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La Shunca 1941-01-21 — Orquesta Edgardo Donato con Horacio Lagos, Lita Morales y Romeo Gavio

Lorenzo Barcelata Letra: Ernesto Cortázar

La Shun­ca est la cadette d’une famille. C’est égale­ment une parole affectueuse pour la fiancée. Cette valse enjouée, avec des paroles de Ernesto Cortázar, laisse plan­er un petit sous-enten­du. Entrons dans la valse et lais­sons-nous bercer par les vagues de la musique qui vont nous men­er assez loin des rives de l’Argentine.

Qui est la Shunca ?

Comme nous l’avons vu, la Shun­ca est la cadette de la famille. Ce terme est d’origine zapotèque, c’est-à-dire d’un peu­ple d’Amérique cen­trale et plus pré­cisé­ment du Mex­ique (région de Mex­i­co), bien loin de l’Argentine. Cela pour­rait paraître éton­nant, mais vous vous sou­vien­drez que nous avons sou­vent mis en valeur les liens entre le Mex­ique et l’Argentine dans d’autres anec­dotes et que les musi­ciens voy­ageaient beau­coup, pour enreg­istr­er dans des pays mieux équipés, ou pour assoir leur car­rière.
Les deux auteurs, Loren­zo Barce­la­ta et Ernesto Cortázar, sont mex­i­cains. Par ailleurs, on con­naît l’engouement des Mex­i­cains pour la valse jouée par les mari­achis et que même Luis Mar­i­ano chan­ta avec son titre, « La valse mex­i­caine ». Vous avez donc l’origine de l’arrivée de la Shun­ca dans le réper­toire du tan­go argentin. Nous avons d’autres exem­ples, comme la Zan­dun­ga. Nous ver­rons que ce n’est pas un hasard…

Extrait musical

La Shun­ca 1941-01-21 — Orques­ta Edgar­do Dona­to con Hora­cio Lagos, Lita Morales y Romeo Gavio.

La valse est instau­rée dès le début avec un rythme soutenu, alter­nant des pas­sages légatos et stac­catos. À 42s arrivent l’air prin­ci­pal. À 1:05 Romeo Gavi­o­li com­mence à chanter. À 1 :41, c’est le tour de Lita Morales, puis Hora­cio Lagos se lance à son tour pour for­mer un trio avec les deux autres chanteurs. Comme sou­vent, la fin tonique est con­sti­tuée de dou­bles-croches qui don­nent une impres­sion de vitesse, même si le rythme est le même qu’au début.

