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Plegaria 1940-04-20 — Orquesta Osvaldo Fresedo con Ricardo Ruiz

Eduardo Bianco

Cer­tains tan­gos sont « inter­dits » dans les milon­gas. On ne passe pas Gardel et surtout pas Volver, mais il y a une liste plus longue, le tan­go du jour en ferait par­tie même s’il n’a jamais fait par­tie des tan­gos inter­dits par la loi argen­tine. Atten­tion, cet arti­cle aura du mal à suiv­re ma devise selon laque­lle le tan­go est une pen­sée heureuse qui se danse.

Extrait musical

Avant de ren­tr­er sur les caus­es de l’interdiction, je vous le pro­pose à écouter. Il est inter­dit dans les milon­gas, pas à l’écoute. Si vous jugez en lisant l’article que l’interdiction est jus­ti­fiée, ou pas, vous pour­rez vot­er à la fin de l’article.

Ple­garia 1940-04-20 — Orques­ta Osval­do Frese­do con Ricar­do Ruiz

On ne peut pas dire que ce soit vilain, non ?

Interdiction officielle du tango

Plusieurs caus­es ont provo­qué des inter­dic­tions du ou des tan­gos.

Interdiction du tango pour des raisons de bienséance

Les débuts inter­lopes du tan­go ont provo­qué sont inter­dic­tion, surtout à cause des paroles, des lieux et des débor­de­ments qu’il pou­vait sus­citer.
La bonne société voy­ait d’un mau­vais œil cette danse de voy­ous qui nais­sait dans les faubourgs, mais ses fils s’y aco­quinèrent. Le pou­voir religieux pous­sait des cris d’orfraie, jusqu’à ce que le danseur Casimiro Ain fasse une démon­stra­tion au pape. 
Le pape ayant don­né sa béné­dic­tion et le tan­go s’étant acheté une con­duite en Europe, les inter­dic­tions sont lev­ées et la bonne société se lance à son tour sans réserve dans la pra­tique de cette danse.

Tangos interdits par les dictatures militaires

Cepen­dant, la dic­tature mil­i­taire a repris la ques­tion en main et pub­lié une liste de tan­gos inter­dits, non pas à cause de la musique, bien sûr, mais à cause des paroles. Les extrêmes droites, sont rarement favor­ables à la cul­ture et n’aiment pas trop les cri­tiques.
A mi país de Rober­to Diaz et Rey­nal­do Martín
Acquaforte de C. Maram­bio Catán et H. Alfre­do Per­roti
Al mun­do le fal­ta un tornil­lo de Enrique Cadicamo
Al pie de la San­ta Cruz de M. Bat­tis­tel­la et E. Delfi­no
Bron­ca de Mario Bat­tis­tel­la et Edmun­do Rivero
Cabal­lo Criol­lo de J. Dale­vuelta et F. Ramirez de Aguilar
Cam­bal­ache de Enrique San­tos Dis­cépo­lo
Ciru­ja de T.A. Mari­no et E.N. de la Cruz
Gor­riones de Cele­do­nio Flo­res et Eduar­do Pereyra
Jor­nalero de Atilio Car­bone
Matu­fias de Ángel G. Vil­lol­do
Men­ti­ras criol­las de Oscar Arona
Pajar­i­to de Dante A. Liny­era
Pan de Cele­do­nio Flo­res et Eduar­do Pereyra
Que­vachaché de Enrique San­tos Dis­cépo­lo
Sol a sol de Daniel L. Bar­reto
Solo de Fer­nan­do Solanas
Bien sûr, cette liste n’est plus d’actualité, du moins tant qu’un gou­verne­ment ne juge pas de nou­veau que ces paroles peu­vent nuire à son pres­tige. Ceux qui suiv­ent la sit­u­a­tion en Argen­tine voient cer­taine­ment ce qui avive mes craintes.

Tangos « interdits » sans « interdit ».

Les tan­gos de Gardel sont réputés comme ne devant pas se danser. L’interdit est le plus fort sur Volver et sur Adios ami­gos, à cause de la fin trag­ique du chanteur. Le DJ n’ira pas en prison, mais cer­tains danseurs seront sur­pris.
D’un autre côté, Gardel n’a pas per­for­mé pour la piste de danse, c’est donc un moin­dre mal. Cepen­dant, on trou­ve plusieurs tan­gos réal­isés par la suite avec la voix de Gardel sur des instru­men­ta­tions mod­ernes. Ces « prouess­es » ont été ren­du pos­si­bles par les pro­grès tech­niques qui per­me­t­taient de couper des ban­des de fréquences. Le sys­tème est assez sim­ple, ce sont des ensem­bles de résis­tances et con­den­sa­teurs qui fil­trent cer­taines fréquences. Des poten­tiomètres per­me­t­tent d’ajuster les paramètres. Ain­si on peut ren­forcer la voix et baiss­er les fréquences où jouent les instru­ments. L’orchestre joue ensuite le morceau en appuyant suff­isam­ment pour mas­quer les restes de gui­tare des enreg­istrements orig­in­aux…

Par exemple par Canaro, dans les années 50 (1955 à 1959),

Ban­doneón arra­balero, Cho­ra, Madame Ivonne, Madre hay una sola, Mi noche triste, Siga el cor­so, Yira Yira.

