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Mosterio - BYC

Mosterio 1939-09-11 – Orquesta Francisco Canaro Canta Ernesto Fama

Alberto Gambino Letra: Fortunato Benzaquen (Alí Salem de Baraja)

Cer­tains trou­vent, croient, veu­lent, imag­i­nent que le tan­go est sérieux. Heureuse­ment, ce n’est pas ou, pour le moins, pas tou­jours le cas. Je pense que ce tan­go humoris­tique va vous le prou­ver. Je laisse la place à Fran­cis­co Canaro et Ernesto Famá, mais aus­si à deux autres paires de joyeux drilles, Fran­cis­co Lomu­to avec Fer­nan­do Díaz et Enrique Rodríguez avec Rober­to Flo­res.

Extrait musical

Mosterio. Alberto Gambino Letra: Fortunato Benzaquen (Alí Salem de Baraja).
Moste­rio. Alber­to Gam­bi­no Letra: For­tu­na­to Ben­za­quen (Alí Salem de Bara­ja).
Moste­rio 1939-09-11 – Orques­ta Fran­cis­co Canaro Can­ta Ernesto Famá

L’essentiel de la saveur de ce morceau est dans les paroles. Je vous invite donc à les suiv­re en direct, soit en ver­sion orig­i­nale, soit dans la ver­sion traduite. Vous recon­naîtrez, même si vous n’êtes pas fam­i­li­er avec l’Espagnol, les noms de D’Arienzo, Lomu­to, De Caro et Canaro.

Paroles

Todo en la vida es Moste­rio
y nadie sabe por qué.
Moste­rio es haber naci­do
y hac­erse grande después.
Moste­rio son las car­reras,
Moste­rio el andar a pie.
Moste­rio la cuen­ta ‘el sas­tre
y Moste­rio el aje­drez.
Pero hay algo en esta vida
que hay que creer o reven­tar
porque si fuera Moste­rio
no podríamos ni hablar,
por eso cuan­do le digan
que Moste­rio es el com­er,
ust­ed con­teste ensegui­da
que eso es Moste­rio al revés.

¿Que por qué D’Arienzo es ñato
y Lomu­to del­ga­di­to?
¡Moste­rio!
¿Que por qué De Caro es rico
y Canaro mil­lonario ?
¡Otro Moste­rio!
¿Que por qué todos los días
sale el sol por la mañana
y por qué tu viejo quiere
de que se case tu her­mana?
¡Moste­rio!
¿Que por qué no nacen chicos?,
otro Mosle­rio tam­bién.

Todo en la vida es Moste­rio
y nadie sabe por qué.
Moste­rio es haber naci­do
y hac­erse grande después.
Moste­rio son las car­reras,
Moste­rio el andar a pie.
Moste­rio la cuen­ta ‘el sas­tre
y Moste­rio el aje­drez.
Todo es Moste­rio señores
y a nadie le impor­ta nada,
todo en la vida se aca­ba
y nadie sabe por qué
y aunque le vaya al revés
y pare en el cemente­rio
toda la gente dirá
eso sí que es Moste­rio.
Alber­to Gam­bi­no Letra: For­tu­na­to Ben­za­quen (Alí Salem de Bara­ja)

Dans la ver­sion de Canaro, Famá chante ce qui est en gras. Lomu­to et Díaz repren­nent ce qui est en rouge. Rodriguez et Flo­res changent les paroles de la par­tie rouge et soulignée, sans doute pour ne pas par­ler des orchestres con­cur­rents…

D’ailleurs, lorsqu’ils repren­nent ce refrain, c’est pour par­ler, deux fois, de Rodriguez…

Voici le texte mod­i­fié par Rodriguez et Flo­res :

Por qué mi papi es tan grande
Y yo chiq­ui­ti­to.
Y Por qué todos los chicos
Hoy se dejan big­oti­tos
Y por qué Rodriguez es grande
Y María
Luisa del­gati­ta (María Luisa Notar est la femme de Rodriguez)
Y por qué Rodriguez
Siem­pre la lle­va a la cale­si­ta.

On notera qu’aucune des ver­sions n’utilise le dernier cou­plet. Peut-être que Alí Salem de Bara­ja l’utilisait dans ses inter­ven­tions radio­phoniques…

Traduction libre

Tout dans la vie est Moste­rio (défor­ma­tion de mis­te­rio, mys­tère) et per­son­ne ne sait pourquoi.
Moste­rio, c’est être né et ensuite devenir grand.
Moste­rio sont les cours­es, Moste­rio est la marche.
Moste­rio la fac­ture du tailleur et Moste­rio les échecs (jeu).
Mais il y a quelque chose dans cette vie que vous devez croire ou détru­ire parce que si c’é­tait Moste­rio, nous ne pour­rions même pas par­ler, donc quand ils vous dis­ent que Moste­rio mange, vous répon­dez immé­di­ate­ment que c’est Moste­rio à l’en­vers.