Des duos et trios à gogo

Dona­to a aimé utilis­er des duos et trios de chanteurs, sans doute plus que d’autres orchestres. J’ai indiqué duo+ et trio+ quand il y avait deux ou trois chanteurs iden­ti­fiés et un chœur. Le (+) est car il y a plus que le duo ou le trio.
Trios Hora­cio Lagos, Lita Morales, Romeo Gavi­o­li :
Estrel­li­ta mía, La Shun­ca, Luna, Volverás….pero cuán­do (valses)
Sin­fonía de arra­bal (tan­go).
Trios+ Hora­cio Lagos, Lita Morales avec chœur :
Mañana será la mía (valse).
No se haga mala san­gre (pol­ka).
Trio+ Félix Gutiér­rez, Luis Díaz avec chœur :
La Nove­na (tan­go)
Duos Hora­cio Lagos, Lita Morales :
Car­naval de mi bar­rio, Cha­pale­an­do bar­ro, Sins­a­bor, Som­bra gaucha (tan­gos)
Duos Romeo Gavi­o­li, Lita Morales :
Mi ser­e­na­ta, Yo te amo (tan­gos).
Duos Gavi­o­li, Hora­cio Lagos :
Aman­do en silen­cio, Lon­ja­zos (tan­gos)
Noches cor­renti­nas (valse)
Repique del corazón, Sen­tir del corazón (milon­gas).
Duos Anto­nio Mai­da, Ran­dona (Arman­do Julio Pio­vani) :
Amores viejos, Quien más… quien menos…, Riachue­lo, Ruego, Una luz en tus ojos (tan­gos).
Duos Hora­cio Lagos, Ran­dona (Arman­do Julio Pio­vani) :
Si tú supieras, Te gané de mano (tan­gos).
Cara negra, Sacale pun­ta (milon­gas)
Duos Hugo del Car­ril et Ran­dona (Arman­do Julio Pio­vani) :
Rosa, poneme una ven­tosa (tan­go)
Mi more­na (paso doble)
Duo Daniel Adamo et Jorge Denis :
El lecher­i­to (milon­ga)
Duo avec Teó­fi­lo Ibáñez :
Madre Patria (paso doble)
Duo Rober­to Morel y Raúl Ángeló :
T.B.C. (tan­go)
Duo+ Anto­nio Mai­da avec chœur :
Sandía cal­a­da (ranchera)
Duo+ Car­los Viván avec chœur :
Mamá (tan­go)
Duos+ Félix Gutiér­rez avec chœur :
La nove­na, Que Haces! Que Haces! (tan­go)
Duos+ Hora­cio Lagos avec chœur :
Hacete car­tel, Hay que aco­modarse (tan­gos)
Vir­genci­ta (valse)
Pier­rot apa­sion­a­do (marche brésili­enne)
Duo+ Juan Alessio avec chœur :
Hola!… Qué tal?… (tan­go)
Duo+ Lita Morales avec chœur :
Triqui-trá (tan­go)
Duos Luis Díaz avec chœur :
Chau chau, Sev­eri­no, El once glo­rioso, Felici­ta­me her­mano (tan­gos)
Can­dom­bian­do (max­ixe)
Ma qui fu (tar­entelle)
Ño Agenor (ranchera)

C’est un beau record.

Paroles

La luna se ve de noche,
El sol al amanecer,
Hay quienes por ver la luna
Otra cosi­ta no quieren ver.

Me dicen que soy boni­ta,
Quién sabe porque será,
Si alguno tiene la cul­pa
Que le pre­gun­ten a mi papá.

Shun­ca para acá, Shun­ca para allá,
¡Ay!, las olas que vienen y van,
Shun­ca para acá, Shun­ca para allá,
¡Ay!, car­iño me vas a matar.
Loren­zo Barce­la­ta Letra: Ernesto Cortázar

Traduction libre et indications

La lune se voit la nuit,
Le soleil à l’aube,
Il y a cer­tains qui voient la lune
Une autre petite chose, ils ne veu­lent pas la voir.

Ils me dis­ent que je suis jolie
Qui sait pourquoi c’est le cas,
Si quelqu’un en a la faute
Deman­dez-le à mon papa. (J’imagine que le père n’est pas si beau et qu’il faut chercher ailleurs les gènes de beauté de la Shun­ca)

Shun­ca par ci, Shun­ca par-là,
Oh, les vagues qui vont et vien­nent,
Shun­ca par ici, Shun­ca par-là,
Oh, chéri, tu vas me tuer.

Autres versions

Il n’y a pas d’autre enreg­istrement argentin de ce titre, je vous pro­pose donc de com­pléter avec des ver­sions mex­i­caines…

La Shun­ca 1941-01-21 — Orques­ta Edgar­do Dona­to con Hora­cio Lagos, Lita Morales y Romeo Gavio. C’est notre valse du jour.
La Shun­ca 1938 – Las Her­manas Padil­la con Los Costeños.
Disque Vocalion 9101 de La Shun­ca par Las Her­manas Padil­la avec Los Costeños. On notera la men­tion “Can­ción Tehua­na” et le nom de Loren­zo Barce­la­ta.
La Shun­ca 1998 — Marim­ba Her­manos Moreno Gar­cía. C’est une ver­sion récente, mex­i­caine.

Shunca et Zandunga, hasard ?

