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Otra vez carnaval (Noche de carnaval) 1942-01-03 — Orquesta Carlos Di Sarli con Roberto Rufino

Carlos Di Sarli Letra: Francisco García Jiménez

Le Car­naval était, chaque année, un moment clef pour les orchestres de tan­go. À cette occa­sion, des orchestres se regroupaient pour pro­pos­er des orchestres immenses et des mil­liers de danseurs “tan­guaient” sur les pistes plus ou moins impro­visées, dans les rues, les places ou les salles de con­cert, comme le Luna Park. Mais Car­naval, c’était bien plus que le seul tan­go. C’était un moment de libéra­tion dans une vie sou­vent dif­fi­cile et par­fois, l’occasion de ren­con­tres, comme celle que nous narre ce tan­go de Di Sar­li.

Extrait musical

Otra vez car­naval (Noche de car­naval) 1942-01-03 — Orques­ta Car­los Di Sar­li con Rober­to Rufi­no.
Par­ti­tion de piano de Otra vez car­naval de Di Sar­li et Jiménez.

Paroles

En los ojos llev­a­ba la noche
y el amor en la boca…
Car­naval en su coche
la pasea­ba tri­un­fal.
Ser­penti­na de mági­co vue­lo
fue su amor de una noche;
ser­penti­na que luego arras­tró mi dolor
enreda­da en las ruedas de un coche
cuan­do el cor­so en la som­bra quedó…

Otra vez, Car­naval,
en tu noche me cita
la mis­ma boni­ta
y audaz mas­cari­ta…
Otra vez, Car­naval,
otra vez, como ayer,
sus locos amores
le vuel­vo a creer.
Y aca­so la llore
mañana otra vez…

Fugi­ti­vas se irán en la auro­ra
la ven­tu­ra y la risa…
¡Ten­drán todas mis horas
una gris soledad!
En mis labios habrá la ceniza
de su nue­vo desaire;
y despo­jos del sueño tan sólo serán,
un per­fume ron­dan­do en el aire
y en el sue­lo un pequeño antifaz…
Car­los Di Sar­li Letra: Fran­cis­co Gar­cía Jiménez

Traduction libre

Dans ses yeux, elle por­tait la nuit et l’amour à la bouche…
Car­naval dans son char la fai­sait défil­er tri­om­phale­ment.
Un ser­pentin de vol mag­ique fut son amour d’une nuit ;
ser­pentin qui ensuite traî­na ma douleur empêtrée dans les roues d’une voiture lorsque le char dans l’om­bre s’im­mo­bil­isa…

Encore une fois, Car­naval, dans ta nuit, me don­na ren­dez-vous, la même belle et auda­cieuse, masquée…
Encore une fois, Car­naval, encore une fois, comme hier, ses amours folles, je reviens à les croire.
Et peut-être que je la pleur­erai demain, encore une fois…

Les fugi­tives s’en iront dans l’au­rore, la for­tune et les rires…
Toutes mes heures auront une soli­tude grise !
Sur mes lèvres res­teront les cen­dres de son nou­veau cam­ou­flet ;
et les restes du rêve ne seront plus qu’un par­fum planant dans l’air et sur le sol un petit masque…

Autres versions

Otra vez car­naval (Noche de car­naval) 1942-01-03 — Orques­ta Car­los Di Sar­li con Rober­to Rufi­no. C’est notre tan­go du jour.
Otra vez car­naval (Noche de car­naval) 1947-01-14 — Orques­ta Car­los Di Sar­li con Jorge Durán. Cinq ans plus tard, nou­veau chanteur. Di Sar­li réen­reg­istre sa com­po­si­tion.
Otra vez car­naval 1981-08-12 — Rober­to Goyeneche con Orques­ta Típi­ca Porteña. Une ver­sion à écouter.

Carnaval

Les fes­tiv­ités de Car­naval se sont vues à plusieurs repris­es inter­dites en Argen­tine. Il faut dire qu’au XIXe siè­cle, cela don­nait sou­vent lieu à des débor­de­ments.
Il s’agissait de man­i­fes­ta­tions plutôt spon­tanées jusqu’au dix-neu­vième siè­cle, elles furent inter­dites ou lim­itées à cer­tains lieux, notam­ment dans le cadre de la lim­i­ta­tion des pop­u­la­tions d’origine africaines.

1869, l’état autorise le carnaval et l’organise

C’est Sarmien­to, de retour d’un voy­age en Ital­ie où il avait assisté aux fes­tiv­ités de Car­naval, qui les a rétablies offi­cielle­ment en 1869 sous la forme du défilé.

Défilé en 1931, 1940 et de nos jours (Gualeguay­chú, province de Entre Ríos).

Tango et carnaval

Les orchestres étaient mis à con­tri­bu­tion et, durant les décen­nies tan­go, les orchestres de tan­go fai­saient danser plusieurs mil­liers de cou­ples. Pas seule­ment à Buenos Aires, mais aus­si à Mon­te­v­ideo et Rosario, notam­ment.