Yira… Yira… 1955-11-13 1930-10-16 — Car­los Gardel con acomp. de la orques­ta de Fran­cis­co Canaro.

Par exemple De Angelis en 1973 et 1974

Alma en pena, Alma­gro, Ausen­cia, Cualquier cosa, Due­lo criol­lo, Esta noche me embor­ra­cho, Giusepe el zap­a­tero, Ínti­mas, La cumpar­si­ta (Si supieras), Mal­e­va­je, Me enam­oré una vez (ranchera), Melodía de arra­bal, adiós mucha­chos, Muñe­ca bra­va, Nel­ly (valse), Paler­mo, Rosas de abril (valse), Si soy así, Tomo y obli­go, Viejo jardín (valse), Viejo smok­ing, Yira Yira.

Yira… Yira… 1973-10-25 1930-10-16 — Orques­ta Alfre­do De Ange­lis con Car­los Gardel. La ver­sion de Ange­lis à par­tir de Yira Yira…

Par exemple Otros Aires en 2004

Aquel mucha­cho bueno (extraits de Aquel Mucha­cho Triste par Car­los Gardel en 1929), En direc­ción a mi casa (extraits de El Car­retero par Car­los Gardel en 1922), La Pam­pa Seca (extraits de El Car­retero par Car­los Gardel en 1922), Milon­ga Sen­ti­men­tal (extraits de Milon­ga Sen­ti­men­tal par Car­los Gardel en 1929), Per­can­ta (extraits de Mi Noche Triste par Car­los Gardel).
Les résul­tats sont plutôt moyens et si on peut con­sid­ér­er que cer­tains sont dans­ables, ce n’est pas une urgence de les pass­er.
Pour ma part je n’ai passé des titres de cette liste qu’à une seule reprise en plus de 20 ans de car­rière et c’était pour une milon­ga « spé­ciale Gardel » dans le cadre du fes­ti­val Tan­go postal (Toulouse, France). Heureuse­ment, le thème autori­sait de pass­er des titres com­posés par Gardel, mais joués par d’autres orchestres…

Interdits par devoir de mémoire

Le tan­go du jour fait par­tie de cette caté­gorie. Il a été com­posé par Eduar­do Bian­co qui a égale­ment écrit les paroles.
Ce tan­go, dans sa ver­sion de 1927 que vous pour­rez enten­dre ci-dessous est triste et ne donne pas du tout envie de danser. On imag­ine facile­ment sa dif­fu­sion lors d’un enter­re­ment.
En 1939, l’auteur qui était asso­cié à Bachicha pour la ver­sion de 1927, récidive. Cette ver­sion d’une grande émo­tion et tristesse ne se prête pas non plus à la danse.
Il en est autrement de la ver­sion de Frese­do qui pour­rait s’intégrer dans une tan­da.
Donc, les ver­sions avec Bian­co ne sont pas pass­ables car elles ne se prê­tent pas à la milon­ga, mais celle de Frese­do le pour­rait. Alors pourquoi l’interdire ?
Eduar­do Bian­co a dédi­cacé ce tan­go au Roi Alfon­so XIII d’Espagne (et aupar­a­vant dédié Evo­cación à Ben­i­to Mus­soli­ni), mais le plus grave est à venir…
Ce musi­cien etait con­sid­éré comme ayant des idées anti­sémites et comme étant sen­si­ble aux thès­es fas­cistes. Il fréquen­tait les milieux pron­azis.
Pour les nazis alle­mand, le tan­go con­sti­tu­ait une réponse aux Jazz des Noirs améri­cains qui avait le vent en poupe. Ils ont donc encour­agé le tan­go en Alle­magne, comme en témoignent les nom­breux tan­gos alle­mands de l’époque.
Lors d’un con­cert à l’ambassade d’Argentine à Berlin, Adolf Hitler aurait enten­du la musique jouée par Bian­co et aurait demandé que cette musique soit jouée par les déportés juifs aux portes des cham­bres à gaz (Jens-Ingo a attiré mon atten­tion sur le fait que ce point serait de la pro­pa­gande russe, je mets donc en ques­tion ce point, d’autant plus que l’ambassadeur d’Argentine qui est cité dans ces sources, Eduar­do Labougle Car­ran­za, a quit­té ses fonc­tions à Berlin an 1939 et donc avant la liste en place de la « solu­tion finale ».