Ben, non. La Zan­dun­ga est un air espag­nol orig­i­naire d’Andalousie (jaleo andaluz) qui est devenu l’hymne de l’Isthme de Tehuan­te­pec que nous avons déjà évo­qué à pro­pos de Tehua­na.

En 1937, le réal­isa­teur Fer­nan­do de Fuentes réal­isa un film de ce titre avec Lupe Vélez dans le rôle prin­ci­pal. Elle y chante La Shun­ca.
La Zan­dun­ga a été arrangée par divers auteurs comme Loren­zo Barce­la­ta et Max Urban (pour le film), Andres Gutier­rez, A. Del Valle, Guiller­mo Posadas ou Máx­i­mo Ramó Ortiz.
La Shun­ca attribuée à Loren­zo Barce­la­ta et les autres titres sont indiqués au générique du film comme « inspirés » d’airs de la région.

La zan­dun­ga 1939-03-30 — Orques­ta Fran­cis­co Canaro con Fran­cis­co Amor.

Dans ces extraits du film La Zan­dun­ga, vous pour­rez enten­dre pre­mière­ment, La Shun­ca, puis voir danser la Zan­dun­ga. J’ai ajouté le générique du début où vous pour­rez de nou­veau enten­dre la Zan­dun­ga.

3 extraits de la Zan­dun­ga 1937 du réal­isa­teur Fer­nan­do de Fuentes avec Lupe Vélez dans le rôle prin­ci­pal. Elle y chante la Shun­ca.

Je pense que vous avez décou­vert le chemin emprun­té par ce titre. Loren­zo Barce­la­ta a arrangé des airs de son pays pour un film et avec la dif­fu­sion du film et des dis­ques, l’air est arrivé en Argen­tine où Dona­to a décidé de l’enregistrer. Voici donc, un autre exem­ple de pont, ici entre le Mex­ique et l’Argentine.

À bien­tôt les amis !

Un libro 1941-08-06 Orquesta Edgardo Donato con Horacio Lagos

Osvaldo Donato Letra: Ricardo Olcese

Les Argentins sont de grands lecteurs. Il n’est qu’à voir les cen­taines de mètres de queue pour vis­iter le Salon du livre et le nom­bre de librairies pour s’en ren­dre compte.
Notre tan­go du jour s’appelle Un libro (un livre) a été enreg­istré par Edgar­do Dona­to avec Hora­cio Lagos il y a 83 ans.

Extrait musical

Un libro 1941-08-06 Orques­ta Edgar­do Dona­to con Hora­cio Lagos.

Dona­to était un homme dis­trait, il pou­vait oubli­er sa femme dans le tramway ou atten­dre le chanteur pour un enreg­istrement alors qu’il était en face de lui. Sa musique lui va bien. Le thème com­mence comme une prom­e­nade guillerette. Puis arrive la voix sans égale de Hora­cio Lagos.

Paroles

Con el alma heri­da, casi der­ro­ta­do
Ancló mi esper­an­za en tu dulce amor,
Me diste un alien­to que ya no aguard­a­ba
Mi vida lisi­a­da por tan­to dolor.

Todo mi tor­men­to, se fue por encan­to
Y tu gran aliv­io fue mi sal­vación,
Entonces de nue­vo vi al sol de mi vida
Reha­cien­do el cora­je de mi corazón.

Un libro como hay tan­tos en la vida
Que (se) leía en mi errante rodar,
Desahu­ci­a­do por la suerte
Dan­do tum­bos sin cesar.
Un libro de plac­er inter­minable
De ince­sante sins­a­bor,
Salpic­a­do en tus pági­nas de oro
Por un lodo maldito y traidor.
Osval­do Dona­to Letra : Ricar­do Olcese