Affich­es de car­navals. 1917 Fir­po et Canaro — 1940 Eddie Kay (Jazz), Canaro, Frese­do et D’Arien­zo (voir le petit jeu en fin d’ar­ti­cle). Ensuite, Di Sar­li et enfin une affiche de 1950 avec Troi­lo et De Ange­lis.

Exemple de règlement mis en place durant la dictature militaire (Cordoba, 1976/02/23)

La plus récente pro­hi­bi­tion fut par­tielle. C’était pen­dant la dernière dic­tature du vingtième siè­cle. Le Car­naval n’avait pas été aboli, mais deux con­di­tions avaient été posées :
“Se pro­híbe el uso de dis­fraces que aten­ten con­tra la moral y la decen­cia públi­cas: uni­formes mil­itares, poli­ciales, vestiduras sac­er­do­tales y los que ridi­culi­cen a las autori­dades del Esta­do u otras naciones.
-Está per­mi­ti­do de 9 a 19, jugar con agua en bue­nas condi­ciones de higiene, glo­bitos y pomos.”
« L’u­til­i­sa­tion de cos­tumes qui vio­lent la moral­ité publique et la décence est inter­dite : uni­formes mil­i­taires, uni­formes de police, vête­ments sac­er­do­taux et ceux qui ridi­culisent les autorités de l’É­tat ou d’autres nations. (On notera que la lec­ture peut être à dou­ble niveau et que l’on pour­rait y con­sid­ér­er les vête­ments mil­i­taires et sac­er­do­taux comme indé­cents…)
-Il est per­mis de 9 h à 19 h de jouer avec l’eau dans de bonnes con­di­tions d’hy­giène, les bal­lons et les pom­meaux. » (Les jeux d’eau sont en effet courants, il faut dire que l’époque du car­naval cor­re­spond au plein été en Argen­tine).

Les jeux avec l’eau sont restés per­mis pen­dant la dic­tature.

Cepen­dant, durant la Dic­tature, il n’y a pas eu de Car­naval pro­pre­ment dit, pas de défilés et de grandes fêtes pop­u­laires.

La fin de la dictature et le retour du Carnaval

Lorsque Alfon­sin fut élu en 1983, il mit en œuvre son pro­gramme « Avec la démoc­ra­tie on mange, on se soigne et on s’éduque ». L’année suiv­ante, le car­naval de nou­veau libéré a pris une saveur par­ti­c­ulière et, peu à peu, les ten­ta­tives de coup d’État se sont espacées et la démoc­ra­tie s’est implan­tée pour une quar­an­taine d’années.

Le car­naval de 1984 est impor­tant, car il fête le retour de la démoc­ra­tie et, par la même, le retour du Car­naval sous sa forme habituelle.

En 2023, le con­grès por­tait des ban­deroles 40 ans de démoc­ra­tie, en sou­venir de cette époque.

Le gou­verne­ment précé­dent avait fait plac­er deux ban­deroles, de part et d’autre de l’en­trée des députés au Con­grès (Con­gre­so). J’ai pris cette pho­to, peu de temps après le change­ment de gou­verne­ment. Une des ban­deroles avait dis­paru. On remar­quera une scène éton­nante, ce livreur qui dort sur la chaussée (emplace­ment réservé aux voitures offi­cielles). Il ne reste bien sûr plus de ban­de­role aujourd’hui et les indi­gents sont priés de dormir hors de la ville. Les mate­las de for­tune et les mai­gres pos­ses­sions de ces per­son­nes sont brûlés. Cela sem­ble fonc­tion­ner, on ren­con­tre beau­coup moins de per­son­nes dor­mant dehors main­tenant. Mais il suf­fit de franchir les lim­ites de la ville pour con­stater que ce n’est pas une amélio­ra­tion de la sit­u­a­tion des plus pau­vres, mais un sim­ple « net­toy­age ».

Petit jeu (très facile)

Observez cette affiche et attribuez à chaque chef d’orchestre son ou ses chanteurs…

Affiche de la Radio El Mun­do de Buenos Aires pour le Car­naval de 1940.
À gauche les orchestres et à droite les chanteurs…

