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Comme il faut 1951-09-26 – Orquesta Carlos Di Sarli

Eduardo Arolas Letra: Gabriel Clausi

« Comme il faut » , le titre de ce tango est en français et il signifie que l’on fait les choses bien, comme il faut qu’elles soient réalisées. Nous allons toutefois voir, que sous ce titre « anodin » se cache une tricherie, quelque chose qui n’est peut-être pas fait, « comme il faut ».

Je parle français comme il faut

Je pense que vous ne serez pas surpris de découvrir un titre en français, il y a en a plusieurs et les mots français sont couramment utilisés par les Argentins et fort fréquents dans le tango.

Deux raisons expliquent cette abondance.

La première, c’est le prestige de la France de l’époque.

La haute société argentine parlait couramment le français qui était la langue « chic » de l’époque. À ce sujet, il y a une quinzaine d’années, une amie me faisait visiter son club nautique. C’est le genre d’endroit dont on devient membre par cooptation ou héritage familial. J’ai été surpris d’y entendre parler français, sans accent, par une bonne partie et peut-être même la majorité des personnes que l’on croisait. Je m’en suis ouvert et mon amie m’a informé que les personnes de cette société avaient coutume de parler entre eux en français, cette langue étant toujours celle de l’élite.

La seconde, vous la connaissez.

Les orchestres de tango se sont donné rendez-vous en France au début du vingtième siècle. Il était donc naturel que s’expriment des nostalgies, des références pour montrer que l’on avait fait le voyage ou tout simplement que s’affichent les expressions à la mode.

Je peux vous conseiller un petit ouvrage sur la question, EL FRANCÉS EN EL TANGO: Recopilación de términos del idioma francés y de la cultura francesa utilizados en las letras de tango. Il a été écrit par Víctor A. Benítez Boned qui cite et explicite 78 mots de français qui se retrouvent dans le tango et 41 noms propres désignant des Français ou des lieux de France. On peut considérer qu’environ 200 tangos font directement référence à la France, aux Français (souvent aux Françaises) ou à la langue française. Víctor A. Benítez Boned en cite 177.

Lien vers le livre au format Kindle.

Extrait musical

Comme il faut 1951-09-26 – Orquesta .
Comme il faut de Eduardo Arolas avec la dédicace “A mis estimados y distinguidos amigos Francisco Wright Victorica, Vladislao A. Frías, Juan Carlos Parpaglione y Manuel Miranda Naón”.

Les dédicataires sont des étudiants en droit qui ont probablement cassé leur tire-lire pour être dédicataires :
Francisco Wright Victorica, étudiant de la Faculté de droit et de sciences sociales de Buenos Aires en 1917
Vladislao A. Frías ; étudiant de la Faculté de droit et de sciences sociales de Buenos Aires en 1917, puis juge au civil et membre de la cour d’appel au tribunal de commerce de Buenos Aires.
Juan Carlos Parpaglione, étudiant de la Faculté de droit et de sciences sociales de Buenos Aires en 1917.
Manuel Miranda Naón, étudiant de la Faculté de droit et de sciences sociales de Buenos Aires. En 1918, il a participé au mouvement de réforme de cette université.

Paroles

Luna, farol y canción,
dulce emoción del ayer
fue en París,
donde viví tu amor.
Tango, Champagne, corazón,
noche de amor
que no está,
en mi sueño vivirá…

Es como debe ser, con ilusión viví
las alegrías y las tristezas;
en esa noche fue que yo sentí por vos
una esperanza en mi corazón.
Es como debe ser en la pasión de ley,
tus ojos negros y tu belleza.
Siempre serás mi amor en bello amanecer
para mi vida, dulce ilusión.

En este tango
te cuento mi tristeza,
dolor y llanto
que dejo en esta pieza.
Quiero que oigas mi canción
hecha de luna y de farol
y que tu amor, mujer,
vuelva hacia mí.

