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Buscándote 1941-12-30 — Orquesta Osvaldo Fresedo con Ricardo Ruiz

Eduardo “Lalo” Scalise (Eduardo Scalise Regard)

Buscán­dote est un des thèmes les plus émou­vants du tan­go. Par la qual­ité de la musique et des paroles de Eduar­do “Lalo” Scalise El poeta del piano, mais aus­si par la sim­plic­ité et la ron­deur de l’interprétation par Frese­do et Ruiz, pour notre tan­go du jour. Nous allons en prof­iter pour regarder de plus prêt com­ment fonc­tionne une par­ti­tion.

Extrait musical

Buscán­dote 1941-12-30 — Orques­ta Osval­do Frese­do con Ricar­do Ruiz
Pre­mière page de la par­ti­tion retran­scrite par Lucas Cáceres.

Cette pre­mière page présente les qua­tre pre­mières mesures. On voit les dif­férents instru­ments. T (ténor, Ricar­do Ruiz, dans cet enreg­istrement), puis 4 vio­lons, 4 ban­donéons, un piano et une con­tre­basse.
À l’armure, il y a deux diès­es, nous sommes en Si mineur. Un mode nos­tal­gique, voire triste. Dans la pre­mière mesure, on remar­que qu’il y a une seule note, un la à la main gauche du piano. La deux­ième mesure com­mence avec la sec­onde note du piano, un fa# de 4 temps (note ronde). En même temps, la con­tre­basse com­mence à mar­quer tous les temps (4 par mesure) en com­mençant par un Ré, puis un La et elle va effectuer un mou­ve­ment de bas­cule entre deux notes, Do# Fa# à la mesure suiv­ante et ain­si de suite sur env­i­ron la moitié des mesures de la par­ti­tion. Cela porte la marche, chaque temps est indiqué. Libre aux danseurs de les effectuer ou de choisir plutôt de s’aligner sur des élé­ments de la mélodie.
On remar­quera que les ban­donéons et vio­lons qui débu­tent aus­si à la deux­ième mesure com­men­cent par un silence, suivi de trois croches. Ce motif se répète. Il est assez dis­cret, mais vous n’aurez pas de peine à repér­er ce pouf pouf pouf — pouf pouf pouf dans le début de la musique. L’envolée des vio­lons y met fin, pour com­mencer à énon­cer la pre­mière par­tie (A).

La par­ti­tion du ténor avec la pho­to de Ricar­do Ruiz. J’ai rajouté le début des paroles en rouge. La par­ti­tion a été pro­posée égale­ment par Lucas Cáceres.

Ici, c’est la par­ti­tion du ténor (Ricar­do Ruiz dans notre cas) qui ne com­mence à chanter qu’à par­tir de la mesure 43 (en lev­ée de la 44).
On se sou­vient que le début de la par­ti­tion était en Ré mineur, après un pas­sage en Fa mineur, Ruiz com­mence à chanter en Fa majeur. La présence de diès­es sur 4 des Sols et un Do, font bas­culer cer­tains pas­sages en Ré mineur).

Roue des modes, majeurs et mineurs, avec le nom des notes à gauche, et avec les let­tres à droite.

Une petite aide pour vous aider à vous repér­er dans les tonal­ités. Le nom­bre de diès­es ou bémols à la clef donne la tonal­ité dont le mode peut être majeur ou mineur. Pour décider, il faut écouter. Sou­vent, il y a beau­coup de change­ments de tonal­ités et des altéra­tions (Diès­es, ou Bémols) ponctuelles qui ren­dent dif­fi­cile de décider la tonal­ité exacte util­isée. Mais ce n’est pas si impor­tant, ce qui l’est, c’est unique­ment de savoir si c’est majeur ou mineur, pour adapter la danse à la sen­si­bil­ité de la musique, donc l’écoute est suff­isante.
Main­tenant que vous êtes au point, je vous pro­pose de suiv­re la par­ti­tion durant l’écoute, grâce au tra­vail remar­quable de Lucas Cáceres.

Par­ti­tion ani­mée de Buscán­dote, une vidéo réal­isée par Lucas Cáceres.

Vous remar­querez qu’il y a toutes les par­ties, et qu’il y a donc beau­coup de change­ments de pages. Dans un orchestre, chaque instru­ment n’a que sa par­tie et si cela vous intéresse, vous pou­vez vous les obtenir en vous abon­nant à son Patre­on.
Assez par­lé de la musique, intéres­sons-nous aux paroles, main­tenant.

Paroles

Vagar con el can­san­cio de mi eter­no andar
tris­teza amar­ga de la soledad
ansias enormes de lle­gar.
sabrás que por la vida fui buscán­dote
que mis ensueños sin quer­er vencí
que en algún cruce los dejé
mi andar apresuré
con la esper­an­za de encon­trarte a ti
lar­gos caminos hil­vané
leguas y leguas recor­rí por ti
después que entre tus bra­zos pue­da des­cansar
si lo pre­fieres volveré a mar­char
por mi camino de ayer
sabrás que por la vida fui buscán­dote
que mis ensueños sin quer­er rompí
que en algún cruce los dejé
mi andar apresuré
con la esper­an­za de encon­trarte a ti
lar­gos caminos hil­vané
leguas y leguas recor­rí por ti
después que entre tus bra­zos pue­da des­cansar
si lo pre­fieres volveré a mar­char
por mi camino de ayer.
Eduar­do “Lalo” Scalise (Eduar­do Scalise Regard)