Réponse au petit jeu

J’imagine que vous n’avez pas trop eu de dif­fi­culté pour ce qui est de rac­corder les orchestres avec leurs chanteurs de tan­go.
Il restait ensuite deux noms, Eddie Kay et Rudy Green, qu’il sem­ble donc logique d’associer, car ils sont moins con­nus.
Eddie Kay, pianiste né en Ital­ie et qui est passé aupar­a­vant par les États-Unis pour sa for­ma­tion musi­cale avant de retourn­er en Ital­ie, puis de s’installer en Argen­tine.
Étant don­né son passé en Amérique du Nord, il est ten­tant d’en faire un musi­cien de jazz. On n’aurait pas tort, mais sa ren­con­tre avec Gardel, qui se trans­for­ma en ami­tié, a fait qu’il a élar­gi ses hori­zons et a égale­ment com­posé des tan­gos. Cepen­dant, en ce qui con­cerne l’affiche de notre jeu, il inter­ve­nait bien comme orchestre de jazz (Fox­trots, valses et dans­es importées d’Amérique du Nord). Son groupe Alaba­ma Jazz, a un nom qui mar­que bien les ambi­tions de cet orchestre, tout comme le pseu­do­nyme Eddie Kay car son nom véri­ta­ble était Edmun­do Tul­li, ce qui fait net­te­ment moins, jazzman.
Il reste Rudy Green. Là, je n’ai pas trou­vé trace du bon­homme. Il y a bien un Rudy Green, mais celui-ci était noir et avait com­mencé sa car­rière en 1946 à Nashville alors qu’il avait 14 ans. Il s’agit donc for­cé­ment d’un autre Rudy Green, le type sur l’affiche n’a pas une tête de gamin noir de 8 ans…
Je ne sais donc pas si ce chanteur était asso­cié à Eddie Kay, mais, par son nom ou pseu­do­nyme, on peut penser qu’il grav­i­tait égale­ment autour du Jazz. Peut-être qu’un jour la lumière se fera sur ce point et alors, je vous en avis­erai.

Les répons­es. Le lien entre Eddie Kay et Rudy Green est une hypothèse, fort prob­a­ble, mais sans garantie…

Un petit cadeau

J’ai mon­té quelques images fix­es et ani­mées de Car­naval. Cela vous per­me­t­tra de vous faire une idée du phénomène.

Quelques images de Car­naval de 1889 à nos jours.

À bien­tôt, les amis !

Sentimiento gaucho 1954-07-30 — Orquesta Donato Racciatti con Nina Miranda

Francisco Canaro; Rafael Canaro Letra: Juan Andrés Caruso

Nous avons vu les liens entre le tan­go et le théâtre, le ciné­ma, la radio. Notre tan­go du jour, Sen­timien­to gau­cho a tous ces liens et en plus, il a gag­né un con­cours… Il n’est donc pas éton­nant qu’il dis­pose de dizaines de ver­sions, voyons donc ce Sen­timien­to gau­cho à par­tir de la ver­sion ori­en­tale, de Dona­to Rac­ciat­ti et Nina Miran­da.

Les concours Max Glücksmann

La firme Max Glücks­mann est celle qui a créé la mai­son de dis­ques Odeón, que vous con­nais­sez bien main­tenant. Cette société a organ­isé à par­tir de 1924 dif­férents con­cours annuels qui se déroulaient dans dif­férents lieux à Buenos Aires et Mon­te­v­ideo.
Trois fois par semaine, durant le con­cours, l’orchestre « offi­ciel » qui était dif­férent chaque année, jouait les tan­gos qui avaient été sélec­tion­nés par l’entreprise pour con­courir.
Les jours con­cernés, l’orchestre jouait deux fois la sélec­tion, une fois pour la séance de ciné­ma de 18 heures et une fois pour la séquence de ciné­ma de 22h30.
Le pub­lic votait grâce à un coupon placé sur le tick­et d’entrée au théâtre/cinéma.
En 1924, la pre­mière année du con­cours, c’est Sen­timien­to Gau­cho qui gagna.
L’orchestre qui a joué les œuvres élec­tion­nées était celui de Rober­to Fir­po, un orchestre gon­flé pour attein­dre 15 musi­ciens, dans le Théâtre Grand Splen­did et la radio LOW, Radio Grand Splen­did retrans­met­tait égale­ment la presta­tion de l’orchestre.
On voit que le dis­posi­tif était par­ti­c­ulière­ment élaboré et que Max Glücks­mann avait mis les moyens.
La ver­sion présen­tée était instru­men­tale, car les trois pre­mières années du con­cours, il n’y avait pas de chanteur, « seule­ment » 15 musi­ciens.
Le pal­marès de cette année a été le suiv­ant :

  • Pre­mier prix : Sen­timien­to Gau­cho (Fran­cis­co et Rafael Canaro)
  • Pa que te acordés (Fran­cis­co Lomu­to)
  • Organ­i­to de la tarde (Cat­u­lo Castil­lo)
  • Con toda el alma (Juan Fari­ni)
  • Amiga­zo (Juan de Dios Fil­ib­er­to)
  • Men­tions : Capa­blan­ca solo (Enrique Delfi­no)
  • El púa (Arturo de Bassi)
  • Soñan­do (Paqui­ta Bernar­do)

Extrait musical

Sen­timien­to gau­cho. Fran­cis­co Canaro; Rafael Canaro Letra: Juan Andrés Caru­so.

À gauche, la par­ti­tion Ricor­di qui cor­re­spond au texte des paroles habituelles. À droite de la par­ti­tion, le pre­mier prix gag­né par Canaro (il n’y avait pas de paroles et c’était donc cohérent de représen­ter un gau­cho). À l’extrême droite, la cou­ver­ture de la par­ti­tion avec les paroles cen­surées.