Traduction libre

Avec l’âme blessée, presque vain­cue, j’an­cre mon espérance dans ton doux amour.
Tu m’as don­né un souf­fle auquel je ne m’at­tendais plus, ma vie paralysée par tant de douleurs.
Tous mes tour­ments ont dis­paru par magie et ton grand soulage­ment a été mon salut.
Puis, j’ai de nou­veau vu le soleil de ma vie, restau­rant le courage de mon cœur.
Un livre comme il y en a tant dans la vie que j’ai lu dans mon errant vagabondage, dés­espéré par la chance, trébuchant sans cesse.
(J’en­tends Que leía, mais un lecteur, Philippe Con­stant entend Se leía, ce qui pour­rait mod­i­fi­er un peu le sens. Si vous avez un avis sur la ques­tion, lais­sez un com­men­taire…).
Un livre de plaisir sans fin d’insipidité inces­sante, éclaboussé sur tes pages dorées par une boue mau­dite et traîtresse.

Ricar­do Olcese a écrit les paroles de quelques
autres tan­gos comme :
Mirá lo que soy, Tu engaño et, en col­lab­o­ra­tion avec Nestor Rodi, Buenos Aires de ayer et Che pebe­ta.

Autres versions

Il n’y a pas d’autres ver­sions de ce tan­go. Je vous pro­pose donc d’écouter un autre enreg­istrement du même jour de Dona­to…

Un libro 1941-08-06 Orques­ta Edgar­do Dona­to con Hora­cio Lagos. C’est notre tan­go du jour.

Pour le sec­ond enreg­istrement de la journée, Lita Morales se joint à Hora­cio Lagos pour chanter :

Mañana será la mía 1941-08-06 — Orques­ta Edgar­do Dona­to con Hora­cio Lagos y Lita Morales y coro.

Demain tu seras mienne. Le titre est par­faite­ment adap­té à la rela­tion entre les deux chanteurs de cette valse…

Au cen­tre Edgar­do Dona­to et à droite Hora­cio Lagos que regarde avec atten­tion, Lita Morales.

Il se dit que Lita Morales et Hora­cio Lagos se seraient mar­iés, mais rien ne le prou­ve. Ce cou­ple, si c’é­tait un cou­ple, était très dis­cret et mys­térieux. Le regard que Lita envoie à Hora­cio me fait penser qu’ils ont a min­i­ma eut une idylle.
Sur le plan artis­tique, ils ont tous les deux com­mencé par enreg­istr­er du folk­lore et ont arrêté rapi­de­ment la car­rière (1935–1942 pour Hora­cio, 1937–1941 pour Lita, avec un petit retour en 1955–1956). Peut-être que l’ar­rêt de Lita en 1941 était pour cause de nais­sance, il se dis­ait que Lita était enceinte lors de son pre­mier arrêt. Ceci pour­rait expli­quer son retour tardif, elle a repris, lorsque son (leur) enfant était devenu plus autonome.
On avait déjà par­lé de cela à pro­pos de Sins­a­bor.

L’orchestre de Donato de 1932 à 1945

L’orchestre de Dona­to reste sta­ble sur une grande péri­ode. Ses deux frères sont respec­tive­ment pianiste (Osval­do) et vio­lon­cel­liste (Ascanio Ernesto). On notera le nom­bre impres­sion­nant de chanteurs ayant par­ticipé avec l’orchestre.

L’orchestre de Dona­to.

Directeur : Edgar­do Dona­to

Les musiciens

Vio­lonistes : (Edgar­do Dona­to), Domin­go Milil­lo, Arman­do Pio­vani et José Pol­lici­ta.
Ban­donéon­istes : Juan Tur­turiel­lo, Vicente Vilar­di et Miguel Bonano.
Pianiste : Osval­do Dona­to
Vio­lon­cel­liste : Ascanio Dona­to
Con­tre­bassiste : José Campe­si

Les chanteurs

Sopra­nos : Lita Morales
Ténors : Hora­cio Lagos, Romeo Gavi­o­li, Félix Gutiér­rez, Alber­to Gómez, Arman­do Pio­vani, Juan Alessio, Daniel Adamo et Pablo Lozano.
Bary­tons : Anto­nio Mai­da, Hugo Del Car­ril, Jorge Denis, Alber­to Podestá et Rober­to Bel­trán.

