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Entre dos fuegos 1940-04-12 — Orquesta Juan D’Arienzo

Alberto López Buchardo

Entre deux feux, Entre dos fuegos est un tango instrumental. Pour l’illustration de l’anecdote du jour, j’avais plusieurs pistes possibles. J’ai choisi celle de la souris entre deux chats aux yeux de feu, mais d’autres possibilités étaient ouvertes. Découvrons ce tango qui met le feu dans les milongas…

Pourquoi entre deux feux ?

On connaît bien sûr l’expression, qui depuis l’antiquité grecque, impose aux humains d’affronter en même temps deux menaces, comme les tourbillons et les récifs du détroit de Messine qui ont donné naissance aux êtres légendaires, Charybde et Scylla.

C’est aussi une expression militaire, où les combattants essuient les tirs de deux côtés à la fois.
Mais puisqu’on est dans le domaine du tango, on se doute que l’entre deux feux concerne plutôt une jeune femme aux prises avec deux séducteurs.
Cela nous est confirmé par une des couvertures de partition.

L’Argentine pendant la Première Guerre mondiale

En 1914, l’Argentine avait son activité économique tournée vers l’Europe. L’Angleterre, l’Allemagne et dans de plus faibles proportions, la France.
En termes de population, les pays « fournisseurs » étaient l’Italie, l’Espagne et la France au point qu’à la veille de la guerre, à Buenos Aires, 80 % des hommes étaient nés en Europe et dans tout le pays, près de 30 % de la population était d’origine européenne.
Ceci explique que même si l’Argentine est restée indépendante pendant tout le conflit, elle n’a pas été indifférente à celui-ci, ne serait-ce qu’à cause des répercussions économiques, les importations et exportations avec l’Europe étant quasiment paralysées.
Pour assouvir la soif de nouvelles des Argentins, les journaux et revues de l’époque parlent abondamment de la Guerre.

La couverture de gauche comporte un « jeu ». En effet, le soldat allemand dit qu’il aura la victoire, car il a x canons, obus et ainsi de suite. On remarquera que les chiffres sont peu compréhensibles.
Il faut lire la réponse du soldat français pour comprendre l’astuce : « el soldado frances replica: Vuelva la hoja y lea al trasluz ». Le soldat français répond : tourne la page et lis-la à contre-jour.

On remarque que sur la couverture de la partition et sur la couverture de gauche de Caras y Caretas, le soldat français porte un élégant pantalon rouge, rouge garance pour être précis. Après la défaite de 1870 contre la Prusse, les autorités françaises ont tiré plusieurs conclusions.

  1. Il faut enseigner la géographie aux Français, car les grossières erreurs de stratégies de l’état-major français venaient de lacunes dans ce domaine. Jules Ferry et sur tout Ferdinand Buisson travailleront à améliorer le système scolaire.
  2. Le pantalon rouge garance est trop voyant et avec l’augmentation de portée des armes, les soldats français deviennent des cibles trop voyantes.

On remarquera que sur les illustrations de 1914 et 1915, presque un demi-siècle plus tard, la couleur rouge est toujours utilisée… Je vous épargne les campagnes pour ou contre et les interminables débats sur la question, jusqu’au fantassin qui déclare qu’il ne souhaite pas que l’on change la couleur, car elle fait de l’effet aux femmes.
Ce n’est qu’en 1915 et progressivement, que la couleur « bleu horizon » est adoptée. Ce qui a hâté le mouvement, c’est que la culture de la garance avait périclité en France et que la teinture chimique pour faire la couleur rouge était fabriquée… en Allemagne.

Extrait musical

Cela étant écrit, il est temps de passer à l’écoute du tango du jour, par l’énergique d’Arienzo.

Entre dos fuegos 1940-04-12 — Orquesta Juan D’Arienzo.

Avec la façon d’interpréter qu’à D’Arienzo, on peut penser plutôt à quelqu’un essuyant des coups de feu de deux partis. Le début peut paraître une marche martiale, la fleur au fusil. Il est à noter que cet enregistrement a été fait après un an de guerre. On a l’impression que les instruments s’affrontent. La musique est très dynamique avec de brusques sautes d’humeur, donnant du suspens à la musique, ce qui en fait un titre amusant à danser, au moins pour les danseurs qui pourront en percevoir les fantaisies. Les autres pourront continuer à marcher au pas cadencé du roi du rythme (Rey del compás).

Autres versions

Cette version de 1916 a été enregistrée par Canaro qui est, de très loin, le chef d’orchestre ayant enregistré le plus, 3799 enregistrements selon la discographie de Christoph Lanner. Ce titre porte la référence 25 dans son catalogue.

