nicolás Manzione Prestera)

José Roberto De Prisco

Je n’ai pas grand-chose à dire de l’auteur des paroles, si ce n’est qu’il a écrit les paroles ou com­posé la musique de quelques titres en plus de Fan­tas­ma.

  • • Che, no hay dere­cho (Arturo César Senez Letra: José de Prisco) – Enreg­istré par Fir­po.
  • • Desamor (Alber­to Gam­bi­no y Jose De Prisco)
  • • Fan­tas­ma (Mario Mau­ra­no Letra: José Rober­to De Prisco)
  • • Negri­to (Milon­ga) (Alber­to Soifer Letra: José De Prisco)
  • • Vac­ilación (Anto­nio Moli­na, José Rober­to De Prisco Letra: Rafael Iri­arte)
Deux cou­ver­tures de par­ti­tion d’œu­vres de José De Prisco.

Autres versions

Notre tan­go du jour sem­ble orphe­lin en ce qui con­cerne les enreg­istrements, mais il y a un autre fan­tôme qui rôde, com­posé par Enrique Delfi­no (Enrique Pedro Delfi­no — Delfy) avec des paroles de Cátu­lo Castil­lo (Ovidio Cátu­lo González Castil­lo).

Fan­tas­ma 1939-12-28 — Orques­ta Rober­to Fir­po con Alber­to Diale. C’est notre tan­go du jour.

Intéres­sons-nous main­tenant au fan­tôme de Delfy et Cátu­lo Castil­lo.

Paroles de Fantasma de Cátulo Castillo

Regre­sa tu fan­tas­ma cada noche,
Tus ojos son los mis­mos y tu voz,
Tu voz que va rodan­do entre sus goznes
La vie­ja can­ti­nela del adiós.
Qué pál­i­da y qué triste resuci­ta
Vesti­da de recuer­dos, tu can­ción,
Se afer­ra a esta tris­teza con que gri­tas
Lla­man­do, en la dis­tan­cia, al corazón.

Fan­tas­ma… de mi vida ya vacía
Por la gris melan­colía…
Fan­tas­ma… de tu ausen­cia, sin reme­dio
En la copa de mis­te­rio…
Fan­tas­ma… de tu voz que es una som­bra
Regre­san­do sin cesar,
¡Cada noche, cada hora!
Tan­ta sed abrasado­ra…
A esta sed abrasado­ra… de olvi­dar.

Ya no tienes las pupi­las boni­tas
Se apa­garon como una oración,
Tus manos, tam­bién ya mar­chi­tas
No guardaron mi can­ción.
Som­bras que acom­pañan tu reproche
Me nublan, para siem­pre, el corazón…
Olvi­dos que se encien­den en la noche
Agotan en alco­hol, mi deses­peración.

Enrique Delfi­no (Enrique Pedro Delfi­no — Delfy) avec des paroles de Cátu­lo Castil­lo – (Ovidio Cátu­lo González Castil­lo)

Traduction libre de la version de Cátulo Castillo

Ton fan­tôme revient chaque nuit, tes yeux sont les mêmes et ta voix, ta voix qui roule entre ses gonds (Les goznes sont les charnières, gonds… mais aus­si des propo­si­tions énon­cées sans jus­ti­fi­ca­tion, ce qui sem­ble être l’acception à con­sid­ér­er ici), le vieux refrain d’au revoir.
Que de pâleur et tristesse ton chant ressus­cite, vêtu de sou­venirs, s’ac­crochant à cette tristesse avec laque­lle tu cries, appelant au loin, le cœur.
Fan­tôme… de ma vie déjà vide par une mélan­col­ie grise…
Fan­tôme… de ton absence, dés­espéré dans la coupe du mys­tère…
Fan­tôme… de ta voix, qui est une ombre qui revient sans cesse,
chaque soir, chaque heure !
Tant de soif brûlante…
À cette soif brûlante… d’oublier.
Déjà, tu n’as plus les pupilles jolies, elles se sont éteintes comme une prière.
Tes mains, égale­ment déjà desséchées, n’ont pas gardé ma chan­son.
Les ombres qui accom­pa­g­nent ton reproche embru­ment pour tou­jours le cœur…
Les oub­lis qui s’al­lu­ment dans la nuit s’épuisent dans l’al­cool, mon dés­espoir.