Toute­fois, le poète roumain Paul Celan détenu en camp de con­cen­tra­tion a évo­qué cette hor­reur dans son poème Todesfuge. Selon Enzo Tra­ver­so, ce ne serait pas un témoignage direct, cette pra­tique n’étant pas for­cé­ment général­isée dans tous les camps et Celan n’aurait pas été dans le camp de Lublin — Maj­danek, où selon l’Armée rouge ce « rit­uel » aurait été pra­tiqué.
Si dans les camps la ver­sion n’était pas chan­tée, Alek­sander Kulisiewicz a ajouté des paroles et a même enreg­istré un disque (Songs from the Depths of Hell). Je ne vous le pro­pose pas ici, mais vous pou­vez l’écouter sur le site de la Smith­son­ian et même l’acheter.
S’il existe des « tan­gos de la muerte » (tan­go de la mort) qui por­tent réelle­ment ce titre, on a égale­ment bap­tisé ain­si, pour son usage macabre, ple­garia. Les SS l’avaient surnom­mé, « Muerte en fuga » « Todesfuge » (mort en fugue)…
Pour cette rai­son, même s’il y a des doutes sur cer­tains élé­ments de cette his­toire, on ne passe générale­ment pas ple­garia en milon­ga, même la belle ver­sion de Frese­do. Cepen­dant, si un DJ la passe, soyez indul­gents, pas comme cet indi­vidu qui attrapé une pau­vre DJ débu­tante en la trai­tant de nazi tout en la sec­ouant, car elle avait passé ce titre.

Adden­dum : Jens-Ingo a attiré mon atten­tion sur un livre qui remet­trait en ques­tion ces élé­ments.
https://www.tangodanza.de/Books_Dirk-E-Dietz-Der-Todestango–1726.html?language=en “It still cir­cles over the dancers, the ghost of the ‘death tan­go’ that the nefar­i­ous Eduar­do Bian­co once brought into the world to give the Nazis a fit­ting sound­track for their atroc­i­ties.
One of the dancers, his­to­ri­an and jour­nal­ist Dirk E. Dietz, has now stud­ied the phe­nom­e­non exten­sive­ly. In his inves­ti­ga­tion, he con­cludes that the fairy tale of the ‘death tan­go’ is based on an act of delib­er­ate com­mu­nist pro­pa­gan­da toward the end of World War II.

As inter­est in the tan­go grew, so did the spread of this leg­end. It is there­fore far from being true, as Dietz proves in detail in his book.
A strong book — and an impor­tant book for the tan­go.”.

Pour nous, DJ, même si cette his­toire est fausse, il nous faut savoir que l’on peut heurter la sen­si­bil­ité de cer­taines per­son­nes et donc pren­dre les mesures néces­saires avant de pass­er un titre de ce type. (Fin de l’addendum).

Extrait musical (bis)

Ple­garia 1940-04-20 — Orques­ta Osval­do Frese­do con Ricar­do Ruiz

. Le rythme est tonique et la voix de Ricar­do Ruiz est comme tou­jours mag­nifique. Si on ne prête pas atten­tion aux paroles, on peut pass­er à côté de la tristesse du thème. Ce titre sans l’histoire fumeuse de Bian­co pour­rait pass­er en milon­ga, dans un moment d’émotion, par exem­ple en sou­venir d’un dis­paru, lors d’un hom­mage.

Les paroles

Ple­garia que lle­ga a mi alma
al son de lentas cam­panadas,
ple­garia que es con­sue­lo y cal­ma
para las almas desam­para­das.
El órgano de la capil­la
embar­ga a todos de emo­ción
mien­tras que un alma de rodil­las
¡pide con­sue­lo, pide perdón!

¡Ay de mí!… ¡Ay señor!…
¡Cuán­ta amar­gu­ra y dolor!
Cuan­do el sol se va ocul­tan­do
una ple­garia
y se muere lenta­mente
bro­ta de mi alma
cruza un alma doliente
y ele­vo un rezo
en el atarde­cer.

Murió la bel­la pen­i­tente,
murió, y su alma arrepen­ti­da
voló muy lejos de esta vida, 
se fue sin que­jas, tími­da­mente,
y di en que noche calla­da
se oye un can­to de dolor
y su alma triste, perdó­nala,
toda de blan­co can­ta al amor!

Eduar­do Bian­co

Les paroles sont tristes et peu­vent plomber l’ambiance de la milon­ga, mais rien de répréhen­si­ble dans leur con­tenu.

Prière qui vient à mon âme au son de lentes son­ner­ies de cloches, prière qui est con­so­la­tion et calme pour les âmes désem­parées.
L’orgue de la chapelle embar­que tout le monde dans l’émotion tan­dis qu’une âme à genoux demande du récon­fort, demande par­don !

Pau­vre de moi ! … Oh Seigneur ! …
Com­bi­en d’amertume et de douleur !
Lorsque le soleil va s’occulter
Une prière
et se meurt lente­ment
Jail­lit de mon âme
croise une âme souf­frante
Et adresse une prière
dans le soir.

