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El marajá 1951-08-03 – Orquesta Domingo Federico

Francisco Federico

Notre tan­go du Jour est très orig­i­nal, par son titre, par sonorité et par sa rareté. Un mara­já (mahara­já) est bien sûr un maharad­jah qui pour l’époque qui nous intéresse est un des princes feu­dataires de l’Inde. La sonorité de la musique le con­firme rapi­de­ment si on avait un doute.

Un Federico peut en cacher un autre

Qua­tre âges de Domin­go Fed­eri­co.

Domin­go Fed­eri­co (1916–2000) avait une petite sœur, Nél­i­da Cristi­na Fed­eri­co (1920–2007). Ban­donéon­iste, pianiste et pein­tre (1920–2007). Cette dernière indique que son père, Fed­eri­co était vio­loniste et même pro­fesseur de vio­lon selon son frère, Domin­go et c’est là que les prob­lèmes com­men­cent.
Un Fran­cis­co Fed­eri­co, on en a un en stock, mais il était con­tre­bassiste, notam­ment dans l’orchestre de Miguel Caló. Il était égale­ment com­pos­i­teur, par exem­ple de El mara­já dont on par­le aujourd’hui.
Selon Nél­i­da, c’est son père et Domin­go qui l’ont ini­tié à la musique. Il est donc fort prob­a­ble que le Fran­cis­co auteur de ce tan­go soit le père de Nél­i­da et Domin­go, sinon, pourquoi ne pas par­ler de son autre frère qui comme com­pos­i­teur et con­tre­bassiste aurait pu aus­si con­tribuer à la for­ma­tion musi­cale de la jeune femme ?
Une autre indi­ca­tion est le fait que le tan­go Salu­dos est cosigné Domin­go et Fran­cis­co Fed­eri­co et qu’à cette époque, Fran­cis­co Fed­eri­co était con­tre­bassiste dans l’orchestre de Miguel Caló.
Sur le fait de jouer plusieurs instru­ments, c’était une par­tic­u­lar­ité de la famille et de nom­breux autres musi­ciens de tan­go. Nél­i­da aurait com­mencé à étudi­er le vio­lon, puis serait passé au piano et au ban­donéon.
En effet, le pre­mier jan­vi­er 1931, avec son frère Domin­go, elle jouait au Café Tokyo de Junín en com­pag­nie de son frère âgé de 14 ans (elle devait donc avoir env­i­ron 11 ans). Lui au ban­donéon et elle au piano. Le clou du spec­ta­cle est qu’ils échangèrent les rôles, lui au piano et elle au ban­donéon, le père étant le con­seiller musi­cal du duo qui fut appelé, le Duo Fed­eri­co.
J’avais donc mon­té l’hypothèse que le Fran­cis­co de Salu­dos et de El mara­já était le père ou sinon le frère de Nél­i­da et Domin­go. Pour lever cette ambiguïté, j’ai con­tac­té des col­lègues et l’excellent Cami­lo Gat­i­ca m’a ori­en­té vers une source que j’avais con­sultée, mais dans une ver­sion inac­ces­si­ble pour moi.
Cette source com­plète con­firme toutes mes hypothès­es, je cite donc la con­clu­sion de Cami­lo (avec des ajouts entre par­en­thès­es) : « Ain­si, Fran­cis­co était pianiste, ban­donéon­iste, vio­loniste (et même pro­fesseur de vio­lon selon son fils), con­tre­bassiste (dans l’orchestre de Miguel Calo) et avait des con­nais­sances en musique. Il était le père de Domin­go et Nél­i­da ».

Domin­go et Nél­i­da Fed­eri­co avant…
Domin­go et Nél­i­da après une vie d’artiste (Nél­i­da avait aban­don­né le ban­donéon pour la pein­ture, mais est rev­enue ensuite au ban­donéon).

Extrait musical

El mara­já 1951-08-03 — Orques­ta Domin­go Fed­eri­co.
El mara­já 1951-08-03 — Orques­ta Domin­go Fed­eri­co.