Sen­timien­to gau­cho 1954-07-30 — Orques­ta Dona­to Rac­ciat­ti con Nina Miran­da

Paroles

En un viejo almacén del Paseo Colón
Donde van los que tienen per­di­da la fe
Todo sucio, hara­pi­en­to, una tarde encon­tré
A un bor­ra­cho sen­ta­do en oscuro rincón
Al mirar­le sen­tí una pro­fun­da emo­ción
Porque en su alma un dolor secre­to adi­v­iné
Y, sen­tán­dome cer­ca, a su lado, le hablé
Y él, entonces, me hizo esta cru­el con­fe­sión
Pon­ga, ami­go, aten­ción

Sabe que es condi­ción de varón el sufrir
La mujer que yo quería con todo mi corazón
Se me ha ido con un hom­bre que la supo seducir
Y, aunque al irse mi ale­gría tras de ella se llevó
No quisiera ver­la nun­ca… Que en la vida sea feliz
Con el hom­bre que la tiene pa’ su bien… O qué sé yo
Porque todo aquel amor que por ella yo sen­tí
Lo cortó de un solo tajo con el filo’e su traición

Pero inútil… No puedo, aunque quiera, olvi­dar
El recuer­do de la que fue mi úni­co amor
Para ella ha de ser como el trébol de olor
Que per­fuma al que la vida le va a arran­car
Y, si aca­so algún día quisiera volver
A mi lado otra vez, yo la he de per­donar
Si por celos a un hom­bre se puede matar
Se per­dona cuan­do habla muy fuerte el quer­er
A cualquiera mujer

Fran­cis­co Canaro; Rafael Canaro Letra: Juan Andrés Caru­so

Traduction libre et indications

Dans un vieux mag­a­sin (El almacén, est à a la fois un mag­a­sin, un bar, un lieu de vie, de musique et danse, etc.) du Paseo Colón (rue du sud de Buenos Aires) où vont ceux qui ont per­du la foi.
Tout sale, en hail­lons, un après-midi, j’ai trou­vé un ivrogne assis dans un coin som­bre.
En le regar­dant, j’éprou­vai une pro­fonde émo­tion parce que dans son âme je dev­inais une douleur secrète.
Et assis près de lui, je lui ai par­lé, et il m’a fait cette cru­elle con­fes­sion.
Fais atten­tion, mon ami.
Sache que c’est la con­di­tion de l’homme que de souf­frir.
La femme que j’ai aimée de tout mon cœur s’en est allée avec un homme qui a su la séduire et, avec son départ, elle a emporté ma joie avec elle.
Je ne voudrais jamais la revoir… Puisse-t-elle être heureuse dans la vie avec l’homme qui l’a pour la sienne…
Ou qu’est-ce que j’en sais pourquoi tout cet amour que je ressen­tais pour elle, elle l’a coupé d’un seul coup avec la lame de sa trahi­son.
Mais inutile… Je ne peux pas, même si je le voulais, oubli­er le sou­venir de celle qui était mon seul amour. Pour elle, il faut être comme le trèfle d’odeur (mélilot) qui par­fume celui que la vie va arracher.
Et si un jour elle veut revenir vers moi, je lui par­don­nerai.
Si un homme peut être tué par jalousie, cela se par­donne quand par­le très fort l’amour à quelque femme que ce soit.

Il existe deux autres ver­sions des paroles, mais le prob­lème sur le site ne m’a pas lais­sé le temps de les retran­scrire.
Une ver­sion cen­surée, ou l’ivrogne dans le bar devient un paysan dans un champ et l’autre une ver­sion humoris­tique de Trio Gedeón. J’y reviendrai un jour, mais pour l’instant, ma pri­or­ité est de rétablir le site.

Autres versions

Pour les mêmes raisons que le gros rac­cour­cisse­ment de l’anecdote du jour, le prob­lème sur le site, je ne pro­pose pas les autres ver­sions de Sen­timien­to Gau­cho.
Là encore, j’essayerai de rat­trap­er, dès que pos­si­ble, lorsque le site sera remis en état.
Je vous présente tout de même cette ver­sion sym­pa où on voit chanter Ada Fal­con. C’est dans le film : Ido­l­os de la radio de Eduar­do Mor­era

Ada Fal­con dans Ido­l­os de la radio de Eduar­do Mor­era chante Sen­timien­to Gau­cho.

j’e­spère à demain, les amis, avec une ver­sion plus com­plète…

El once (A divertirse) 1953-05-20 – Orquesta Osvaldo Fresedo

Osvaldo Fresedo (Osvaldo Nicolás Fresedo) Letra : Emilio Fresedo (Emilio Augusto Oscar Fresedo)

Vous savez tous que « El once », en espag­nol, sig­ni­fie le 11. Mais peut-être ne con­nais­sez-vous pas la rai­son de ce nom. Ceux qui con­nais­sent Buenos Aires, pour­ront penser à la place Once de Sep­tiem­bre 1852 que l’on appelle sim­ple­ment Once. On lit par­fois que c’est le numéro 11 dans une course de chevaux, voire le 11 au foot­ball. Je pense que vous avez com­pris que j’allais vous pro­pos­er une autre expli­ca­tion…

El once

S’il existe des tan­gos sur le quarti­er de Once (Bar­rio Once), ses habi­tants (Muñe­ca del Once), le train de onze heures (El tren de las once), la messe de onze heures (Misa de once), une adresse (Callao 11), ou une équipe de foot­ball (El once glo­rioso) qui célèbre l’équipe d’Uruguay qui a gag­né la pre­mière coupe du Monde en 1930.