Eduardo Arolas Letra: Gabriel Clausi

Traduction libre et indications

Lune, réverbère et chanson, douce émotion d’hier c’était à , où j’ai vécu ton amour.
Tango, Champagne, cœur, nuit d’amour qui n’est pas là, dans mon rêve vivra…
C’est comme il faut (comme il se doit), avec enthousiasme j’ai vécu les joies et les peines ; C’est ce soir-là que j’ai senti de l’espoir pour toi dans mon cœur.
C’est comme doit être la véritable passion (les Argentins disent de ley, de la loi, par exemple un porteño de ley pour dire un véritable portègne), de tes yeux noirs et de ta beauté.
Tu seras toujours mon amour dans la belle aurore pour ma vie, douce illusion (doux sentiment).
Dans ce tango, je te conte ma tristesse, douleur et larmes que je laisse dans ce morceau.
Je veux que tu entendes ma chanson faite de lune et de réverbère et que ton amour, femme, revienne jusqu’à moi.

Elle est où la tricherie promise ?

Comme je vois que vous semblez intéressés, voici la tricherie. Le tango « Comme il faut » a un frère jumeau « Comparsa criolla » signé Rafael Iriarte.

Couverture et partition de Comparsa Criolla de Rafael Iriarte. La mention du concours de 1930 est en haut de la couverture.

La gémellité n’est pas une tricherie me direz-vous, mais alors comment nommer deux tangos identiques attribués à des auteurs différents ?
On dirait aujourd’hui un plagiat.
Nous avons déjà rencontré plusieurs tangos dont les attributions étaient floues, que ce soit pour la musique ou les paroles. Firpo n’a-t-il pas cherché à mettre sous son nom , alors pourquoi pas une comparsa ?
Mais revenons à notre paire de tangos et intéressons-nous aux auteurs.
Eduardo Arolas (1892-1924), un génie, mort très jeune (32 ans). Non seulement il jouait du bandonéon de façon remarquable, ce qui lui a valu son surnom de « Tigre du bandonéon », mais en plus, il a composé de très nombreux titres. C’est assez remarquable si on tient compte de sa très courte carrière. Il s’est dit cependant qu’il s’inspirait de l’air du temps, utilisant ce que d’autres musiciens pouvaient interpréter à une époque où beaucoup n’écrivaient pas la musique.
Il me semble que c’est plus complexe et qu’il est plutôt difficile de dénouer les fils des interactions entre les musiciens à cette époque où il y avait peu de partitions, peu d’enregistrements et donc surtout une connaissance par l’écoute, ce qui favorise l’appropriation d’airs que l’on peut de toute bonne foi croire originaux.
Pour revenir à notre tango du jour et faire les choses Comme il faut, voyons qui est le second auteur, celui de Comparsa criolla, Rafael Iriarte. (1890-1961).
Lui aussi a fait le voyage à Paris et Néstor Pinsón évoque une collaboration dans la composition qui aurait eu lieu en 1915.
Si on s’intéresse aux enregistrements, les plus anciens semblent dater de 1917 et sont de Arolas lui-même et de la Orquesta Típica Pacho. Les deux disques mentionnent seulement Arolas comme seul compositeur.

Eduardo Arolas et un disque par la Tipica Pacho qui serait également de 1917 selon Enrique Binda, spécialiste de la vieille garde).

Peut-être que le fait que Arolas avait accès au disque à cette époque et pas Iriarte a été un élément. Peut-être aussi que la part d’Arolas était suffisamment prépondérante pour justifier qu’il soit le seul mentionné.
Je n’ai pas trouvé de témoignage indiquant une brouille entre les deux hommes, si ce n’est une hypothèse de Néstor Pinsón. Faut-il voir dans le fait que Iriarte signe de son seul nom la version qu’il dépose en 1930 et qui obtiendra un prix, au septième concours organisé par la maison de disque « Nacional ».
Ce qui est curieux est que , qui était ami de Arolas ait enregistré sa version avec la mention de Iriarte et pas celle de son ami décédé six ans plus tôt. Faut-il voir dans cela une reconnaissance de Canaro pour la part de Iriarte ?
Pour vous permettre d’entendre les similitudes, je vous propose d’écouter le début de deux versions. Celui de 1951 de Comme il faut, notre tango du jour par Di Sarli et celui de Comparsa criolla de Tanturi de 1941. J’ai modifié la de la version de Tanturi pour que les tempos soient comparables.