En 1936, Dona­to était à la tête d’un orchestre énorme.

Vio­lonistes : Arman­do Julio Pio­vani, Domin­go Mir­il­lo et José Pol­lici­ta
Ban­donéon­istes : José Roque Tur­turiel­lo, Vicente Vilar­di, Eliseo Marchesse et José Budano.
Accordéon­iste : Wash­ing­ton Bertoli­ni (Osval­do Bertoni) qui était égale­ment pianiste. Il jouait du piano avec et sans bretelles (en France, l’accordéon est surnom­mé « piano à bretelles »).
Pianiste : Osval­do Dona­to
Vio­lon­cel­liste : Ascanio Dona­to
Con­tre­bassiste : José Campe­si

Sur la pho­to, on les trou­ve :
De gauche à droite et au pre­mier plan.
Debout, Edgar­do Dona­to et Hora­cio Lagos.
Assis au piano, Osval­do Dona­to.
Deux ban­donéon­istes, José Budano et Vicente Vilar­di.
Puis Wash­ing­ton Bertoli­ni avec son accordéon.
Et deux autres ban­donéon­istes, José Roque Tur­turiel­lo et Eliseo Marchesse.
À l’arrière, de gauche à droite, un vio­loniste Domin­go Mir­il­lo.
Un vio­lon­cel­liste, Ascanio Dona­to
Deux vio­lonistes José Pol­lici­ta et Arman­do Julio Pio­vani.
Un con­tre­bassiste, José Campe­si.
Voilà, je vous laisse jouer au jeu des sept erreurs pour iden­ti­fi­er les change­ments dans l’orchestre entre ces deux pho­tos. Ce n’est pas si dif­fi­cile.

À demain, les amis !

Rosalinda 1935-07-03 — Orquesta Edgardo Donato con Juan Alessio

Edgardo Donato Letra : Máximo José Orsi

Encore un por­trait de femme dans un tan­go. Celle-ci se prénom­mait Ros­alin­da. Cette valse rel­a­tive­ment rare, bien que sym­pa­thique est inter­prétée par Dona­to et chan­tée par Juan Alessio.
Ce chanteur n’a enreg­istré qu’avec Dona­to et sur une péri­ode très brève, un mois entre juin et juil­let 1935. Il est donc prob­a­ble que vous ne le con­naissiez pas. Je vous pro­pose donc cette petite ren­con­tre avec un chanteur de qual­ité.

Juan Alessio

Juan Alessio est dif­fi­cile à cern­er, car il est resté dis­cret. Par ailleurs, il ne sem­ble avoir enreg­istré qu’avec Dona­to et seule­ment les cinq titres que voici :

  • El día que me quieras 1935-06-13 (Car­los Gardel Letra: Alfre­do Le Pera)
  • Dios lo sabe 1935-06-13 (Anto­nio Poli­to)
  • Ros­alin­da 1935-07-03 (Edgar­do Dona­to Letra: Max­i­mo José Orsi)
  • Picaflor 1935-07-03 (Edgar­do Dona­to Letra: Max­i­mo José Orsi, les mêmes auteurs que notre valse du jour).
  • Hola!… Qué tal?… 1935-07-17 (Osval­do Dona­to Letra: San­dalio C. Gómez)

L’autre dif­fi­culté est qu’il n’a enreg­istré qu’une seule valse et que cette dernière est assez dif­férente des valses les plus appré­ciées de Dona­to. De 1930 à 1936, il y a des valses com­pat­i­bles, mais faire une tan­da avec ce type de valse risque de ne pas plaire.
Comme DJ, il se peut donc que je ne passe jamais cette valse, sauf pour une occa­sion par­ti­c­ulière, comme l’anniversaire d’une Ros­alinde ou d’une Ros­alin­da… Je con­tin­uerais ensuite avec les valses les plus appré­ciées de Dona­to.