À gauche, les cap­i­taines d’Argentine et Uruguay se salu­ent avant la finale. À droite, après la vic­toire de l’Uruguay, les jour­naux argentins se déchaî­nent, accu­sant les Uruguayens d’avoir été bru­taux…

Car­los Enrique (musique) et Luis César Amadori (paroles), écrivent El once glo­rioso en l’honneur de l’équipe gag­nante. Les paroles sont dignes des chants des inchas (sup­port­ers) d’aujourd’hui :

Ra ! Ra ! Ra !
Le foot­ball uruguayen !
Ra ! Ra ! Ra !
Le Cham­pi­onnat du monde !

Une autre piste peut se trou­ver dans les cours­es. Leguisamo avait un cheval nom­mé Once, je vous invite à con­sul­ter l’excellent blog de José María Otero pour en savoir plus
Mais, ce n’est tou­jours pas la bonne expli­ca­tion.
Une pre­mière indi­ca­tion est le sous-titre « a diver­tirse » (pour s’amuser). Cela cor­re­spond peu aux dif­férents thèmes évo­qués ci-dessus. Cela incite à creuser dans une autre direc­tion.
Nous allons donc inter­roger la musique du jour, puis les paroles pour voir si nous pou­vons en savoir plus.

Extrait musical

El once (A diver­tirse) 1953-05-20 – Orques­ta Osval­do Frese­do.

On a l’impression d’une balade. Tout est tran­quille. Dif­fi­cile d’avoir une indi­ca­tion utile pour résoudre notre énigme. Heureuse­ment, si notre ver­sion est instru­men­tale, Emilio Frese­do, le frère de Osval­do a écrit des paroles.

Paroles

No deje que sus penas
se vayan al vien­to
porque serán aje­nas
al que oye lo cier­to.
No espere que una mano
le aflo­je el dolor,
sólo le dirán pobre
y después se acabó.
Por eso me divier­to,
no quiero sen­tir­las,
no quiero oír lamen­tos
que amar­guen la vida;
pre­fiero que se pier­dan
y llegue el olvi­do
que todo reme­dia,
que es lo mejor.

Si bus­ca con­sue­lo no vaya a llo­rar,
apren­da a ser fuerte y mate el pesar.
Son­ría lle­van­do a su boca el licor,
que baile su almi­ta esperan­do un amor.
El humo de un puro, la luz del lugar,
las notas que vagan le harán olvi­dar.
Quién sabe a su lado los que irán así
con los cora­zones para diver­tir.

A diver­tirse todos
rompi­en­do el silen­cio
para can­tar en coro
siquiera un momen­to.
Recuer­den que en la vida
si algo hay de val­or
es de aquel que lle­va
pasán­dola mejor.
Ale­gre su mira­da
no piense en lo malo,
no deje que su cara
se arrugue tem­pra­no.
Deje que todo cor­ra,
no apure sus años
que a nadie le impor­ta
lo que sin­tió.

Osval­do Frese­do (Osval­do Nicolás Frese­do) Letra : Emilio Frese­do (Emilio Augus­to Oscar Frese­do)

En gras le refrain que chantent Teó­fi­lo Ibáñez et Rober­to Ray.

Traduction libre

Ne laisse pas tes cha­grins s’envoler au vent, car ils seront étrangers à celui qui entend la vérité.
N’attends pas qu’une main soulage la douleur ; ils te diront seule­ment, le pau­vre, et puis c’est tout.
C’est pour cela que je m’amuse, je ne veux pas les sen­tir, je ne veux pas enten­dre des lamen­ta­tions qui aigris­sent la vie ; je préfère qu’ils se per­dent
et qu’arrive l’oubli qui remédie à tout, c’est le mieux.
Si tu cherch­es du récon­fort, ne pleures pas, apprends à être fort et tuer le cha­grin.
Sourire en por­tant la liqueur à ta bouche, laisse ton âme danser en atten­dant l’amour.
La fumée d’un joint (puro est sans doute mis pour por­ro, cig­a­rette de mar­i­jua­na, à moins que ce soit un cig­a­re), la lumière du lieu, les notes vagabon­des te fer­ont oubli­er.
Qui sait, à ton côté, ceux qui iront ain­si avec à cœur de s’amuser.
Amu­sons-nous tous, en rompant le silence pour chanter en chœur, ne serait-ce qu’un instant.
N’oublie pas que dans la vie, si quelque chose a de la valeur, c’est d’avoir passé le meilleur moment.
Rends joyeux ton regard, ne pense pas au mal, ne laisse pas ton vis­age se froiss­er pré­maturé­ment.
Laisse tout couler, ne pré­cip­ite pas tes années parce que per­son­ne ne se soucie de ce que tu ressens.