Débuts de : Comme il faut de Eduardo Arolas par Carlos Di Sarli (1951) et Comparsa criolla de Rafael Iriarte par (1941).

Autres versions

Comme il s’agit du « même » tango, je vais placer par ordre chronologique plusieurs versions de Comme il faut et de Comparsa criolla.

Comme il faut 1917 – Eduardo Arolas
Les musiciens de l’orchestre de Arolas en 1916. Arolas est en bas, au centre. Juan Marini, pianiste, à gauche, puis Rafael Tuegols et Atilio Lombardo (violonistes) et Alberto Paredes (violonceliste). Ce sont eux qui ont enregistré la version de 1917 de Arolas.
Comme il faut 1917 – Orquesta Típica Pacho
Comparsa criolla 1930-11-18 – Francisco Canaro
Comme il faut 1936-10-27 – Juan D’Arienzo
Comme il faut 1938-03-07 – Anibal Troilo
Comparsa criolla 1941-06-16 – Ricardo Tanturi
Comme il faut 1947-01-14 – Carlos Di Sarli
Comparsa criolla 1950-12-12 – Orchestre
Comme il faut 1951-09-26 – Orquesta Carlos Di Sarli.
Comme il faut 1955-07-15 – Carlos Di Sarli
Comme il faut 1966-09-30 – Hector Varela
Comme il faut 1980 – Alfredo De Angelis
Comme il faut 1982 –

Mon cher Correcteur, Thierry, m’a fait remarquer que je n’avais pas proposé de versions chantées. N’en ayant pas sous la main, j’ai fait un appel à des collègues qui m’ont proposé deux versions, Nelly Omar avec Bartolomé Palermo de 1997 et con de 2018 :

Comme il faut 1997 – Nelly Omar con Bartolomé Palermo y sus guitarras. Merci à Howard Jones qui m’a signalé cette version.
Comme il faut 2013 – Gente de tango
Comme il faut 2018 – Sciamarella Tango con Denise Sciammarella. Merci à Yüksel Şişe qui m’a indiqué cette version.
Comme il faut 2020-08 – El Cachivache

Je vous propose d’arrêter là les exemples, il y en aurait bien sûr quelques autres et je vous dis, à bientôt les amis !

Mandria 1957-06-29 – Orquesta Juan D’Arienzo con Mario Bustos

Juan Rodríguez Letra: Juan Miguel Velich; Francisco Brancatti

, encore un grand tango, adoré par les danseurs. Si ce sont les versions de D’Arienzo qui sont les plus connues, il y a d’autres versions intéressantes et que je vous propose ici. Attention, on entre dans l’univers hostiles des gauchos, mandrias, s’abstenir.

Extrait musical

Mandria 1957-06-29 – Orquesta Juan D’Arienzo con
Partition de Mandria. On voit le combat avec les rebenques.

Paroles

Tome mi poncho… No se aflija…
¡Si hasta el cuchillo se lo presto!
Cite, que en la cancha que usté elija
he de dir y en fija
no pondré mal gesto.

Yo con el cabo ‘e mi rebenque
tengo ‘e sobra pa’ cobrarme…
Nunca he sido un maula, ¡se lo juro!
y en ningún apuro
me sabré achicar.

Por la mujer,
creamé, no lo busqué…
Es la acción
que le viché
al varón
que en mi rancho cobijé…
Es su maldad
la que hoy me hace sufrir :
Pa’ matar
o pa’ morir
vine a pelear
y el hombre ha de cumplir.

Pa’ los sotretas de su laya
tengo güen brazo y estoy listo…
Tome… Abaraje si es de agaya,
que el varón que taya
debe estar previsto.
Esta es mi marca y me asujeto.
¡Pa’ qué pelear a un hombre mandria !
Váyase con ella, la cobarde…
Dígale que es tarde
pero me cobré.