Ce thème de Delfy et Cátu­lo Castil­lo a été enreg­istré plusieurs fois et notam­ment dans les ver­sions suiv­antes.

Fan­tas­ma 1944-10-24 — Orques­ta Miguel Caló con Raúl Iri­arte.

L’interprétation sem­ble en phase avec les paroles. Si c’est cohérent d’un point de vue styl­is­tique, le résul­tat me sem­ble moins adap­té au bal que notre tan­go du jour.

Fan­tas­ma 1944-12-28 — Orques­ta Osval­do Frese­do con Oscar Ser­pa.

Oscar Ser­pa n’est pas un chanteur pour la danse et il le con­firme dans cet enreg­istrement.

Fan­tas­ma 2013 — Orques­ta Típi­ca Sans Souci con Wal­ter Chi­no Labor­de.

L’orchestre Sans Souci s’est don­né comme mis­sion de per­pétuer le style de Miguel Calo. Ce n’est donc pas un hasard si vous trou­vez un air de famille entre les deux enreg­istrements.

Arthur le fan­tôme par Cezard

Comme il faut 1951-09-26 — Orquesta Carlos Di Sarli

Eduardo Arolas Letra: Gabriel Clausi

« Comme il faut » , le titre de ce tan­go est en français et il sig­ni­fie que l’on fait les choses bien, comme il faut qu’elles soient réal­isées. Nous allons toute­fois voir, que sous ce titre « anodin » se cache une tricherie, quelque chose qui n’est peut-être pas fait, « comme il faut ».

Je parle français comme il faut

Je pense que vous ne serez pas sur­pris de décou­vrir un titre en français, il y a en a plusieurs et les mots français sont couram­ment util­isés par les Argentins et fort fréquents dans le tan­go.

Deux raisons expliquent cette abon­dance.

La pre­mière, c’est le pres­tige de la France de l’époque.

La haute société argen­tine par­lait couram­ment le français qui était la langue « chic » de l’époque. À ce sujet, il y a une quin­zaine d’années, une amie me fai­sait vis­iter son club nau­tique. C’est le genre d’endroit dont on devient mem­bre par coop­ta­tion ou héritage famil­ial. J’ai été sur­pris d’y enten­dre par­ler français, sans accent, par une bonne par­tie et peut-être même la majorité des per­son­nes que l’on croi­sait. Je m’en suis ouvert et mon amie m’a infor­mé que les per­son­nes de cette société avaient cou­tume de par­ler entre eux en français, cette langue étant tou­jours celle de l’élite.

La sec­onde, vous la con­nais­sez.

Les orchestres de tan­go se sont don­né ren­dez-vous en France au début du vingtième siè­cle. Il était donc naturel que s’expriment des nos­tal­gies, des références pour mon­tr­er que l’on avait fait le voy­age ou tout sim­ple­ment que s’affichent les expres­sions à la mode.

Je peux vous con­seiller un petit ouvrage sur la ques­tion, EL FRANCÉS EN EL TANGO: Recopi­lación de tér­mi­nos del idioma francés y de la cul­tura france­sa uti­liza­dos en las letras de tan­go. Il a été écrit par Víc­tor A. Benítez Boned qui cite et explicite 78 mots de français qui se retrou­vent dans le tan­go et 41 noms pro­pres désig­nant des Français ou des lieux de France. On peut con­sid­ér­er qu’environ 200 tan­gos font directe­ment référence à la France, aux Français (sou­vent aux Français­es) ou à la langue française. Víc­tor A. Benítez Boned en cite 177.

Lien vers le livre au for­mat Kin­dle.

Extrait musical

Comme il faut 1951-09-26 — Orques­ta Car­los Di Sar­li.
Comme il faut de Eduar­do Aro­las avec la dédi­cace “A mis esti­ma­dos y dis­tin­gui­dos ami­gos Fran­cis­co Wright Vic­tor­i­ca, Vladis­lao A. Frías, Juan Car­los Parpaglione y Manuel Miran­da Naón”.