Traduction libre

Errer avec la fatigue de ma marche éter­nelle, l’amère tristesse de la soli­tude, l’énorme désir d’ar­riv­er.
Tu sauras qu’à tra­vers la vie je t’ai cher­chée, que j’ai dépassé mes rêves sans le vouloir, qu’à un croise­ment je les ai lais­sés. Ma marche pré­cip­itée dans l’e­spoir de te trou­ver.
Après que je pour­rai me repos­er dans tes bras, si tu préfères, je retourn­erai à marcher par mon chemin d’hi­er.
Tu sauras qu’à tra­vers la vie je t’ai cher­chée, que j’ai dépassé mes rêves sans le vouloir, qu’à un croise­ment je les ai lais­sés. Ma marche pré­cip­itée dans l’e­spoir de te trou­ver.
J’ai enchaîné de longues routes, des lieues et des lieues que j’ai par­cou­rues pour vous.
Après que je pour­rai me repos­er dans tes bras, si tu préfères, je retourn­erai à marcher par mon chemin d’hi­er.

Autres versions

Il n’y a pas d’enregistrement de l’âge d’or, autre que celui de Frese­do et Ruiz. Cepen­dant, la pas­sion européenne pour Frese­do fait que beau­coup d’orchestre du 21e siè­cle se sont lancés dans l’enregistrement de ce chef d’œuvre, avec des for­tunes divers­es.

Buscán­dote 1941-12-30 — Orques­ta Osval­do Frese­do con Ricar­do Ruiz. C’est notre tan­go du jour, le mètre étalon, la référence absolue.
Buscán­dote 2000-06-01 — Klaus Johns.

Une ver­sion instru­men­tale avec un par­ti pris de tem­po par­ti­c­ulière­ment lent. C’est prob­a­ble­ment à class­er au ray­on des étrangetés, mais cer­taine­ment pas à pro­pos­er au bal.

Buscán­dote 2012 — Sex­te­to Milonguero con Javier Di Ciri­a­co.

On ne présente plus cet orchestre qui a fait notre joie, et notam­ment son Directeur, chanteur, Javier Di Ciri­a­co, pen­dant une quin­zaine d’années.

Buscán­dote 2012 — Solo Tan­go Orques­ta.

Cet orchestre russe a égale­ment son pub­lic. Ils pro­posent, ici, une ver­sion instru­men­tale.

Buscán­dote 2013 — Ariel Ardit y Orques­ta Típi­ca.

L’incroyable solo de vio­lon qui ouvre cette ver­sion peut sur­pren­dre. Mais, une fois lancé, avec un rythme bien mar­qué par les ban­donéons et tou­jours dom­iné par les cordes et ce superbe vio­lon, fait que c’est cer­taine­ment une ver­sion « chair de poule » pour beau­coup. La belle voix, puis­sante et chaude d’Ariel Ardit ter­mine de faire de cette ver­sion remar­quable. Pour la danse, les arras­tres d’Ariel peu­vent gên­er cer­tains danseurs et le rythme rapi­de peut faire que l’on préfère d’autres ver­sions. Je pense qu’en Europe cette inter­pré­ta­tion aurait des ama­teurs.

Buscán­dote 2013 — Hype­r­i­on Ensem­ble con Rubén Peloni.

Après l’écoute de l’enregistrement d’Ariel Ardit, cette ver­sion tran­quille peut paraître un peu faible, mais il faut la com­par­er à notre étalon, la ver­sion de Frese­do et Ruiz, pour voir que c’est une belle réal­i­sa­tion, intime et bien accordée au thème de la chan­son.

Buscán­dote 2014 (En vivo) — Sex­te­to Milonguero con Javier Di Ciri­a­co.

Une ver­sion avec pub­lic qui per­met de se sou­venir de l’ambiance que met­tait cet orchestre. C’était à Rosario (Argen­tine) lors de l’Encuentro Tanguero del Inte­ri­or (ETI). J’ai eu la chance de voir et écouter cet orchestre de nom­breuses fois, c’est vrai­ment dom­mage qu’il n’existe plus.

Buscán­dote 2015 — Cuar­te­to SolTan­go.

Ce cuar­te­to, avec beau­coup moins d’instruments s’approche de la ver­sion de Frese­do. Une belle per­for­mance. Le solo de vio­lon qui rem­place la voix de Ricar­do Ruiz, bien que bien chan­tant, est sans doute ce qui peut faire baiss­er la valeur de l’ensemble, sauf pour les danseurs qui n’aiment pas les chanteurs. Si, il y en a, et, à mon avis, la prin­ci­pale rai­son, est que cer­tains DJ met­tent des chan­sons tan­go au lieu de véri­ta­bles tan­gos chan­tés de danse.

Buscán­dote 2015 — Orques­ta La 2X4 Rosa­ri­na con Martín Piñol.

Retour à une ver­sion chan­tée. La voix de Martín Piñol pour­rait béné­fici­er d’un orchestre plus accom­pli. La prise de son mérit­erait d’être meilleure égale­ment. Le résul­tat ne risque pas de détrôn­er, la ver­sion de Frese­do qui en est claire­ment le mod­èle.

Buscán­dote 2015-07-09 — Esquina Sur con Diego Di Mar­ti­no.

Je vous avais bien dit qu’il y avait une folie à notre époque pour Frese­do. Cet enreg­istrement de Esquina Sur en est une autre preuve. La voix de Di Mar­ti­no, s’élance légère et flu­ide par-dessus l’orchestre, ce n’est pas vilain, mais là encore, Frese­do et Ruiz restent en tête.