Elle est morte la belle péni­tente, elle est morte, et son âme repen­tante a volé très loin de cette vie. Elle est par­tie sans se plain­dre, timide­ment, et fit que dans cette nuit silen­cieuse s’entend un chant de douleur. Et son âme triste, par­don­nez-la, toute de blanc chante l’Amour !

Les par­ties en gras et italique sont chan­tées par le choeur.
Le cou­plet en bleu n’est pas chan­té par Ricar­do Ruiz.

Autres versions

Ple­garia 1927-04-22 — Orques­ta Bian­co-Bachicha con Juan Rag­gi y coro.

Pas ques­tion de pass­er cette ver­sion en milon­ga, à cause du per­son­nage, mais aus­si, car il est loin d’être agréable à écouter et à danser. Le ban­nir n’est pas du tout un prob­lème. Je vous épargne leurs autres ver­sions de 1928 et 1929.

Ple­garia 1939-03-15 — Orques­ta Eduar­do Bian­co con Mario Vis­con­ti.

Cette ver­sion com­mence par une cloche lugubre et un chœur chan­tant comme pour un requiem. Puis Mario Vis­con­ti, chante avec beau­coup d’émotion sa prière, en réponse avec le chœur et les instru­ments. Pour moi, c’est assez joli, mais suff­isam­ment triste pour ban­nir cette ver­sion de toute milon­ga.

Ple­garia 1940-04-20 — Orques­ta Osval­do Frese­do con Ricar­do Ruiz. C’est le tan­go du jour.

Les prières (plegarias)

D’autres tan­gos por­tent ce titre. En voici quelques-uns. Il y en a d’autres, comme quoi l’initiative de Bian­co n’est pas éton­nante. C’est un thème qui se retrou­ve au moins jusqu’aux années 50.

La ple­garia 1926-09-07 — Orques­ta Julio De Caro. Ce tan­go (instru­men­tal) a été com­posé par Emilio De Caro.
Ple­garia 1931-08-21 — Orques­ta Juan Maglio “Pacho” (Eduar­do Anto­nio De Maio avec des paroles d’Alfredo Alle­gret­to).

Il y a même une prière en valse par Anto­nio Sure­da avec des paroles de son frère Gerón­i­mo Sure­da. Je vous en pro­pose deux ver­sions. Les paroles sont une prière à la Vierge de Luján,

Ple­garia 1933-07-19 — Orques­ta Fran­cis­co Canaro con Ernesto Famá.

L’introduction est vrai­ment sin­istre. On peut la pass­er si on n’est pas sous Prozac.

Ple­garia 1933-07-22 — Orques­ta Fran­cis­co Lomu­to con Fer­nan­do Díaz.

Cette ver­sion assez proche (et enreg­istrée seule­ment trois jours plus tard) de celle de Canaro, sans l’introduction dép­ri­mante.

Sondage

Pensez-vous que cette ver­sion par Frese­do (pas celles de Bian­co ou Bian­co et Bachicha) pour­rait être dif­fusée en milon­ga ?

Recuerdo, 1944-03-31 — Orquesta Osvaldo Pugliese

Adolfo et/ou Osvaldo Pugliese Letra : Eduardo Moreno

Recuer­do serait le pre­mier tan­go écrit par Osval­do Pugliese. Ayant été édité en 1924, cela voudrait dire qu’il l’aurait écrit avant l’âge de 19 ans. Rien d’étonnant de la part d’un génie, mais ce qui est éton­nant, c’est le titre, Recuer­do (sou­venir), sem­ble plus le titre d’une per­son­ne d’âge mûr que d’un tout jeune homme, surtout pour une pre­mière œuvre. Essayons d’y voir plus clair en regroupant nos sou­venirs…

La famille Pugliese, une famille de musiciens

Osval­do est né en 1905, le 2 décem­bre. Bien que d’une famille mod­este, son père lui offre un vio­lon à l’âge de neuf ans, mais Osval­do préféra le piano.
Je vais vous présen­ter sa famille, tout d’abord avec un arbre généalogique, puis nous entrerons dans les détails en présen­tant les musi­ciens.

Adolfo Pugliese (1876–06-24 — 1945-02-09), le père, flûtiste, compositeur (?) et éditeur de musique

Comme com­pos­i­teur, on lui attribue :

Ausen­cia (Tan­go mío) (Tan­go de 1931), mais nous ver­rons, à la fin de cet arti­cle, qu’il y en a peut-être un autre, ou pas…
La légende veut qu’il soit un mod­este ouvri­er du cuir, comme son père qui était cor­don­nier, mais il était aus­si édi­teur de musique et flûtiste. Il avait donc plusieurs cordes à son arc.
De plus, quand son fils Osval­do a souhaité faire du piano, cela ne sem­ble pas avoir posé de prob­lème alors qu’il venait de lui fournir un vio­lon (qui pou­vait être partagé avec son frère aîné, cepen­dant). Les familles qui ont un piano ne sont pas les plus dému­nies…
Même si Adol­fo a écrit, sem­ble-t-il, écrit peu (ou pas) de tan­go, il en a en revanche édité, notam­ment ceux de ses enfants…
Voici deux exem­ples de par­ti­tion qu’il édi­tait. À droite, celle de Recuer­co, notre tan­go du jour. On remar­quera qu’il indique « musique d’Adolfo Pugliese » et la sec­onde de « Por una car­ta », une com­po­si­tion de son fils Alber­to, frère d’Osvaldo, donc.

