Archives de catégorie : Chanteur et chanteuses

Tres Esquinas 1941-07-24 – Orquesta Ángel D’Agostino con Ángel Vargas

Ángel D'Agostino y Letra: Enrique Cadícamo

Je suis aux anges de vous parler aujourd'hui de (trois coins de rue), car ce merveilleux tango immortalisé par les deux angelitos (D'Agostino et Vargas) parle à tous les . C'est une composition de Ángel D'Agostino et Alfredo Attadía, Enrique Cadícamo lui a donné ses paroles et son nom. Partons en train jusqu'à Tres Esquinas à la découverte du berceau de ce tango.

Naissance de Tres Esquinas

En 1920, Ángel D'Agostino a composé ce titre dans une version sommaire pour une saynète nommée « Armenonville » montée par Luis Arata, Leopoldo Simari et José Franco. Comme on peut s'en douter, cette pièce parlait de la vie des pauvres filles du cabaret Armenonville.
Ángel D'Agostino jouait cette composition au piano sous le titre, (Pauvre gamine).

Arata-Simari-Franco

Une vingtaine d'années plus tard selon la légende (histoire) D'Agostino fredonnait le titre que reprit Vargas à la sortie de la salle où ils venaient d'intervenir. Cadícamo imagina le premier vers « Yo soy del barrio de Tres Esquinas ». Alfredo Attadía qui était le premier bandonéon et l'arrangeur de l'orchestre de D'Agostino s'occupa des arrangements. Il doit cependant d'avoir son nom à la partition par son apport sur le phrasé des bandonéons, phrasé inspiré par la façon de chanter de Vargas qui devrait donc à ce double titre avoir aussi son nom sur la partition 😉

Extrait musical

Commençons par écouter cette merveille pour se mettre dans l'humeur propice à notre découverte.

Tres Esquinas 1941-07-24 – Orquesta Ángel D'Agostino con Ángel Vargas.
Tres Esquinas. Ángel D'Agostino y Alfredo Attadía Letra: Enrique Cadícamo. À gauche, deux couvertures, puis partition et accords guitare et disque.

Je pense que vous avez remarqué ce fameux phrasé dès le début. On y tellement habitué maintenant que l'on pense que cela a toujours existé… Lorsque Vargas chante, le bandonéon se fait discret, se contentant au même titre que les autres instruments de marquer le rythme et de proposer quelques ornements pour les ponts. On notera le superbe solo de violon de après la voix de Vargas et la reprise du bandonéon (vers 2:20). Vargas a le dernier mot et termine le titre.

Je n'ai pas trouvé d' de Pobre piba pour juger de l'apport de Attadia, mais il y a fort à parier que ce titre éphémère, lié à une pièce qui n'a pas accédé à une gloire intemporelle n'a pas inspiré les maisons de disque.

Paroles

Yo soy del barrio de Tres Esquinas,
viejo baluarte de un arrabal
donde florecen como glicinas
las lindas pibas de delantal.
Donde en la noche tibia y serena
su antiguo aroma vuelca el malvón
y bajo el cielo de luna llena
duermen las chatas del corralón.

Soy de ese barrio de humilde rango,
yo soy el tango sentimental.
Soy de ese barrio que toma mate
bajo la sombra que da el parrral.
En sus ochavas compadrié de mozo,
tiré la daga por un loco amor,
quemé en los ojos de una maleva
la ardiente ceba de mi pasión.

Nada hay más lindo ni más compadre
que mi suburbio murmurador,
con los chimentos de las comadres
y los piropos del Picaflor.
Vieja barriada que fue estandarte
de mis arrojos de juventud…
Yo soy del barrio que vive aparte
en este siglo de Neo-Lux.

Ángel D'Agostino y Alfredo Attadía Letra: Enrique Cadícamo

Traduction libre des paroles

Je suis du quartier de Tres Esquinas (plus un village qu'un quartier au sens actuel), un ancien bastion d'une banlieue où les jolies filles en tablier fleurissent comme des glycines (Il s'agit des travailleuses des usines locales).
Où dans la nuit chaude et sereine le géranium déverse son arôme ancien et sous le ciel de la pleine lune dorment les logis du corralón (le corralón est un habitat collectif, le pendant du conventillo, mais à la campagne. Au lieu de donner sur un couloir, les pièces qui accueillent les familles donnent sur un balcon. Au pluriel, cela peut aussi désigner le lieu où on parque le bétail et tout l'attirail de la traction animale. Je pense plutôt au logement dans ce cas à cause des géraniums qui me font plus penser à un habitat, même si les corralones étaient proches. Les géraniums éloignent les mouches qui devaient pulluler à cause de la proximité du bétail).
Je viens de ce quartier de rang modeste, je suis le tango sentimental.
Je suis de ce quartier qui boit du maté à l'ombre de la vigne.
Dans ses ochavas (la ochava est la découpe des angles des rues qui au lieu d'être vifs à 90 % présentent un petit pan de façade oblique) j'étais un jeune homme, j'ai jeté le poignard pour un amour fou, j'ai brûlé dans les yeux d'une mauvaise l'appât brûlant de ma passion.
Il n'y a rien de plus beau ni de plus compadre que mon faubourg murmurant, avec les commérages des commères et les compliments du Picaflor (les piropos sont des compliments pour séduire et un picaflor [oiseau-mouche] est un homme qui butine de femme en femme).
Un vieux quartier qui fut l'étendard de mon audace de jeunesse…
Je suis du quartier qui vit à part en ce siècle de Néo-Lux.