Buscán­dote 2016-03-01 — El Cachivache Quin­te­to.

El Cachivache signe une ver­sion plus per­son­nelle, qui n’est pas qu’une sim­ple imi­ta­tion de Frese­do et on leur en est gré, même si l’utilisation d’autres instru­ments comme la gui­tare élec­trique peut don­ner des bou­tons à des milongueros sclérosés. C’est une ver­sion instru­men­tale, mais la diver­sité des vari­a­tions fait que ce n’est pas monot­o­ne. L’entrée avec une gamme de do majeur descen­dent suiv­ie d’une gamme ascen­dante est très orig­i­nale. Le final est égale­ment intéres­sant, c’est une ver­sion qui peut faire l’affaire avec des tangueros curieux. Elle devrait plaire aus­si à Angela C. car il y a une bonne pro­por­tion de mode majeur dans cette ver­sion, con­traire­ment à la ver­sion de Frese­do qui est majori­taire­ment en mode mineur 😉

Buscán­dote 2016-12 — Orques­ta Román­ti­ca Milonguera con Rober­to Minon­di.

Avec la Román­ti­ca Milonguera on revient à un reg­istre plus clas­sique, même si cet orchestre a su créer son pro­pre son. Ici, c’est Rober­to Minon­di qui nous rav­it.

Buscán­dote 2019 — Cuar­te­to Mulen­ga. Cette ver­sion présente l’intérêt de voir les instru­men­tistes opér­er. Mais ce titre est aus­si sur CD. Cliquez sur le lien pour voir la vidéo. https://youtu.be/WHJq2fwE3Fk . Vidéo réal­isée au Bode­gon (restau­rant) El Des­ti­no, à Quilmes (Province de Buenos Aires).

Buscán­dote 2021-03 Orques­ta Típi­ca Andar­ie­ga.

Un début orig­i­nal, qui peut faire douter durant les 30 pre­mières sec­on­des qu’on écoute Buscán­dote. On notera la descente de piano, très orig­i­nale durant ce début. Le reste de l’orchestration renou­velle égale­ment l’œuvre, qui est comme décom­posée, déstruc­turée au prof­it de solos qui se super­posent. C’est presque un ensem­ble de cita­tions de l’œuvre orig­i­nale, plus qu’une inter­pré­ta­tion au sens habituel. La fin ne dis­sipera pas cette impres­sion.

Je te cherche, pas à pas

Comme DJ, je m’intéresse à savoir com­ment les danseurs vont pou­voir inter­préter la musique que je pro­pose.
J’ai trou­vé cette petite pépite, réal­isée par Jua­na Gar­cía y Julio Rob­les. Elle mon­tre les temps et con­tretemps.

Cliquez sur le lien pour con­sul­ter la vidéo. https://youtu.be/RjNY9pnNUoA

Pos­er les pieds en rythme est la toute pre­mière étape du danseur de tan­go et, même si cer­tains ne s’y résol­vent pas, il me sem­ble qu’il faut aller beau­coup plus loin, le tan­go étant une danse d’improvisation. On tir­era cepen­dant de cette vidéo un élé­ment très intéres­sant, la sépa­ra­tion entre les dif­férentes par­ties. Savoir les repér­er per­met d’adapter la danse en changeant le style pour chaque par­tie.
Il faut aus­si savoir dis­tinguer la phrase musi­cale, afin que le cou­ple se retrou­ve dans un état d’attente ou pour le moins cohérent avec la prochaine tran­si­tion ou enchaîne­ment de phras­es. Cer­tains comptent de 1 à 8, mais c’est beau­coup plus agréable de se laiss­er porter par la struc­ture de la musique.
Je décon­seille donc le comp­tage, sauf pour des choré­gra­phies en groupe, ce qui n’est pas du même domaine que le tan­go social qui nous intéresse ici, car je trou­ve dom­mage d’occuper son cerveau dans une tâche qui n’aide pas à enten­dre la musique.
Il me sem­ble qu’il est ample­ment préférable de tra­vailler son « instinct », car, rapi­de­ment, le corps saura quand la musique va chang­er et, incon­sciem­ment, il va se pré­par­er, ce qui vous per­me­t­tra de danser l’esprit totale­ment libre, en vous lais­sant porter.
Ce même instinct sert au DJ pour iden­ti­fi­er les musiques plus dans­ables que d’autres. Le DJ fait marcher ses danseurs et eux le suiv­ent. Il a donc la respon­s­abil­ité d’ouvrir la voie et de leur pro­pos­er des chemins dont les dif­fi­cultés sont adap­tées.

À bien­tôt, les amis, mer­ci de me suiv­re.

À bien­tôt, les amis, mer­ci de me suiv­re.

Invierno 1937-08-19 — Orquesta Francisco Canaro con Roberto Maida

Horacio Gemignani Pettorossi Letra: Enrique Domingo Cadícamo

Invier­no est sans doute un des tan­gos préférés des danseurs qui aiment Canaro. Avec un nom pareil, on se doute qu’on va par­ler de froid, d’hiver, en somme, mais avez-vous fait atten­tion aux émou­vantes paroles de Cadí­camo ? Je vous offre en prime le texte com­plet de Cadí­camo. Prenez votre man­teau et votre écharpe et entrons au cœur de l’hiver.