C’est donc une invi­ta­tion à oubli­er ses prob­lèmes en faisant la fête. C’est assez proche du Amusez-vous immor­tal­isé par Hen­ri Garat (1933) et Albert Pré­jean (1934)
Je vous le pro­poserai en fin d’article. Ça n’a rien à voir avec notre pro­pos, mais c’est eupho­risant 😉

Autres versions par Fresedo

Bien sûr, pour un titre aus­si célèbre, il y a for­cé­ment énor­mé­ment d’autres ver­sions.
Je vous pro­pose dans un pre­mier temps d’écouter les ver­sions de l’auteur, Frese­do. Ce dernier devait être fier de lui, car il a enreg­istré à de nom­breuses repris­es.

El once 1924 – Sex­te­to Osval­do Frese­do

Mer­ci à mes col­lègues Cami­lo Gat­i­ca et Gab­bo Frese­do (quand Gab­bo vient au sec­ours d’Osval­do et Emilio…) qui m’ont fourni cet enreg­istrement qui me man­quait).
Remar­quez les superbes solos de vio­lon notam­ment à 1:05,1:52, 2:24 et 2:56. Cette ver­sion est assez allè­gre. Notez bien ce point, il nous servi­ra à déter­min­er l’usage de ce titre et donc son nom.

El once (A diver­tirse) 1927 – Sex­te­to Osval­do Frese­do.

Je trou­ve intéres­sant de com­par­er cette ver­sion avec celle de 1924. Pour moi représente un recul. Le rythme est beau­coup plus lent, pesant. C’est un exem­ple du « retour à l’ordre » des années 20, dont Canaro est un des moteurs. Vous pour­rez le con­stater dans sa ver­sion de 1925 ci-dessous.

El once (A diver­tirse) 1931-11-14 – Orques­ta Osval­do Frese­do con Teó­fi­lo Ibáñez.

Osval­do a fini par enreg­istr­er les paroles de son frère, Emilio (Gardel l’avait fait en 1925). On reste dans le tem­po anémique de 1927. On a du mal à voir com­ment cette ver­sion, comme la précé­dente, d’ailleurs peut appel­er à se diver­tir… Il est vrai qu’il ne chante que le refrain qui n’est pas la par­tie la plus allè­gre du titre.

El once (A diver­tirse) 1935-04-05 – Orques­ta Osval­do Frese­do con Rober­to Ray.

Cette fois, Frese­do retrou­ve une ver­sion un peu plus dynamique qui peut mieux cor­re­spon­dre à l’idée du diver­tisse­ment. On pour­rait presque voir des per­son­nes gam­bad­er.
C’est un des pre­miers enreg­istrements où l’on remar­que la propen­sion de Frese­do à rajouter des bruits bizarres qui devien­dront sa mar­que de fab­rique dans ses dernières années, même si Sas­sone fait la même chose.

El once 1945-11-13 – Osval­do Frese­do.

Frese­do va encore plus loin que dans la ver­sion de 1935 dans l’ajout de bruits. C’est dans­able, mais pas totale­ment sat­is­faisant à mon goût.

El once (A diver­tirse) 1953-05-20 – Orques­ta Osval­do Frese­do.

C’est notre tan­go du jour. Comme déjà évo­qué, on pense à une prom­e­nade. Les bruits sont un peu plus fon­dus dans la musique. Mais on ne peut pas dire que c’est un tan­go de danse fab­uleux. Je trou­ve que ça manque un peu de fête. On retrou­ve quelques gross­es chutes qui ont fait la notoriété de Frese­do dans les années 1930. Frese­do se sou­vient peut-être un peu trop de ses orig­ines de la haute société pour une musique de danse qui se veut sou­vent plus pop­u­laire.

El Once (A diver­tirse) 1979-10-30 – Orques­ta Osval­do Frese­do.

En 1979, Frese­do enreg­istre pour la sep­tième fois son titre fétiche. On y retrou­ve presque tous ses élé­ments, comme les bruits bizarres, de jolis pas­sages de vio­lon, une élé­gance aris­to­cra­tique, man­quent seule­ment les gross­es chutes. Cela reste tran­quille, dans­able une après-midi chaude juste avant de pren­dre le thé, avec la pointe d’ennui « chic » qui con­vient.