Les dédi­cataires sont des étu­di­ants en droit qui ont prob­a­ble­ment cassé leur tire-lire pour être dédi­cataires :
Fran­cis­co Wright Vic­tor­i­ca, étu­di­ant de la Fac­ulté de droit et de sci­ences sociales de Buenos Aires en 1917
Vladis­lao A. Frías ; étu­di­ant de la Fac­ulté de droit et de sci­ences sociales de Buenos Aires en 1917, puis juge au civ­il et mem­bre de la cour d’appel au tri­bunal de com­merce de Buenos Aires.
Juan Car­los Parpaglione, étu­di­ant de la Fac­ulté de droit et de sci­ences sociales de Buenos Aires en 1917.
Manuel Miran­da Naón, étu­di­ant de la Fac­ulté de droit et de sci­ences sociales de Buenos Aires. En 1918, il a par­ticipé au mou­ve­ment de réforme de cette uni­ver­sité.

Paroles

Luna, farol y can­ción,
dulce emo­ción del ayer
fue en París,
donde viví tu amor.
Tan­go, Cham­pagne, corazón,
noche de amor
que no está,
en mi sueño vivirá…

Es como debe ser, con ilusión viví
las ale­grías y las tris­tezas;
en esa noche fue que yo sen­tí por vos
una esper­an­za en mi corazón.
Es como debe ser en la pasión de ley,
tus ojos negros y tu belleza.
Siem­pre serás mi amor en bel­lo amanecer
para mi vida, dulce ilusión.

En este tan­go
te cuen­to mi tris­teza,
dolor y llan­to
que dejo en esta pieza.
Quiero que oigas mi can­ción
hecha de luna y de farol
y que tu amor, mujer,
vuel­va hacia mí.

Eduar­do Aro­las Letra: Gabriel Clausi

Traduction libre et indications

Lune, réver­bère et chan­son, douce émo­tion d’hi­er c’était à Paris, où j’ai vécu ton amour.
Tan­go, Cham­pagne, cœur, nuit d’amour qui n’est pas là, dans mon rêve vivra…
C’est comme il faut (comme il se doit), avec ent­hou­si­asme j’ai vécu les joies et les peines ; C’est ce soir-là que j’ai sen­ti de l’e­spoir pour toi dans mon cœur.
C’est comme doit être la véri­ta­ble pas­sion (les Argentins dis­ent de ley, de la loi, par exem­ple un porteño de ley pour dire un véri­ta­ble portègne), de tes yeux noirs et de ta beauté.
Tu seras tou­jours mon amour dans la belle aurore pour ma vie, douce illu­sion (doux sen­ti­ment).
Dans ce tan­go, je te con­te ma tristesse, douleur et larmes que je laisse dans ce morceau.
Je veux que tu enten­des ma chan­son faite de lune et de réver­bère et que ton amour, femme, revi­enne jusqu’à moi.

Elle est où la tricherie promise ?

Comme je vois que vous sem­blez intéressés, voici la tricherie. Le tan­go « Comme il faut » a un frère jumeau « Com­parsa criol­la » signé Rafael Iri­arte.

Cou­ver­ture et par­ti­tion de Com­parsa Criol­la de Rafael Iri­arte. La men­tion du con­cours de 1930 est en haut de la cou­ver­ture.