Un motif très léger de flûte eth­nique com­mence l’œuvre. La mélodie prin­ci­pale a des car­ac­téris­tiques qui la rap­prochent de la musique ori­en­tale. On ne peut donc à aucun moment écarter la volon­té de référence à un ori­ent.
On notera la grande richesse des con­tre­points, les instru­ments se lançant à tour de rôle de dans de belles phras­es qui s’enlacent et s’enchevêtre, tout en gar­dant une grande clarté.
Les motifs, plus typ­ique­ment ori­en­taux, revi­en­nent régulière­ment pour rap­pel­er le thème.
Étant igno­rant en musique indi­enne, je ne peux pas vous pro­pos­er d’œuvres de com­para­i­son qui per­me­t­traient de définir la source d’inspiration de Fran­cis­co Fed­eri­co. Cepen­dant, ceux qui con­nais­sent Ravi Shankar ou George Har­ri­son (le gui­tariste des Bea­t­les)ver­ront toute de suite des analo­gies, même si Fran­cis­co et Domin­go Fed­eri­co ne font pas appel au sitar. Que ce soit un ori­ent de fan­taisie ou savant, cela évoque l’Inde et l’un de ses princes, un mahara­já.

Mais qui est ce mahârâjah — maharajá — marajá ?

Le fait que le père de Domin­go soit l’auteur de ce tan­go est impor­tant, car en 1925, un mahârâ­jah est venu en Argen­tine et a été reçu en grande pompe, au point que le Prési­dent Alvear a dû sor­tir de sa poche une par­tie du finance­ment, car l’enveloppe de dépense avait explosé.
Le voyageur était le mahârâ­jah de Kapurtha­la, Jagatjit Singh Sahib Bahadur. Ce prince indi­en était forte­ment européanisé et par­lait français, ce qui était courant dans la haute société argen­tine de l’époque. Il effec­tua son voy­age en habits européens, sans son tur­ban.

Le mahara­jah (au cen­tre de face) en com­pag­nie du prési­dent argentin Alvear (au cen­tre, de pro­fil avec la canne) et du Prince de Galles (le deux­ième à par­tir de la gauche).

Le mahara­jah relate son périple dans son jour­nal :
My Tour in South, Cen­tral, and North Amer­i­ca (1926). On y apprend qu’il fai­sait froid à son arrivée à Buenos Aires en prove­nance d’Uruguay et que Buenos Aires est le lieu qui lui a le plus plu de son voy­age. On peut le croire quand on con­state qu’un quart de son livre est con­sacré à son pas­sage dans la province. Par­mi ses vis­ites, en plus du théâtre Colon et les récep­tions habituelles, il est allé à Tigre et dans un site inso­lite que j’ai choisi de met­tre en fond de la pho­to de cou­ver­ture.
Il s’agit du château estancia Hue­tel situé à 200 km de Buenos Aires, dans la Pam­pa. Il pas­sa deux jours dans ce château imi­tant le style français Louis XIII appar­tenant à doña Con­cep­ción Unzué de Casares.

Quelques vues du château estancia Hue­tel con­stru­it par l’ar­chi­tecte fran­co-suisse Jacques Dunant. Né à Genève, Jacques Dunant fit ses études d’architecte aux Beaux-Arts de Paris. Pour l’exposition uni­verselle de 1889 (celle où a été con­stru­ite la Tour Eif­fel), il tra­vail­la au pavil­lon de l’Argentine. En 1995, il fut appelé à Buenos Aires pour juger du con­cours pour l’attribution de la con­struc­tion du Con­gres­so. Il se fixa en Argen­tine et y réal­isa de nom­breux édi­fices (ain­si qu’en Uruguay). La con­struc­tion de l’estancia Hue­tel a com­mencé en 1906.