Sur la cou­ver­ture de Recuer­do, le nom des musi­ciens de Julio de Caro, à savoir : Julio de Caro, recon­naiss­able à son vio­lon avec cor­net qui est égale­ment le directeur de l’orchestre., puis de gauche à droite, Fran­cis­co de Caro au piano, Pedro Maf­fia au ban­donéon (que l’on retrou­ve sur la par­ti­tion de Por una car­ta), Enrike Krauss à la con­tre­basse, Pedro Lau­renz au ban­donéon et Emilio de Caro, le 3e De Caro de l’orchestre…
Sur la par­ti­tion de Por una car­ta, les sig­na­tures des mem­bres de l’orchestre de Pedro Maf­fia : Elvi­no Var­daro, le mer­veilleux vio­loniste, Osval­do Pugliese au piano, Pedro Maf­fia au ban­donéon et directeur de l’orchestre, Fran­cis­co De Loren­zo à la con­tre­basse, Alfre­do De Fran­co au ban­donéon et Emilio Puglisi au vio­lon.

On voir qu’Adolfo gérait ses affaires et que donc l’idée d’un Osval­do Pugliese né dans un milieu déshérité est bien exagérée. Cela n’a pas empêché Osval­do d’avoir des idées généreuses comme en témoignent son engage­ment au par­ti com­mu­niste argentin et sa con­cep­tion de la répar­ti­tion des gains avec son orchestre. Il divi­sait les émol­u­ments en por­tions égales à cha­cun des mem­bres de l’orchestre, ce qui n’était pas la façon de faire d’autres orchestres ou le leader était le mieux payé…

Antonio Pugliese (1878–11-21— ????), oncle d’Osvaldo. Musicien et compositeur d’au moins un tango

Ce tan­go d’Antonio est : Qué mal hiciste avec des paroles d’Andrés Gaos (fils). Il fut enreg­istré en 1930 par Anto­nio Bonave­na. Je n’ai pas de pho­to du ton­ton, alors je vous pro­pose d’écouter son tan­go dans cette ver­sion instru­men­tale.

Que mal hiciste 1930 Orques­ta Anto­nio Bonave­na (ver­sion instru­men­tale)

Alberto Pugliese (1901–01-29- 1965-05-15), frère d’Osvaldo. Violoniste et compositeur

Curieuse­ment, les grands frères d’Osvaldo sont peu cités dans les textes sur le tan­go. Alber­to a pour­tant réal­isé des com­po­si­tions sym­pa­thiques, par­mi lesquelles on pour­rait citer :

  • Ado­ración (Tan­go) enreg­istré Orques­ta Juan Maglio « Pacho » avec Car­los Viván (1930–03-28).
  • Cabecitas blan­cas (Tan­go) enreg­istré par Osval­do et Chanel (1947–10-14)
  • Car­iño gau­cho (Milon­ga)
  • El char­quero (Tan­go de 1964)
  • El remate (Tan­go) dont son petit frère a fait une mag­nifique ver­sion (1944–06-01). Mais de nom­breux autres orchestres l’ont égale­ment enreg­istré.
  • Espinas (Tan­go) Enreg­istré par Fir­po (1927–02-27)
  • Milon­ga de mi tier­ra (Milon­ga) enreg­istrée par Osval­do et Jorge Rubi­no (1943–10-21)
  • Por una car­ta (Tan­go) enreg­istré par la Típi­ca Vic­tor (1928–06-26)
  • Soñan­do el Charleston (Charleston) enreg­istré par Adol­fo Cara­bel­li Jazz Band (1926–12-02).

Il en a cer­taine­ment écrit d’autres, mais elles sont encore à iden­ti­fi­er et à faire jouer par un orchestre qui les enreg­istr­era…
On notera que sa petite fille, Marcela est chanteuse de tan­go. Les gènes ont aus­si été trans­mis à la descen­dance d’Alberto.

Adolfo Vicente (Fito) Pugliese (1899— ????), frère d’Osvaldo. Violoniste et compositeur

Adol­fo Vicente (surnom­mé Fito pour mieux le dis­tinguer de son père Adol­fo, Adolfito devient Fito) ne sem­ble pas avoir écrit ou enreg­istré sous son nom. Ce n’est en revanche pas si sûr. En effet, il était un bril­lant vio­loniste et étant le plus âgé des garçons, c’est un peu lui qui fai­sait tourn­er la bou­tique quand son père se livrait à ses frasques (il buvait et courait les femmes).
Cepen­dant, la mésen­tente avec le père a fini par le faire par­tir de Buenos Aires et il est allé s’installer à Mar del Pla­ta où il a délais­sé la musique et le vio­lon, ce qui explique que l’on perde sa trace par la suite.