Autres versions

Comme souvent, les versions immenses semblent intimider les suiveurs et il n'existe pas d'enregistrement remarquable de l'époque, si on exclut à la guitare et notre surprise du jour, mais patience…

Tres Esquinas 1941-07-24 – Orquesta Ángel D'Agostino con Ángel Vargas. C'est notre .
Tres Esquinas 1942-05-07 – Hugo Del Carril con guitarras.

Il me semble difficile de s'attacher à cette version une fois que l'on a découvert celle des deux anges. On retrouve l'ambiance de Gardel, mais cet enregistrement ne sera normalement jamais proposé dans une .

Tres Esquinas 2010 – Sexteto Milonguero con Javier Di Ciriaco.

Tres Esquinas 2010 – Sexteto Milonguero con Javier Di Ciriaco. J'ai eu le bonheur de découvrir cet orchestre à ses débuts à Buenos Aires où il mettait une ambiance de folie. Je l'ai fait venir à Tangopostale (Toulouse France) où il a suscité un enthousiasme délirant. Il nous reste le disque pour nous souvenir de ces moments intenses magnifiés par la voix de Javier Di Ciriaco.

Le jeune Ariel Ardit relève toutefois le défi et propose plusieurs versions électrisantes de ce titre. Voici un enregistrement public en vidéo datant de 2010.

Ariel Ardit interprète Tres Esquinas en 2010.

Ce n'est pas non plus pour la danse (du moins dans sa forme traditionnelle), mais c'est une magnifique version avec une grande richesse des contrepoints. Ariel Ardit donne beaucoup d'expression et l'orchestre n'est pas en reste. On comprend l'approbation du public.

SURPRISE : il reste une version en réserve à découvrir à la fin de cette anecdote, vous ne pouvez pas vous la perdre ! Avis pour Thierry, mon talentueux correcteur, ce n'est pas une coquille, mais une formulation calquée sur l'espagnol…

Un petit mot sur Tres Esquinas

Il faut imaginer un lieu relativement rural qui comportait des espaces de terrains vagues, des usines, des maisons pour les pauvres (corralones) et des cafés, dont un qui se nommait Tres Esquinas du nom de ce quartier qui disposait toutefois d'une station ferroviaire du même nom… Voici de quoi vous repérer. Attention, cette zone n'est pas trop à recommander aux touristes, mais on y organise des peñas magnifiques ! Pas des peñas pour touristes dans un café plus ou moins branché, mais des hangars remplis de centaines de danseurs qui s'éclatent sur des orchestres fabuleux en dansant, chacareras, gatos, zambas et une bonne dizaine d'autres titres. Ce qui est le plus surprenant est que quand l'orchestre enchaîne deux titres, les danseurs adoptent automatiquement le style de la nouvelle danse en moins de deux secondes. Si vous avez lu mes conseils pour la chacarera, vous savez déjà reconnaître celles à 6 et 8 compases et les dobles, c'est la partie fondue de l' du folklore argentin.

Le café Tres Esquinas est ici cerclé de rouge.

On voit qu'on est au bord de l'eau (Riachuelo) qui marque la limite sud de la ville de Buenos Aires (Vue Google). Comme on peut le voir, le quartier est d'usines, de terrains vagues et est maintenant bordé par l'autoroute qui va à La Plata (la capitale de la Province de Buenos Aires). Le café proprement dit n'est plus que l'ombre de lui-même. Notez toutefois la ochava  qui coupe l'angle de l'immeuble et qui marque l'entrée de ce qui était ce café historique.
La station de train portait aussi logiquement le nom du quartier.

À gauche la gare de Tres Esquinas vers 1909. À droite, une vue aérienne de Google.

Le cercle rouge est le café Tres Esquinas. Le cercle jaune marque la zone où était située la gare de Tres Esquinas détruite en 1955. L'autoroute qui a été créée en 1994-1996 a coupé en deux le quartier et probablement mis un peu de désordre dans les baraquements de latas (voir Del barrio de las latas, le berceau du tango pour en savoir plus sur ce type de construction)

Et pour terminer, un court-métrage reconstituant l'ambiance d'un bar comme celui de Tres Esquinas, réalisée par Enrique Cadícamo en 1943.