Extrait musical

Invier­no 1937-08-19 — Orques­ta Fran­cis­co Canaro con Rober­to Mai­da
Disque et par­ti­tion de Invier­no

Il n’est pas sûr, qu’il soit néces­saire de décrire cet enreg­istrement tant il est con­nu. On notera l’in­ter­ven­tion des instru­ments à vent (cuiv­res) typ­iques de Canaro. Le rythme est appuyé, comme un celui d’un homme marchant dans une neige épaisse.
La voix de Mai­da, sur­v­ole l’orchestre qui atténue ses pas lourds pour laiss­er la place au chanteur. C’est du Canaro typ­ique et effi­cace. D’ailleurs, les orchestres con­tem­po­rains qui repren­dront le titre s’in­spireront assez forte­ment de cette ver­sion pour faire leurs pro­pres ver­sions. Nous en ver­rons quelques-unes en fin d’ar­ti­cle.

Paroles

Des­de aquel bal­cón
Baja una can­ción,
Que es como un jirón
De una esper­an­za…
Su inten­ción es la deses­per­an­za cru­el
Que me arrin­cona más
En esta soledad.
Des­de aquel bal­cón
Rue­da una can­ción,
Que en la noche negra
Dice así:

Volvió…
El invier­no con su blan­co ajuar,
Ya la escar­cha comen­zó a bril­lar
En mi vida sin amor.
Pro­fun­do pade­cer
Que me hace com­pren­der,
Que hal­larse solo, es un hor­ror.

Y al ver…
Cómo soplan en mi corazón,
Vien­tos fríos de des­o­lación
Quiero llo­rar.
Porque mi alma lle­va
Bru­mas de un invier­no,
Que hoy no puedo disi­par…

En aquel bal­cón
Cesa la can­ción,
Pero igual la escuchan mis oídos
Y es que por el eco persegui­do estoy.
Y todo su dolor
Embar­ga el corazón.
Para qué quer­ré
Esta vida yo,
Cuan­do no me que­da juven­tud…
Hora­cio Gemignani Pet­torossi Letra: Enrique Domin­go Cadí­camo

Rober­to Mai­da chante unique­ment ce qui est en gras, c’est-à-dire le texte annon­cé comme étant la chan­son écoutée par le nar­ra­teur.

Traduction libre

Depuis ce bal­con, une chan­son descend, qui est comme un lam­beau d’e­spoir…
Son sujet est le dés­espoir cru­el qui m’en­fonce davan­tage dans cette soli­tude.
Depuis ce bal­con roule une chan­son qui, dans la nuit noire, dit ceci :
Il est revenu…
L’hiv­er avec ses atours blancs,
Déjà le givre a com­mencé à briller dans ma vie sans amour.
Une souf­france pro­fonde qui me fait com­pren­dre qu’être seul, c’est une hor­reur.
Et quand je vois…
Comme ils souf­flent dans mon cœur, les vents froids de la déso­la­tion, j’ai envie de pleur­er.
Parce que mon âme porte les brumes d’un hiv­er, qu’au­jour­d’hui je ne peux pas dis­siper…

Sur ce bal­con, la chan­son s’ar­rête, mais mes oreilles l’en­ten­dent encore, car l’é­cho me pour­suit.
Et toute sa douleur paral­yse le cœur.
Pourquoi, moi, voudrais-je cette vie, alors que je n’ai plus de jeunesse…

Autres versions

Je serai ten­té de dire qu’il n’y a pas d’autre ver­sion, mais ce ne serait pas sym­pa­thique pour les orchestres con­tem­po­rains qui ont remis le titre à la mode.
Je sig­nale tout de même qu’il existe au moins deux autres tan­gos qui s’appellent Invier­no, com­posés par Arturo Bet­toni avec des paroles de Ramón Abel­lá (Rafael Jorge Abel­lá) pour le pre­mier et Eduar­do Bian­co avec Arau­jo (paroles et musique) pour le sec­ond.
Je vous pro­pose seule­ment ici, les ver­sions issues de Hora­cio Gemignani Pet­torossi et Enrique Domin­go Cadí­camo.

Invier­no 1937-08-19 — Orques­ta Fran­cis­co Canaro con Rober­to Mai­da. C’est notre tan­go du jour.
Invier­no 2013-11-30 — Hype­r­i­on Ensem­ble con Rubén Peloni
Invier­no 2015 — Cuar­te­to Mulen­ga con Max­i­m­il­iano Agüero
Invier­no 2015 — Orques­ta Típi­ca Mis­te­riosa con Car­los Rossi
Invier­no 2015c — Solo Tan­go Orques­ta
Invier­no 2017-10 — Orques­ta Román­ti­ca Milonguera con Marisol Martínez y Rober­to Minon­di.

 Une orches­tra­tion orig­i­nale et un duo, homme femme, com­ment résis­ter à cette ver­sion ?

Invier­no 2018 — Orques­ta Típi­ca Mis­te­riosa con Eliana Sosa

De nou­veau la Mis­te­riosa dans une autre ver­sion, cette fois chan­tée par une femme, Eliana Sosa. Mer­ci à Thier­ry, mon, tal­entueux cor­recteur qui détecte les coquille et a remar­qué que j’avais mis deux fois la même ver­sion de Invier­no par la Típi­ca Mis­te­riosa. Main­tenant, vous avez bien ici Eliana Sosa qui a égale­ment enreg­istré avec Juan Pablo Gal­lar­do et a réal­isé deux dis­ques, Sin­er­gia tanguera et De donde ven­go (dans lequel elle chante égale­ment ses pro­pres com­po­si­tions).