La gémel­lité n’est pas une tricherie me direz-vous, mais alors com­ment nom­mer deux tan­gos iden­tiques attribués à des auteurs dif­férents ?
On dirait aujourd’hui un pla­giat.
Nous avons déjà ren­con­tré plusieurs tan­gos dont les attri­bu­tions étaient floues, que ce soit pour la musique ou les paroles. Fir­po n’a‑t-il pas cher­ché à met­tre sous son nom La cumpar­si­ta, alors pourquoi pas une com­parsa ?
Mais revenons à notre paire de tan­gos et intéres­sons-nous aux auteurs.
Eduar­do Aro­las (1892–1924), un génie, mort très jeune (32 ans). Non seule­ment il jouait du ban­donéon de façon remar­quable, ce qui lui a valu son surnom de « Tigre du ban­donéon », mais en plus, il a com­posé de très nom­breux titres. C’est assez remar­quable si on tient compte de sa très courte car­rière. Il s’est dit cepen­dant qu’il s’inspirait de l’air du temps, util­isant ce que d’autres musi­ciens pou­vaient inter­préter à une époque où beau­coup n’écrivaient pas la musique.
Il me sem­ble que c’est plus com­plexe et qu’il est plutôt dif­fi­cile de dénouer les fils des inter­ac­tions entre les musi­ciens à cette époque où il y avait peu de par­ti­tions, peu d’enregistrements et donc surtout une con­nais­sance par l’écoute, ce qui favorise l’appropriation d’airs que l’on peut de toute bonne foi croire orig­in­aux.
Pour revenir à notre tan­go du jour et faire les choses Comme il faut, voyons qui est le sec­ond auteur, celui de Com­parsa criol­la, Rafael Iri­arte. (1890–1961).
Lui aus­si a fait le voy­age à Paris et Nés­tor Pin­són évoque une col­lab­o­ra­tion dans la com­po­si­tion qui aurait eu lieu en 1915.
Si on s’intéresse aux enreg­istrements, les plus anciens sem­blent dater de 1917 et sont de Aro­las lui-même et de la Orques­ta Típi­ca Pacho. Les deux dis­ques men­tion­nent seule­ment Aro­las comme seul com­pos­i­teur.

Eduar­do Aro­las et un disque par la Tipi­ca Pacho qui serait égale­ment de 1917 selon Enrique Bin­da, spé­cial­iste de la vieille garde).

Peut-être que le fait que Aro­las avait accès au disque à cette époque et pas Iri­arte a été un élé­ment. Peut-être aus­si que la part d’Aro­las était suff­isam­ment prépondérante pour jus­ti­fi­er qu’il soit le seul men­tion­né.
Je n’ai pas trou­vé de témoignage indi­quant une brouille entre les deux hommes, si ce n’est une hypothèse de Nés­tor Pin­són. Faut-il voir dans le fait que Iri­arte signe de son seul nom la ver­sion qu’il dépose en 1930 et qui obtien­dra un prix, au sep­tième con­cours organ­isé par la mai­son de disque « Nacional ».
Ce qui est curieux est que Fran­cis­co Canaro, qui était ami de Aro­las ait enreg­istré sa ver­sion avec la men­tion de Iri­arte et pas celle de son ami décédé six ans plus tôt. Faut-il voir dans cela une recon­nais­sance de Canaro pour la part de Iri­arte ?
Pour vous per­me­t­tre d’entendre les simil­i­tudes, je vous pro­pose d’écouter le début de deux ver­sions. Celui de 1951 de Comme il faut, notre tan­go du jour par Di Sar­li et celui de Com­parsa criol­la de Tan­turi de 1941. J’ai mod­i­fié la vitesse de la ver­sion de Tan­turi pour que les tem­pos soient com­pa­ra­bles.

Débuts de : Comme il faut de Eduar­do Aro­las par Car­los Di Sar­li (1951) et Com­parsa criol­la de Rafael Iri­arte par Ricar­do Tan­turi (1941).

Autres versions

Comme il s’agit du « même » tan­go, je vais plac­er par ordre chronologique plusieurs ver­sions de Comme il faut et de Com­parsa criol­la.