Beba (Lucela Delma) Pugliese (1936— …), pianiste, chef d’orchestre et compositrice

C’est la fille d’Osvaldo et de María Con­cep­ción Flo­rio et donc la petite fille d’Adolfo, le flûtiste et édi­teur.
Par­mi ses com­po­si­tions, Catire et Chichar­ri­ta qu’elle a joué avec son quin­te­to…

Carla Pugliese (María Carla Novelli) Pugliese (1977— …), Pianiste et compositrice

Petite fille d’Osvaldo et fille de Beba, la tra­di­tion famil­iale con­tin­ue de nos jours, même si Car­la s’oriente vers d’autres musiques.
Si vous voulez en savoir plus sur ce jeune tal­ent :

https://www.todotango.com/creadores/biografia/1505/Carla-Pugliese/ (en espag­nol)

https://www.todotango.com/english/artists/biography/1505/Carla-Pugliese/ (en anglais)

Les grands-parents de Pugliese

Je ne sais pas s’ils étaient musi­ciens. Le père était zap­a­tero (cor­don­nier). Ce sont eux qui ont fait le voy­age en Argen­tine où sont nés leurs 5 enfants. Ce sont deux par­mi les mil­liers d’Européens qui ont émi­gré vers l’Argentine, comme le fit la mère de Car­los Gardel quelques années plus tard.

Roque PUGLIESE Padula

Né le 5 octo­bre 1853 — Tri­cari­co, Mat­era, Basil­i­ca­ta, Ital­ie
Zap­a­tero. C’est de lui que vient le nom de Pugliese qu’il a cer­taine­ment adop­té en sou­venir de sa terre natale.

Filomena Vulcano

Née en 1852 — Rossano, Cosen­za, Cal­abria, Ital­ie
Ils se sont mar­iés le 28 novem­bre 1896, dans l’église Nues­tra Seño­ra de la Piedad, de Buenos Aires.
Leurs enfants :

  • Adol­fo Juan PUGLIESE Vul­cano 1876–1943 (Père d’Osvaldo, com­pos­i­teur, édi­teur et flûtiste)
  • Anto­nio PUGLIESE Vul­cano 1878 (Musi­cien et com­pos­i­teur)
  • Luisa María Mar­gari­ta PUGLIESE Vul­cano 1881
  • Luisa María PUGLIESE Vul­cano 1883
  • Con­cep­ción María Ana PUGLIESE Vul­cano 1885

Extrait musical

Recuer­do, 1944-03-31 — Orques­ta Osval­do Pugliese.

Dans cette ver­sion il y a déjà tout le Pugliese à venir. Les ver­sions enreg­istrées aupar­a­vant avaient déjà pour cer­taines des into­na­tions proches. On peut donc penser que la puis­sance de l’écriture de Pugliese a influ­encé les orchestres qui ont inter­prété son œuvre. À l’écoute on se pose la ques­tion de la pater­nité de la com­po­si­tion. Alfre­do, Osval­do ou un autre ? Nous y revien­drons.

Les paroles

Ayer can­taron las poet­as
y llo­raron las orques­tas
en las suaves noches del ambi­ente del plac­er.
Donde la bohemia y la frágil juven­tud
apri­sion­adas a un encan­to de mujer
se mar­chi­taron en el bar del bar­rio sud,
murien­do de ilusión
murien­do su can­ción.

Mujer
de mi poe­ma mejor.
¡Mujer!
Yo nun­ca tuve un amor.
¡Perdón!
Si eres mi glo­ria ide­al
Perdón,
serás mi ver­so ini­cial.

Y la voz en el bar
para siem­pre se apagó
su moti­vo sin par
nun­ca más se oyó.

Embria­ga­da Mimí,
que llegó de París,
sigu­ien­do tus pasos
la glo­ria se fue
de aque­l­los mucha­chos
del viejo café.

Quedó su nom­bre graba­do
por la mano del pasa­do
en la vie­ja mesa del café del bar­rio sur,
donde anoche mis­mo una som­bra de ayer,
por el recuer­do de su frágil juven­tud
y por la cul­pa de un olvi­do de mujer
dur­mióse sin quer­er
en el Café Con­cert.

Adol­fo et/ou Osval­do Pugliese Letra : Eduar­do Moreno

Dans la ver­sion de la Típi­ca Vic­tor de 1930, Rober­to Díaz ne chante que la par­tie en gras. Rosi­ta Mon­temar chante deux fois tout ce qui est en bleu.

Traduction libre et indications

Hier, les poètes ont chan­té et les orchestres ont pleuré dans les douces nuits de l’atmosphère de plaisir.
Où la bohème et la jeunesse frag­ile pris­on­nière du charme d’une femme se flétris­saient dans le bar du quarti­er sud, mourant d’illusion et mourant de leur chan­son.
Femme de mon meilleur poème.