Voici la vidéo au moment où D'Agostino et Vargas entament Tres Esquinas, mais je vous recommande de voir les 9 minutes du court-métrage en entier, c'est intéressant dès le début et après Tres Esquinas, il y a El cuarteador de Barracas

Court-métrage sur un scénario et sous la direction de Enrique Cadícamo où l'on voit des scènes de café, pittoresques et l'interprétation de Tres esquinas et de El cuarteador de Barracas par Ángel D'Agostino et Ángel Vargas.

À demain, les amis !

Sinsabor 1939-06-05 – Orquesta Edgardo Donato con Horacio Lagos y Lita Morales

Letra : Adolfo Antonio Vedani

Il y a quelques semaines, je suis tombé sur un article qui disait que Tita Merello avec «Yo soy así», avait donné une place aux femmes dans le tango. Il me semble que c'est aller un peu vite en besogne, car les femmes en sont des interprètes de la première heure, Flora Gobbi, Rosita Quirogan, Ada Falcón, , , Nelly Omar, Mercedes Simone, , Libertad Lamarque, Tania, , Susana Rinaldi, Virginia Luque, , Nina Miranda, Impreio Argentina, Olga Delgrossi et bien sûr et pas des moindres, Tita Merello. Aujourd'hui, c'est Lita qui nous parle de tango.

Pourquoi cette impression que les femmes ne sont pas dans l'univers du tango ?

Je pense que cette vision a trois causes. La première est que les femmes ont eu une place importante comme chanteuses, mais pas réellement comme chefs d'orchestre ou musiciennes. Aujourd'hui, beaucoup de danseurs connaissent et reconnaissent les orchestres, mais très peu, les chanteurs et quand ils le font, c'est souvent, car ce sont des « couples » que l'on est habitué à associer à un orchestre, comme D'Agostino-Vargas, Troilo-Fiorentino ou Rodriguez-Moreno. S'ils entendent Fiorentino avec un autre orchestre, pas sûr qu'ils le reconnaissent.

Les femmes ont plus souvent chanté des versions à écouter que des versions à danser. Je n'ai pas d'explication sur cette raison, d'autant plus que la voix de femme dans un registre plus aiguë laisse de la place aux instruments plus graves qui marquent généralement la pulsation, Main gauche au piano, contrebasse, bandonéon… La preuve est que des versions chantées de bout en bout par des femmes sont parfaitement dansables alors que par le même orchestre et à la même époque, une version chantée par un homme n'est qu'à écouter. Voir par exemple les enregistrements de Canaro qui a de nombreux exemples de titres enregistrées deux ou trois fois, pour l'écoute et pour la danse, par un homme ou une femme.

Une autre cause vient sans doute d'un excès de machisme dans le domaine. Les hommes ont occupé la place, laissant peu de places aux femmes en dehors des thèmes des tangos. Là, elles n'ont pas toujours le beau rôle, comme en témoigne notre tango du jour.

Dans l'idée de lever un coin du voile et vous montrer qu'il y a de nombreuses femmes dans l'univers de tango, je vous propose aujourd'hui quelques chanteuses, mais pour l'instant, concentrons-nous sur le phénomène Lita Morales.
Avant d'écouter notre tango du jour, sachez qu'il existe un autre tango du même titre, Sin sabor joué par Tito Francia qui en est le compositeur avec des paroles de Pedro Tusoli. Je ne pourrai pas vous le faire écouter, n'ayant pas le disque…

Extrait musical

Sinsabor 1939-06-05 — Orquesta Edgardo Donato con Horacio Lagos y Lita Morales.

Je pense que nous sommes nombreux à aimer ce duo magnifique, cette musique entraînante. La tristesse des paroles passe très bien et n'entame pas la bonne humeur des danseurs. Une valeur sûre pour les milongas. La musique est en mode majeur. L'orchestre expose le thème, puis Horacio Lagos prend la parole. Lita Morales le rejoint ensuite pour former un duo et finalement, l'orchestre termine le tango. La structure est très simple, comme l'orchestration. C'est une belle version qui brille par sa simplicité et sa légèreté.

Paroles

Llevando mi pesar
Como una maldición
Sin rumbo fui
Buscando de olvidar
El fuego de ese amor
Que te imploré
Y allá en la soledad
Del desamparo cruel
Tratando de olvidarte recordé
Con la ansiedad febril
Del día que te di
Todo mi ser
Y al ver la realidad
De toda tu crueldad
Yo maldecí
La luz de tu mirar
En que me encandilé
Llevado en mi ansiedad de amar
Besos impregnados de amargura
Tuve de tu boca en su frialdad
Tu alma no sintió mi fiel ternura
Y me brindó con su rigor, maldad
Quiero disipar toda mi pena
Busco de calmar mi sinsabor
Siento inaguantable esta cadena
Que me ceñí al implorar tu amor

Ascanio Ernesto Donato Letra : Adolfo Antonio Vedani

Horacio Lagos chante le début, seul, puis Lita Morales se rajoute pour chanter en duo ce qui est en gras.