Comme il faut 1917 — Eduar­do Aro­las
Les musi­ciens de l’orchestre de Aro­las en 1916. Aro­las est en bas, au cen­tre. Juan Mari­ni, pianiste, à gauche, puis Rafael Tue­gols et Atilio Lom­bar­do (vio­lonistes) et Alber­to Pare­des (vio­lon­celiste). Ce sont eux qui ont enreg­istré la ver­sion de 1917 de Aro­las.
Comme il faut 1917 — Orques­ta Típi­ca Pacho
Com­parsa criol­la 1930-11-18 — Fran­cis­co Canaro
Comme il faut 1936-10-27 — Juan D’Arien­zo
Comme il faut 1938-03-07 — Ani­bal Troi­lo
Com­parsa criol­la 1941-06-16 — Ricar­do Tan­turi
Comme il faut 1947-01-14 — Car­los Di Sar­li
Com­parsa criol­la 1950-12-12 — Orchestre Quintin Ver­du
Comme il faut 1951-09-26 — Orques­ta Car­los Di Sar­li.
Comme il faut 1955-07-15 — Car­los Di Sar­li
Comme il faut 1966-09-30 — Hec­tor Varela
Comme il faut 1980 — Alfre­do De Ange­lis
Comme il faut 1982 — Leopol­do Fed­eri­co

Mon cher Cor­recteur, Thier­ry, m’a fait remar­quer que je n’avais pas pro­posé de ver­sions chan­tées. N’en ayant pas sous la main, j’ai fait un appel à des col­lègues qui m’ont pro­posé deux ver­sions, Nel­ly Omar avec Bar­tolomé Paler­mo de 1997 et Scia­marel­la Tan­go con Denise Sci­ammarel­la de 2018 :

Comme il faut 1997 — Nel­ly Omar con Bar­tolomé Paler­mo y sus gui­tar­ras. Mer­ci à Howard Jones qui m’a sig­nalé cette ver­sion.
Comme il faut 2013 — Gente de tan­go
Comme il faut 2018 – Scia­marel­la Tan­go con Denise Sci­ammarel­la. Mer­ci à Yük­sel Şişe qui m’a indiqué cette ver­sion.
Comme il faut 2020-08 — El Cachivache

Je vous pro­pose d’arrêter là les exem­ples, il y en aurait bien sûr quelques autres et je vous dis, à bien­tôt les amis !

Tus besos fueron míos 1927-02-17 (Tango) — Orquesta Típica Victor (Direction Adolfo Carabelli)

Anselmo Alfredo Aieta Letra : Francisco García Jiménez

Tus besos fueron míos

Le tan­go du jour a 97 ans. Son titre est explicite, Tus besos fueron míos (Tes bais­ers furent miens) et son sujet, tou­jours d’actualité.
Même s’il s’agit ici d’une ver­sion instru­men­tale, on imag­ine qu’il s’agit de la chan­son de la perte d’un amour. Les paroles que l’on con­naît dans la plu­part des autres ver­sions le con­fir­ment.
J’ai choisi ce tan­go pour pou­voir par­ler de son édi­teur, la firme RCA Vic­tor. En effet, l’orchestre Típi­ca Vic­tor ne jouait pas en pub­lic, seule­ment en stu­dio, c’est l’o­rig­i­nal­ité de cer­tains de ces orchestres de maisons d’édi­tion.

Victor ou Victors ?

La par­tic­u­lar­ité de ces orchestres de maisons d’édition de dis­ques était qu’ils n’étaient pas asso­ciés à un Directeur d’orchestre. Les musi­ciens pou­vaient rester les mêmes et le chef chang­er, con­traire­ment aux orchestres dirigés par des chefs ayant don­né leur nom à l’orchestre. Le pre­mier chef d’orchestre à avoir été con­trac­té par la Vic­tor a été un jeune pianiste, Adol­fo Cara­bel­li, qui a eu par la suite son pro­pre orchestre. Ce tan­go date de cette péri­ode.

Les musi­ciens de la orques­ta Típi­ca Vic­tor vers 1927 De gauche à droite : Con­tre­basse : Hum­ber­to Costan­zo — Vio­lons : Euge­nio Romano, Age­si­lao Fer­raz­zano et Man­lio Fran­cia — Ban­donéons : Luis Petru­cel­li, Ciri­a­co Ortiz et Nicolás Prim­i­ani — Piano : Vicente Gor­rese. Adol­fo Cara­bel­li (le chef d’orchestre et le vio­loniste Elvi­no Var­daro qui tra­vail­lait aus­si à l’époque pour la RCA Vic­tor, ne sont pas sur la pho­to.