Au pro­gramme, un con­cert de Car­los Gardel. Un chanteur d’origine française, dans un château de style français par un archi­tecte français, il n’en fal­lait pas plus pour ravir le mahârâ­jah fran­cophile.
Pour être pré­cis, Gardel n’était pas seul. Il était accom­pa­g­né de Raz­zano et de leurs gui­taristes Ricar­do et Bar­bi­eri et d’un instru­men­tiste impromp­tu…
Gardel et Raz­zano com­mencèrent à inter­préter Lin­da provin­ciani­ta, Gal­le­gui­ta, Clave­les men­do­ci­nos, La pas­to­ra et La can­ción del ukelele. Alors, Le Prince de Galles qui était égale­ment invité est par­ti dans sa suite chercher un ukulélé et il se mit à en jouer y com­pris sur les chan­sons de Gardel et Raz­zano.
Jagatjit Singh Sahib Bahadur (le mahara­jah) racon­te dans son jour­nal que l’accueil de la pop­u­la­tion argen­tine a été ent­hou­si­aste dans tous les points de son voy­age dans le pays et qu’on l’accueillait aux cris de “Viva el Mahara­já”, y com­pris aux haltes du train qui le mena par la suite vers le Chili.

My Tour in South, Cen­tral, and North Amer­i­ca (1926). Sur la pho­to du mahara­jah de Kapurtha­la, Jagatjit Singh Sahib Bahadur, en cos­tume tra­di­tion­nel, on peut voir un fau­teuil qui lui avait été offert à La Pla­ta par le gou­verneur Can­til­lo en août 1925.

La vis­ite d’un prince venu de si loin sem­ble avoir impres­sion­né la pop­u­la­tion et j’imagine que c’est bien cette vis­ite qui a don­né l’idée à Fran­cis­co Fed­eri­co d’écrire ce titre.

Autres versions

Il n’y a pas d’autre ver­sion de ce tan­go, je vous pro­pose de le réé­couter.

El mara­já 1951-08-03 — Orques­ta Domin­go Fed­eri­co.

Domin­go Fed­eri­co est sans doute un musi­cien un peu oublié. Sa retraite à Rosario l’éloignant de Buenos Aires a peut-être lim­ité sa vis­i­bil­ité. Je suis donc con­tent, une fois de plus, de lui redonner un peu de présence.

À propos de l’image de couverture

J’ai assem­blé deux images. Une vue de l’estancia Hue­tel et au pre­mier plan, un por­trait du mahara­jah de Kapurtha­la, Jagatjit Singh Sahib Bahadur. Ce por­trait n’est pas d’époque, mais je tenais à présen­ter un mahara­jah avec son tur­ban.

El mara­já (mahârâ­jah) de Kapurtha­la, Jagatjit Singh Sahib Bahadur.

Saludos 1944-04-10 — Orquesta Domingo Federico

Domingo Federico (Domingo Serafín Federico) ; Francisco Federico

Je pense qu’en voy­ant l’illustration, vous avez pen­sé que cette fois, j’étais défini­tive­ment par­ti me balad­er avec les fous. En fait, pas tout à fait. Ces petits bon­jours (salu­dos) des Fed­eri­co, père (Fran­cis­co) et fils (Domin­go), les deux sains d’esprits, ont vrai­ment quelque chose à voir avec le grand Walt!

En fait, le grand Walt a vexé nos amis et ce tan­go est leur réponse musi­cale et élé­gante.
Voyons cela en image, ani­mée…

Extrait du film mélangeant des pas­sages filmés et des dessins ani­més tirés du film sor­ti en 1942, Salu­dos Ami­gos de Walt Dis­ney

Il s’agit d’un court extrait du film mélangeant des pas­sages filmés et des dessins ani­més tirés du film sor­ti en 1942, Salu­dos Ami­gos de Walt Dis­ney. Il était des­tiné à inciter les pays d’Amérique latine à adhér­er à la Good Neigh­bor Pol­i­cy face au nazisme qui déchi­rait l’Europe.
Fed­eri­co était énervé, car Dis­ney a rejeté le tan­go et il a donc décidé d’écrire un tan­go.