En toute fin d’ar­ti­cle, je vous pro­poserai une autre option 😉

Extrait musical

Ros­alin­da 1935-07-03 — Orques­ta Edgar­do Dona­to con Juan Alessio

Comme vous pou­vez le con­stater, c’est une valse par­ti­c­ulière­ment lente. Elle peut donc être dif­fi­cile à danser, notam­ment pour les danseurs débu­tants. Les plus avancés pour­ront capter les petits orne­ments pour vari­er la danse, mais sans les élans habituels de la valse, il fau­dra faire preuve d’un bon sens de l’équilibre et bien respecter les axes pour en tir­er tout le plaisir pos­si­ble. Là encore, ren­dez-vous en fin d’article pour un jok­er.

Paroles

Je n’ai pas trou­vé les paroles de Max­i­mo José Orsi, je retran­scris donc unique­ment ce que chante Juan Alessio, tout du moins ce que j’ai cru enten­dre.

En mi vida sos la lin­da
Tu cari­ta feliz
En tus ojos hay ful­go­res
Con auro­ra de ilusión
Jun­to a ti Ros­alin­da
El amor sem­bran­do pasa
Como el beso de los vien­tos
Y entre el sol se devolvió

Edgar­do Dona­to Letra : Máxi

Autres versions

Il y a une seule valse enreg­istrée avec ce titre.

Ros­alin­da 1935-07-03 — Orques­ta Edgar­do Dona­to con Juan Alessio

Mais il y a aus­si une ranchera du même titre, mais avec des auteurs dif­férents. On notera que la valse de Dona­to est à la lim­ite de la ranchera.

Ros­alin­da (Ranchera) 1955-04-14 — Trío Ciri­a­co Ortiz
Trío Ciri­a­co Ortiz (au cen­tre avec le ban­donéon), Ramón Andrés Menén­dez (à gauche) et Vicente Spina (à droite)

Máximo José Orsi

L’auteur des paroles, Máx­i­mo José Orsi, était acteur et paroli­er. Il est indi­recte­ment et con­tre son gré, à l’origine du suc­cès de Piana, Milon­ga sen­ti­men­tal. En effet, Orsi deman­da à Sebastián Piana une musique pour une des chan­sons d’un spec­ta­cle de Arturo De Bassi où il était acteur. Le résul­tat plut à De Bassi qui lui com­man­da un autre titre, ce fut Milon­ga sen­ti­men­tal.

Qui était Rosalinda ?

Il est dif­fi­cile de dire qui était la Ros­alin­da, car ce prénom d’origine ger­manique est très répan­du en Amérique du Sud au point qu’une revue men­su­elle argen­tine des années 30 à 50 por­tait ce nom. C’était une édi­tion de J. Hays Bell & Cia.

Le pre­mier numéro de cette revue pour la femme et le foy­er est paru en 1931, preuve que le prénom était à la mode à l’époque où Dona­to écriv­it sa valse.

Par ailleurs, dif­férents films por­tent ce titre, par exem­ple :

  • Ros­alin­da (1914) de Ricar­do de Baños et Alber­to Mar­ro (Espagne)
  • Ros­alin­da (1941) de Lam­ber­to V. Avel­lana (Philip­pines)
  • Ros­alin­da (1945) de Rolan­do Aguilar (Mex­ique)

C’est égale­ment le titre de télénov­e­las (les feuil­letons à l’eau de rose), la plus récente étant de 2009 (Philip­pines) et la plus con­nue, celle de 1999 (Mex­ique) avec la chan­son de Thalía.
En résumé, vous pou­vez imag­in­er la Ros­alin­da que vous voulez, de la guer­rière ger­manique avec des étin­celles dans les yeux, jusqu’à la plus mièvre des héroïnes de télénov­e­las.

Ros­alin­da, quelques cou­ver­tures de la revue Ros­alin­da, de 1940,1942 et 1944.