Pourquoi « El once »

Il est impos­si­ble de devin­er la rai­son du titre à par­tir des ver­sions de Frese­do, sauf peut-être avec celle de 1924. Je vais donc vous don­ner l’explication.
Les internes en médecine de Buenos Aires ont décidé en 1914 de faire un bal des­tiné à se diver­tir. Musique, alcool, femmes com­préhen­sives, le cock­tail par­fait pour ces jeunes gens qui devaient beau­coup étudi­er et devaient donc avoir besoin de relâch­er la pres­sion.
Si on regarde les paroles sous ce jour, on com­prend mieux.
Reste à expli­quer pourquoi El once (le 11). L’explication est sim­ple. Le pre­mier événe­ment a eu lieu en 1914 et ensuite, chaque année, un autre a été mis en place. Celui de 1924 est donc le… onz­ième (je vois que vous êtes forts en cal­cul). Les frères Frese­do ont donc nom­mé ce tan­go, le 11 ; El once.
De 1914 à 1923 inclus, c’était Canaro qui offi­ci­ait à cette occa­sion. Les frères Frese­do fêtaient donc aus­si leur entrée dans cette man­i­fes­ta­tion dont la pre­mière a eu lieu au « Palais de glace » un lieu qu’un tan­go de ce nom des années 40 évoque avec des paroles et une musique d’Enrique Domin­go Cadí­camo.
Vous trou­verez quelques pré­ci­sions sur cette his­toire dans un arti­cle d’Isaac Otero.

Autres versions

El Once (A diver­tirse) 1925 – Orques­ta Fran­cis­co Canaro.

L’année précé­dente, Frese­do a gril­lé la place à Canaro qui ani­mait ce bal depuis 10 ans. Canaro enreg­istre tout ce qu’il peut, alors, mal­gré sans doute une petite décep­tion, il enreg­istre aus­si El once, lui qui a fait de uno a diez (1 à 10)

El once (A diver­tirse) 1925 – Car­los Gardel con acomp. de Guiller­mo Bar­bi­eri, José Ricar­do (gui­tares).

Le petit Français 😉 donne sa ver­sion avec toutes les paroles de Emilio, con­traire­ment à Ibáñez et Ray qui ne chan­taient que le refrain.

El once (A diver­tirse) 1943-01-13 – José Gar­cía y su Orques­ta Los Zor­ros Gris­es.

Et les Zor­ros sont arrivés ! C’est une ver­sion entraî­nante, avec plusieurs pas­sages orig­in­aux. Un petit flo­rilège des « trucs » qu’on peut faire pour jouer un tan­go. Le résul­tat n’a rien de monot­o­ne et est suff­isam­ment fes­tif pour con­va­in­cre des internes décidés à faire la fête. C’est sans doute une ver­sion qui mérit­erait de pass­er plus sou­vent en milon­ga, même si quelques ron­chons pour­raient trou­ver que ce n’est pas un tan­go con­ven­able. J’ai envie de leur dire d’écouter les con­seils de ce tan­go et de se diver­tir. Le tan­go est après tout une pen­sée allè­gre qui peut se danser.

El once (A diver­tirse) 1946-10-21 – Rober­to Fir­po y su Nue­vo Cuar­te­to.

Cette ver­sion par­ti­c­ulière­ment gaie est sans doute une de celles qui con­viendraient le mieux à une fête d’internes. On retrou­ve les sautille­ments chers à Fir­po. Elle trou­vera sans doute encore plus de ron­chons que la précé­dente, mais je réa­gi­rai de la même façon.

El once (A diver­tirse) 1946-12-05 – Orques­ta Car­los Di Sar­li.

Avec cette ver­sion, on retrou­ve la maîtrise de Di Sar­li qui nous pro­pose une ver­sion élé­gante, par­faite pour la danse. C’est sûr que là, il n’y aura pas de ron­chons. Alors, pourquoi s’en priv­er ?

El once (A diver­tirse) 1951-10-23 – Orques­ta Car­los Di Sar­li.

Je préfère la ver­sion de 1946, mais cette inter­pré­ta­tion est égale­ment par­faite pour la danse. Elle aura toute sa place dans une tan­da de cette époque.

El once (A diver­tirse) 1951 – Oswal­do Bercas et son orchestre.

De son vrai nom, Boris Saar­be­coof a tra­vail­lé en France et a pro­duit quelques titres intéres­sants. On a des enreg­istrements de sa part de 1938 à 1956. C’est un des 200 orchestres de l’âge d’or dont on ne par­le plus beau­coup aujourd’hui. Il a égale­ment pro­duit de la musique clas­sique.

El once (A diver­tirse) 1952-11-14 – orques­ta Alfre­do De Ange­lis.

C’est sans doute une des ver­sions que l’on entend le plus. Son entrain et sa fin tonique per­me­t­tent de bien ter­min­er une tan­da instru­men­tale de De Ange­lis.

El once (A diver­tirse) 1954-11-16 – Orques­ta Car­los Di Sar­li.

On retrou­ve Di Sar­li avec des vio­lons sub­limes, notam­ment à 1:42. Je préfère cette ver­sion à celle de 1951. Je la passerai donc assez volon­tiers, comme celle de 1946 qui est ma chou­choute.

El once (A diver­tirse) 1955-10-25 – Quin­te­to Pir­in­cho dir. Fran­cis­co Canaro.