Et pour ter­min­er en vidéo, un enreg­istrement de 2017 du Cuar­te­to Mulen­ga à la milon­ga Parakul­tur­al.

Sinsabor 1939-06-05 — Orquesta Edgardo Donato con Horacio Lagos y Lita Morales

Ascanio Ernesto Donato Letra : Adolfo Antonio Vedani

Il y a quelques semaines, je suis tombé sur un arti­cle qui dis­ait que Tita Merel­lo avec «Yo soy así», avait don­né une place aux femmes dans le tan­go. Il me sem­ble que c’est aller un peu vite en besogne, car les femmes en sont des inter­prètes de la pre­mière heure, Flo­ra Gob­bi, Rosi­ta Quirogan, Ada Fal­cón, Ani­ta Palmero, Azu­ce­na Maizani, Nel­ly Omar, Mer­cedes Simone, Lita Morales, Lib­er­tad Lamar­que, Tania, María Graña, Susana Rinal­di, Vir­ginia Luque, Ela­dia Blázquez, Nina Miran­da, Impreio Argenti­na, Olga Del­grossi et bien sûr et pas des moin­dres, Tita Merel­lo. Aujourd’hui, c’est Lita qui nous par­le de tan­go.

Pourquoi cette impression que les femmes ne sont pas dans l’univers du tango ?

Je pense que cette vision a trois caus­es. La pre­mière est que les femmes ont eu une place impor­tante comme chanteuses, mais pas réelle­ment comme chefs d’orchestre ou musi­ci­ennes. Aujourd’hui, beau­coup de danseurs con­nais­sent et recon­nais­sent les orchestres, mais très peu, les chanteurs et quand ils le font, c’est sou­vent, car ce sont des « cou­ples » que l’on est habitué à associ­er à un orchestre, comme D’Agostino-Vargas, Troi­lo-Fiorenti­no ou Rodriguez-Moreno. S’ils enten­dent Fiorenti­no avec un autre orchestre, pas sûr qu’ils le recon­nais­sent.

Les femmes ont plus sou­vent chan­té des ver­sions à écouter que des ver­sions à danser. Je n’ai pas d’explication sur cette rai­son, d’autant plus que la voix de femme dans un reg­istre plus aiguë laisse de la place aux instru­ments plus graves qui mar­quent générale­ment la pul­sa­tion, Main gauche au piano, con­tre­basse, ban­donéon… La preuve est que des ver­sions chan­tées de bout en bout par des femmes sont par­faite­ment dans­ables alors que par le même orchestre et à la même époque, une ver­sion chan­tée par un homme n’est qu’à écouter. Voir par exem­ple les enreg­istrements de Canaro qui a de nom­breux exem­ples de titres enreg­istrées deux ou trois fois, pour l’écoute et pour la danse, par un homme ou une femme.

Une autre cause vient sans doute d’un excès de machisme dans le domaine. Les hommes ont occupé la place, lais­sant peu de places aux femmes en dehors des thèmes des tan­gos. Là, elles n’ont pas tou­jours le beau rôle, comme en témoigne notre tan­go du jour.

Dans l’idée de lever un coin du voile et vous mon­tr­er qu’il y a de nom­breuses femmes dans l’univers de tan­go, je vous pro­pose aujourd’hui quelques chanteuses, mais pour l’instant, con­cen­trons-nous sur le phénomène Lita Morales.
Avant d’écouter notre tan­go du jour, sachez qu’il existe un autre tan­go du même titre, Sin sabor joué par Tito Fran­cia qui en est le com­pos­i­teur avec des paroles de Pedro Tusoli. Je ne pour­rai pas vous le faire écouter, n’ayant pas le disque…

Extrait musical

Sins­a­bor 1939-06-05 — Orques­ta Edgar­do Dona­to con Hora­cio Lagos y Lita Morales.

Je pense que nous sommes nom­breux à aimer ce duo mag­nifique, cette musique entraî­nante. La tristesse des paroles passe très bien et n’entame pas la bonne humeur des danseurs. Une valeur sûre pour les milon­gas. La musique est en mode majeur. L’orchestre expose le thème, puis Hora­cio Lagos prend la parole. Lita Morales le rejoint ensuite pour for­mer un duo et finale­ment, l’orchestre ter­mine le tan­go. La struc­ture est très sim­ple, comme l’orchestration. C’est une belle ver­sion qui brille par sa sim­plic­ité et sa légèreté.

Paroles

Lle­van­do mi pesar
Como una maldición
Sin rum­bo fui
Bus­can­do de olvi­dar
El fuego de ese amor
Que te imploré
Y allá en la soledad
Del desam­paro cru­el
Tratan­do de olvi­darte recordé
Con la ansiedad febril
Del día que te di
Todo mi ser
Y al ver la real­i­dad
De toda tu cru­el­dad
Yo maldecí
La luz de tu mirar
En que me encan­dilé
Lle­va­do en mi ansiedad de amar
Besos impreg­na­dos de amar­gu­ra
Tuve de tu boca en su fri­al­dad
Tu alma no sin­tió mi fiel ter­nu­ra
Y me brindó con su rig­or, mal­dad
Quiero disi­par toda mi pena
Bus­co de cal­mar mi sins­a­bor
Sien­to inaguantable esta cade­na
Que me ceñí al implo­rar tu amor

Ascanio Ernesto Dona­to Letra : Adol­fo Anto­nio Vedani

Hora­cio Lagos chante le début, seul, puis Lita Morales se rajoute pour chanter en duo ce qui est en gras.