Entre dos fuegos 1915 (o 1916) — Orquesta Típica Canaro Sello: Atlanta Disco: 3025 Matriz: 47 Fecha Grabación: 1916.

Cette version est tout de même un peu répétitive et lancinante. Le disque usé et l’enregistrement acoustique ne donnent pas envie de la passer dans une milonga…

Entre dos fuegos 1940-04-12 — Orquesta Juan D’Arienzo. C’est le tango du jour. Comme celui de Canaro, enregistré en temps de guerre mondiale, ce qui peut laisser penser que la version un peu militaire n’est pas étrangère à son interprétation.
Entre dos fuegos 1966-07-25 (enregistrement) et 1966-12-04 (date de sortie) — Orquesta Juan D’Arienzo. D’Arienzo a réenregistré le titre, 26 ans plus tard.

Le même jour, il a enregistré au moins 6 titres :
La payanca 1966-07-25, Vea, vea 1966-07-25, Entre dos fuegos 1966-07-25, Rodriguez Peña 1966-07-25, La viruta 1966-07-25 et El amanecer 1966-07-25.
Cela explique peut-être la qualité moyenne de cette interprétation. On est plus dans la quantité que la qualité. Les six titres ont la même contrebasse, marquant bien le tempo. Cela reste du tango de danse, mais avec sans doute moins de subtilités pour les danseurs avancés que dans les années 30 et 40.

Pourquoi des chats et une souris ?

Une des couvertures de la partition de Entre dos fuegos avait des chats et une souris qui semblait avoir des difficultés à trouver un moyen de rejoindre son trou que l’on voit au pied du mur, car elle est prise entre deux feux.

J’ai aussi imaginé une variation de l’illustration où les chats sont de feu, la souris est alors littéralement entre deux feux…

Pasado florido 1945-04-04 — Orquesta Ricardo Malerba con Antonio Maida

Rosendo Luna (Enrique Domingo Cadícamo) paroles et musique

Aujourd’hui, un tango un peu rare, car il n’a été enregistré qu’une fois et par un orchestre peu passé en milonga, avec un chanteur encore plus rare. En revanche, les paroles et la musique sont par le fameux Rosendo Luna (Enrique Domingo Cadícamo). Elles parlent du Buenos Aires disparu et de quelques souvenirs qu’il peut être intéressant de réviser…

Extrait musical

Pasado florido 1945-04-04 — Orquesta Ricardo Malerba con Antonio Maida

Les paroles

Buenos Aires, has cambiado como yo cambié de a poco.
Soy del tiempo de tus focos, los primeros que hubo a gas.
Yo bailé en Rodríguez Peña, con la orquesta de los Greco
y hasta aquí me llega el eco y me enciende su compás…

Yo me acuerdo del T.V.O., de la calle Montes de Oca,
de un café que había en La Boca, donde Arolas empezó.
Y de Andrade, buen amigo, que en un baile lo mataron…
¡Esas cosas ya pasaron pero tienen su emoción!

De aquel pasado florido
de mil novecientos once,
viene el recuerdo querido
en ancas de aquel entonces…
La noche cuando Manolo
me provocó con los Vieyra
y como yo estaba solo
no quise hacerme el Moreyra.
Si hubiese vivido Andrade no queda ni uno, esa vez.

Cuántas noches nos largamos con Cielito y con Ceballos
en los coches de caballos, por tus calles a pasear…
Y una vez, cuando entre copas, por hacer un chiste de antes
fui a sentarme en el pescante y me puse a manejar…
Buenos Aires de Fray Mocho y de Caras y Caretas
en tus plazas sin retretas, hoy me pongo a suspirar…
Y al mirar como has cambiado, mi Buenos Aires querido
por aquello que he vivido, siento ganas de llorar.

Rosendo Luna (Enrique Domingo Cadícamo) paroles et musique

Traduction libre et indications

Buenos Aires, tu as changé comme j’ai changé, peu à peu.
Je suis de l’époque des réverbères, les premiers qui étaient au gaz.
J’ai dansé à Rodríguez Peña,

avec l’orchestre Greco (Vicente Greco dit Garrote, Bandonéiste, chef d’orchestre et compositeur. 1888-1924).
Et c’est aussi loin que l’écho m’atteint et tourne sur son rythme…
Je me souviens du T.V.O., rue Montes de Oca, (Un tango de Adela del Valle [1897-19 ??] se nomme ainsi, sans doute en souvenir du même établissement. T.V.O. = Te veo [je te vois]. La rue Montes de Oca était dans le quartier à l’époque chic de Buenos Aires, Barracas. C’est encore quelque chose qui a changé, Barracas ayant une mauvaise réputation aujourd’hui).