Pourquoi D’Arien­zo est ñato (a un petit nez) et Lomu­to mai­gre ? Bien sûr, vous qui con­nais­sez ces deux chefs d’orchestre, vous savez que c’est le con­traire. D’Arienzo est nar­igón (a un gros nez) et Lomu­to est un peu envelop­pé…
Moste­rio !
Pourquoi De Caro est-il riche et Canaro mil­lion­naire ? Là encore, les paroles se veu­lent taquines. De Caro peut sig­ni­fi­er « coû­teux », il n’était pas par­ti­c­ulière­ment riche. En revanche, Canaro qui fut très pau­vre dans son enfance, avait le sens des affaires et fut réelle­ment mil­lion­naire… Cepen­dant, il peut s’agir, surtout en 1939, d’une référence au tan­go écrit (paroles et musique) et joué par Canaro « Si yo fuera mil­lonario » (Si j’é­tais mil­lion­naire).
Autre Moste­rio !

Pourquoi tous les jours, le soleil se lève le matin et pourquoi ton vieux (père) veut que ta sœur se marie ?
Moste­rio !
Que, pourquoi ne nais­sent pas d’enfants ?
Un autre Moste­rio aus­si.

Tout dans la vie est Moste­rio et per­son­ne ne sait pourquoi.
Moste­rio, c’est être né et ensuite devenir grand.
Moste­rio sont les cours­es, Moste­rio est la marche.
Moste­rio la fac­ture du tailleur et Moste­rio les échecs.
Tout est Moste­rio, messieurs et per­son­ne ne se soucie de rien, tout dans la vie se ter­mine et per­son­ne ne sait pourquoi et même si cela va dans l’autre sens et s’ar­rête au cimetière, tout le monde dira que oui, ça c’est Moste­rio.

Traduction des ajouts de Rodriguez

Pourquoi mon père est-il si grand, et moi, tout petit.
Et pourquoi tous les gars, de nos jours, se lais­sent-ils la petite mous­tache.
Et pourquoi Rodriguez est grand et Maria Luisa mince (la chanteuse María Luisa Notar est la femme de Rodriguez).
Et pourquoi Rodriguez, l’emmène tou­jours au manège ? (pour cela, je n’ai pas d’explication…).

Autres versions

Moste­rio 1939-07-14 — Orques­ta Fran­cis­co Lomu­to con Fer­nan­do Díaz y coro.

C’est la plus anci­enne ver­sion. Lomu­to, cité dans les paroles, inter­prète de bonne grâce ce titre. Cette pre­mière ver­sion est très proche musi­cale­ment de celle de Canaro, comme c’est sou­vent le cas.

Moste­rio 1939-07-25 — Orques­ta Enrique Rodríguez con Rober­to Flo­res.

On con­naît Rodriguez et son goût pour les titres humoris­tique, par­fois à la lim­ite d’une cer­taine vul­gar­ité. Il ne pou­vait pas pass­er à côté de ce titre. Sim­ple­ment, comme nous l’avons vu, il n’avait pas envie de faire de la pub­lic­ité à ses con­cur­rents et il adapte les paroles pour se met­tre en valeur.
Rober­to Flo­res, El Cha­to, a la voix et la dic­tion qui vont bien pour inter­préter ce titre.

Moste­rio 1939-09-11 — Orques­ta Fran­cis­co Canaro Can­ta Ernesto Famá.

C’est notre tan­go du jour et donc, la dernière ver­sion enreg­istrée, près de deux mois après celles de Lomu­to et Rodriguez. Peut-être que ce retard à l’allumage, rare chez Canaro, qui cherche tou­jours à surfer sur l’actualité, est, car il était réservé sur le vers qui le con­cerne… Quoi qu’il en soit, il joue le jeu et comme Lomu­to, il se met en scène. D’ailleurs, c’est lui qui fait les répons­es à Famá…

Alberto Gambino

Il ne faut pas con­fon­dre le com­pos­i­teur de notre tan­go du jour avec cet autre Argentin « Alber­to Gam­bi­no » qui a joué Brassens et qui est l’auteur de la Pur­pu­ri­na. Il fut célèbre dans les années 1970…

Notre Alber­to Gam­bi­no est né le 28 juil­let 1899 et est mort le 8 junio 1987. Il était ban­donéon­iste et vio­loniste, directeur d’orchestre et com­pos­i­teur de quelques thèmes, sou­vent humoris­tiques, comme notre tan­go du jour.