Traduction libre et indications

Portant mon chagrin comme une malédiction, sans but, j'ai cherché à oublier.
Le feu de cet amour que j'implorais de toi et là, dans la solitude d'un cruel abandon.
Essayant de t'oublier, je me suis souvenu de l'anxiété fébrile du jour où je t'ai donné tout mon être et voyant la réalité de toute ta cruauté, j'ai maudit.
La lumière de ton regard, qui m'a aveuglé (dans laquelle j'étais ébloui), emporté par mon anxiété d'aimer.
Des baisers imprégnés d'amertume, je les ai obtenus de ta bouche dans sa froideur.
Ton âme n'a pas senti ma tendresse fidèle, et m'a offert, avec sa rigueur, la méchanceté.
Je veux dissiper toute ma douleur, je cherche à apaiser ma détresse (sinsabor, de sin sabor [sans saveur] signifie regret, malaise moral, tristesse).
Je sens insupportable cette chaîne, que je me suis attachée quand j'ai imploré ton amour.

De gauche à droite, Lita Morales, Edgardo Donato et Horacio Lagos, l'équipe qui nous offre le tango du jour.

Sur cette photo, Lita Morales et Horacio Lagos ne semblent pas être le couple ayant donné le sujet de ce tango… Il se dit qu'ils se seraient mariés, mais rien ne le prouve. Ce couple, si c'était un couple, était très discret et mystérieux. Un indice, les deux ont commencé par enregistrer du folklore, lui un peu avant et ils ont tous les deux arrêtés rapidement la carrière (1935-1942 pour Horacio, 1937-1941 pour Lita, avec un petit retour en 1955-1956). Peut-être l'arrêt en 1941 était pour cause de naissance, Lita aurait été enceinte. Ceci pourrait expliquer son retour tardif, lorsque son enfant est devenu plus autonome.

Autres versions

Le tango du jour est a priori, la plus ancienne version enregistrée et la seule avant une date assez récente.

Sinsabor 1939-06-05 — Orquesta Edgardo Donato con Horacio Lagos y Lita Morales. C'est notre tango du jour.

Le l'a enregistré vers 2008, avec le chanteur Maximilliano Agüero.

Sinsabor 2008c — Carteto Mulenga Con Maximilliano Agüero.

Je vous laisse penser ce que vous voulez de cette version, mais elle a du mal à faire oublier celle de Donato, à mon avis.
C'est toutefois un bel effort pour faire revivre ce titre, mais l'essai n'est pas totalement transformé. En revanche, la nous en a donné plusieurs versions intéressantes.

Sinsabor 2017-10 — Orquesta Romántica Milonguera con Marisol Martínez y Roberto Minondi (Sur l'album Romantica Milonguera de 2017).
Sinsabor 2018 — Orquesta Romántica Milonguera con Marisol Martínez y Roberto Minondi (sur l'album Duo de 2018). Cette, nouvelle version est plus tonique.
Sinsabor 2019 — Orquesta Romántica Milonguera con Marisol Martínez y Roberto Minondi (sur le single Sin sabor — Quizas, quizas, quizás, Nuevas versiones de 2019).

Roberto Minondi est un magnifique chanteur, mais Marisol Martínez, sur scène, lui vole la vedette par son jeu d'actrice remarquable.

Elle me permet d'introduire la dernière partie de l'anecdote du jour, une petite liste de chanteuses de tango. Combien en connaissez-vous ?

Quelques chanteuses de tango

Je vous propose une petite galerie de portraits. Elle est très incomplète, mais j'aurai l'occasion de revenir sur le sujet.

Combien de chanteuses reconnaissez-vous ? Passez la souris sur l'image pour faire apparaitre le nom de la chanteuse.

On notera que beaucoup de ces chanteuses ont aussi fait du cinéma. Le lien entre cinéma et tango est très fort, beaucoup de tangos fameux ont été composés pour les films et même à l'époque des films muets, les musiciens jouaient dans la salle en direct.

En prime, je vous propose la première joueuse de bandonéon professionnelle, je vous parlerai une autre fois des musiciennes, des auteurs et compositrices, il y a énormément à dire sur ce sujet également. Alors, les femmes et le tango, c'est une histoire ancienne et toujours vivante.

Paquita Bernardo, Bandonéoniste (1900-1925).

Elle fut la première bandonéoniste, mais sa vie fut trop brève. Elle n'a pas laissé d', cependant, Gardel et ont enregistré ses compositions.

Paquita Bernardo (1900-1925) Bandonéoniste