T.V.O (Té Veo) — Adela del Valle

d’un café de La Boca, où Arolas a fait ses débuts.

(On a vu à propose de Lorenzo que le Tigre du bandonéon [Arolas] rodait du côté du Café Royal, plus connu sous son surnom de Café del Griego).

Et Andrade, un bon ami, qu’ils ont tué dans un bal… (Il n’est pas le seul… Peut-être un Brésilien).  
Ces choses-là c’est du passé, mais elles ont leurs émotions !
De ce passé fleuri de mil neuf cent onze, le cher souvenir vient sur le dos (du cheval) de l’époque…
La nuit où Manolo (les paroles écrites en 1983 par Pedro Colombo pour le tango « Manolo » semblent conter cette histoire) m’a provoqué avec les Vieyras
Et comme j’étais seul, je ne voulais pas jouer le Moreyra.
Si Andrade avait vécu, il n’en serait pas resté un seul, cette fois-là. (beaucoup de candidats possibles, je n’arrive pas à la départager).
Combien de nuits sommes-nous partis avec Cielito et Ceballos dans des voitures à chevaux, nous promener dans tes rues…
Et une fois, entre deux verres, pour faire une blague d’antan, je suis allé m’asseoir sur le siège et j’ai commencé à conduire…
Buenos Aires de Fray Mocho (José Ciriaco Alvarez [1858 –1903] écrivain et journaliste)

et Caras y Caretas (Revue fort intéressante et qui malgré quelques éclipses, continue d’être publiée aujourd’hui) vos places sans spectacles de rue, aujourd’hui je commence à soupirer…
Et en voyant à quel point tu as changé, mon Buenos Aires bien-aimé, à cause de ce que j’ai vécu, j’ai envie de pleurer.

Rosendo Luna (Enrique Domingo Cadícamo)