La phrase qui tue…

Dans le film en entier, on com­mence par quelques vues de Buenos Aires, puis on va rapi­de­ment à la cam­pagne. On présente le tra­vail des gau­chos, leur vête­ment, puis de la danse. Le com­men­ta­teur lance alors « No con el tan­go mod­er­no de Buenos Aires, sino con los bailes típi­cos del cam­po ». Pas avec le tan­go mod­erne de Buenos Aires, mais avec les dans­es typ­iques de la cam­pagne…

La réponse de Fédérico

Comme on le sait, les orchestres de tan­go de l’époque étaient aus­si des orchestres de Jazz, ou pour le moins suff­isam­ment con­nais­seurs pour s’emparer de cette musique qui partageait les salles de bal avec le tan­go.
Fed­eri­co a donc décidé d’écrire un tan­go inté­grant un rythme de Boo­gie et de le présen­ter à Dis­ney pour qu’il revoie sa copie.

Boo­gie. Repér­er les syn­copes du boo­gie. Un peu comme quelqu’un qui boi­t­erait.

Fed­eri­co s’est inspiré du rythme du boo­gie et a appelé sont tan­go Salu­dos pour répon­dre au titre du film de Dis­ney « Salu­dos ami­gos ». Désolé, pas de lun­far­do ou de détails croustil­lants, mais ce n’est pas fini, restez jusqu’au bout…

Extrait musical

Il est temps d’écouter le titre par l’auteur, tout chaud sor­ti de sa plume (en fait, cet enreg­istrement a été fait env­i­ron un an après l’écriture).

Salu­dos 1944-04-10 — Orques­ta Domin­go Fed­eri­co.

Retrou­vez-vous la syn­cope du boo­gie ? Prob­a­ble­ment que les danseurs nord-améri­cains n’y trou­veraient pas leur compte, mais les danseurs de tan­go ont beau­coup aimé ce nou­veau rythme dans leur musique et le titre a été rapi­de­ment un suc­cès.

Autres versions

Il y en a beau­coup, alors, je vous ai fait une petite sélec­tion :

Salu­dos 1944-04-10 — Orques­ta Domin­go Fed­eri­co. C’est le tan­go du jour et le point de départ de la col­lec­tion de saluts.
Salu­dos 1944-08-23 — Orques­ta Miguel Caló. Cette ver­sion est très con­nue, peut être encore plus que l’original. Elle a qua­tre mois de moins et est vrai­ment très dif­férente. Les motifs mag­nifiques du vio­lon estom­pent l’attention sur le rythme de boo­gie.
Salu­dos 1950-09-28 — Juan Cam­bareri y su Cuar­te­to Típi­co. Une ver­sion plutôt nerveuse. Cam­bareri est cou­tu­mi­er de ces ver­sions rapi­des. Je ne sais pas si les danseurs de boo­gie peu­vent y trou­ver leur compte, mais c’est une curiosité à con­naître, prob­a­ble­ment hors des pistes de milon­ga toute­fois. Le bril­lant piano et le ban­donéon vir­tu­ose de Cam­bareri méri­tent notre estime, je suis con­tent de vous l’avoir pro­posé…
Salu­dos 1999 — Jorge Arduh y su Gran Orques­ta Típi­ca Argenti­na. Une ver­sion plus calme, mais pas pour la danse non plus. La syn­cope du boo­gie est encore ramol­lie, on est plus dans l’esprit de Calo que de Fed­eri­co. La fin pro­pose un beau trait de ban­donéon.
Salu­dos 1990-12 — Orques­ta Juve­nil de Tan­go de la U.N.R. Dir. Domin­go Fed­eri­co. Une petite entorse à la chronolo­gie, pour ter­min­er avec l’auteur qui dirige l’orchestre de jeunes de Rosario, ville où il a ter­miné sa vie, une dizaine après.

Et Disney ?