Traduction libre et indications

Por­tant mon cha­grin comme une malé­dic­tion, sans but, j’ai cher­ché à oubli­er.
Le feu de cet amour que j’implorais de toi et là, dans la soli­tude d’un cru­el aban­don.
Essayant de t’oublier, je me suis sou­venu de l’anxiété fébrile du jour où je t’ai don­né tout mon être et voy­ant la réal­ité de toute ta cru­auté, j’ai mau­dit.
La lumière de ton regard, qui m’a aveuglé (dans laque­lle j’étais ébloui), emporté par mon anx­iété d’aimer.
Des bais­ers imprégnés d’amertume, je les ai obtenus de ta bouche dans sa froideur.
Ton âme n’a pas sen­ti ma ten­dresse fidèle, et m’a offert, avec sa rigueur, la méchanceté.
Je veux dis­siper toute ma douleur, je cherche à apais­er ma détresse (sins­a­bor, de sin sabor [sans saveur] sig­ni­fie regret, malaise moral, tristesse).
Je sens insup­port­able cette chaîne, que je me suis attachée quand j’ai imploré ton amour.

De gauche à droite, Lita Morales, Edgar­do Dona­to et Hora­cio Lagos, l’équipe qui nous offre le tan­go du jour.

Sur cette pho­to, Lita Morales et Hora­cio Lagos ne sem­blent pas être le cou­ple ayant don­né le sujet de ce tan­go… Il se dit qu’ils se seraient mar­iés, mais rien ne le prou­ve. Ce cou­ple, si c’était un cou­ple, était très dis­cret et mys­térieux. Un indice, les deux ont com­mencé par enreg­istr­er du folk­lore, lui un peu avant et ils ont tous les deux arrêté rapi­de­ment la car­rière (1935–1942 pour Hora­cio, 1937–1941 pour Lita, avec un petit retour en 1955–1956). Peut-être l’arrêt en 1941 était pour cause de nais­sance, Lita aurait été enceinte. Ceci pour­rait expli­quer son retour tardif, lorsque son enfant est devenu plus autonome.

Autres versions

Le tan­go du jour est a pri­ori, la plus anci­enne ver­sion enreg­istrée et la seule avant une date assez récente.

Sins­a­bor 1939-06-05 — Orques­ta Edgar­do Dona­to con Hora­cio Lagos y Lita Morales. C’est notre tan­go du jour.

Le Cuar­te­to Mulen­ga l’a enreg­istré vers 2008, avec le chanteur Max­imil­liano Agüero.

Sins­a­bor 2008c — Carte­to Mulen­ga Con Max­imil­liano Agüero.

Je vous laisse penser ce que vous voulez de cette ver­sion, mais elle a du mal à faire oubli­er celle de Dona­to, à mon avis.
C’est toute­fois un bel effort pour faire revivre ce titre, mais l’essai n’est pas totale­ment trans­for­mé. En revanche, la Roman­ti­ca Milonguera nous en a don­né plusieurs ver­sions intéres­santes.

Sins­a­bor 2017-10 — Orques­ta Román­ti­ca Milonguera con Marisol Martínez y Rober­to Minon­di (Sur l’album Roman­ti­ca Milonguera de 2017).
Sins­a­bor 2018 — Orques­ta Román­ti­ca Milonguera con Marisol Martínez y Rober­to Minon­di (sur l’album Duo de 2018). Cette, nou­velle ver­sion est plus tonique.
Sins­a­bor 2019 — Orques­ta Román­ti­ca Milonguera con Marisol Martínez y Rober­to Minon­di (sur le sin­gle Sin sabor — Quizas, quizas, quizás, Nuevas ver­siones de 2019).

Rober­to Minon­di est un mag­nifique chanteur, mais Marisol Martínez, sur scène, lui vole la vedette par son jeu d’actrice remar­quable.

Elle me per­met d’introduire la dernière par­tie de l’anecdote du jour, une petite liste de chanteuses de tan­go. Com­bi­en en con­nais­sez-vous ?

Quelques chanteuses de tango

Je vous pro­pose une petite galerie de por­traits. Elle est très incom­plète, mais j’aurai l’occasion de revenir sur le sujet.

Com­bi­en de chanteuses recon­nais­sez-vous ? Passez la souris sur l’image pour faire appa­raitre le nom de la chanteuse.

Fueron tres años 1956-05-18 — Orquesta Héctor Varela con Argentino Ledesma

Juan Pablo Marín (musique et paroles)

Lorsque Varela lance les qua­tre notes ini­tiales, tous les danseurs réagis­sent. Elles raison­nent comme le pom pom pom pom de la 5e sym­phonie de Beethoven. Le des­tin des danseurs est fixé, ils doivent danser ce titre. Cette fas­ci­na­tion date des pre­miers temps de ce titre qui a été enreg­istré, il n’y a pas trois ans, mais 68 ans et il nous par­le tou­jours.

Le pom pom pom pom de Varela dans la ver­sion avec Ledes­ma.