Juan Rodríguez Letra: Juan Miguel Velich ; Francisco Brancatti

libre et indications

Prenez mon poncho… Ne vous affligez pas…
Et jusqu’au couteau, je vous le prête !
Racontez, que dans le lieu (terrain pour le duel, se dit aussi du terrain de foot) que vous choisissez, il faut dire et assurément (fija en lunfardo, chose sûre), je n’aurai pas de mauvais geste.
Moi, avec la tête de mon fouet j’ai largement pour me couvrir (protéger)…

(tête de fouet de ). On voit la dragonne qui permet de le tenir fermement au poignet et la boule de métal qui devait donner de forts mots de tête quand elle entrait en avec le crâne de l’adversaire…

Je n’ai jamais été un lâche, je vous le jure !
Et sans aucune urgence je saurais me faire petit.
Pour la femme, croyez-moi, je ne l’ai pas cherché…
C’est l’action que j’ai vue de l’homme que j’ai hébergé dans mon ranch…
C’est sa méchanceté qui aujourd’hui me fait souffrir :
Pour tuer ou pour mourir, je suis venu me battre et l’homme doit s’y conformer.
Pour un malotru de ce type, j’ai un bon bras et je suis prêt…
Prenez… Abattu s’il est fait de galle, (agaya = agalla = excroissance qui se forme sur un arbre à cause de la piqûre d’un insecte) que le mec qui a parlé doit être prévenu.
C’est ma devise et je m’y tiens.
Pourquoi combattre un homme pleutre !
Allez avec elle, la lâche…
Dites-lui qu’il est tard, mais que j’ai été payé.

J’ai quelques doutes sur l’interprétation, est-ce qu’au final il a mis une raclée avec son fouet au type qui était allé avec sa femme et qu’il chasse les deux, ou qu’il ne prend pas la peine de s’attaquer au pleutre (mandria) et qu’il le chasse avec la femme infidèle.

Autres versions

Mandria 1927-03-17 — Rosita Quiroga con guitarras.

Mandria 1927-03-17 — Rosita Quiroga con guitarras. Les prestations de Rosita, l’artiste à la mode remportèrent beaucoup de au théâtre et à la radio, ce qui lança le titre comment en témoignent les autres enregistrements réalisés dans les deux mois qui suivirent. Dans cet , elle est accompagnée de trois guitaristes. Sa voix, marquée de souffrance l’avait fait surnommée, la toujours blessé (La eterna herida) ou la muse pauvre (La musa mistonga), car elle était un produit des faubourgs dont elle avait la diction et la gouaille. En 1927, elle était au fait de sa gloire et l’année précédente, Antonio Polito et Celedonio Flores pour les paroles, lui avaient écrit un tango La musa mistonga.

Rosita Quiroga, La musa mistonga
Mandría 1927-03-25 — Orquesta Roberto Firpo.

Une Jolie version, assez lente et bien dansable.

Mandría 1927-05-10 – Orquesta Osvaldo Fresedo

La version de Fresedo a des points communs avec celle de Firpo.

Mandria 1927-05-19 – Orquesta Francisco Canaro con Agustín Irusta

Encore une version assez proche, un tempo plus marqué, mais bien sûr, la grande différence est le refrain chanté par Agustín Irusta.

Avec Canaro se terminent les enregistrements de la première vague. Quatre en deux mois, c’est un beau succès pour le titre, mais attendez la suite…

Mandria 1939-08-09 – Orquesta Juan D’Arienzo con Alberto Echagüe.

Après une pause de douze ans, une nouvelle version de notre titre du jour. C’est sans doute la version la plus célèbre. Contrairement aux versions de la décennie précédente on est face à un titre énergique, brillant, qui donne envie de danser.

Mandria 1954-04-22 — Orquesta Eduardo Del Piano con Mario Bustos.