Ces thèmes furent enreg­istrés prin­ci­pale­ment dans les années 30 par les mêmes orchestres que pour Moste­rio avec quelques com­plé­ments de l’époque, comme Mer­cedes Simone ou Rober­to Fir­po.

Alí Salem de Baraja (Fortunato Benzaquen)

De son vrai nom For­tu­na­to Ben­za­quen, mais plus con­nu sous son pseu­do­nyme de comé­di­en « Alí Salem de Bara­ja ». Il joua dans quelques films dans les années 1940.

Corazón de turco de Lucas Demare (scénario de Hernán de Castro)

Sor­tie en Argen­tine le 9 mai 1940. On notera que Lucio Demare, le frère aîné de Lucas, a com­posé la musique du film. On reste en famille… Lucas Demare est aus­si le réal­isa­teur de Mi noche triste en 1952, un film plus sat­is­faisant pour les ama­teurs de tan­go que nous sommes.
En Argen­tine, on appelle Tur­co (Turc), tous ceux qui vien­nent du Moyen-Ori­ent… Le film racon­te l’histoire d’un immi­gré qui aime une fille de bonne famille…
Un détail amu­sant. Lorsqu’il est propul­sé can­di­dat et qu’il doit faire un dis­cours, il par­le de mis­te­rio et même de moste­rio avec un petit début de la chan­son. Il se pose d’ailleurs trois fois des ques­tions dans le film, de la même façon que dans le tan­go.

J’émets donc une hypothèse. Vu que, dans les années 30, For­tu­na­to Ben­za­quen était un locu­teur à suc­cès de la radio et qu’il se vouait à des pro­grammes humoris­tiques, je pro­pose que les enreg­istrements de notre tan­go du jour effec­tués de façon si groupée en 1939 ont été des­tinés à cap­i­talis­er sur un suc­cès radio­phonique. Ce suc­cès, repris par de grands orchestres de l’époque, ont sans doute incité le frère de Lucio Demare de choisir For­tu­na­to comme acteur. Et, logique­ment, Lucas Demare laisse For­tu­na­to faire quelques allu­sions à son suc­cès.

Par ailleurs, je pense que son surnom d’Alí Salem de Bara­ja vient de ce film, car c’est le nom de son rôle. Il se peut aus­si que ce soit le surnom pris à la radio et qu’il l’ait exploité, une fois devenu acteur. Le pub­lic aurait pu être heureux de met­tre une tête sur leur vedette radio­phonique.

Voir la bande annonce.

Si cela vous intéresse, voici le film en entier…

La quinta calumnia (1941) de Adelqui Migliar (scénario de Héctor Canziani et Belisario García Villar).

Là, Alí Salem de Bara­ja est un turc qui vient au sec­ours d’un com­merçant en sit­u­a­tion dif­fi­cile.

Voir la bande-annonce

El comisario de Tranco Largo de Leopoldo Torres Ríos

Leopol­do Tor­res Ríos a aus­si écrit le scé­nario avec Alber­to Vacarez­za. Sor­tie en Argen­tine le 21 octo­bre 1942. Là encore, le Turc jouer un rôle. Celui d’un com­mis­saire assas­s­iné afin de démas­quer les coupables.

Affiche du film El comisario de Tranco Largo de Leopoldo Torres Ríos.
Affiche du film El comis­ario de Tran­co Largo de Leopol­do Tor­res Ríos.

Je ne pré­tendrai pas que ces trois films renou­vel­lent l’histoire du ciné­ma, mais ils per­me­t­tent de mieux con­naître la vie des immi­grés et l’auteur des paroles sym­pa­thique de notre tan­go du jour.

On se quitte en compagnie de joyeux drilles

Fran­cis­co Canaro et Ernesto Famá, en com­pag­nie de Fran­cis­co Amor, l’autre chanteur vedette de Canaro en 1939. Ce dernier était moins adap­té que Famá pour cet enreg­istrement, tout comme Flo­res est par­fait pour ce type de titres avec sa dic­tion plus pop­u­laire.

Francisco Amor, Francisco Canaro et Ernesto Famá, vers 1939.
Fran­cis­co Amor, Fran­cis­co Canaro et Ernesto Famá, vers 1939.

À bien­tôt, les amis, et con­tin­uez à vous pos­er des ques­tions pour décou­vrir les mys­tères du tan­go…

El entrerriano 1944-04-26 — Orquesta Osvaldo Fresedo

Anselmo Rosendo Mendizábal Letra : Ernesto Temes (Julián Porteño), Homero Expósito, H. Semino, S. Retondaro, Vicente Planells del Campo y Oscar Amor, Ángel Villoldo.