Rap­pelez-vous, Fed­eri­co était ani­mé du des­sein (ce jeu de mots n’est que pour les Français, désolé) de pro­pos­er son tan­go à Dis­ney pour qu’il revoie sa copie en y inté­grant le tan­go.
Finale­ment, son tan­go a eu beau­coup de suc­cès et Fed­eri­co a oublié son pro­jet.
Le plus amu­sant est que Dis­ney a revu sa copie en réal­isant une suite à « Salu­dos ami­gos », « Los très caballeros » (les trois cav­a­liers). Dans ce nou­veau film, il revient en Argen­tine et met en valeur… de nou­veau la Pam­pa, avec un per­son­nage qui rap­pelle, Patoruzú… Le tan­go n’aura pas son film par Dis­ney, même si quelques films ont des musiques qui peu­vent l’évoquer de façon rel­a­tive­ment loin­taine, comme dans Rata­touille, Colette Shows Him Le Ropes, ou The Dys­func­tion­al Tan­goGer­maine Fran­co du film de Dis­ney Encan­to.

Yuyo verde 1945-02-28 Orquesta Aníbal Troilo con Floreal Ruiz

Domin­go Fed­eri­co (Domin­go Ser­afín Fed­eri­co) Letra: Home­ro Aldo Expósi­to

Le tan­go du jour, Yuyo verde, a été enreg­istré le 28 févri­er 1945 par Aníbal Troi­lo et Flo­re­al Ruiz. C’est encore un mag­nifique thème écrit par l’équipe Fed­eri­co et Expósi­to, les auteurs de Per­cal. Le yuyo verde est une herbe verte qui peut être soit une mau­vaise herbe, soit une herbe médic­i­nale. Je vous laisse forg­er votre inter­pré­ta­tion à la lec­ture de cet arti­cle.

Extrait musical

Yuyo verde 1945-02-28 Orques­ta Aníbal Troi­lo con Flo­re­al Ruiz

Les paroles

Calle­jón… calle­jón…
lejano… lejano…
íbamos per­di­dos de la mano
bajo un cielo de ver­a­no
soñan­do en vano…
Un farol… un portón…
-igual que en un tan­go-
y los dos per­di­dos de la mano
bajo el cielo de ver­a­no
que par­tió…

Déjame que llore cruda­mente
con el llan­to viejo adiós…
adonde el calle­jón se pierde
brotó ese yuyo verde
del perdón…
Déjame que llore y te recuerde
-tren­zas que me anudan al portón-
De tu país ya no se vuelve
ni con el yuyo verde
del perdón…

¿Dónde estás?… ¿Dónde estás?…
¿Adónde te has ido?…
¿Dónde están las plumas de mi nido,
la emo­ción de haber vivi­do
y aquel car­iño?…
Un farol… un portón…
-igual que un tan­go-
y este llan­to mío entre mis manos
y ese cielo de ver­a­no
que par­tió…

Domin­go Fed­eri­co Letra: Home­ro Expósi­to

Traduction

Ruelle… ruelle…
loin­taine… loin­taine…
Nous étions per­dus main dans la main sous un ciel d’été rêvant en vain…
Un lam­padaire… un por­tail (une porte cochère)…
-Comme dans un tan­go-

et les deux, per­dus, main dans la main sous le ciel d’été qui s’en est allé…

Laisse-moi pleur­er mon soûl avec les larmes d’un vieil adieu…
Là où la ruelle se perd, cette herbe verte du par­don a ger­mé…
Laisse-moi pleur­er et me sou­venir de toi

-tress­es qui m’at­tachent à la porte-
De ton pays, on ne revient pas, pas même avec l’herbe verte du par­don…

Où es-tu ?… Où es-tu ?…
Où es-tu allée ?…
Où sont les plumes de mon nid, l’é­mo­tion d’avoir vécu une telle affec­tion ?…
Un lam­padaire… un por­tail…
-tout comme un tan­go-
et ces pleurs qui sont miens entre mes mains et ce ciel d’été qui s’en est allé…

Autres versions

Ce tan­go, mag­nifique a don­né lieu à des cen­taines de ver­sions.