Une version chantée avec une voix un peu recherchée. Pas forcément la version préférée des danseurs.

Mandria 1957-06-29 – Orquesta Juan D’Arienzo con Mario Bustos. C’est notre tango du jour.

Trois ans plus tard, Bustos enregistre le thème avec D’Arienzo qui lui est aussi avec sa deuxième version, la première étant de 18 ans plus ancienne, avec Echagüe.
Il est intéressant de comparer la version de Del Piano avec celle de D’Arienzo, elles sont proches en date et c’est le même chanteur. Del Piano a laissé plus de liberté à Bustos et même si D’Arienzo laisse Bustos chanter toutes les paroles, il reste dans le cadre de la danse, ce qui n’est aps toujours le cas d’autres orchestre de l’époque qui augmentent aussi fortement la part chantée des tangos.

Mandria 1970 — Orquesta Juan Cambareri con Héctor Berardi.
Mandria 1980c — Los con Carlos Tejeda.
Mandria 2022 – .

El rebenque

On a déjà parlé de l’armement des gauchos, notamment du facón (couteau) et du poncho (enroulé autour du bras en protection).

L’arme d’aujourd’hui est le rebenque. C’est une sorte de cravache ou de fouet court. D’un côté, il y a la poignée (cabo) et de l’autre, la queue.

À gauche, un rebenque entier avec au premier plan el cabo en métal. La tenue du rebenque avec la dragonne au poignet. Combat au rebenque selon une illustration de Molina. Le poncho enroulé sur le bras sert à se protéger. Rebenque et facón, deux armes redoutables, dessins de Mario Lopez Osornio Ici, il tient le rebenque par la queue. On imagine donc le résultat de la fappe du cabo sur l’adversaire. Dans le combat, le rebenque sert également à désarmer l’adversaire de son couteau.

Mi serenata 1952-06-25 – Orquesta Edgardo Donato con Carlos Almada y Alberto Podestá

Edgardo Donato Letra: Juan Carlos Thorry (José Antonio Torrontegui)

Mi serenata est un superbe tango chanson, écrit par Edgardo Donato. Il l’a enregistré à deux reprises, les deux fois avec des duos (et il ne sera pas le seul). Je vous propose aujourd’hui la seconde version, moins connue que celle réalisée 12 ans plus tôt. C’est le soir, laissez-vous bercer par cette et soyez sympas, répondez aux chanteurs, pas comme la pimbêche de ce tango.

Les rues de Buenos Aires et des alentours regorgeaient d’âmes seules et de musiciens, chanteurs, toujours prêts à pousser la chansonnette, notamment pour conquérir une belle.
La sérénade, favorisée par les nuits généralement clémentes de la région, faisait donc flores.
témoigne de cet engouement, avec au moins une trentaine de titres contenant Serenata. Ce sont majoritairement des tangos et des valses, mais en dehors de notre univers tanguero, il pouvait s’agir aussi de habaneras ou boléros.
Le cérémonial de la sérénade passait par la chanson sous le balcon, de l’autre côté de la clôture, comme dans la version d’aujourd’hui, par fois sur le balcon, comme dans Serenata que nous avons déjà évoqué… Normalement, la femme devait allumer une lumière pour signaler qu’elle était à l’écoute et si tout se passait bien, le chanteur pouvait espérer aller un peu plus loin, c’est-à-dire, selon les cas, grimper au balcon de façon acrobatique, sauter la barrière, ou recevoir l’accueil suspicieux du père de la belle.

Extrait musical

Mi serenata 1952-06-25 – Orquesta Edgardo Donato con Carlos Almada y .

La voix grave de Almada et la plus aigüe de Podestá forment un assez bel ensemble.

Mi serenata, Partition avec Donato et Gavioli en photo

Vous remarquerez qu’il est indiqué « Tango canción » (tango chanson). Il est écrit également que les palabras (paroles) sont de Juan C. Thorry, que la musique est de Edgardo Donato et que c’est une création de Romeo Gavio. Cela nous indique certainement qu’avant de l’enregistrer, il l’a chanté sur une des scènes de Buenos Aires.
La partition est dédicacée par Donato à José Lectoure et Ismaël Pace. Comme il se peut que vous ne connaissiez pas ces deux individus, voici leur photo et leur CV.