Voici une chose bien curieuse que ce tan­go qui ne dis­pose pas d’enregistrement de ver­sion chan­tée intéres­sante dis­pose de tant de paroles. Pas moins de cinq ver­sions… Quoi qu’il en soit, ce tan­go écrit en 1897 par Rosendo Men­dizábal est fameux, et il fut le pre­mier à avoir une par­ti­tion…

Un tango célèbre

Ce tan­go est fameux. C’est pour cela, prob­a­ble­ment qu’il dis­pose de plusieurs paroles, ces dernières étant util­isées pour flat­ter un com­man­di­taire poten­tiel.
J’ai racon­té dans Sacale pun­ta com­ment Rosendo l’a dédi­cacé à Ricar­do Segovia et a gag­né ain­si 100 pesos… Il venait de le jouer à de mul­ti­ples repris­es à la demande du pub­lic en Lo de María la Vas­ca, dont il était le pianiste attitré.
Comme preuve de notoriété, out­re l’abondance de paroliers, je pour­rais men­tion­ner qu’il est chan­té par Gardel dans Tan­go argenti­no 1929-12-11.

«De tus buenos tiem­pos aún hay pal­pi­tan
El choclo, Pelele’, El tai­ta, El cabu­re
La morocha, El catre y La cumpar­si­ta
Aquel Entr­erri­ano y el Saba­do ingles»

La dernière preuve est le nom­bre incroy­able de ver­sions de ce titre. Les 100 pesos de Ricar­do Segovia furent un bon investisse­ment.

Extrait musical

El entr­erri­ano 1944-04-26 — Orques­ta Osval­do Frese­do.

On com­prend l’enthousiasme des pre­miers audi­teurs de El entr­erri­ano qui ne s’appelait pas ain­si quand il fut joué pour la pre­mière fois en Lo de María la Vas­ca. À l’époque Rosendo l’avait joué au piano et sans doute émulé par la bonne récep­tion par les par­tic­i­pants s’était peut-être lancé dans quelque chose un peu plus jouer et spon­tané que les ver­sions de l’époque. Ce qui est sûr, c’est que Frese­do a su sor­tir de sa zone de con­fort pour nous éblouir avec cette ver­sion joyeuse.

Les paroles

J’ai men­tion­né cinq ver­sions. Je n’en ai retrou­vé que qua­tre, celle de Ángel Vil­lol­do sem­ble per­due.
Les qua­tre restantes sont du même type, elle racon­te la gloire, la glo­ri­ole d’un type. Rien de bien intéres­sant et orig­i­nal. Je vous les cite donc par ordre chronologique et ne traduirai que la plus récente, celle de Home­ro Expósi­to.

Letra de Ángel Villoldo

Ángel Vil­lol­do a dédié une ver­sion à Pepi­ta Avel­lane­da. Pour cela il a écrit des paroles qui sem­blent per­dues pour le moment.
Atten­tion à ne pas con­fon­dre la chanteuse Pepi­ta Avel­lane­da et Pepi­to Avel­lane­da, pseu­do­nyme du danseur José Domin­go Mon­teleone. Ce dernier a pris ce surnom, car il était né à Avel­lane­da. Pepi­to, je ne sais pas pourquoi il l’a choisi quand il fut obligé de pren­dre un pseu­do­nyme pour atténuer son orig­ine ital­i­enne afin de faciliter ses tournées européennes et le fait qu’il était d’une famille de piz­zaio­los de province (Avel­lane­da).
D’ailleurs Pepi­ta Avel­lane­da était égale­ment un pseu­do­nyme, la chanteuse, qui était aus­si danseuse s’appelait en fait Jose­fa Calat­ti… C’est elle qui avait étren­né El esquina­zo de Vil­lol­do, avec des paroles égale­ment dis­parues…
Vil­lol­do a cepen­dant écrit les paroles d’un autre tan­go qu’il a égale­ment com­posé : Desafío de un entr­erri­ano (défi d’un entr­erri­ano).
Il se peut qu’une par­tie des paroles soit proche de celles de la ver­sion per­due, à la dif­férence qu’il s’agissait d’une femme, prob­a­ble­ment uruguayenne dans le pre­mier cas, mais à l’époque, l’Uruguay et Entre Rios sont très proche et la fron­tière de la Province de l’Est per­méable.
On remar­quera qu’elles sont de la même eau que celles des­tinées à El enter­ri­ano, ce qui con­firme la des­ti­na­tion de ces paroles, la flat­terie, voire la flagorner­ie…
On ne con­naît pas la data­tion pré­cise de l’écriture de ce tan­go, mais comme il a été pub­lié en 1907 dans Caras y Careteras, il est au plus tard de cette époque, soit tout au plus, cinq ans après la ver­sion per­due. Il ne sem­ble pas exis­ter d’enregistrement de ce tan­go. Voici donc les paroles de Desafío de un entr­erri­ano :

Ángel Vil­lol­doDesafío de un entr­erri­ano 
Aquí viene el entr­erri­ano
El criol­lo más respeta­do,
Por una milon­ga, un esti­lo,
O un tan­gui­to reque­bra­do.
En cuan­to yo me pre­sen­to
No hay quién se atre­va a ron­car,
Al cohete son los can­di­ales…
Me tienen que respetar.