Yuyo verde 1944-09-12 — Orques­ta Domin­go Fed­eri­co con Car­los Vidal. La ver­sion orig­i­nale par l’auteur de la musique. C’est une jolie ver­sion.
Yuyo verde (Calle­jón) 1945-01-24 — Orques­ta Rodol­fo Bia­gi con Jorge Ortiz. Un bia­gi typ­ique, bien énergique. À not­er le sous-titre, Calle­jón, la ruelle, qui com­mence les paroles en étant chan­tée deux fois.
Yuyo verde 1945-01-25 — Orques­ta Osval­do Pugliese con Alber­to Morán. Une inter­pré­ta­tion de Morán un peu lar­moy­ante. Rien à voir avec la ver­sion enreg­istrée la veille par Bia­gi et Ortiz. La mer­veilleuse diver­sité des orchestres de l’âge d’or du tan­go.
Yuyo verde 1945-02-28 Orques­ta Aníbal Troi­lo con Flo­re­al Ruiz. C’est le tan­go du jour. Pour moi, c’est un des meilleurs équili­bres entre dans­abil­ité et sen­si­bil­ité.
Yuyo verde 1945-05-08 — Tania y su Orques­ta Típi­ca dir. Miguel Nijen­son. Si l’enregistrement de Troi­lo et Morán fai­sait un peu chan­son, cette inter­pré­ta­tion par Tania est claire­ment une chan­son. L’indication que c’est Tania et son orchestre, dirigé par Miguel Mijen­son con­firme que l’intention de Tania était bien d’en faire une chan­son.

Avec ces cinq ver­sions, on a donc une vision intéres­sante du poten­tiel de ce titre. En 1958, Fed­eri­co a enreg­istré de nou­veau ce titre, avec son Trío Salu­dos et les chanteurs Rubén Maciel et Rubén Sánchez. Je vous fais grâce de cette ver­sion kitch.
Comme il est l’auteur de la musique, je cit­erai aus­si son enreg­istrement réal­isé à Rosario avec la Orques­ta Juve­nil De La Uni­ver­si­dad Nacional De Rosario con Héc­tor Gatá­neo. J’ai déjà évo­qué ce chanteur et cet orchestre à pro­pos de Per­cal dont Fed­eri­co est égale­ment l’auteur.
Il y a des cen­taines d’interprétations par la suite, mais rel­a­tive­ment peu pour la danse. Les aspects chan­son ou musique clas­sique ont plutôt été les sources d’inspiration.
Pour ter­min­er cet arti­cle sur une note sym­pa­thique, une ver­sion en vidéo par un orchestre qui a cher­ché son style pro­pre, la Román­ti­ca Milonguera. Ici avec Rober­to Minon­di. Un enreg­istrement effec­tué en Uruguay, un des trois pays du tan­go ; en mars 2019.

Yuyo verde 2019-03 — Orques­ta Roman­ti­ca Milonguera con Rober­to Minon­di.

Clin d’œil

Un cuar­te­to organ­isé autour du gui­tariste Diego Tros­man et du bandéon­iste Fer­nan­do Magu­na avait pris le nom de Yuyo Verde en 2003. Ce cuar­te­to avait d’ailleurs par­ticipé en 2004 au fes­ti­val que j’organisais alors à Saint-Geniez d’Olt (Avey­ron, France). Ils nous avaient fait par­venir une maque­tte dont je tire cette superbe inter­pré­ta­tion de la milon­ga La Tram­pera. Ce n’est pas Yuyo Verde, mais c’est une com­po­si­tion d’Ani­bal Troi­lo, on reste dans le thème du jour.

La tram­pera 2004 — Yuyo Verde (Maque­tte)

Deux des affich­es que j’avais réal­isées pour mon fes­ti­val de tan­go. Le site inter­net était hébergé par mon site per­so de l’époque (byc.ch) et sur l’affiche de droite, les plus obser­va­teurs pour­ront remar­quer mon logo de l’époque. C’était il y a 20 ans…

Petite his­toire, ce fes­ti­val de tan­go qui existe tou­jours, avec d’autres organ­isa­teurs, avait au départ une par­tie sal­sa, car mon coor­gan­isa­teur croy­ait plutôt en cette danse. C’est la rai­son pour laque­lle j’avais don­né le nom de Tan­go lati­no (tan­go y lati­no), pour faire appa­raître ces deux facettes. La milon­ga du same­di soir était ani­mée par Yuyo Verde et Corine d’Alès, une pio­nnière du DJing de tan­go que je salue ici…