Cadicamo, (Rosenda Luna ou Yino Luzzi) a vécu tout le vingtième siècle. Du 15 juillet 1900 au 3 décembre 1999).
Il a composé et/ou écrit les paroles de plus de 800 titres, majoritairement des tangos, mais aussi d’autres rythmes
Quelques exemples parmi le plus connus :
A mí no me hablen de penas Tango (1940)
A otra cosa che pebeta Tango
A pan y agua Tango
A quién le puede importar Tango
Adiós [d] Poema lunfardo
Adiós Arolas (Se llamaba Eduardo Arolas) Tango (1949)
Adiós Chantecler Tango
Al mundo le falta un tornillo Tango (1933)
Almita herida Tango
Anclao en París Tango (1931)
Angel Vargas el ruiseñor Tango
Apología tanguera Milonga (1933)
Aquellos tiempos Tango
Araca llegó Novarro Tango
Argañaraz (Aquellas farras) Tango (1930)
Ave de paso Tango (1937)
Bailongo Tango
Bandera baja-Ella se reía Milonga
Baquiano pa’ elegir Tango (1930)
Baraja de amor Tango
Barajando recuerdos Tango
Berretín Tango (1928)
Bichitos de luz Tango
Boedo y San Juan Tango
Boleta Tango
Brindemos compañero Tango
Brumas Tango
Cabaret Tango
Café de Barracas (No) Tango
Café Nacional Poema lunfardo
Calandria (Dejá el bodegón) Tango
Callejera Tango (1929)
Cambiá de vida Tango (1938)
Canción del inmigrante Tango
Cancionera Tango
Carnavales de mi vida (Mosca muerta) Tango
Carpeta Tango
Charmaine Vals
Che Bartolo Tango (1928)
Che papusa oí Tango (1927)
Cherí Canción
Cien años Canción
Colombina (Teresita) Tango
Como un sueño Tango
Compadrón Tango (1927)
Copas, amigas y besos Tango (1944)
Cortando camino Vals (1941)
Cruz de palo Tango (1929)
Cuál de los dos Tango
Cuando miran tus ojos Vals
Cuando tallan los recuerdos Tango (1943)
Cumplido Tango
De todo te olvidas (Cabeza de novia) Tango (1929)
Descarte Milonga
Desvelo (De flor en flor) Tango (1938)
Dice un refrán Tango (1942)
Dolor milonguero Tango
Dos en uno Tango
El bar de Rosendo Tango
El beso aquel Tango
El cantor de Buenos Aires Tango (1936)
El cuarteador Tango (1941)
El llorón Tango
El Morocho y el Oriental (Gardel-Razzano) Milonga (1946)
El que atrasó el reloj Tango (1933)
El teléfono Tango (1963)
El trompito Tango
Ella se reía Poema lunfardo
En la buena y en la mala Tango (1940)
En lo de Laura Milonga
En un pueblito de España Vals
En una petite garçoniere de Montmarte Tango
Ensueños Tango
Estación Tango Tango
Estrella fugaz Vals
Fanfarrón Tango (1928)
Gallo Viejo Tango
Garúa Tango (1943)
Gigoló compadrito Tango
Gotán Tango
Guapo de la guardia vieja Tango
Guitarra que llora Tango
Hambre Tango (1932)
Hermano tordo Poema (1982)
Hojarasca Tango
Hoy es tarde Tango
Humo Tango
Igual que una sombra Tango (1946)
Improvisando Milonga
Intervalo Tango
Juana Rebenque Tango
La barranca Tango
La biaba de un beso Tango
La calle sin sueño Tango
La casita de mis viejos Tango (1932)
La divina dama Vals
La epopeya del tango Poema
La luz de un fósforo Tango (1943)
La novia ausente Tango (1933)
La reina del tango Tango (1928)
Lagrimitas de mi corazón Vals
Llora vida mía Tango
Llorar por una mujer Tango
Los compadritos Tango
Los mareados Tango (1942)
Luna de arrabal Vals (1934)
Madame Ivonne Tango (1933)
Mal de ausencia [b] Vals
Mano brava Milonga (1941)
Mañanitas de mi Pampa Tango (1953)
María [b] Polca
María Milonga Milonga
Mascarita [c] Vals (1946)
Melodía oriental Tango
Mi chiquita Tango (1963)
Mi traje de novia Tango
Mi vida [b] Vals (1934)
Mientras gime el bandoneón Tango
Mis lágrimas Tango
Mocito rana Tango
Mojarrita Tango
Morenita mía Tango
Muñeca brava Tango (1929)
Muñeca cruel Tango
Naipe Tango (1944)
Niebla del Riachuelo Tango (1937)
No hay tierra como la mía Milonga
No me importa su amor Tango
No vendrá Tango (1945)
Noche de estrellas Vals
Noches blancas Vals
Norma Poema lunfardo
Nostalgias Tango (1936)
Notas de bandoneón Tango
Nunca tuvo novio Tango (1930)
Olvidao Tango (1932)
Orgullo tanguero Tango
Orquesta Típica Tango
Pa’ mí es igual Tango (1932)
Pa’ que bailen los muchachos Tango (1942)
Palais de Glace Tango (1944)
Pasado florido Tango
Pebeta graciosa Tango
Perdoname Vals
Piano alemán Fox charleston
Picaneao Tango (1953)
Pico de oro Tango
Piropos Tango
Pituca Tango (1930)
Pobre piba Tango (1941)
Pocas palabras Tango (1941)
Pompas de jabón Tango (1925)
Por la vuelta Tango (1937)
Por las calles de la vida Tango (1942)
Por un beso de amor (Per un bacio d’amor) Vals
Punto alto Tango
Que te vaya bien Tango
Qué torcido andás Julián Tango
Quién dijo miedo Tango (1932)
Quién te ve Tango
Ramona [Cadícamo] Vals
Rondando tu esquina Tango (1945)
Roñita Tango
Rubí Tango (1944)
Salomé Tango
Salú percantinas Tango
Santa milonguita Tango (1933)
Se fue la pobre viejita Tango
Se han sentado las carretas Tango
Sea breve Tango
Sentimiento malevo Tango (1929)
Shusheta Tango (1944) (El aristrocrato)
Si la llegaran a ver Tango
Sin hilo en el carretel Tango
Sol de medianoche Tango
Sollozo de bandoneón Tango
Solo de bandoneón Tango
Son cosas del bandoneón Tango
Suburbio Tango
Tango de ayer Tango
Tango de lengue Tango
Te podés acomodar (Zorro viejo) Tango
Tengo mil novias Vals
Tradición Tango
Tres amigos Tango (1944)
Tres esquinas Tango (1941)
Trovador mazorquero Vals
Tu llamado Tango
Un dilema Tango
Una madre Tango
Vamos zaino Tango
Vas muerto con el disfraz Tango (1930)
Vení vení Tango
Vieja recova Tango (1930)
Viejas alegrías Tango (1937)
Viejo grata Tango
Viejo patio Tango
Villa Urquiza Tango
Voy pa’viejo Tango
Y aquel cariño se fue Tango (1939)
Y qué más Tango (1937)
Yo nací para ti tu serás para mí Foxtrot
Yo tan sólo veinte años tenía Vals
Yo te perdono Tango (1927)
Zorro plateao Tango (1942)