¿Vamos a ver quién se atreve?
¿No hay ninguno que ya ladré?
¿Dónde está ese mozo pier­na
que la ech­a­ba de com­padre?
Vayan salien­do al momen­to
Ya que lle­ga la ocasión,
Que eso es lo que a mí me gus­ta
Pa´ dar­les un revol­cón.

¿Quién le ron­ca al entr­erri­ano?
¿No hay quién cope la para­da?,
Vamos a ver, pues, los taitas
Aprovechen la bola­da.
Miren que ocasión como esta
No se les va a pre­sen­tar…
¿De ande yer­ba?… Tienen miedo
Que los vaya a abatatar.

Ya veo que no hay ninguno
Que resuelle por la heri­da,
Y me gano la car­rera
Mucho antes de la par­ti­da.
Aquí con­cluyo y salu­do
Con car­iño fra­ter­nal,
A todos los con­cur­rentes
Y al pabel­lón nacional…


Letra de A. Semi­no y S. Reton­daro
Tú el entr­erri­ano un criol­la­zo
De nobleza e hidal­guía
Que cap­tó la sim­patía
De todo el que lo trató.
Porque siem­pre demostró
Ser hom­bre sin­cero y fiel
Y como macho de Ley
La muchacha­da lo apre­ció.

Como varón se com­portó
Su pecho noble supo expon­er
Para el débil defend­er
Y así librar­lo del mal
Pero una noche som­bría.
Que fue, ¡ay !, su desven­tu­ra
En su alma la amar­gu­ra
Echó su man­to fatal
Por haber sido tan leal
Hal­ló su cru­el perdi­ción …!
El entr­erri­ano lloró
Su triste desilusión.

Una noche en un calle­jón
Al ami­go más fiel vio caer,
Bajo el puñal de un matón
Que de traición lo hir­ió cru­el
Y vibran­do de indi­gnación
El criol­la­zo atro­pel­ló
Y en la faz del matón
Un bar­bi­jo mar­có.

Y al cor­rer de los años
Lib­er­tao ’e las cade­nas
Con el peso de su pena,
Pa’l viejo bar­rio volvió
Y amar­ga­do lagrimeó
Al hal­larse sin abri­go
Y has­ta aquél… el más ami­go,
El amparo le negó.


Letra de Vicente Planells del Cam­po y Oscar Amor
Mi apo­do es
El Entr­erri­ano y soy
de aque­l­los tiem­pos hero­icos de ayer,
el de los patios del farol y el par­ral,
con per­fume a madre­sel­va y clav­el.
Soy aquel tan­go que no tuvo rival
en las bron­cas y entreveros.
Pero fui sen­ti­men­tal
jun­to al calor
del vesti­do de per­cal.

Soy aquel que no aflo­jó jamás,
el que luchó con su val­or
por man­ten­er este com­pás
y con él
me sen­tí muy feliz
al poder tri­un­far con mi val­or
lejos de aquí, allá en París.
Y después
de recor­rer tri­un­fal,
la vuelta pegué para volver
jun­to al calor de mi arra­bal
y hoy al ver
que soy retru­co y flor
quiero agrade­cer este favor
al bailarín como al can­tor.

Entr­erri­ano soy
de pura cepa y no hay
a pesar de ser tan viejo, varón
ni quien me pise los talones pues soy
el com­pás de meta y pon­ga y fui
de la que­bra­da y el corte el rey
en lo de Hansen y el Tam­bito.
Y en las tren­zadas de amor
primero yo
por bohemio y picaflor.


Letra de Julián Porteño
En el bar­rio de San Tel­mo
yo soy
picaflor afor­tu­nao en amor
un pun­to bra­vo pa’l chamuyo flo­re­ao
buen ami­go en cualquier ocasión
caudil­lo firme de juga­do val­or
pa’ copar una para­da
y afir­mar mi bien proba­da
leal­tad con el doc­tor.

Calá este varón
cuan­do con un gesto
man­do en el resto
pa’ ganar una elec­ción.
Calá este varón
en bai­lon­gos bien mis­ton­gos
con­qui­s­tan­do un fiel corazón.
Calá este varón
en salones dis­tin­gui­dos
todo pre­sum­i­do
de “doc­tor”.
Calá este varón
mozo atre­v­i­do
siem­pre can­to flor, envi­do
en el amor.