Même si la par­ti­tion ne com­porte que les notes en rouge pour les trois pre­mières notes, Varela fait jouer une dou­ble croche à la place de la croche du début de la sec­onde mesure à ses vio­lons. C’est rel­a­tive­ment dis­cret. Je l’ai indiqué en plaçant deux points rouges avec un petit point bleu au cen­tre. Varela fait jouer les deux petits points à la place de la croche qu’ils enca­drent. Cela cor­re­spond aux paroles (me/ha), Ledes­ma chan­tant deux syl­labes sur une seule note ; Varela demande à ses vio­lons de faire pareil, par un très léger accent. On se retrou­ve donc avec env­i­ron trois dou­ble croches (No-me-ha), puis la croche pointée (las). On notera que les vio­lons, comme Ledes­ma, chantent le (las) sur la note supérieure de l’accord (dernière note en rouge).
Cela atténue la syn­cope ini­tiale que devrait provo­quer l’anacrouse avec la dou­ble croche ini­tiale suiv­ie d’une croche. L’interprétation est plus proche de trois dou­bles croches, ce qui est sem­blable aux coups du des­tin dans la cinquième sym­phonie de Beethoven. Trois coups brefs suivi d’un plus long. Varela utilise une mon­tée à la quinte, alors que Beethoven utilise une descente à la tierce. Ce démar­rage est dif­férent suiv­ant les orchestres et si Varela l’utilise pour la ver­sion de 1973, il ne le fait pas pour la ver­sion chan­tée par Mau­ré enreg­istrée la même année (1956).
À la fin de la croche pointée rouge, on trou­ve (te-so-ro-mi) sur trois dou­ble croches et une croche qui fait dur­er le dou­ble de temps le (mi), puis le (o) qui dis­pose de toute une noire et qui dure donc qua­tre fois plus longtemps que les trois pre­mières notes bleues.

Juan Pablo Marín

Juan Pablo Marín était gui­tariste et a écrit trois titres un peu con­nus. Fueron tres años, notre tan­go du jour en 1956, et l’année suiv­ante, Reflex­ionemos qui a été enreg­istré trois fois en 1957, par Mau­ré, Gob­bi et Nina Miran­da et Ser­e­na­ta mía enreg­istré par Car­los Di Sar­li avec le duo de Rober­to Flo­rio et Jorge Durán. Ces deux titres de 1957 ne sont pas com­pa­ra­bles avec Fueron tres años ce qui explique un peu leur oubli. Je les laisse donc tran­quille­ment dormir pour vous offrir notre tan­go du jour.

Extrait musical

Fueron tres años 1956-05-18 — Orques­ta Héc­tor Varela con Argenti­no Ledes­ma.
Par­ti­tion de Fueron tres años

Paroles

No me hablas, tesoro mío,
no me hablas ni me has mira­do.
Fueron tres años, mi vida,
tres años muy lejos de tu corazón.
¡Háblame, rompe el silen­cio!
¿No ves que me estoy murien­do?
Y quí­tame este tor­men­to,
porque tu silen­cio ya me dice adiós.

¡Qué cosas que tiene la vida!
¡Qué cosas ten­er que llo­rar!
¡Qué cosas que tiene el des­ti­no!
Será mi camino sufrir y penar.
Pero deja que bese tus labios,
un solo momen­to, y después me voy;
y quí­tame este tor­men­to,
porque tu silen­cio ya me dice adiós.

Aún ten­go fuego en los labios,
del beso de des­pe­di­da.
¿Cómo pen­sar que men­tías,
sí tus negros ojos llora­ban por mí?
¡Háblame, rompe el silen­cio!
¿No ves que me estoy murien­do?
Y quí­tame este tor­men­to,
porque tu silen­cio ya me dice adiós.

Juan Pablo Marín (musique et paroles)

Traduction libre

Tu ne me par­les pas, mon tré­sor,
Tu ne me par­les pas ni ne m’as regardé.
Ce furent trois ans, ma vie,
trois ans très loin de ton cœur.
Par­le-moi, rompt le silence !
Ne vois-tu pas que je suis en train de mourir ?
Et ôte-moi ce tour­ment,
car ton silence, déjà, me dit adieu.

Que de choses tient la vie !
Que de choses à tenir pour pleur­er !
Que de choses tient le des­tin !
Ce sera mon chemin, souf­frir et être peiné.
Mais laisse-moi bais­er tes lèvres,
un seul instant, et ensuite je m’en vais ;
Et enlève-moi ce tour­ment,
car ton silence, déjà, me dit adieu.

J’ai encore du feu sur les lèvres,
du bais­er d’adieu.
Com­ment penser que tu men­tais,
quand tes yeux noirs pleu­raient pour moi ?
Par­le-moi, rompt le silence !
Ne vois-tu pas que je suis en train de mourir ?
Et ôte-moi ce tour­ment,
car ton silence, déjà, me dit adieu.

Autres versions

Seules les deux ver­sions de Varela avec Ledes­ma et Fal­cón sont courantes, pour­tant d’autres méri­tent d’être écoutées, voire dan­sées.

Fueron tres años 1956 — Héc­tor Mau­ré con acomp. de Orques­ta Héc­tor Varela.

Cette ver­sion n’est pas pré­cisé­ment datée. Elle est peut-être postérieure à celle avec Ledes­ma, mais j’ai souhaité la met­tre en pre­mier pour la met­tre en valeur. Même si ce n’est pas une ver­sion de danse, elle est mag­nifique et je pense que vous aurez plaisir à l’écouter. On notera que le début est dif­férent. On peut l’attribuer au fait que Ledes­ma chante durant tout le titre et que par con­séquent, faire un pre­mier pas­sage instru­men­tal aurait été trop long. Varela l’a donc rac­cour­ci et il n’y a pas le pom pom pom pom ini­tial.