Ismael Pace et José Lectoure en compagnie de techniciens de la construction du Stadium Luna Park dont ils sont les propriétaires (photo de 1932).

Je suis sûr que vous n’aviez pas deviné qui étaient réellement les dédicataires… Le Luna Park est une immense salle de spectacle de Buenos Aires, on se souvient que Canaro l’a utilisée pour les carnavals à partir de 1936, voir par exemple Después del carnaval 1941-06-19 Orquesta Osvaldo Fresedo con Ricardo Ruiz. C’est aussi une salle où des combats de boxe sont donnés, tout aussi violents que les meetings politiques qui s’y déroulent encore aujourd’hui.
On peut s’étonner de la . Ils étaient amis de Donato, mais le thème de ce tango ne semble pas totalement adapté aux personnages. On les imagine difficilement grattant une guitare sous un balcon, mais qui sait ?

Paroles

Niña de mi
brindarte quiero un cantar
que sea el reflejo fiel
de cariño sin par,
niña de mi ilusión.

A tu reja llegué
una estrella guiñó
y aquel día forjé
mi primera ilusión.
Serenata que allí
para ti improvisó mi amor,
tu promesa de amor,
tu mirada, un clavel,
dieron premio a mi canción.

Hoy que ya el tiempo pasó,
vine a tu reja a cantar,
silencio fue el responder
a este triste dolor
que tu ausencia dejó.

Edgardo Donato Letra: Juan Carlos Thorry (José Antonio Torrontegui)

libre et indications

Fille de mon cœur, je veux t’offrir une chanson qui soit le reflet fidèle d’une affection sans pareille, fille de mon sentiment amoureux (ilusión, n’est pas une illusion…).
À ta clôture, une étoile venue faire un clin d’œil, et ce jour-là, j’ai forgé mes premiers sentiments.
Une sérénade que là, pour toi, j’ai improvisé mon amour, ta promesse d’amour, ton regard, un œillet, ont donné un prix (récompense) à ma chanson.
Aujourd’hui que ce temps est déjà passé, je suis venu à ta clôture pour chanter, le silence a été la réponse à cette triste douleur que ton absence a laissée.

Autres versions

Mi serenata 1940-01-11 — Orquesta Edgardo Donato con Romeo Gavio y Lita Morales.

C’est la première version, enregistrée par l’auteur, avec le duo gagnant Lita Morales et Romeo Gavioli. Qui d’autre que Roméo pouvait lancer la sérénade à Juliette, pardon, à Lita ? N’oublions pas qu’ils étaient un couple discret comme nous l’avons évoqué lors de notre anecdote sur El adios.
C’est sans doute la version préférée de la plupart des danseurs et elle le mérite.

Mi serenata 1952-06-25 – Orquesta Edgardo Donato con Carlos Almada y Alberto Podestá. C’est notre tango du jour.
Mi serenata 1955-09-02 – Orquesta Osvaldo Pugliese con Jorge Maciel y Miguel Montero.
Mi serenata 1973 – Los Solistas de D’Arienzo con y
Mi serenata 1980 – Orquesta Donato Racciatti con Marcelo Biondini y Gabriel Reynal.

Il s’appelle aussi Donato, mais c’est son prénom et le résultat n’est pas forcément convaincant.

Mi Serenata 2022-06 – . Sans doute la palme de l’originalité pour cette version.

Et pour terminer, une belle version de la en video. C’est de 2017, donc logiquement après la version de El Cachivache, mais je trouve plus sympa de terminer ainsi.
C’est de nouveau un duo, homme femme, comme la première version de 1940 par Donato. La boucle est fermée.

Orquesta Romantica Milonguera avec Roberto Minondi et Marisol Martinez en duo – « Mi serenata »

À demain les amis !