La petite surprise

Comme DJ, on a le priv­ilège de pou­voir mod­i­fi­er la musique. C’est l’a­van­tage d’u­tilis­er un logi­ciel spé­ci­fique et pas iTunes ou autre logi­ciel grand pub­lic pour la dif­fu­sion.
Comme un orchestre avant de com­mencer jouer, le DJ peut décider du tem­po de la musique. Il ne dit pas 1 — 2 et 1 2 3 comme les musi­ciens, mais il peut ajuster le rythme, par exem­ple pour vari­er l’ordre des morceaux dans une tan­da, voire en cours de route (avec un logi­ciel per­for­mant et bien maîtrisé). J’avoue recourir sou­vent à cet arti­fice qui me per­met de coller tou­jours le plus pos­si­ble aux capac­ités et/ou envies des danseurs présents.
Donc, cette valse, sans doute trop lente pour de nom­breuses occa­sions peut se voir offrir une chance en lui don­nant un peu d’élan.
Je vous pro­pose un résul­tat à com­par­er à la ver­sion enreg­istrée. Sur quelle ver­sion préféreriez-vous danser dans une milon­ga ordi­naire ?

Ros­alin­da 1935-07-03 — Orques­ta Edgar­do Dona­to con Juan Alessio. Ver­sion accélérée.
Ros­alin­da 1935-07-03 — Orques­ta Edgar­do Dona­to con Juan Alessio

Bien sûr, l’exercice va faire râler les ron­chon­chons et c’est tant mieux. Le DJ a pour but de don­ner du plaisir aux danseurs. La milon­ga n’est pas un musée, mais un lieu de diver­tisse­ment. Que la musique soit un peu plus rapi­de, un peu plus lente, un peu plus aiguë ou grave, cela ne va rien chang­er.

  • Oui, mais le ban­donéon de untel était accordé à 430 Hz, jusqu’en sep­tem­bre et en octo­bre à 440 Hz. Tu ne peux donc pas pass­er les deux dans la même tan­da, dit le Ron­chon­chon.
  • Tu es capa­ble d’entendre la dif­férence ? Demande le DJ, amusé.
  • J’ai l’oreille absolue, réplique le Ron­chon­chon.
  • Je te plains, dit le DJ com­préhen­sif. Alors, tu as sans doute remar­qué que j’ai passé la deux­ième prise du 16 juil­let 1952 et pas l’habituelle. Le ban­donéon de Xyzxyz a eu un prob­lème et il a emprun­té celui d’un col­lègue accordé en 440 Hz.
  • Oui, bien sûr, j’avais remar­qué qu’il y avait quelque chose de bizarre.
  • Ben, en fait, il n’a pas de sec­onde ver­sion et j’ai passé la ver­sion de Tan­go­Tunes (ou TTT) qui est au bon dia­pa­son, dit le DJ, mort de rire.

Je pour­rai con­tin­uer, ce petit con­te avec toutes ces anec­dotes de « spé­cial­istes », mais j’avoue que je m’occupe plus des danseurs que de ces DJ jaloux. Alors, dans la milon­ga, chers danseurs, prenez votre bonne humeur, affichez votre plus beau sourire et lais­sez-vous porter par la musique. Imag­inez que vous êtes en plein âge d’or du tan­go et qu’un orchestre sur scène vous présente ses nou­veautés, essaye de nou­veaux arrange­ments, joue un titre à la mode plutôt con­nu par un autre orchestre. Aujourd’hui, la diver­sité des expéri­ences et lim­itée par ce qui a été enreg­istré, un petit bout d’iceberg, tout le reste s’étant per­du faute d’avoir été enreg­istré et ne sera jamais retrou­vé.

Des orchestres con­tem­po­rains essayent de faire revivre des titres oubliés, de trou­ver de nou­veaux arrange­ments. Tout cela devrait raviv­er le plaisir de la décou­verte chez les danseurs. Donc, si un DJ dans mon genre vous fait de petites sur­pris­es, prenez-le bien, c’est un jeu, le tan­go n’est pas une langue morte. Asi­nus asinum non fricat.

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