Fueron tres años 1956-05-18 — Orques­ta Héc­tor Varela con Argenti­no Ledes­ma. C’est notre tan­go du jour.
Fueron tres años 1956-06-18 — Orques­ta Gra­ciano Gómez con Nina Miran­da.

Le pom pom pom pom est rem­placée une mon­tée des cordes et ban­donéons. Cela donne un départ assez spec­tac­u­laire et très dif­férent. On con­nait Nina Miran­da, une des grandes chanteuses uruguayennes. C’est vif et enlevé, mais ça manque sans doute de l’émotion que l’on trou­ve dans les ver­sions de Varela.

Fueron tres años 1956-06-25 — Jorge Vidal con gui­tar­ras.

Un mois après la ver­sion enreg­istrée par Varela avec Ledes­ma, Jorge Vidal pro­pose une ver­sion en chan­son accom­pa­g­née par des gui­tares. On est dans un tout autre reg­istre. Je trou­ve que l’on perd, là aus­si un peu d’émotion.

Fueron tres años 1956-07-18 — Orques­ta Sím­bo­lo ‘Osmar Mader­na’ dir. Aquiles Rog­gero con Jorge Hidal­go.

Rog­gero choisit la même option que Gómez, un debut lié, mais plus doux.

Fueron tres años 1956-07-27 — Orques­ta Enrique Mario Franci­ni con Alber­to Podestá.

Des nuances sans doute un peu exagérées démar­rent le thème, avec des vio­lons énervés. Podestá qui fait un peu de même ne me sem­ble pas totale­ment con­va­in­cant. C’est de toute façon une ver­sion d’écoute et j’ai donc une excuse pour ne pas la pass­er en milon­ga…

Fueron tres años 1956-08-06 — Orques­ta Dona­to Rac­ciat­ti con Olga Del­grossi

On trou­ve pour la même année, 1956, une ver­sion de Rodriguez avec Moreno, mais j’ai un gros doute, car je n’y recon­nais ni l’un ni l’autre dans cette inter­pré­ta­tion qui de toute façon n’a rien de génial. Je préfère m’abstenir… Il y a donc au moins huit ver­sions et peut-être plus enreg­istrées sur la seule année 1956.
Il fau­dra atten­dre 1973, pour que Varela relance la machine à tubes (pour les non-fran­coph­o­nes, machine à suc­cès). Cette fois avec Jorge Fal­cón.

Fueron tres años 1973 — Orques­ta Héc­tor Varela con Jorge Fal­cón.

C’est une autre sub­lime ver­sion, bra­vo, Mon­sieur Varela, trois ver­sions mer­veilleuses du même thème, cha­peau bas !

Fueron tres años 1974 — Orques­ta Jorge Drag­one Con Diego Solis.

Ce n’est pas inin­téres­sant. Nous n’aurions pas les ver­sions de Varela, on s’en con­tenterait peut-être. Ces artistes méri­tent cepen­dant une écoute et comme ils ont enreg­istré dans un réper­toire proche, on peut même faire une tan­da pour accom­pa­g­n­er ce titre.

Fueron tres años 2014 — Sex­te­to Milonguero con Javier Di Ciri­a­co.

C’est dom­mage que cet orchestre ne soit plus. Il avait une sym­pa­thique dynamique impul­sée par son chanteur et directeur. On en a peut-être abusé, mais c’était un des orchestres qui avait un style qui n’était pas qu’une copie de ceux du passé. Je les avais fait venir au fes­ti­val Tan­go­postale de Toulouse lorsque j’étais en charge des orchestres de bals et ils furent épous­tou­flants et en plus, ils fai­saient du trop­i­cal génial qu’il est dom­mage de ne pas plus avoir dans leurs dis­ques, tournés sur le tan­go.

Fueron tres años 2016-12 — Orques­ta Román­ti­ca Milonguera con Rober­to Minon­di.

Un autre orchestre qui a cher­ché un style pro­pre et qui l’a trou­vé. La très belle voix de Rober­to Minon­di et la sonorité par­ti­c­ulière de l’orchestre donne une autre teinte au titre.

Fueron tres años 2018 — Cuar­te­to Mulen­ga con Max­i­m­il­iano Agüero.

L’orchestre mar­que son orig­i­nal­ité en déplaçant la syn­cope ini­tiale du désor­mais fameux pom pom pom pom…

Fueron tres años 2023 — Con­junc­to Berretin con Megan Yvonne.

La ver­sion la plus récente en ma pos­ses­sion de ce titre. Si vous aimez, vous pou­vez acquérir une ver­sion en haute qual­ité sur Band­Camp https://tangoberretin.bandcamp.com/album/tangos-del-berretin.

Même si j’ai un faible pour les ver­sions de Varela, je pense que vous avez écouté des choses qui vous plaisent dans ce tan­go tardif, puisque né après l’âge d’or du tan­go de danse. Si vous n’aimez rien de tous ces titres, je vous pro­pose quelque chose de très dif­férent qui prou­ve le suc­cès majeur de ce thème écrit il y a 68 ans…

Fueron tres años — Los Rangers De Venezuela.

Aïe, ne me tapez pas sur la tête ! Vous avez la preuve que ce n’est pas néces­saire… C’est la corti­na…
Je vous pro­pose de retrou­ver tout de suite votre titre préféré dans la liste qui précède.

À demain les amis !

Hablame, rompe silen­cio.