Naipe y mujeres
son mi úni­ca pasión,
sí señor,
éstas me dicen que sí
aquél me dice que no.
Pero no le hace
mel­la a mi condi­ción
de varón,
soy entr­erri­ano, señor
y ten­go firme el corazón.


Letra de Home­ro Expósi­to
Sabrán que soy el Entr­erri­ano,
que soy
milonguero y provin­ciano,
que soy tam­bién
un poquito com­padri­to
y aguan­to el tren
de los gua­pos con taji­tos.
Y en el vaivén
de algún tan­go de fan­dan­go,
como el quer­er
voy metién­dome has­ta el man­go,
que pa’l baile y pa’l amor
sabrán que soy
siem­pre el mejor.

¿Ven, no ven lo que es bailar así,
lleván­dola jun­ti­to a mí
como apre­tan­do el corazón?…
¿Ven, no ven lo que es lle­varse bien
en las cor­tadas del quer­er
y en la milon­ga del amor?…

Todo corazón para el amor
me dio la vida
y algu­na heri­da
de vez en vez,
para saber lo peor.
Todo corazón para bailar
hacien­do cortes
y al Sur y al Norte
sulen gri­tar
que el Entr­erri­ano es el gotán.

Traduction libre de la version de Homero Expósito

Ils sauront que je suis l’Entrerriano, (celui de la Povince d’Entre Rios) que je suis un milonguero et un provin­cial, que je suis aus­si un peu com­padri­to et je tiens la dégaine du guapo (beau) avec des cica­tri­ces (taji­to, petites entailles).
Et dans le bal­ance­ment d’un tan­go fan­dan­go, (Un siè­cle avant le tan­go, le fan­dan­go a fait scan­dale, car jugé las­cif. Avec le tan­go, l’histoire se répète… N’oublions pas que ce tan­go s’est inau­guré dans une mai­son de plaisir…)

avec volon­té je me lance à fond, afin qu’ils sachent que pour la danse et pour l’amour je suis tou­jours le meilleur.
Vois-tu, ne vois-tu pas ce que c’est que de danser comme cela, de l’amener à moi comme pour écras­er le cœur ?…
Voyez, ne voyez pas ce qu’est de s’entendre bien dans les cor­tadas du désir et dans la milon­ga de l’amour ?…
Tout cœur pour l’amour m’a don­né la vie et une blessure de temps en temps, pour con­naître le pire.
Tout le cœur pour danser en faisant des cortes (fig­ure de tan­go) et au Sud et au Nord, ils vont crier que l’Entrerriano est le gotan (tan­go en ver­lan, mais vous le saviez…).

Les versions

El entr­erri­ano 1910-03-05 Estu­di­anti­na Cen­te­nario dir. Vicente Abad
El entr­erri­ano 1913 — Eduar­do Aro­las y su Orques­ta Típi­ca.

Une ver­sion par le tigre du ban­donéon. Il existe peu d’enregistrements de Aro­las, sans doute, moins de 20 et tous de la péri­ode de l’enregistrement acous­tique. Ils ne ren­dent sans doute pas jus­tice aux presta­tions réelles de cet artiste du ban­donéon et de son orchestre.

El entr­erri­ano 1914 — Quin­te­to Criol­lo Tano Genaro.
El entr­erri­ano 1917 Orques­ta Rober­to Fir­po. Avec les moyens et le style de l’époque.
El entr­erri­ano 1927-02-24 — Orques­ta Fran­cis­co Canaro.

Une ver­sion calme et tran­quille à la Canaro des années 20, mais avec de beaux pas­sages guidés par le piano comme après 50 s.

El entr­erri­ano 1927-03-20 — Orques­ta Osval­do Frese­do.

Une ver­sion avec des bruits étranges, on entend les ani­maux de la ferme (notam­ment à par­tir de 30 s). Le dédi­cataire est en effet un riche pro­prié­taire ter­rien et j’imagine que Frese­do s’est amusé à ce petit jeu de recréer une basse-cour avec son orchestre.

El entr­erri­ano 1937-03-29 ou 1940-08-29 — Rober­to Fir­po y su Cuar­te­to Típi­co.

Une ver­sion à toute vitesse. Avec man­do­line. Je ne sais pas si elle était des­tinée à la danse. J’ai plutôt l’impression que c’était une démon­stra­tion de vir­tu­osité.

El entr­erri­ano 1940-11-06 — Orques­ta Radio Vic­tor Argenti­na.

On dirait que Fir­po a passé le virus à Scor­ti­cati qui dirigeait la Vic­tor à cette époque. On peut imag­in­er sa joie de faire raison­ner le « Pin-Pon-Pin » du ban­donéon comme une ponc­tu­a­tion tout au long de l’interprétation. On sent que l’orchestre, y com­pris la trompette, s’amuse et nous, DJ ou danseurs, avec.