Qui dit pas Victor a parfois tort

Sou­vent, des danseurs me deman­dent la Típi­ca Vic­tor. Soucieux de leur faire plaisir, je leur demande quel orchestre, quelle péri­ode, quel titre et je n’obtiens jamais de réponse.
Cer­tains DJ, sous le pré­texte qu’il y a écrit Vic­tor passent n’importe quels titres sans tenir compte des styles assez dif­férents selon les orchestres et les directeurs qui se sont suc­cédé.

Les différents orchestres Victor

  • Orques­ta Vic­tor Pop­u­lar
  • Orques­ta Típi­ca Los Provin­cianos (Ciri­a­co Ortiz)
  • Orques­ta Radio Vic­tor Argenti­na (Mario Mau­ra­no)
  • Orques­ta Argenti­na Vic­tor
  • Orques­ta Vic­tor Inter­na­cional
  • Cuar­te­to Vic­tor [Cayetano Puglisi et Anto­nio Rossi (vio­lons), Ciri­a­co Ortiz et Fran­cis­co Pracáni­co (ban­donéons)]
  • Trío Vic­tor [Elvi­no Var­daro (vio­lon), Oscar Alemán et Gastón Buen (gui­tares)]

En revanche, il est sou­vent pos­si­ble de mélanger un titre de la Vic­tor avec un titre enreg­istré par le même chef avec son pro­pre orchestre.
On remar­quera, en effet, qu’avec les mêmes musi­ciens, les chefs ont mis leur empreinte. C’est d’ailleurs un phénomène bien con­nu pour les orchestres de musique clas­sique.

Le nom ne fait pas la tanda

Beau­coup de DJ débu­tants l’apprennent à leur dépens (ou à celui de leurs danseurs), le nom d’un orchestre ne suf­fit pas pour fab­ri­quer une belle tan­da. Dans le cas des orchestres Vic­tor, c’est assez clair, mais si on prend l’exemple de Canaro, de ces dif­férents orchestres (tan­go et jazz), de ses dif­férentes for­ma­tions, quin­tettes, Típi­cas et de sa très longue péri­ode d’enregistrement, on se retrou­ve face au même prob­lème.
Recon­nais­sons toute­fois que c’est un peu moins gênant main­tenant, car ces DJ s’appuient désor­mais sur des playlists qui cir­cu­lent et que donc, le tra­vail de tri a déjà été fait. C’était par­ti­c­ulière­ment sen­si­ble au début des années 2000. Voir à ce sujet, cet arti­cle.

Écoute

Tus besos fueron míos 1927-02–17Orques­ta Típi­ca Vic­tor (Direc­tion Adol­fo Cara­bel­li)

L’archive sonore présen­tée ici, l’est à titre d’ex­em­ple didac­tique. La qual­ité sonore est réduite à cause de la plate­forme de dif­fu­sion qui n’ac­cepte pas les fichiers que j’u­tilise en milon­ga et qui sont env­i­ron 50 fois plus gros et de bien meilleure qual­ité. Je pense toute­fois que cet extrait vous per­me­t­tra de décou­vrir le titre en atten­dant que vous le trou­viez dans une qual­ité audio­phile.

Les paroles

Tus besos fueron míos.
Dique Vic­tor 79334‑A

Hoy pasas a mi lado con fría indifer­en­cia
Tus ojos ni siquiera detienes sobre mí
Y sin embar­go, vives uni­da a mi exis­ten­cia
Y tuyas son las horas mejores que viví
Fui dueño de tu encan­to, tus besos fueron míos
Soñé y can­té mis penas jun­to a tu corazón
Tus manos en mis locos y ardi­entes desvaríos
Pasaron por mi frente como una ben­di­ción

Y yo he per­di­do por tor­pe incon­stan­cia
La dulce dicha que tú me tra­jiste
Y no respiro la suave fra­gan­cia
De tus pal­abras, ¡y estoy tan triste!
Nada del mun­do mi due­lo con­suela
Estoy a solas con mi ingrat­i­tud
Se fue con­ti­go, de mi nov­ela
La últi­ma risa de la juven­tud