Femme !
Je n’ai jamais eu d’amour.
Par­don !
Si tu es ma gloire idéale
Désolé, tu seras mon cou­plet d’ouverture.

Et la voix dans le bar s’éteignit à jamais, son motif sans pareil ne fut plus jamais enten­du.
Mimì ivre, qui venait de Paris, suiv­ant tes traces, la gloire s’en est allée à ces garçons du vieux café.

Son nom était gravé par la main du passé sur la vieille table du café du quarti­er sud, où hier soir une ombre d’hier, par le sou­venir de sa jeunesse frag­ile et par la faute de l’oubli d’une femme, s’est endormie involon­taire­ment dans le Café-Con­cert.

Dans ce tan­go, on voit l’importance du sud de Buenos Aires.

Autres versions

Recuer­do, 1926-12-09 — Orques­ta Julio De Caro. C’est l’orchestre qui est sur la cou­ver­ture de la par­ti­tion éditée avec le nom d’Adolfo. Remar­quez que dès cette ver­sion, la vari­a­tion finale si célèbre est déjà présente.
Recuer­do 1927 — Rosi­ta Mon­temar con orques­ta. Une ver­sion chan­son. Juste pour l’intérêt his­torique et pour avoir les paroles chan­tées…
Recuer­do, 1928-01-28 — Orques­ta Bian­co-Bachicha. On trou­ve dans cette ver­sion enreg­istrée à Paris, quelques accents qui seront mieux dévelop­pés dans les enreg­istrements de Pugliese. Ce n’est pas inin­téres­sant. Cela reste cepen­dant dif­fi­cile de pass­er à la place de « La référence ».
Recuer­do, 1930-04-23 — Orques­ta Típi­ca Vic­tor con Rober­to Díaz. Une des rares ver­sions chan­tées et seule­ment sur le refrain (en gras dans les paroles ci-dessus). Un bas­son apporte une sonorité éton­nante à cette ver­sion. On l’entend par­ti­c­ulière­ment après le pas­sage chan­té.
Recuer­do, 1941-08-08 — Orques­ta Fran­cis­co Lomu­to. Une ver­sion très intéres­sante. Que je pour­rais éventuelle­ment pass­er en bal.
Recuer­do 1941 Orques­ta Aníbal Troi­lo. La prise de son qui a été réal­isée à Mon­te­v­ideo est sur acé­tate, donc le son est mau­vais. Elle n’est là que pour la référence.
Recuer­do, 1942-11-04 — Orques­ta Ricar­do Tan­turi. Une ver­sion sur­prenante pour du Tan­turi et pas si loin de ce que fera Pugliese, deux ans plus tard. Heureuse­ment qu’il y a la fin typ­ique de Tan­turi, une dom­i­nante suiv­ie bien plus tard par la tonique pour nous cer­ti­fi­er que c’est bien Tan­turi 😉
Recuer­do, 1944-03-31 — Orques­ta Osval­do Pugliese. C’est le tan­go du jour. Il est intéres­sant de voir com­ment cette ver­sion avait été annon­cée par quelques inter­pré­ta­tions antérieures. On se pose tou­jours la ques­tion ; Alfre­do ou Osval­do ? Sus­pens…
Recuer­do, 1952-09-17 — Orques­ta Julio De Caro. De Caro enreg­istre 26 ans plus tard le titre qu’il a lancé. L’évolution est très nette. L’utilisation d’un orchestre au lieu du sex­te­to, donne de l’ampleur à la musique.
Recuer­do 1966-09 — Orques­ta Osval­do Pugliese con Jorge Maciel. On retrou­ve Pugliese, 22 ans après son pre­mier enreg­istrement. Cette fois, la voix de Maciel. Celui-ci chante les paroles, mais avec beau­coup de mod­i­fi­ca­tions. Je ne sais pas quoi en penser pour la danse. C’est sûr qu’en Europe, cela fait un mal­heur. L’interprétation de Maciel ne se prête pas à la danse, mais c’est telle­ment joli que l’on pour­rait s’arrêter de danser pour écouter.

En 1985, on a au moins trois ver­sions de Rucuer­do par Pugliese. Celle de « Grandes Val­ores », une émis­sion de télévi­sion, mais avec un son moyen, mais une vidéo. Alors, je vous la présente.

Recuer­do par Osval­do Pugliese dans l’émission Grandes Val­ores de 1985.

Puisqu’on est dans les films, je vous pro­pose aus­si la ver­sion au théâtre Colon, cette salle de spec­ta­cle fameuse de Buenos Aires.

Recuer­do par Osval­do Pugliese au Théa­tre Colon, le 12 décem­bre 1985.

Pour ter­min­er, tou­jours de 1985, l’enregistrement en stu­dio du 25 avril.

Recuer­do, 1985-04-25 — Orques­ta Osval­do Pugliese.