Fran­cis­co Canaro qui n’est pas ran­cu­nier (???) enreg­istre de nou­veau le titre des Frese­do avec son quin­te­to Pir­in­cho. C’est une ver­sion bien ryth­mée avec de beaux pas­sages, comme le solo de ban­donéon à 1:02. Une ver­sion guillerette qui pour­ra servir dans une milon­ga un peu informelle où les danseurs ont envie de se diver­tir (celles où il n’y a pas de ron­chons).

El once (A diver­tirse) 1956-10-30 – Orques­ta Enrique Rodríguez.

Un Rodríguez tardif qui reste léger et qui sera appré­cié par les fans de cet orchestre.

El once (A diver­tirse) 1958 – Argenti­no Galván.

Je cite cette ver­sion ultra­courte, car je l’ai évo­quée dans His­to­ria de la orques­ta típi­ca — Face 1. Pas ques­tion de la plac­er dans une tan­da, bien sûr à cause de sa durée réduite à 33 sec­on­des…

El once (A diver­tirse) 1960c — Juan Cam­bareri y su Cuar­te­to de Ayer.

Juan Cam­bareri, le mage du ban­donéon (El Mago del Ban­doneón) four­nit la plu­part des temps des ver­sions vir­tu­os­es, sou­vent trop rapi­des pour être géniales à danser, mais dans le cas présent, je trou­ve le résul­tat très réus­si. On notera égale­ment que d’autres instru­men­tistes sont vir­tu­os­es dans son orchestre. C’est une ver­sion à faire péter de rage les ron­chons…
Un grand mer­ci à Michael Sat­tler qui m’a fourni une meilleure ver­sion que celle que j’avais (disque 33 tours en mau­vais état).

El once (A diver­tirse) 1965-07-28 – Orques­ta Enrique Mora.

Une ver­sion intéres­sante, mais qui ne boule­verse pas le paysage de tout ce que nous avons déjà évo­qué.

El once (A diver­tirse) 1966-08-03 – Orques­ta Juan D’Arienzo.

Finale­ment D’Arienzo se décide à enreg­istr­er ce titre qui man­quait à son réper­toire. J’adore le jeu de la con­tre­basse de Vic­to­rio Vir­gili­to.

Amusez-vous ! 1934 — W. Heymans — Sacha Guitry — Albert Willemetz

Ce titre fai­sait par­tie de l’opérette de Sacha Gui­t­ry, Flo­restan Ier prince de Mona­co.
Le titre a été créé par Hen­ri Garat.

Amusez-vous 1933 — Hen­ri Garat

L’année suiv­ante, Albert Pré­jean l’enregistre à son tour. C’est la ver­sion la plus con­nue.

Amusez-vous 1934 — Albert Pré­jean.

Et c’est sur cette musique entraî­nante que se ter­mine l’anecdote du jour. À mes amis ron­chons qui ont envie de dire que ce n’est pas du tan­go, je répondrai que c’est une corti­na et qu’il faut pren­dre la vie par le bon bout.

Les paroles de Amusez-vous

Amusez-vous, foutez-vous d’tout
La vie entre nous est si brève
Amusez-vous, comme des fous
La vie est si courte, après tout.
Car l’on n’est pas ici
Pour se faire du souci
On n’est pas ici-bas
Pour se faire du tra­cas.
Amusez-vous, foutez-vous d’tout
La vie passera comme un rêve
Faites les cent coups, dépensez tout
Prenez la vie par le bon bout.
Et zou

Amusez-vous, foutez-vous d’tout
La vie entre nous est si brève
Amusez-vous, comme des fous
La vie est si courte, après tout.
Car l’on n’est pas ici
Pour se faire du souci
On n’est pas ici-bas
Pour se faire du tra­cas.
Amusez-vous, foutez-vous d’tout
La vie passera comme un rêve
Faites les cent coups, dépensez tout
Prenez la vie par le bon bout.
Et zou

Pour que la vie soit tou­jours belle
Ha, que j’aimerais un quo­ti­di­en
Qui n’annoncerait qu’de bonnes nou­velles
Et vous dirait que tout va bien
Pour ne mon­tr­er qu’les avan­tages
Au lieu d’apprendre les décès
On apprendrait les héritages
C’est la même chose et c’est plus gai
Pour rem­plac­er les jour­naux tristes
Que ça serait con­so­la­teur
De lancer un jour­nal opti­miste
Qui dirait à tous ses lecteurs :

Amusez-vous, foutez-vous d’tout
La vie entre nous est si brève
Amusez-vous, comme des fous
La vie est si courte, après tout.
Car l’on n’est pas ici
Pour se faire du souci
On n’est pas ici-bas
Pour se faire du tra­cas.
Amusez-vous, foutez-vous d’tout
La vie passera comme un rêve
Faites les cent coups, dépensez tout
Prenez la vie par le bon bout.
Et zou

Amusez-vous, foutez-vous d’tout
La vie passera comme un rêve
Faites les cent coups, dépensez tout
Prenez la vie par le bon bout.
Et zou

W. Hey­mans — Sacha Gui­t­ry — Albert Willemetz
Amusez-vous, comme des fous.