Después te irás bor­ran­do, per­di­da en los refle­jos
Con­fu­sos que el olvi­do pon­drá a mi alrede­dor
Tu ima­gen se hará pál­i­da, tu amor estará lejos
Y yo erraré por todas las playas del dolor
Pero hoy que tu recuer­do con encen­di­dos bríos
Ocu­pa entera­mente mi pobre corazón
Mur­muro amarga­mente: “tus besos fueron míos
Tus besos de con­sue­lo, tus besos de pasión”

Y yo he per­di­do por tor­pe incon­stan­cia
La dulce dicha que tú me tra­jiste
Y no respiro la suave fra­gan­cia
De tus pal­abras, ¡y estoy tan triste!
Nada del mun­do mi due­lo con­suela
Estoy a solas con mi ingrat­i­tud
Se fue con­ti­go, de mi nov­ela
La últi­ma risa de la juven­tud

Ansel­mo Alfre­do Aieta Letra : Fran­cis­co Gar­cía Jiménez

Autres enregistrements

Ce titre a été enreg­istré à plusieurs repris­es, dans un bal­ance­ment entre ver­sions instru­men­tales, ver­sions chan­tées et ver­sions chan­sons (seule­ment pour l’écoute et pas pour la danse).

  • 1926, Car­los Gardel accom­pa­g­né par les gui­tares de Guiller­mo Bar­bi­eri et José Ricar­do enreg­is­trait ce titre avec les paroles.
  • 1926, Enreg­istrement par Canaro
  • 1927-02-17, la ver­sion que je vous pro­pose aujourd’hui et qui a donc 97 ans, est celle enreg­istrée le 17 févri­er 1927 par l’orchestre Típi­ca Vic­tor. Il a été édité sur disque 78 tours sous la référence Vic­tor 79334 A. Sa matrice por­tait le numéro 1102–2. C’était le deux­ième enreg­istrement de la journée et il est devenu la face A du disque.
    Le même jour, la Típi­ca Vic­tor enreg­is­tra Tra­go amar­go de Rafael Iri­arte Letra : Julio Plá­ci­do Navar­rine (matrice 1101–1).
    À cette époque, les maisons d’édition regravent les titres avec les nou­veaux procédés d’enregistrement élec­trique. Cela provoque une activ­ité intense, comme en témoignent d’autres enreg­istrements du du même jour, comme l’enregistrement de la com­par­si­ta par Canaro, chez Odéon.
  • 1927-02-21, Rosi­ta Quiroga pro­pose une ver­sion chan­tée, accom­pa­g­née par des gui­taristes.
  • 1927-05-30, Canaro l’enregistre de nou­veau, tou­jours en ver­sion instru­men­tale.
  • 1930-12-13, encore Canaro, mais en accom­pa­g­nant de sa chère Ada Fal­con. Voir cet arti­cle pour des infos sur leur « cou­ple ».
  • 1946-11-29, Ricar­do Tan­turi sort le titre de l’oubli avec le chanteur Rober­to Videla. Mal­gré le mode mineur (tristesse), la par­tie instru­men­tale est assez allè­gre. En revanche, Videla met beau­coup (trop ?) d’émotion. On peut aimer et ça reste comme Tan­turi en général, dans­able.
  • 1952-08-14, Alfre­do Attadía et le chanteur Enzo Valenti­no en donne une ver­sion chan­tée. C’est claire­ment une chan­son qui n’était pas des­tinée à la danse. Atta­dia, n’a pas con­trôlé le chanteur comme l’avait fait Tan­turi.
  • 1952-11-14, Alfre­do de Ange­lis et Car­los Dante en don­nent une ver­sion chan­tée bien équili­brée et qui per­met une danse de qual­ité. Elle rejoint donc la ver­sion de Tan­turi dans la dis­cothèque du DJ de tan­go.
Pero hoy que tu recuer­do con encen­di­dos bríos
Ocu­pa entera­mente mi pobre corazón
Mur­muro amarga­mente: “tus besos fueron míos
Tus besos de con­sue­lo, tus besos de pasión”