Pugliese a con­tin­ué à jouer à de nom­breuses repris­es sa pre­mière œuvre. Vous pou­vez écouter les dif­férentes ver­sions, mais elles sont glob­ale­ment sem­blables et je vous pro­pose d’arrêter là notre par­cours, pour traiter de notre fil rouge. Qui est le com­pos­i­teur de Recuer­do ?

Qui est le compositeur de Recuerdo ?

On a vu que la par­ti­tion éditée en 1926 par Adol­fo Pugliese men­tionne son nom comme auteur. Cepen­dant, la tra­di­tion veut que ce soit la pre­mière com­po­si­tion d’Osvaldo.
Écou­tons le seul tan­go qui soit éti­queté Adol­fo :
Ausen­cia, 1926-09-16 — José Bohr y su Orques­ta Típi­ca. C’est mignon, mais c’est loin d’avoir la puis­sance de Recuer­do.
On notera toute­fois que la réédi­tion de cette par­ti­tion est signée Adol­fo et Osval­do. La seule com­po­si­tion d’Adolfo serait-elle en fait de son fils ? C’est à mon avis très prob­a­ble. Le père et sa vie peu équili­brée et n’ayant pas don­né d’autres com­po­si­tions, con­traire­ment à ses garçons, pour­rait ne pas être com­pos­i­teur, en fait.

Pour cer­tains, c’est, car Osval­do était mineur, que son père a édité la par­ti­tion à son nom. Le prob­lème est que plusieurs tan­gos d’Osvaldo avaient été antérieure­ment édités à son nom. Donc, l’argument ne tient pas.

Pour ren­dre la chose plus com­plexe, il faut pren­dre en compte l’histoire de son frère aîné
Adol­fo (Fito). Ce dernier était un bril­lant vio­loniste et com­pos­i­teur.
Pedro Lau­renz, alors Ban­donéiste dans l’orchestre de Julio De Caro, indique qu’il était avec Eduar­do Moreno quand un vio­loniste Emilio Marchi­ano serait venu lui deman­der d’aller chercher ce tan­go chez Fito pour lui ajouter des paroles.
Marchi­ano tra­vail­lait alors au café ABC, comme l’indique Osval­do qui était ami avec le ban­donéon­iste Enrique Pol­let (France­si­to) et qui aurait recom­mandé les deux titres mar­qués Adol­fo (Ausen­cia et Recuer­do).
On est sur le fil avec ces deux his­toires avec les mêmes acteurs. Dans un cas, l’auteur serait Adolfi­to qui don­nerait la musique pour qu’elle soit jouée par De Caro et dans l’autre, ce serait Pol­let qui aurait fait la pro­mo­tion des com­po­si­tions qui seraient toutes deux d’Osvaldo et pas de son père, ni de son grand frère.
Pour expli­quer que le nom de son père soit sur les par­ti­tions de ces deux œuvres, je donne la parole à Osval­do qui indique qu’il est bien l’auteur de ces tan­gos, et notam­ment de Recuer­do qu’il aurait don­né à son père, car ce dernier, flûtiste avait du mal à trou­ver du tra­vail et qu’il avait décidé de se recon­ver­tir comme édi­teur de par­ti­tion. En effet, la flûte, très présente dans la vieille garde n’était plus guère util­isée dans les nou­veaux orchestres. Cette anec­dote est par Oscar del Pri­ore et Irene Amuchástegui dans Cien tan­gos fun­da­men­tales.
Tou­jours selon Pedro Lau­renz, la vari­a­tion finale, qui donne cette touche magis­trale à la pièce, serait d’Enrique Pol­let, alias El Francés, (1901–1973) le ban­donéon­iste qui tra­vail­lait avec Eduar­do Moreno au moment de l’adaptation de l’œuvre aux paroles.
Cepen­dant, la ver­sion de 1927 chan­tée par Rosi­ta Mon­temar ne con­tient pas la vari­a­tion finale alors que l’enregistrement de 1926 par De Caro, si. Plus grave, la ver­sion de 1957, chan­tée par Maciel ne com­porte pas non plus cette vari­a­tion. On pour­rait donc presque dire que pour adapter au chant Recuer­do, on a sup­primé la vari­a­tion finale.

Et en conclusion ?

Ben, il y a plein d’hypothèses et toutes ne sont pas fauss­es. Pour ma part, je pense que l’on a min­imisé le rôle Fito et qu’Adolfo le père n’a pas d’autre mérite que d’avoir don­né le goût de la musique à ses enfants. Il sem­ble avoir été un père moins par­fait sur d’autres plans, comme en témoigne l’exil d’Adolfito (Vicente).
Mais finale­ment, ce qui compte, c’est que cette œuvre mer­veilleuse nous soit par­v­enue dans tant de ver­sions pas­sion­nantes et qu’elle ver­ra sans doute régulière­ment de nou­velles ver­sions pour le plus grand plaisir de nos oreilles, voire de nos pieds.
Recuer­do restera un sou­venir vivant.