El entr­erri­ano 1944-04-26 — Orques­ta Osval­do Frese­do. C’est notre tan­go du jour.

On dirait que Fir­po et Scor­ti­cati ont passé le virus à Frese­do qui pro­duit à son tour une ver­sion très rapi­de. Il fal­lait sans doute ces deux con­t­a­m­i­na­tions pour l’inciter à pro­duire cette ver­sion tonique et rapi­de. Le ban­donéon fait encore un « Pin-Pon-Pin » encore plus con­va­in­cant. Cepen­dant, adieu veaux, vach­es, cou­vées par rap­port à la ver­sion précé­dente de 1927. Chaque instru­ment a son tour de gloire et le résul­tat est prenant, jusqu’au clas­sique dou­ble accord final de Frese­do. C’est notre tan­go du jour.

J’ai passé sous silence les ver­sions de 1941 de Troi­lo (c’était l’époque où il avait des enreg­istrements pour­ris, car les maisons de dis­ques ne voulaient pas con­cur­rencer leurs poulains) et celle de Bia­gi, qui est du Bia­gi comme il y en a tant. Du bon Bia­gi, mais que du Bia­gi, sans valeur ajoutée au titre lui-même.

El entr­erri­ano 1944-06-27 — Orques­ta Aníbal Troi­lo.

Pas la ver­sion de 1941 qui était une ver­sion plutôt rapi­de, mais celle de 1944, bien mieux enreg­istrée. On voit que l’ambiance est bien dif­férente de tout ce qui s’est fait avant, plus grave, calme, musi­cale, moins dans la sur­prise. On remar­quera les pleurs du ban­donéon à 2 : 46, le mer­veilleux jeu de Troi­lo. Une ver­sion pour une danse bien dif­férente, Troi­lo com­mence à mon­tr­er le bout de son nez nova­teur.

El entr­erri­ano 1954-04-29 — Orques­ta Juan D’Arienzo.

Du bon D’Arienzo qui cogne, tout en restant joueur. De quoi réveiller l’ambiance d’une milon­ga qui som­nole (il paraît que ça existe), mais cer­tains des titres précé­dents sont égale­ment effi­caces pour cet usage…

El entr­erri­ano 1979-10-31 — Orques­ta Osval­do Frese­do.

Frese­do a encore enreg­istré le titre en 1979. Hon­nête­ment, cet enreg­istrement n’a rien d’exceptionnel et je vous pro­pose de boule­vers­er la chronolo­gie pour ter­min­er cette anec­dote avec une ver­sion éton­nante, par Varela…

El entr­erri­ano 1957-03-29 — Orques­ta Héc­tor Varela.

C’est le dernier titre que je vous pro­pose aujourd’hui. Il débute avec le « Pin-Pon-Pin », mais très solen­nel, suivi d’une cita­tion des paroles de Tiem­pos viejos (Fran­cis­co Canaro Letra: Manuel Romero) « ¿Te acordás, her­mano, qué tiem­pos aque­l­los? » puis « Oí si » et une phrase de Mi noche triste (Samuel Cas­tri­o­ta Letra: Pas­cual Con­tur­si) « me dan ganas de llo­rar ».

Voilà, je ter­mine avec cela. Quel par­cours effec­tué depuis 1897 par ce tan­go excep­tion­nel !

À demain les amis !

La vida es un tango 1939-02-08 (Film)

Réalisation Manuel Romero. Musique Alberto Soifer

Sabi­na Olmos et Hugo del Car­ril

La vida es un tan­go est un film argentin en noir et blanc de Manuel Romero. La musique est d’Alber­to Soifer (com­pos­i­teur de nom­breux titres de la vie­ja guardia comme la mer­veilleuse valse Estrel­li­ta mía enreg­istrée, entre autre par Dona­to).

Il est sor­ti le 8 févri­er 1939.

Les rôles sont tenus par Flo­ren­cio Par­ravici­ni, Tito Lusiar­do, Hugo del Car­ril et Sabi­na Olmos.

Le film d’un cou­ple (Hugo del Car­ril et Sabi­na Olmos) autour du tan­go au début du vingtième siè­cle.
Con­sul­tez le site de la mai­son de pro­duc­tion, Lumi­ton pour obtenir du matériel autour du film.
La vida es un tan­go (1939)

Intrigue du film

Ce film est sans doute un chef d’œu­vre pour tous ceux qui s’in­téresse à l’his­toire du tan­go. Il faut bien sûr révis­er quelques élé­ments qui ne sont pas par­faite­ment com­pat­i­bles avec la vérité, mais à l’aide des voix mer­veilleuses de Hugo Del Car­ril et de Sabi­na Olmos, ce film vous fera voy­ager, rêver et je suis sûr, vous enchantera.
L’in­trigue est assez sim­ple.
Un jeune homme (Raul Con­tr­eras, joué par Hugo Del Car­ril), fils d’un chef d’orchestre pianiste (Con­tr­eras père, joué par Flo­ren­cio Par­ravici­ni).
Un soir, Raul se rend dans le cabaret où son père joue du piano avec son orchestre. Il joue de façon automa­tique, un bock de bière pour chaque titre, ce qui donne lieu à un gag répéti­tif. À chaque morceau joué, il boit entière­ment son boc (j’espère que c’est un verre truqué) et à peine l’a‑t-il reposé que la serveuse l’échange con­tre un bock plein.
Raul con­te à son père qui tra­vail­lait de façon dis­simulée à son fils dans ce cabaret, qu’il souhaite devenir chanteur de tan­go, annonçant que cette musique sera un phénomène mon­di­al. Cela pour­rait être une pré­mo­ni­tion géniale puisque la scène est sen­sée se pass­er au tout début du vingtième siè­cle, mais il faut tem­pér­er, car le film date de 1939…
Lors de cette soirée, il fait con­nais­sance de Elisa Quin­tana, jouée par Sabi­na Olmos et de son père, joué par Tito Lusiar­do.
Il se retrou­ve à chanter avec Elisa sur scène pour sa pre­mière presta­tion publique. C’est un suc­cès.
Les par­ents déci­dent de lancer le cou­ple d’artiste et imag­i­nent d’aller à Paris, pen­sant qu’à la fin de la pre­mière guerre mon­di­ale, la France aurait envie de se diver­tir.
C’est bien sûr un immense suc­cès, mais Raul fait con­nais­sance d’une riche héri­tière. Le père Con­tr­eras voit d’un bon œil que son fils l’épouse. Cela blesse Elisa qui est amoureuse de Raul et finale­ment, Elisa et son père retour­nent à Buenos Aires où elle a un grand suc­cès.
Elle finit par se mari­er à un riche héri­ti­er et arrête sa car­rière musi­cale. Raul qui n’avait pas pu l’oublier décide de ren­tr­er en Argen­tine dans l’espoir de la recon­quérir, sans savoir qu’elle vient de se mari­er. Il assiste au dernier con­cert d’Elisa qui, jeune mar­iée d’une grande famille, ne peut plus se com­pro­met­tre sur les planch­es.
Pour noy­er sa tristesse, Raul part à New-York, accom­pa­g­né par son père et dégringole, sous les coups des whiskies qu’il ingur­gite trop facile­ment.
Au bout du rouleau, ayant per­du sa voix après une pneu­monie, il accepte de ren­tr­er à Buenos Aires.
Je vous laisse décou­vrir la suite dans le film.

Les chansons du film musical

Ce film est égale­ment un pré­texte pour pass­er des chan­sons inter­prétées de façon fab­uleuse par Hugo Del Car­ril et Sabi­na Olmos.
Par­mi les titres inter­prétés sous la direc­tion de Alber­to Soifer :
• Viens Poupoule de Félix May­ol (mon­trant que la musique de France était présente à Buenos Aires au tout début du vingtième siè­cle).
• La morocha
• El porteñi­to
• La payan­ca
• Gabi­no el may­oral
• Bel­gi­ca (en l’honneur de la Bel­gique qui venait d’être envahie par l’Allemagne)
• Mi noche triste
• El tai­ta del arra­bal
• Patoter­ro sen­ti­men­tal (une sub­lime ver­sion)

Sub­mergé d’é­mo­tion Raul (Hugo Del Car­ril) chante Patotero sen­ti­men­tal quand il com­prend qu’il va per­dre elisa.

• Milon­gui­ta
• La copa del olvi­do
• Nubes de humo
• Mano a mano (une inter­pré­ta­tion extra­or­di­naire)

Superbe inter­pré­ta­tion de Hugo Del Car­ril qui décide de chang­er pour chanter Mano a Mano quand il voit Elisa avec son mari. Ce dernier ne com­prend pas com­plète­ment que Raul (Hugo Del Car­ril) chante pour elle, ce qui explique l’ex­tra­or­di­naire émo­tion que provoque cette inter­pré­ta­tion.

• Yira-yira
• ban­doneón arra­balero
• Aquel tapa­do de armiñó.
Les chan­sons sont choisies en fonc­tion de l’intrigue et ser­vent aux deux pro­tag­o­nistes prin­ci­paux pour exprimer leurs sen­ti­ments.
En cela, le film est d’une grande justesse et je le con­sid­ère comme un véri­ta­ble chef‑d’œuvre. J’espère que vous partagerez mon ent­hou­si­asme.